Lettre à Jean-Yves Le Drian : Situation au Sahara occidental

Lettre adressée à Monsieur Jean-Yves LE DRIAN, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères par le MRAP, le Paris le 19 novembre 2020

Objet : Situation au Sahara occidental

Paris le 19 novembre 2020
Monsieur le Ministre,
L’opération militaire déclenchée le 13 novembre par l’armée marocaine à El Guerguerat contre des civils sahraouis qui manifestaient pacifiquement contre la construction illégale d’une route dans la zone-tampon a entraîné une riposte de l’armée sahraouie en légitime défense. Depuis la rupture du cessez-le-feu de 1991 par le Maroc, la situation est très préoccupante. Le gouvernement français a appelé fort justement à « tout faire pour éviter l’escalade et revenir à une solution politique ». Mais encore faut-il que cette solution politique inclue les engagements pris par les Nations unies envers le peuple sahraoui !
L’accord de cessez-le-feu conclu en 1991 entre le Maroc et le Front Polisario sous l’égide de l’ONU allait de pair avec la tenue d’un référendum d’autodétermination. Or, cela fait près de trente ans que le peuple sahraoui subit un sentiment de mépris et d’injustice ; il n’en peut plus de voir ses droits bafoués et les engagements à son égard non tenus. Le pouvoir marocain, qui occupe illégalement le territoire du Sahara occidental, poursuit ses manœuvres de blocage et d’obstruction pour empêcher l’expression du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui pourtant reconnu par de très nombreuses résolutions des Nations unies. De plus, il entrave les activités de la mission de paix de l’ONU, réprime violemment la population sahraouie des territoires occupés, empêche la venue de délégations étrangères dans ces territoires, y favorise l’ouverture illégale de consulats de pays étrangers, y poursuit le pillage des ressources naturelles en ne respectant pas les arrêts de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) qui précisent que le Maroc et le Sahara occidental sont deux entités distinctes.
Il bénéficie malheureusement du soutien du gouvernement français qui va même jusqu’à appuyer le plan d’autonomie marocain dans le cadre de l’intégrité territoriale en violation du droit international puisque ce plan ne respecte pas le droit à l’autodétermination. Le gouvernement français a donc une part de responsabilité dans la situation actuelle. Il doit en tirer les conséquences en arrêtant de soutenir le pouvoir marocain et en l’amenant à respecter ses engagements et le droit international.
Pour mettre un terme à cette situation dangereuse, qui constitue un risque grave de déstabilisation pour toute la région, nous vous demandons, Monsieur le ministre, d’agir en priorité au Conseil de sécurité des Nations unies pour qu’il sorte de son inaction et organise rapidement le référendum autodétermination- raison d’être et mission prioritaire de la Minurso - qui permettra enfin au peuple sahraoui de décider librement et démocratiquement de son avenir.
Nous attendons du gouvernement français qu’il s’engage dans cette voie et contribue ainsi à une solution définitive au problème de décolonisation du Sahara occidental dans le respect du droit inaliénable du peule sahraoui à la liberté et à l’indépendance.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de notre haute considération.

La co-présidence du MRAP
Renée LE MIGNOT
Pierre MAIRAT
Jean-François QUANTIN