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<p><b>Nouvelle page</b></p><div>**Incident à Vichy (soirée MRAP sur la pièce d’Arthur Miller)<br />
**Michel de Ré: "une tragédie en forme de cantate" recueilli par M. Kagan<br />
**Spectacles par A. Levy<br />
<br />
==Numéro au format PDF==<br />
{{Lecture PDF}}<br />
<br />
[[Image:Voir-pdf.jpg|link={{filepath:Dl71_306opt.pdf}}]]<br />
<br />
{{Recherches texte brut}}<br />
<div class="textebrut"><br />
--<br />
R ...... me ............ M .......... m OIl1J1 Il R ........ l'Alllose ... lI.me el """' la Pau lM R" P)<br />
15 OCT08RE 1911 NO 306 PRIX : 1 FRANC<br />
1<br />
-<br />
NUMERO<br />
SPECIAL<br />
2<br />
SOIREE EXCEPTIONNELLE<br />
sous le patro nage du Mouvement contre le Racisme,<br />
l'Antisémitisme et pour la Paix (M.R.A.P.)<br />
Une pièce dlArthur Miller<br />
INCIDENT A VICHY<br />
Vendredi 5 novembre 1971 à 20h30<br />
Espace Pierre Cardin<br />
(Théâtre des Ambassadeurs)1/3,avenue Gabriel, Paris Se Métro:Concorde<br />
Adaptation: Maurice Kurtz Mise en scène: Michel de Ré<br />
Avec Sacha Pitoeff,Gabriel Cattand, Jean-Pierre Granval-Van-Doude,<br />
Arcady, Gérard Berner,Gaetan Jor,Jean Pemeja,Geo Wallery<br />
PLACES à 35F,25F et 15F.<br />
LOCATION:M.R.A.P.,120 rue Saint-Denis,Paris 2e<br />
Tél.: 231-09-57 CCP:14.825-85 Paris<br />
--------------BON DE COMMANDE -------------<br />
M ......................... . .................... . Téléphone:<br />
Adresse:<br />
souhaite réserver, pour la soirée du 5 novembre à l'Espace Pierre Cardin<br />
places à 35 F<br />
places à 25 F .......... .<br />
places à 15 F ..... .. ... .<br />
Frais d'expédition<br />
TOTAL<br />
F<br />
F<br />
F<br />
1 F,OO<br />
Ci-joint, pour règlement, un chèque bancaire, un mandat-poste, chèque postal.<br />
(Souligner la formule choisie).<br />
DIX HOMMES PRIS AU PIEGE<br />
Ecrite en 1965, et créée la même année à New-York,<br />
inédite en France, la pièce d'Arthur Miller, « Incident à<br />
Vichy» que Michel de Ré présente à l'Espace Pierre<br />
Cardin se joue à huis-clos, d;ms l'antichambre de la mort; non<br />
pas la mort naturelle mais celle voulue, organisée par les<br />
nazis sur des victimes sans défense. Les protagonistes sont<br />
pour la plupart juifs ou de « race» dite « inférieure »<br />
comme le Gitan. Seul un aristocrate autrichien, le prince<br />
Von Berg, échappe à ces catégories : il est là pour Ul1e<br />
vérification d'identité. Il aura droit à un laissez-passer mais<br />
ne l'utilisera pas, parce qu'il se sent, à la fm de la pièce,<br />
responsable, bien que n'y ayant pas participé, de l'holocauste<br />
commis par ses compatriotes.<br />
Le personnage du prince Von Berg qu'incarne Sacha<br />
Pitoëff est l'axe autour duquel tourne la pièce. Il est en<br />
même temps le miroir qui permet la réflexion - au sens<br />
physique du mot - des autres et le creuset où viennent se<br />
confronter les attitudes, se mêler les sentiments de ses<br />
compagnons. C'est dire que cette pièce permet de dépasser la<br />
dénonciation du nazisme pour atteindre le stade supérieur du<br />
problème de l'homme face à l'histoire. Dans la mesure aussi<br />
où ces hommes, persécutés bien sûr parce que juifs (ou<br />
gitan), se déterminent, non pas seulement en fonction de<br />
leur orgine, mais plutôt en fonction de leurs convictions, de<br />
