Communiqué de presse concernant les cours d’arabe en direction des enfants de Saint Florentin

Nous avons appris, par la presse, que la mairie de Saint-Florentin avait décidé, de manière unilatérale, de ne plus ouvrir l’école publique aux cours d’arabe réservés aux enfants de CE1 au CM2.

Cette décision motivée par des raisons de sécurité qui ne sont d’ailleurs pas clairement exposées, nous interroge. La notion de danger, ainsi mise en avant, associée à l’apprentissage de la langue arabe, contribue à renforcer l’image négative de la langue arabe, et au-delà de la communauté arabe en général.

Et pourtant, à la suite d’un rapport, le gouvernement avait préconisé, il y a quelques années d’ouvrir des classes d’arabe dans les écoles publiques. Ce qui avait été salué par les syndicats d’enseignants, qui, par la voix de Sophie Vénétitay, déclaraient : "l’arabe doit être enseigné car s’il n’y a pas cette reconnaissance institutionnelle, alors les élèves se tourneront vers des associations culturelles ou religieuses".

Reconnaissance institutionnelle par la direction académique du 89 qui s’engageait, quant à elle, sur le sérieux de la formation, le contrôle régulier par ses services pour accompagner les professeurs à Saint-Florentin.

Et pourtant, Monsieur Yves Delot, maire de Saint-Florentin, estime que l’apprentissage relèverait de la compétence des parents : une manière de mépriser la langue d’origine. L’histoire de France récente nous apprend que les langues régionales ont subi le même type de traitement, il y a quelques dizaines d’années. En Bretagne, par exemple, après des dizaines d’années de mépris, la reconnaissance et l’apprentissage de la langue, loin d’être un élément de séparatisme, à favorisé l’épanouissement des Bretons dans leur entièreté.

En ce qui concerne les langues d’origine des migrants, de nombreux et nombreuses professionnels disent clairement qu’une bonne maîtrise de la langue maternelle facilite l’apprentissage d’autres langues. Mme Marie-Rose Moro, cheffe de service de la maison des adolescents de l’hôpital Cochin, et experte reconnue, s’exprime ainsi : "À la lumière de notre expérience, acquise auprès de parents migrants et auprès de leurs enfants, il nous apparaît important d’encourager la transmission et la pratique de la langue maternelle. En effet, la bonne
maîtrise de la langue maternelle et la structuration de savoirs sur le monde physique et social à travers elle, facilitent l’acquisition de la langue du pays d’accueil et permettent ainsi aux enfants de bénéficier des avantages cognitifs inhérents au bilinguisme."

C’est un constat aujourd’hui partagé par la très grande majorité des chercheurs et professionnels.

Peut-être aurait-il été judicieux de s’enquérir de l’avis d’experts de la petite enfance avant de prendre une telle décision ? Mais nous sommes en droit de nous interroger, dans une période électorale marquée par l’instrumentalisation du rejet des étrangers, des juifs et des musulmans, sur les véritables raisons d’une telle démarche.

Agnès Cluzel
mrap89@orange.fr
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