Missak et Mélinée Manouchian au Panthéon, enfin !
Ce 21 février, Missak Manouchian sera inhumé au Panthéon avec sa femme Mélinée lors d’un hommage solennel à l’occasion des 80 ans de son exécution. A l’heure où le racisme gangrène toujours notre société, où les migrants sont rendus responsables de tous les maux, où la loi Darmanin, votée grâce au Rassemblement national, bafoue les valeurs d’égalité et de fraternité qui sont celles de la République, le MRAP se réjouit de cette décision. À travers Missak et Mélinée, tous les FTP-MOI et, avec eux, tous les résistants étrangers doivent être honorés.
Orphelin du génocide arménien, Missak était arrivé en France sans papiers en 1925. Épris des principes de liberté, d’égalité et de fraternité, il avait rejoint dès 1940 la résistance et était devenu commissaire militaire des FTP-MOI de Paris (Francs Tireurs et Partisans - Main d’Œuvre Immigrée) sous l’autorité de Joseph Epstein. Ses groupes accomplissent près de trente opérations dans Paris du mois d’août à la mi-novembre 1943 .
Le démantèlement et le procès des FTP-MOI font l’objet d’une campagne de propagande allemande dite de « l’Affiche rouge », placardée dans tout Paris, visant à vilipender la Résistance, en prétendant qu’elle est le fait de criminels étrangers et non de patriotes et combattants de la liberté.
Missak et 21 des membres de son groupe seront fusillés par les Allemands le 21 février 1944 au Mont-Valérien. En 1955, Louis Aragon écrit le poème « l’Affiche Rouge », que Léo Ferré met en musique. La chanson restera censurée, interdite à la radio et la télévision françaises, jusqu’en 1981 !
« Ils étaient vingt et trois » (22 hommes et Olga Bancic, seule femme du groupe sera exécutée en Allemagne en mai 1944) : Celestino Alfonso, Espagnol, 27 ans ; Olga Bancic , Roumaine, 32 ans ; Joseph Boczov , Hongrois, 38 ans ; Georges Cloarec , Français, 20 ans ; Rino Della Negra , Italien, 19 ans ; Thomas Elek, Hongrois, 18 ans ; Maurice Fingercwajg, Polonais, 19 ans ; Spartaco Fontano, Italien, 22 ans ; Jonas Geduldig, Polonais, 26 ans ; Emeric Glasz, Hongrois, 42 ans ; Leon Goldberg, Polonais, 19 ans ; Szlama Grzywacz, Polonais, 34 ans ; Stanislas Kubacki, Polonais, 36 ans ; Cesare Luccarini, Italien, 22 ans ; Missak Manouchian, Arménien, 37 ans ; Armenak Arpen, Arménien, 44 ans ; Marcel Rajman, Polonais, 21 ans ; Roger Rouxel, Français, 18 ans ; Antoine Salvadori, Italien, 24 ans ; Willy Schapiro, Polonais, 29 ans ; Amedeo Usseglio, Italien, 32 ans ; Wolf Wajsbrot, Polonais, 18 ans ; Robert Witchitz, Français, 19 ans.
Parmi les 10 de l’Affiche, 7 sont désignés comme « juifs ».
Dès 1939, 70 000 étrangers s’engagent dans l’armée française. En 1940, 150 000 « coloniaux » sont massés sur le front. Un grand nombre d’entre eux se retrouveront dans la Résistance ou dans les armées de la France Libre, notamment dans la colonne Leclerc partie du Tchad. Ils venaient d’Afrique dite noire, du Maghreb et de l’Europe toute entière, pour contribuer à vaincre le nazisme.
Les uns avaient fui l’idéologie fasciste qui avait d’abord triomphé en Italie, puis en Allemagne et en Espagne ; d’autres, colonisés, espéraient que leurs peuples bénéficieraient, eux aussi, de cette liberté chèrement acquise, sortiraient du statut colonial et deviendraient des citoyens de leurs propres patries. Ils étaient ces Républicains espagnols qui, avec la Nueve (neuvième compagnie, la 2e Division blindée du général Leclerc) furent les premiers à entrer dans Paris au soir du 24 août 1944.
Aujourd’hui, à l’heure « où la sinistre marée brune menace notre avenir », il est plus que jamais nécessaire de rappeler le rôle des étrangers, « ces étrangers et nos frères pourtant qui disaient la France en s’abattant », dans la résistance au nazisme et pour la libération de la France.
Bureau National du MRAP
Paris, le 6 février 2024