leurs options, de leur éducation, de leurs caractères, « Incident<br />
à Vichy» permet de comprendre, mieux peut-être<br />
qu'une pièce strictement militante, combien le processus du<br />
fascisme peut se rééditer, en l'absence même des nazis.<br />
« Leur force, faire l'inconcevable. Cela nous réduit, nous<br />
autres à l'impuissance», explique l'un des personnages.<br />
Le caractère volontairement neutre et anodin du titre de<br />
la pièce lui confère, lui aussi, une dimension universelle ; de<br />
même la prise de conscience du prince Von Berg, « colonne<br />
vertébrale» de l'oeuvre d'Arthur Miller.<br />
Michel de Ré, qui en réalise la mise en scène, n'a pas<br />
choisi la facilité en inscrivant cette pièce au programme de<br />
l'Espace Pierre Cardin dont il assurera à l'avenir la direction.<br />
Il souhaite instaurer, dans l'ex-Théâtre des Ambassadeurs<br />
complètement rénové, la politique d'une Maison de la Culture<br />
au coeur de Paris et y amener aussi un public nouveau.<br />
L'AUTEUR LA REALISATION<br />
Arthur Miller JepetllIUII. f'LltrJLt' l.11 f .J, 1. 1 h J, " J.t "",. H,/t.U,/ J" J;j 1" • ,h " ",<br />
Avec « Incident à Vichy», ce n'est pas la première fois qu'Arthur Miller aborde le problème de l'antisémitisme: il y avait consacré<br />
en 1945 un roman: « Focus» qui obtint à l'époque un grand succès (( Droit et Liberté », à ses débuts, l'avait publié en feuilleton).<br />
Né à New-York en 1915, Arthur Miller fit des études d'art dramatique à l'Université de Michigan. Il écrit des pièces radiophoniques<br />
et est engagé par un studio d'Hollywood. Parallèlement, il écrit son journal qui sera publié en 1944 sous le titre de « Situation<br />
normale ».<br />
En 1947, « Ils étaient tous mes fils» remporte le prix du Cercle de la Critique Dramatique, un « Donaldson » et le « Tony»<br />
(équivalents, pour le théâtre, des « Oscars» cinématographiques). « La mort d'un commis-voyageur» est joué à Broadway en 1949 et<br />
remporte le Prix Pulitzer. Pour « Les Sorcières de Salem» qui fut avec « Ils étaient tous mes fils» et « La mort d'un<br />
commis-voyageur» adapté pour le cinéma, Arthur Miller se voit décerner un autre « Tony» en 1953.<br />
Il écrit en 1955 deux pièces en un seul acte, « Souvenirs de deux lundis» et « Vu du pont », qui resta longtemps à l'affiche à Paris.<br />
Enfin « Après la chute» et « Incident à Vichy», qu'Arthur Miller produisit en 1965 pour le Repertory Theater of Lincoln Center,<br />
furent présentées au Square Theater de Washington administré à l'époque par Robert Whitebread et Elia Kazan.<br />
Parallèllement à sa carrière de dramaturge, Arthur Miller qui vit dans le Connecticut avec sa femme, la photographe, Inge Morath, et<br />
sa plus jeune fille, continue à écrire de courtes nouvelles, dont certaines furent portées à l'écran.<br />
En se chargeant de la mise Ém scène d'« Incident à Vichy» Michel de Ré que les téléspectateurs connaissent bien et qu'ils vont<br />
revoir dans « L'éducation sentimentale» de Gustave Flaubert, est revenu à son métier de base. Il s'est entouré pour cette occasion<br />
d'acteurs chevronnés parmi lesquels Sacha Pitoëff, Gabriel Cattand, Jean-Pierre Granval, Van-Donde, Arcady, Gérard Berner, Gaëtan<br />
Jor, Jean Premeja, Geo Wallery.<br />
DROIT ET LIBERTE - NO 306 - 15 OCTOBRE 1971 3<br />
