Différences n°75 - février 1988

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Sommaire du numéro

n°75 février 1988

  • Les avocats du diable (extrême-droite) par Rabha Attaf
  • Christian Delorme, prête et militant antiraciste à Lyon, fait le point par Rabha Attaf
  • Gaza et Cisjordanie: un peuple étouffe (Palestine, Moyen-Orient) par Cherifa Benabdessadok
  • Code de la nationalité: le rejet de l'exclusion par Rabha Attaf [législation]
  • J.O. Les Crees paient la fête par Robert Pac
  • Les exilés de Montreuil (Mali) par Franck Teruel
  • Un village piqué de théâtre (Monclar) par Laure Lasfargues
  • 88 année de la danse: la jeunesse du mélange par Chantal Langeard
  • Judaïsme, la philosophie ou la religion par Bernard Abouaf


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Le magazine de l'amitié entre les peuples • a COURAGE On tUe chaque jour un Malik Oussékine dans les territoires occupés de Cisjordanie et de Gaza. Où sont les manifestations, où sont les protestations indignées des grandes consciences? Montand se tait, SOS Racisme se tait. Le ministre Malhuret se tait. La liste des silences, complicités dans la paix des cimetières, emplirait un journal. Il s'est heureusement trouvé des intellectuels - juifs - pour sauver l 'honneur en protestant contre la répression. Et les Nobel ? Elie Weisel parle et sa voix, autrefois si forte contre le crime, est aujourd'hui murmure. Il s'interroge, suppute, dose, mégote et finit par excuser la répression. Fondé sur des références morales nées de la lutte contre l 'horreur nazie et les persécutions antisémites, l'Etat israélien applique aujourd'hui aux Palestiniens des méthodes autrefois utilisées contre ses fondateurs par les mandataires britanniques. Ghettos encerclés, sous-citoyenneté, expulsions, justice sommaire, bannissement, spoliation de terre, négation d'un fait national ... Begin et autres subirent cela de la part des Britanniques lorsqu'ils luttaient pour le droit à une patrie. Personne ne met plus aujourd'hui en cause l'existence d'Israël, pas même l'OLP; et c'est heureux. Israël est la première puissance militaire de la région, soutenue très largement par les EtatsUnis; l'Egypte est en paix et les autres pays arabes n'agitent le plus souvent le drapeau palestinien que comme prétexte et alibi. . C'est avec les Palestiniens qu'il faut négocier. Qui, parmi les dirigeants israéliens aura le courage de le reconnaître un jour? D 1iHérences FEVRIER 0 6 Christian Delorme -::J Prêtre et militant antiraciste à Lyon, «() animateur des grandes marches des Beurs en 83-84, il fait le point sur les expulsions, l'intégration, le vote et la citoyenneté. RABHA ATTAF 8 Un peuple étouffé Un représentant de l'DLP et un dirigeant du mouvement israélien « La paix maintenant» analysent la révolte palestinienne. CHERIFA BENABDESSADOK 12 JO : Les Crees paient la fête Dans quelques jours, ce sera la fête olympique. Pour les indiens Crees, elle sent le pétrole. ROBERT PAC ABONNEMENTS lan:200F. 1 an à l'étranger: 220 F. 6 mois: 120 F. Etudiants et chômeurs, 1 an : 150 F. 6mois : 80F (joindre une photocopie des cartes d'étudiant ou de pointage). Soutien : 300 F. Abonnement d'honneur : 1 000 F. Algérie: 15 dinars. Belgique: 140 FB. Canada: 3 dollars. Maroc: 10 dirhams. Publicité au Journal Photocomposition PCP, 17, place de Villiers, 93100 Montreuil. Tél. : 42.87.31 .00 Impression Montligeon. Tél. : 33.83.80.22. Commission paritaire nO 63634 ISSN 0247-9095. Dépôt légal: ]987-12. La rédaction ne peut être tenue pour responsable .des photos, textes et documents confiés. '- 0 ëi ri) 0 0 0 '-

