Différences n° 326 Juillet - Août - Septembre 2023
COMBIEN PÈSE L’HISTOIRE ?
Le racisme est hélas universel. Mais dans chaque peuple, chaque pays, il a une histoire, et même des histoires, qui lui donnent des caractères spécifiques. Il est important de mieux comprendre ces racines pour mieux détruire leurs conséquences.
Dans un pays comme la France, il y a eu ce qu’on appelle « le premier colonialisme », celui qui a exploité, aux Antilles ou à la Réunion, des millions d’esclaves. Et puis, dans la deuxième moitié de XIX° siècle, il y a eu la conquête et l’occupation d’immenses territoires en Afrique et en Asie.
Un racisme à prétention scientifique servait de justification à cette domination et cette exploitation de peuples qualifiés d’inférieurs, au pire biologiquement, ou au moins culturellement. Ce long épisode a imprégné plusieurs générations de Français, comme en témoignent les manuels scolaires de l’époque, la presse, la littérature et les célèbres expositions coloniales dont s’enorgueillissaient alors nos métropoles.
La question qui se pose aujourd’hui à nous est de mesurer le poids que pèse encore ce lourd passé, encore récent, dans notre société, matériellement et idéologiquement.
Ce passé affiche encore sa présence, lorsque des courants politiques cèdent, en 2005, au détour d’une loi, à la nostalgie d’un « rôle positif de la colonisation ».
Certains tentent même encore, ici ou là, de réhabilter les « héros » de l’OAS, sinistres criminels ! Mais surtout, ce que se propose ce numéro de Différences, c’est d’entrevoir les replis de notre société et de notre environnement qui portent encore en eux les traces du colonialisme.
N’est-il pas encore présent dans la composition même de notre population, dans notre environnement urbain le plus quotidien, dans notre langage lui-même et bien sûr dans notre vision du monde et de l’humanité ? Entrevoir, disons-nous, car connaître ce passé et comprendre ses conséquences relève d’un vaste programme à la fois scientifique et d’éducation populaire. Ce travail s’ébauche ici ou là depuis un certain temps, mais il doit devenir l’objet d’une vraie politique publique.
Le MR AP y participe dans son travail d’éducation populaire de proximité. Mais il pense aussi que la création d’un musée de l’histoire du colonialisme donnerait une autre dimension à cette tâche historique, comme le Musée de l’histoire de l’immigration l’a fait dans son domaine.
Le MRAP porte ce projet.
SOMMAIRE
3 INTERNATIONAL
- Tunisie : la fin du « printemps », le retour de la répression
5 DOSSIER : QUE RESTE-T-IL DU COLONIALISME FRANÇAIS ?
- Entretien avec Gilles Manceron
- Entretien avec Catherine Coquery-Vidrovitch
- Le Palais de la porte dorée
- Mayotte, un confetti d’empire
- Comment décoloniser le lexique sur l’« outre-mer » ?
- Un héritage démographique ?
- Les colonies sont dans nos rues
- Pierre Audin en première ligne face aux séquelles du colonialisme en France et en Algérie
- Pour la création d’un Musée National de l’histoire du colonialisme (toujours et encore !)
- Soirée-débat à la Sorbonne sur la montée de l’extrême-droite dans le monde
21 COMITES LOCAUX
- Saint-Brévin, ville d’accueil des migrants
24 NOTES DE LECTURE