Il y a 70 ans, un autre 14 juillet
Les balles du 14 juillet 1953
Il y a 70 ans, un autre 14 juillet.
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Daniel Kupferstein, réalisateur et documentariste, est l’auteur de nombreux films, en particulier « Dissimulation d’un massacre (2001) », sur la sanglante répression de la manifestation du FLN du 17 octobre 1961 à Paris, et « Mourir à Charonne, pourquoi ? (2010) sur la répression de la manifestation du 8 février 1962.
Le mérite du minutieux travail d’histoire de Daniel Kupferstein est de rappeler que la répression des revendications indépendantistes n’a pas concerné que les départements d’Algérie, mais aussi la France métropolitaine et d’éclairer une autre date symbolique, celle du 14 juillet 1953.
Si aujourd’hui le 14 Juillet se résume pour beaucoup à un défilé militaire sur les Champs‑Élysées, il n’en fut pas toujours ainsi. En 1936, à l’appel du Front populaire, c’est un million de personnes qui défilent à Paris pour faire vivre les idéaux de la Révolution française et, parmi elles, le parti de Messali Hadj. En 1953, c’est le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) encore placé sous l’autorité de Messali Hadj, qui participe à la démonstration, mobilisant près de 8 000 personnes derrière le drapeau de la future Algérie souveraine.
C’est à leur arrivée à proximité de la tribune officielle, place de la Nation, que les heurts se produisent et que les policiers font usage de leurs armes, tuant sept personnes, six manifestants algériens et un ouvrier métallurgiste français, militant de la CGT. Les hôpitaux parisiens recueilleront (au moins) une cinquantaine de blessés par balle. Des morts, des blessés, des responsabilités, vite recouverts par le voile de l’oubli sur les deux rives de la Méditerranée. Un oubli qui prend place en France dans l’immense déni
Il faudra attendre plus d’un demi‑siècle, ici, pour que ce voile se déchire grâce aux travaux de Danielle Tartakowsky, de Maurice Rajsfus, d’Emmanuel Blanchard.
L’originalité de l’approche de Daniel Kupferstein réside dans sa méthode de cinéaste documentariste. Si son livre (Editions la Découverte) s’appuie sur la consultation d’archives inédites, sur une lecture attentive de la presse de l’époque et des moindres évocations du 14 juillet 1953 au cours des années qui suivent la tragédie, sur une fréquentation des études consacrées à la guerre d’Algérie, une part essentielle est constituée par la recherche des témoignages. Ce qui en fait la richesse, c’est bien la rencontre avec les acteurs de cet épisode sanglant, avec leurs proches, du côté aussi bien des victimes que des forces de répression, et avec tous ceux dont la vie, aujourd’hui encore, est entravée par les non‑dits, les mal‑dits de l’Histoire.