En Birmanie, un drame pour la démocratie
Le premier février, un coup d’État militaire a provoqué une situation dramatique en Birmanie. La résistance déterminée de la population prend la forme de manifestations quotidiennes, massives et pacifiques, d’un mouvement de désobéissance civile et d’un blocage de la vie publique et économique. Cette résistance est réprimée violemment par la junte au pouvoir. Depuis le coup d’État, la répression a fait plusieurs centaines de morts, dont 114 pour la seule journée du 27 mars (dont 4 enfants), pendant que l’armée paradait pour une « fête nationale ».
Un premier coup d’État, en 1962, a porté au pouvoir le général Ne Win. Il y est resté 26 ans. Depuis, chaque tentative de démocratisation a été brisée par une institution militaire omniprésente dans la société et l’administration. En 2017, Aung San Suu Kyi, devenue un symbole par suite de la longue répression qu’elle a subie, a pensé pouvoir partager le pouvoir avec l’armée. Mais la victoire massive de son parti en 2020 n’a pas été acceptée par des généraux qui ont repris directement le pouvoir le 1er février.
Le mouvement de résistance exige le retour à un pouvoir civil fondé sur les élections, mais avance aussi la revendication d’une nouvelle démocratie fédérale. La population birmane est en effet composée de nombreuses ethnies que les divers pouvoirs ont toujours dressées les unes contre les autres. La répression actuelle a bombardé des régions peuplées par les Karen, qui connaissaient un fragile cessez-le-feu depuis 2012, après de longues années de guerre. Quant aux Rohingya, privés de nationalité depuis 1982, ils sont jugés inassimilables et victimes d’un véritable processus génocidaire poursuivi par tous les gouvernements qui se sont succédé.
La communauté internationale doit réagir énergiquement pour soutenir le peuple birman. Le 10 mars, le Conseil de Sécurité de l’ONU a condamné à l’unanimité les violences, mais l’opposition de la Russie et de la Chine (qui sont les principaux vendeurs d’armes à la Birmanie) empêche toute initiative concrète de l’ONU. Pourtant l’ambassadeur birman à l’ONU, opposé au coup d’État, a appelé à un isolement financier total de la junte. La France est particulièrement concernée. La société Total, accusée de financer la junte, est l’acteur majeur de l’exploitation pétrolière en Birmanie. Elle doit y cesser toute activité.
Le MRAP suit cette situation avec angoisse et appelle à manifester toute notre solidarité avec le peuple birman.
Paris, le 30 mars 2021