19 mars 1962 : "cessez-le-feu en Algérie"
Le 19 mars 1962, le cessez-le-feu en Algérie mettait fin à une "sale guerre" et à 132 ans de domination coloniale. Cette guerre qui n’a jamais voulu dire son nom fit plusieurs centaines de milliers de morts français et algériens, militaires et civils. La population algérienne en a payé le plus lourd tribut.
Ce cessez-le-feu qui n’était pas encore la paix fut salué avec soulagement par l’immense majorité des peuples algérien et français. Il mettait fin au déchaînement de la violence et de la haine racistes.
Il y a en France plusieurs centaines de lieux, places ou rues qui portent la date du 19 mars 1962. Ce jour ce sont les mémoires de toutes les victimes qui doivent être reconnues.
En demandant à l’historien Benjamin Stora un rapport (remis le 20 janvier) sur "les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie", le Président de la République a fait naître de nouveaux espoirs de reconnaissance de ce que fut cette guerre coloniale mais aussi de ce que furent la "conquête" coloniale de l’Algérie et les 132 années de colonisation. Les conditions doivent être réunies pour que les peuples algérien et français puissent construire des mémoires partagées s’appuyant sur le travail des historiens.
Cela passe par la reconnaissance officielle des crimes commis au nom de la France. Le Président de la République a fait quelques gestes significatifs comme la reconnaissance des assassinats de Maurice Audin et Ali Boumendjel par l’armée française. Ces gestes symboliques et ces déclarations sont nécessaires mais ils ne peuvent suffire.
Ni le peuple algérien, ni le peuple français ne comprendraient et n’accepteraient que leurs espoirs soient déçus. Or déjà, les promesses d’ouverture des archives restent aujourd’hui des effets d’annonce.
Pour faire droit aux exigences de dignité et de justice, il reste beaucoup à faire. Les plus hautes autorités françaises doivent reconnaître l’implication première et essentielle de la France dans les traumatismes engendrés par la colonisation, condamner tous les crimes – crimes de guerre, crimes d’état et crimes contre l’humanité -, exprimer des excuses et préparer la juste réparation de ce qui a été commis au nom de la France.
Elles devront aussi se saisir des questions liées aux séquelles du colonialisme en France, séquelles vécues en particulier par celles et ceux que l’on persiste à qualifier d’"issus de l’immigration", celles et ceux qui sont supposés être originaires des anciennes colonies françaises et qui sont victimes de racisme, de discriminations.
La réconciliation et l’amitié entre le peuple algérien qui a tant souffert et le peuple français sont à ce prix.
Paris, le 18 mars 2021