Arthur Miller<br />
NOTES<br />
POUR<br />
LA MISE<br />
EN SCENE<br />
Dans certaines circonstances,<br />
le style choral et métaphor~<br />
que peut être considéré en<br />
même temps comme un aspect<br />
4<br />
du réalisme. Si ces personnages<br />
sont environnés d'un monde effrayé<br />
à la pensée de leur venir en<br />
aide, ou indifférent, ou franchement<br />
hostile, nous comprenons<br />
que l'immobilité physique leur<br />
est imposée par ce monde-Ià et<br />
qu'elle est également l'image de<br />
leur solitude intérieure, une sorte<br />
d'entretien de soi avec soi. En<br />
effet, la plupart des répliques<br />
s'adressent à celui qui les dit,<br />
bien que le personnage semble<br />
les diriger vers l'extérieur. "<br />
I l va sans dire que les part~<br />
cularités des personnages ne<br />
doivent pas exister dans le<br />
but de se faire valoir à titre ind~<br />
viduel, comme pour une pièce<br />
réaliste ; nous ne pourrons jamais<br />
les «connaître" de la sorte, dans<br />
le détail, car ces personnages<br />
sont pris dans un cul-de-sac historique,<br />
à l'instant critique où<br />
les êtres humains dévoilent plus<br />
ou moins ce qui est en rapport<br />
avec cet instant et rien de plus )).<br />
I ci, chaque homme cherche,<br />
d'une manière ou d'une a~<br />
tre, à trouver un sens à l'insensé<br />
et à garder intacte sa personnalité<br />
face à la terreur inst~<br />
tuée par le pouvoir dans le but de<br />
le déshumaniser )).<br />
Toutes ces voix sont les<br />
siennes (de Von Berg), des<br />
champs visuels contradictoires<br />
d'un honnête homme qui<br />
se trouve dans un monde où il<br />
n'est pour rien, un monde dont<br />
il est néanmoins responsable. En<br />
fait, la «colonne vertébrale)) de<br />
la pièce est située dans la prise<br />
de conscience naissante de Von<br />
Berg, et quel que soit le style<br />
théâtral, cet élément-là doit s'affirmer<br />
dès l'instant de son entrée<br />
en scène".<br />
M ichel de Ré<br />
"Une tragédie<br />
en forme de cantate"<br />
L a piéce se déroule en 1943 à Vichy, dans un centre de ramassage, à l'époque où les Allemands<br />
envahirent la « zone libre ». Là, sont réunis des hommes de toutes conditions sociales, idées<br />
politiques et caractérisques psychologiques. Ils ne se connaissent pas et ne savent pas qui est<br />
juif parmi eux. Ils ont peur de se dévoiler les uns aux autres, ils ont peur d'apprendre pourquoi on les<br />
a conduits là. Ils sont tous munis de faux papiers et pensent qu'au plus grave, ils seront envoyés<br />
en camp de travail. Mais ils se rendent compte peu à peu que, chaque fois qu'ils passent la porte, c'est<br />
c'est un sort bien plus terrible encore qui les attend.<br />
En face d'eux, un aristocrate, un prince autrichien (von Berg) qui ne s'est jusqu'alors préoccupé<br />
que d'art, mais qui a vu ses amis, ses intimes, ceux avec lesquels il se trouvait en parfait aécord<br />
culturel et artistique, devenir nazis ... Il regarde ceux qui l'entourent, et prend conscience qu'il<br />
est aussi responsable.<br />
I L n'y a pas d'action veritable dans cette pièce dont l'auteur, Arthur Miller, souhaitait qu'elle soit<br />
jouée comme une cantate. chacun des hommes - la chorale - exécutant sa partie en fonction de<br />
