À quoi sert le projet de loi sur l’immigration ?

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a déposé son texte législatif le 1er février. Lourd de dangers pour les droits des étrangers, il suscite une vive opposition des associations engagées sur le terrain.
Ce projet de loi est d’abord un acte politique d’un ministre qui cherche à ratisser large jusqu’à l’extrême droite. Il entraîne une grande précarité.

L’annonce d’une nouvelle loi sur l’immigration par Gérald Darmanin, en juillet 2022, est en soi, avant tout, un geste politique. Tout ministre de l’Intérieur se doit de laisser son nom à une loi sur ce sujet, imposé par l’extrême droite depuis quarante ans, comme problème majeur prétendu. Et ce d’autant plus lorsque le ministre en question se construit un profil de présidentiable et espère ratisser large jusqu’à l’extrême droite.
Un premier volet de ce projet devrait satisfaire un fantasme cher à certains : expulser ! rejeter ! Une série de mesures vise ainsi à limiter le regroupement familial et à intensifier l’exécution des mesures d’éloignement, en popularisant leur nom : les obligations de quitter le territoire français (OQTF). Quitte à limiter les quelques droits dont disposent encore les étrangères et les étrangers. Et pour faire bonne mesure, on viserait essentiellement les étrangers délinquants, entretenant cet autre fantasme : l’immigration a un lien étroit avec la délinquance...
Un autre volet affecte le droit d’asile, pourtant ancré dans la tradition française, mais qui embarrasse les pays européens depuis que des persécutés du monde entier demandent légitimement leur protection. Les États s’ingénient alors à en restreindre l’application. Le projet de loi propose de réduire le délai d’instruction de neuf mois à six mois. L’intention serait louable si elle ne débouchait pas sur un examen expéditif des situations. L’organe chargé de cet examen, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), pourrait également perdre son indépendance au profit de bureaux « France Asile » implantés en préfecture. Quant à l’organe d’appel, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), elle serait régionalisée et réduite à un juge unique là où la collégialité constituait une garantie.
Avec un volet « intégration », le projet se veut équilibré, mot magique du macronisme. Il introduit l’idée qu’une certaine régularisation des « sans-papiers » serait possible. Cette possibilité n’est en réalité pas une nouveauté, étant, de fait, pratiquée depuis 2012. Le nouveau titre proposé créerait certains droits nouveaux, mais serait surtout d’une extrême précarité. Limité à un an, il enfermerait les bénéficiaires dans des métiers dits « en tension ». Ce serait une régularisation opportuniste, réponse provisoire aux difficultés d’une partie du patronat. Le débat parlementaire devrait commencer fin mars et ne peut aboutir qu’avec la complicité de la droite au prix de concessions aisément imaginables. Mais, nous aussi, nous faisons de la politique, au sens noble, et continuons à prôner la solidarité, l’égalité des droits, ainsi que la régularisation de tous les étrangers. Ce n’est pas l’étranger le problème, mais bien le rejet de l’autre. Le Mrap persistera, avec tous les antiracistes, à combattre le racisme, sous toutes ses formes et à promouvoir la fraternité entre les peuples.