Dans le cadre du RÉSEAU LUTTE CONTRE LE RACISME de la ville de Clermont-Ferrand et de l’ Organisation de Journées internationales pour l’élimination des discriminations raciales, le comité local MRAP 63 (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) organise, en collaboration avec le cinéma Le Rio, la projection du film de Julie Bertucelli, « La Cour de Babel » :
Cinéma Le Rio (178 Rue sous les Vignes, 63100 Clermont-Ferrand) - Mardi 28 mars 2023 à 20H, suivie d’une discussion sur l’intégration et le « vivre ensemble ». Entrée libre.
Cette journée a pour objectif de sensibiliser sur le droit d’asile et l’intégration des familles et de déconstruire les préjugés dont sont victimes les réfugiés, ainsi que de rassembler et favoriser la rencontre mutuelle.
Nous serions heureux de pouvoir partager ensemble ce moment, ainsi que développer un dialogue pour honorer le courage des personnes qui ont dû fuir leur pays et débuter une nouvelle vie.
La Cour de Babel
Julie Bertuccelli
Julie Bertuccelli
La Cour de Babel est un film documentaire français réalisé par Julie Bertuccelli, sorti en 2013. Ils sont Anglais, Sénégalais, Brésilien, Marocain, Chinois... Ils ont entre 11 et 15 ans, ils viennent d’arriver en France. Le temps d’une année, ils cohabitent dans la classe d’accueil d’un collège parisien, La Grange aux Belles. 24 élèves, 24 nationalités. Julie Bertuccelli les a filmés tout au long d’une année, entre une vie et l’autre, entre ailleurs et ici.
Dans ce lieu clos du monde s’expriment l’innocence, l’énergie et les contradictions de ces adolescents qui, animés par le même désir de changer de vie et de vivre ensemble, bouleversent nos idées reçues et nous font croire en l’avenir. Ils apprennent à maîtriser parfaitement le français. C’est la condition indispensable pour devenir des collégiens comme les autres, dans une classe normale ; c’est un chemin difficile, qu’ils empruntent sous la conduite d’une professeure exceptionnelle.
La Cour de Babel est un documentaire où les enfants apprennent le français, confrontent leur déracinement à ceux des autres, avant de repartir en section « normale ». On se laisse prendre par la chronique de cet ensemble juvénile qui devient, jour après jour, un groupe soudé, une petite république de l’espoir. Julie Bertuccelli réussit un tour de force : nous offrir une vraie grande aventure dans ce tout petit espace où la France est encore un pays d’accueil.
A rebours des discours pessimistes sur l’école, ce film montre celle-ci comme un lieu d’espoir et d’épanouissement personnel. Parce qu’ils viennent d’autres pays où leur avenir n’était pas assuré, parce qu’ils ont soif de s’intégrer dans la société française, les élèves et parents d’élèves du film investissent le cursus scolaire de beaucoup d’espoirs.
Julie Bertuccelli montre ces élèves comme des héros, les héros de leur propre vie. Ils vivent l’expérience souvent douloureuse du déracinement, ayant déjà vécu de longues années dans leurs pays respectifs. Ils font face au défi de se réinventer dans un autre pays et une autre langue, très conscients de la responsabilité qui leur incombe de se « changer la vie ».
Le titre du film fait se télescoper la réalité quotidienne du collège et le mythe biblique de la diversité des langues. A l’inverse de interprétation biblique, la diversité (des langues, des cultures, des histoires) ne constitue-t-elle la richesse de l’humanité, et le destin même de l’homme ? Le film est porteur de cette vision positive de la diversité. Alors que ces enfants viennent parfois de pays en guerre, ou marqués par de fortes tensions, ethniques ou religieuses, la classe apparaît comme une utopie concrète, un espace de concorde et d’échanges. Si l’horizon commun reste l’apprentissage de la langue française, chacun est riche de sa langue maternelle, comme le montre la séquence d’ouverture, où chacun apprend aux autres à dire bonjour dans sa langue. Cela n’exclut pas les débats voire les accrochages. Mais La Cour de Babel montre comment, de la diversité des opinions, des points de vue, des croyances, peut naître une vérité commune : dans une des plus belles scènes du film, à force de confronter leurs idées bien arrêtées sur la religion, les élèves découvrent d’eux-mêmes les concepts de tolérance et de laïcité.
Ce film est émouvant aussi par la bienveillance des pédagogues, surtout de l’enseignante pour ses élèves, qui semble s’étendre à toute la classe. Bienveillance des élèves entre eux, malgré quelques petits conflits, bienveillance des parents. La bienveillance et la pédagogie de Brigitte Cervoni, la professeure de français du film, consiste à toujours valoriser les richesses culturelles des enfants et à présenter la langue française comme un moyen d’expression du soi. La langue (syntaxe, vocabulaire, orthographe, accent), est souvent vécue en France comme une norme discriminante : les élèves du film se plaignent des moqueries de leurs camarades, qui stigmatisent leur accent étranger ou leurs « fautes de français ». Ce regard bienveillant, c’est aussi celui, que la cinéaste porte sur ses personnages.
La réalisatrice s’inscrit dans une tradition documentaire qui nous immerge dans une réalité brute. La puissance du film réside autant dans ce qu’il montre que dans ce qu’il ne montre pas : Julie Bertuccelli parvient à nous faire imaginer, à travers les échanges avec les enfants ou leurs parents, le passé et le présent de ces adolescents.
Julie Bertuccelli a d’abord été assistante à la réalisation puis démarre sa carrière de réalisatrice en 1993. Son regard particulièrement humain se révèle d’abord dans une dizaine de documentaires qui lui vaudront de nombreuses sélections en festival et plusieurs distinctions dont le Prix du Patrimoine pour La Fabrique des Juges (1998). Parmi ses œuvres les plus marquantes : Bienvenue au Grand Magasin (1999), une « comédie documentaire » consacrée au quotidien des Galeries Lafayette, Le Merle Siffleur (2006), projeté notamment aux festivals de New York et de Locarno. En 2003, elle réalise son premier long-métrage, Depuis qu’Otar est parti…, récompensé notamment par le Grand Prix de la Semaine de la Critique au Festival de Cannes 2003, le César du Meilleur Premier Film, le Prix Marguerite Duras et le Prix Michel d’Ornano. L’Arbre, son deuxième long-métrage, est présenté en 2010 en Sélection officielle au Festival de Cannes.
Le film « La Cour de Babel » sera projeté au cinéma Le Rio à Clermont-Ferrand le mardi 28 mars à 20h. Il sera suivi à 21h30 d’un débat sur le thème du « Vivre ensemble » animé par le comité local MRAP 63 (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples). L’entrée pour ce film est libre, avec le soutien de la ville de Clermont-Ferrand.