sa propre poésie et de ses réactions personnelles. Ce n'est pas un drame, c'est une tragédie de<br />
dimensions universelles. Car le probléme posé dans la pièce n'est pas seulement celui du racisme<br />
de 1943 et ne concerne pas les seuls juifs. C'est, plus encore, celui du fascisme. « Chaque homme a son<br />
.' uif. dit Leduc. l'un des protagonistes, c'est l'autre ». L'autre grand théme qui sous-tend. « Incident il<br />
\ h:hy n est celui de la solitude de l'homme. en face d'une situation qui n'est plus logique. qui dépasse<br />
l'entendement.<br />
Répétition: Michel de Ré, Gabriel Cattan, Gérard Berner, Sacha Pittoëff (de gauche à droite)<br />
J e cherchais, pour remettre ce théâtre - dont je prends la direction - sur ses rails, une pièce qui<br />
soit à la fois forte, traditionnelle mais originale. Or, celle-ci possède une grande intensité dramatique<br />
par le sujet traité qui concerne tout le monde. Elle est originale par sa construction en cantate,<br />
mais elle reste traditionnelle dans son fond. Elle n'est pas hermétique et ne tombe pas dans le délire,<br />
dans l'absurde ou dans l'onirisme.<br />
D autres éléments ont guidé mon choix. Je ne veux pas donner dans le théâtre de chapelle. Or,<br />
la période de l'occupation, le phénoméne du nazisme dont on a tiré beaucoup, en littérature, au<br />
cinéma, au théâtre engendrait une espèce de lassitude. Peut-être qu'en 1965, 66, ou 67, cette<br />
piéce n'aurait pas eu les mêmes résonnances qu'aujourd'hui, où l'on court voir « Le chagrin et la<br />
pitié », où les enfants - mes enfants - sont intéressés par ce qu'on leur raconte.<br />
J e pense que cette pièce traitée avec le dépouillement d'une oeuvre musicale peut plaire à la fois<br />
aux jeunes et aux anciens qui gardent le souvenir d'une époque très douloureuse et souhaitent la<br />
mieux comprendre » ...<br />
(Propos recueillis par Marguerite Kagan)<br />
J<br />
'1<br />
SPECTACLES<br />
SUR les scènes et les écrans, une abondante floraison<br />
d'oeuvres se préoccupent du racisme, en ce début de<br />
saison. C'est un signe. Le racisme s'impose avec acuité<br />
à la réflexion de nos contemporains. Dans tous les milieux,<br />
des voix s'élèvent pour le condamner. Souvent du fond du<br />
coeur. Parfois, il est vrai, pour cc être dans le vent)) mais<br />
n'est-ce pas la confirmation précisément, que le vent<br />
souffle dans la bonne direction.<br />
Pièces et films, comme les livres, et même des chansons,<br />
reflètent ce courant d'opinion de plus en plus profond. Les<br />
résultats, certes, sont inégaux, et peuvent prêter Il discu ..<br />
sion, d'autant plus que les auteurs, les réalisateurs, s'adre ..<br />
sent à des publics variés. On doit noter, en outre, que si<br />
toutes ces créations se situent en 1971, Année internationale<br />
de lutte contre le racisme, ce n'est pas par une<br />
volonté délibérée, mais pas davantage par hasard: la<br />
campagne mondiale lancée par l'O.N.U. correspond, elle<br />
aussi, aux évolutions de notre temps.<br />
L'Année internationale a débuté en France avec la cc première))<br />
au T.O.P., sp,us l'égide du M.R_A.P., d'une pièce<br />
consacrée à l'apartheid: « Ta vue me dérange, Hot not».<br />
Cette pièce part ces jour .. ci en tournée. Le 5 novembre,<br />
nos amis seront heureux d'applaudir la très belle oeuvre<br />
