Etat d’urgence sanitaire

- Communiqués collectifs

Lettre du président de la CNCDH au premier ministre.

Jean-Marie Burguburu, président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, a écrit, dans la soirée du 19 mars 2020, au premier ministre au sujet du projet de loi sur "l’état d’urgence sanitaire" présenté au Parlement.

Cette lettre (ci-attachée) poura être téléchargée sur le site de la CNCDH.

Nous recopions ci-dessous quatre passages qui nous paraissent correspondre tout particulièrement aux préoccupations du MRAP. L’extrait numéro 4 est dans la ligne des demandes de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers, sur le communiqué duquel nous avions pour notre part attiré l’attention du président de la CNCDH dès que nous en avons eu connaissance le 18 mars, en l’accompagnant du commentaire suivant : Le MRAP est l’une des associations signataires de ce texte, qui exprime des préoccupations qui nous paraissent, dans les circonstances actuelles, être dans la ligne de plusieurs positions présentées par la CNCDH dans ses avis durant ces dernières années.

Le président de la CNCDH précise dans son courrier que "conformément à sa mission, la CNCDH sera particulièrement attentive aux conditions d’application de la loi". Le MRAP suivra lui aussi avec attention les modalités de mise en oeuvre de cet "état d’urgence sanitaire" et pourra notamment s’appuyer sur les observations de la CNCDH pour en dénoncer les conséquences néfastes éventuelles, pendant la durée de la pandémie et aussi, on peut le craindre, ensuite.

Augustin Grosdoy et Jean-Pierre Raoult, représentants du MRAP à la CNCDH


EXTRAITS

1. Ce projet de loi organise des atteintes exceptionnelles et systémiques aux droits fondamentaux qui justifient que la CNCDH puisse, par la voix de son Président, s’exprimer sur son contenu au regard de la mission qui lui est confiée. Si la situation de catastrophe sanitaire, mettant en péril une partie de la population et la vie de la nation, peut justifier des limitations des droits et libertés, il convient de s’assurer que ces dernières sont strictement nécessaires, adéquates, et proportionnées aux circonstances et présentent des garanties pour éviter l’arbitraire. Il convient également de s’assurer que les droits fondamentaux des personnes les plus vulnérables, atteintes par la catastrophe sanitaire elle-même, soient effectivement protégés dans ce contexte.

2. L’article 7 autorise le gouvernement à prendre des ordonnances qui emportent le risque de produire des effets au-delà de la sortie de l’état d’urgence sanitaire, notamment dans le domaine du droit du travail et de l’organisation de la justice. Il convient d’être particulièrement attentif à la durée de validité de ces mesure

3. Dans les prisons et lieux de détention, en cas d’urgence sanitaire, il faudrait prévoir une base juridique claire pour la libération exceptionnelle des personnes les plus fragiles et vulnérables.

4. Un alinéa devrait être ajouté afin de permettre la suspension des mesures d’éloignement des personnes étrangères en situation irrégulière, et en conséquence la fermeture des centres de rétention administrative, d’une part en raison des risques sanitaires pour les personnes retenues, les personnels de garde et les membres des associations intervenantes, et d’autre part en raison de l’impossibilité des reconduites aux frontières actuellement. La CNCDH rappelle à ce titre que des mesures moins coercitives existent comme l’assignation à résidence, qui doivent primer sur la rétention administrative conformément à la loi.