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() ri) -0 '- 0 ::J 0 () '0 0 Magazine créé par le MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), édité par la Société des éditions Différences 89, rue Oberkampf, 75011 Paris. Tél. : (1) 48.06.88.33. 16 Les exilés de Montreuil Aux portes de Paris, 5000 Maliens. Une communauté discrète et soudée, venue gagner sa survie et qui ne rêve que du retour. FRANCK TERUEL 26 88 Année de la danse Année du mouvement dans la danse en tout cas. Ce qui bouge, ce qui change, ce qui se prépare ... CHANTAL LANGEARD 30 Judaïsme L'étude du Talmud revient en force. Des écoles s'ouvrent, les élèves af- [Iuent. Accès de religiosité, recherche philosophique ? BERNARD ABOUAF DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Albert Lévy REDACTION Rédacteur en che[ René François Secrétariat de rédactionmaquettes: Véronique Mortaigne Iconographie Joss Dray ADMINISTRA TlON/GESTION Khaled Debbah PHOTO COUVERTURE Martine Chartier ONT PARTICIPE A CE NUMERO: Rabha Attaf, Cherifa Benabdessadok, Bernard Abouaf, Robert Pac, Chantal Langeard, Laure Lasfargues, Yves Thoraval, Souâd Belhaddad, Elisabeth Chikha, Franck Témel, Bertrand Bary, Monique Fauré. Il

1.