d'Arthur Miller, « Incident à Vichy» , qui a remporté un vif<br />
succès dans tous les pays où elle a été jouée. Dans le même<br />
temps, se poursuit la carrière de « Libérez Angela Davis tout<br />
de suite », la pièce-choc réalisée par José Valverde au<br />
Théâtre Gérard-Philipe. L'Odéon présente « Amorphe d'Otte nburg<br />
», du jeune auteur Jean-Claude Grumberg, dont une<br />
autre pièce également antiraciste, « Rixe», est montée Il<br />
Tours. Le Chatelet annonce une comédie musicale dédiée<br />
Il la fraternité humaine.<br />
Au cinéma, nous cit ero ns parmi d 'autres, « Pet it à petit», où<br />
Jean Rouch s'intérroge sur l 'Afrique et sur ... nou .. mimes;<br />
« Benito Cereno»,' de Serge Roullet, dont la leçon remonte<br />
Il l'esclavage; « Joe Hill », du Suédois Bo Widerberg, drame<br />
où la xénophobie joue le même rôle qu' ailleurs le racisme<br />
ou l'antisémitisme.<br />
Nous pourrions allonger cette double liste. On regrettera<br />
qu'inspirée d 'un tout autre état d ' esprit, la Télévision n'ait<br />
créé aucune oeuvre de ce genre depuis janvier, et nous ait<br />
gratifiés, bien au contraire, de l 'odieux cc Silberman ••...<br />
C'est dire que la multiplication des spectacles sensibilisant<br />
l'opinion au racisme ne saurait endormir notre vigilance.<br />
Dans le domaine culturel, tout n 'est pas résolu. Dans la vie,<br />
moins encore. Chaque jour, en France même, bien des<br />
hommes souffrent du racisme. De la prise de conscience Il<br />
l'action, le M.R.A .P. se doit de mobiliser toujours plus les<br />
bonnes volontés pour s'y opposer. Merci Il tous ceux qui<br />
l'aident dans cette t âche.<br />
Albert LEVY<br />
L'ESPACE PIERRE CARDIN<br />
Sous les frondaisons de la Concorde, en face des jardins de l'Elysée, l'ancien Théâtre des<br />
Ambassadeu rs et le cabaret-restaurant du même nom ont donné naissance à l' Espace Pierre<br />
Cardin.<br />
Si l'architecture extérieure a été conservée, un décor résolument moderne et fonctionnel définit<br />
la salle de spectacle qu i offre de nombreuses possibilités de mise en scène, et les aborde.<br />
Pierre Cardin a désiré puis réalisé son souhait ... que son « espace» devienne une maison du<br />
spectacle et de la culture, en plein Champs-Elysées, sous l'égide du Conseil municipal de Paris<br />
mais sans aucune subvention.<br />
En cette année 1971 -72, Pierre Cardin a fait appel à Michel de Ré qui a construit pour les activités<br />
de l' Espace un programme tréséclectique.<br />
Ainsi: à 18. h 30, de novembre à décembre, y viendront la compagnie Anne Béranger, un groupe<br />
de musique électro-acoustique, Romain Bouteille et « Le café de la gare», l' Orchestre de Paris, etc ...<br />
Des concerts de jazz seront donnés tous les mardis dans la nouvelle salle de l'Espace. Et à partir<br />
du 3 novembre, s'ouvrira une exposition Fernand Léger.<br />
•<br />
DROIT ET LIBERTE - NO 306 - 15 OCTOBRE 1971<br />
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( 6e) RIVE GAUCHE, 85, rue de Sèvres<br />
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(Ioe) GARE DE L'EST, 53, boulevard de Strasbourg<br />
(MO Château-d'Eau).<br />
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"SI VOUS ETES DANS CE TRAIN,<br />
QUITTEZ-LE" ...<br />
BAYARD. - Je travaille ici aux chemins de fer,<br />
