Construire une mémoire pour préparer l’avenir.
Ce numéro de Différences comprend un dossier sur la mémoire. Le passé est omniprésent autour de nous. Chaque année, dans chaque village, une cérémonie se déroule devant un monument aux « morts pour la patrie ».
Quelle ville n’a pas une rue Gambetta ou une place de la Libération ? Mais tout cela n’est LE passé. C’est une mémoire, c’est à dire une construction sociale et politique fabriquée à partir du passé. Elle est fabriquée consciemment par les politiques, l’école, la vie culturelle, les médias. Elle doit l’être aussi par nous, citoyens actifs qui voulons construire l’avenir.
Le MRAP a toujours donné, dans son discours et ses actions, une grande place à la mémoire, celle des horreurs, engendrées en particulier par le racisme et la haine : l’esclavage, le colonialisme, les génocides. Mais aussi celle des luttes pour l’égalité, l’émancipation, la fraternité. Nous ne construirons pas l’avenir sans comprendre pourquoi il y a eu Hitler, pourquoi il y a eu Martin Luther King.
Nous ne sommes pas seuls à nous poser ces questions. Des historiens, de villes, des associations font un travail pédagogique remarquable que le MRAP utilise dans son action éducative. Après avoir glorifié pendant quelques décennies sa monstrueuse boucherie, Verdun est devenue un centre mondial de la paix. Nantes a intégré à son identité son passé esclavagiste.
Lentement, trop lentement de nouvelles interrogations se font jour sur les rapports de la France avec l’Algérie, avec l’Afrique. C’est d’autant plus indispensable que les acteurs de ce proche passé, ou leurs descendants, sont parmi nous. Quelle que soit la place qu’ils y ont occupée, nous sommes persuadés que l’avenir est dans ce que nous appelons une « mémoire partagée ». C’est aussi la raison pour laquelle nous militons, pour que soit ajoutée à cette construction une pierre importante qui manque encore : enfin, en France, un musée de l’histoire du colonialisme...