dans les dépôts de la gare. Nous avons fait entrer<br />
hier un train de marchandises, grande vitesse.<br />
Il y avait bien cinquante wagons, peut-être<br />
plus. Le mécanicien était Polonais, alors je ne<br />
pouvais pas lui causer. Mais un des aiguilleurs<br />
dit qu'il a entendu des gens à l'intérieur.<br />
LEDUC. - A l'intérieur des wagons de marchandises?<br />
BA YARD. - Oui. Le train est arrivé de Toulouse.<br />
J'ai appris qu'il y a eu là-bas ces jours-ci<br />
des rafles de juifs, en douce. Et que vient faire<br />
un mécanicien polonais dans un train qui roule<br />
dans le Midi? Vous avez compris?<br />
LEDUC. - Camp de concentration.<br />
MONCEAU.- Et pourquoi? Pas mal de<br />
gens s'engagent librement pour travailler en<br />
Allemagne. Ça n'est un secret pour personne.<br />
Ceux qui partent ont double ration.<br />
BA Y ARD (avec calme). - Les wagons sont<br />
fermés à clef de l'extérieur. (Brève pause.)<br />
Ils puent à plein nez. On peut les sentir à cent<br />
mètres. Et il y a dedans des enfants qui pleurent.<br />
On peut les entendre. Des femmes aussi. Et<br />
puis, les travailleurs libres, on les enferme pas<br />
à clef comme ça, que je sache. (Longue pause.)<br />
LEDUC. - Tout de même, il n'a jamais été<br />
question d'appliquer les lois raciales en zone<br />
libre. Nous sommes toujours en territoire<br />
français, en dépit de l'occupation - et ça, ils<br />
le respectent. (Une pause.)<br />
BA YARD. - C'est le Bohémien qui m'ennuie.<br />
LEBEAU. - Pourquoi ça ?<br />
BA YARD. - Ces gens-là tombent aussi sous le<br />
coup des lois raciales. Catégorie inférieure.<br />
(Leduc et Lebeau se tournent lentement<br />
pour regarder le Bohémien.)<br />
LEBEAU (Il se retourne rapidement vers<br />
Bayard). - Sauf, bien sûr, s'il a vraiment volé<br />
cette marmite. (Il arrête son mouvement de<br />
navette.)<br />
BA YARD. - Eh bien, oui, s'il a volé la marmite,<br />
alors là bien entendu, il...<br />
LEBEAU (il parle vite au Bohémien). - Dis<br />
donc ... Psst !. ..<br />
(II l'appelle avec un sifflement aigu<br />
mais sans bruit. Le Bohémien se<br />
tourne vers lui.)<br />
Cette marmite, tu l'as volée?<br />
(Le visage du Bohémien reste impénétrable.<br />
Lebeau éprouve de la gêne<br />
GANTS - TETINES<br />
Chez votre pharmacien<br />
à insister sur ce point, mais il est<br />
hors de lui ... )<br />
C'est bien ça, n'est-ce pas?<br />
LE BOHEMIEN. - Non volée, non.<br />
LEBEAU. - Remarque, j'ai rien contre le vol.<br />
(En désignant les autres.)<br />
Suis pas de leur espèce, moi. J'ai couché sous les<br />
ponts, sous les porches, sur les bancs publics<br />
- je veux dire, pour moi, la propriété, n'importe<br />
laquelle, c'est du vol de toute manière, alors<br />
c'est pas moi qui vais te le reprocher.<br />
LE BOHEMIEN. - Non volée.<br />
LEBEAU. - Tiens ... Enfin, franchement, si tu es<br />
bohémien, comment peux-tu vivre autrement,<br />
quoi?<br />
LE GARÇON DE CAFE. - Ils volent tout.<br />
LEBEAU (à Bayard). - Vous avez entendu?<br />
On l'a sans doute arrêté pour vol, pas plus.<br />
LE BOHEMIEN. - Jamais voler. Je fais tours<br />
avec mains.<br />
(Tous font des signes d'incrédulité.)<br />
Jamais voler!<br />
(Il fait avec grâce des gestes de<br />
jongleur.)<br />
Un extrait de<br />
"Incident a Vichy"<br />
VON BERG. - Pardonnez-moi ...<br />
(Les autres se tournent vers lui.)<br />
Vous a-t-on arrêtés parce que vous êtes tous<br />
juifs?<br />
(Ils se taisent, méfiants et surpris.<br />
Il se rend compte de sa gatTe.)<br />
Je suis profondément désolé. Je ne pouvais<br />
pas savoir. ..<br />
BA YARD. - Je n'ai pas parlé de juif. Autant<br />
que je sache, personne n'est juif ici.<br />
VON BERG. - Je suis profondément désolé.<br />
(Silence. Le moment se prolonge.<br />
Sa gêne le fait rire nerveusement.)<br />
C'est simplement que j'ai... j'étais en train<br />
d'acheter le journal quand un homme est sorti<br />
d'une voiture et m'a dit que je devais faire<br />
vérifier mes papiers. Je... je ne pouvais pas<br />
savoir. ..<br />
(Silence. L'espoir reprend le dessus<br />
parmi eux. Von Berg les regarde tous<br />
avec une sympathie accrue.)<br />
LEBEAU (à Bayard). - Alors, pour quelle<br />
raison est-ce qu'on l'a embarqué, LUI.<br />
BA YARD (il regarde Von Berg pendant un<br />
instant, puis il s'adresse à tous). - Je n'y<br />
comprends rien, mais j'ai un conseil à vous<br />
donner. S'il vous arrive une chose pareille et<br />
que vous vous trouviez dans ce train - il y<br />
quatre verrous à mi-hauteur des portes. Tâchez<br />
de trouver un clou, un tournevis, même un<br />
caillou pointu - vous pourrez tailler dans le<br />
bois autour des verrous et les portes s'ouvriront.<br />
Je vous préviens, ne croyez rien de ce qu'ils<br />
vous racontent - j'ai entendu dire que dans<br />
les camps polonais, les juifs... on les fait<br />
travailler à mort.<br />
DROIT ET LIBERTE - NO 306 - 15 OCTOBRE 1971<br />
MONCEAU. - Justement j'ai un cousin qu'ils<br />
ont envoyé là-bas, à Auschwitz. C'est en<br />
Pologne, vous savez. Eh bien, j'ai reçu plusieurs<br />
lettres de lui, me disant qu'il se porte à merveille.<br />
On lui a même appris le métier de maçon.<br />
BA YARD. - Ecoutez, mon vieux, je vous dis<br />
ce que j 'ai entendu chez des gens qui sont au<br />
courant. (Il hésite.)<br />
Chez des gens dont c'est le métier de s'informer,<br />
vous saisissez ? N'allez pas croire leurs<br />
histoires de relogement, ou qu'ils vont vous<br />
apprendre un métier et tout le bazar. Si vous<br />
êtes dans ce train-là, quittez avant qu'il arrive<br />
là ou il va. (Une pause.)<br />
LEDUC. - rai entendu dire la même chose.<br />
(Ils se tournent vers lui et lui se tourne<br />
vers Bayard.)<br />
Est-ce qu'il y a des outils par ici que nous<br />
pourrions? ...<br />
MONCEAU. - Ah ça! C'est typique. Nous<br />
sommes en zone libre, personne ne nous a dit<br />
un traître mot, et voilà qu'on est déjà dans le<br />
train pour un camp de concentration ou nous<br />
serons tous morts dans un an.<br />
LEDUC. - Mais si le mécanicien est un<br />
Polonais ...<br />
MONCEAU. - Eh bien, oui, c'est un Polonais,<br />
alors qu'est-ce que ça prouve?<br />
BA YARD. - Je ne dis qu'une chose, si vous<br />
avez l'outil qu'il faut. ..<br />
LEDUC. - A mon avis, on devrait prendre<br />
au sérieux le conseil de ce monsieur.<br />
Texte reproduit avec l'aimable autorisation<br />
de l'agent littéraire en France<br />
d'Arthur Miller et de l'adaptateur,<br />
Maurice Kurtz.<br />
droit'&<br />
liberté<br />
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7<br />
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[[Catégorie:1971]]</div>Pantchovilla