() LES AVOCATS DU DIABLE Deux faits divers ont servi d'alibi à l'extrêmedroite. Au nom de deux incidents meurtriers, c'est en fait tout le racisme anti-arabe qu'on voudrait dédouaner en dénonçant ... le racisme des Arabes. A Charvieu-Chavagnieu, une localité de l'Isère de 8 000 habitants, dont 25 070 d'immigrés, la population est chauffée à blanc depuis le meurtre à la sortie d'un bal du policier municipal Roger Gauthier, le 1 er novembre dernier. Son meurtrier présumé est un jeune ouvrier algérien, natif de la commune, Houari Kebli. Il a depuis déserté son domicile et son travail. Aussitôt, une campagne est mise sur pied, mettant en cause la communauté immigrée, essentiellement maghrébine. Le maire de cette municipalité, Gérard Dezempte (RPR), lance les hostilités par un message adressé à ses concitoyens dans lequel il déclare que « la commune est en deuil, et, les couleurs de la France en berne à Charvieu-Chavagnieu ». L'Union des commerçants appelle la population à assister en masse aux obsèques de la victime. Un rassemblement qui, selon cet appel, ne doit pas se faire seulement en signe de deuil mais aussi « pour mettre l'accent sur le sentiment d'in sécurité actuel ». Le club motocycliste et le Football-club, soutenus par la municipalité, lancent une pétition sur papier à en-tête de la mairie. Celle-ci est adressée au président de la République, lui demandant de « consulter le peuple de France par voie de référendum, sur le rétablissement de la peine de mort », et « d'expulser tout délinquant dès son premier délit, considérant que de nombreux délinquants étrangers sont rédivistes et deviennent parfois criminels ». Ce texte, qui circule chez les commerçants, est immédiatement repris par le Dauphiné libéré et le Figaro-Lyon, qui donnent un large écho à cette campagne, dont les thèmes sont ceux du Front national. Celui-ci s'est d'ailleurs manifesté dès le lendemain du drame. Bruno Gollnich, député FN du Rhône, le département voisin, est monté au créneau pour dénoncer « ce crime raciste an ti-français » et appeler à une manifestation dans les rues de Lyon. Autre affaire, même scénario, cette fois à Compiègne. Un poissonnier du Marché-auxherbes de cette ville a été poignardé le 5 décembre par Moha Outhou, un Marocain de 40 ans, domicilié à Amiens. Une aubaine pour le Front national qui manifestait le 19 décembre à Amiens pour protester contre le vote des im-. migrés. Durant cette manifestation, les élus du FN ont en effet demandé à l'assistance de respecter une minute de silence pour « les victimes du racisme anti-français ». Un slogan a fusé alors de la petite foule : « A Compiègne, ils tuent, à Amiens, ils votent ». Une occasion de plus pour Jean-Pierre Stirbois, numéro deux du FN, de clamer son refrain sur « la France arabisée ». Ces deux affaires n'auraient pas quitté la rubrique des faits divers si elles n'avaient pas été montées en épingle par les promoteurs du « racisme antifrançais ». Une thèse d'un goût douteux. Que les choses soient claires : deux hommes ont tué. Ils doivent être punis et la justice doit suivre son cours. Mais ces faits divers autorisent-ils pour autant à dénoncer toute une communauté ? Quant à parler de « racisme anti-français» meurtrier, il ne s'est jamais trouvé personne pour appeler au pogrom contre les Français de souche. Que l'on sache, les deux hommes tués ne l'ont pas été pour la simple raison qu'ils étaient français. A Nice, deux jeunes Maghrébins, un Algérien de 17 ans et un Tunisien de 21 ans , ont été inculpés le 22 décembre, d'injures à caractère raciste à l'encontre de deux policiers et placés sous mandat de dépôt. Traités de « sales Français », les policiers n'ont pas apprécié. Et ils ont eu raison. On attend simplement que le prochain raciste, qui insultera un immigré, soif lui aussi placé sous mandat de dépôt. RABHA ATTAF DE DETAIL EN DETAIL, LA CARINTHIE La minorité slovène de Carinthie en Autriche n'a pas la mémoire courte. Au besoin on la lui rafraîchit. Estimée à plus de 60000 personnes en 1910, elle est passée à 16 000 dans les années 80. Le trou n'est pas uniquement dû à la dénatalité. Les slovènes ont laissé une bonne partie des leurs dans la germanisation forcée et la répression menée par les Nazis. Mais aussi dans les maquis antinazis dont ils ont été les acteurs les plus farouches. Aujourd'hui, la crise, la version Le Pen locale et une drôle de cohabitation préélectorale sont venues rappeler aux Slovènes leur histoire. La scène se joue en terre autrichienne sur le mode scolaire. A chacun ses aires de racisme ! Au lendemain de la guerre, forts de leur passé héroïque tout frais, les Slovènes se voient reconnaitre leur droit à un enseignement bilingue (slovène-allemand) par les autorités régionales issues de' la Libération. Tout aussitôt, la droite pure et dure, hypergermanophile çt « grande allemande » dénonce cet acquis démocratique comme «anticonstitutionnel ». • DES JOUETS POUR TUER Les géants américains du jouet envahissent l'Europe. Face à la stagnation des chiffres d'affaires de vente des jouets aux Etats-Unis, l'Europe et singul. ièrement la France (3e consommateur mondial) sont devenus les cibles du « category kil/er» concept américain pour désigner les jouets qui doivent «tuer» la concurrence. Laissons ici l'analyse de ce new-marketing aux spécialistes, pour déplorer que ces objets apprennent un peu trop à « tuer pour jouer» à nos petites têtes hexagonales. Musclor et autres affreux jojos maîtres de l'univers devraient être soumis à un traité de démilitarisation ... pour jouer à ne plus jouer à la guéguerre. o Diff.'érences - n° 75 - Février 1988 En 1958, elle remporte une première victoire : les enfants germanophones qui apprenaient les deux langues dans des groupes d'élèves intégrés, . encadrés par des instituteurs bilingues, ne sont plus obligés d'apprendre le slovène. Ce n'est pas encore suffisant: aujourd'hui, un projet qui a reçu l'assentissement des trois principaux partis politiques (socialistes, conservateurs et libéraux de droite) vise à la ségrégation complètement de l'enseignement, puisque les enfants germanophonones et slovénophones formeront des classes totalement séparées. Si l'on sait que cet enseignement bilingue ne touche que 1 000 élèves, que les élections pour le gouvernement régional auront lieu l'année prochaine, on aura saisi la réalité de l'enjeu politique et politicien. Et l'on constate que là aussi un détail en amène un autre. Ce « modèle pédagogique » a été dénoncé par des manifestations de la communauté slovène à Vienne, le Parlement européen et la Commission des droits de l'homme des Nations Unies ont été saisis. 0 Les catalogues de jouets : une vraie panoplie guerrière pour Noël. • KURDES IRANIENS Plus de 5 000 familles, soit près de 30 000 personnes ont été contraintes de fuir villes et villages. Périodiquement, le régime de Khomeiny se livre à des déportations massives des habitants aux frontières de l'Irak . La guerre sur le sol du Kurdistan d'Iran a entraîné des dommages irrémédiables. Un appel à l'aide aux réfugiés a été lancé par l'association culturelle et sociale franco-kurde (AFK, BP 102, 75625 Cedex 13). 0 • MIRAGES A LA LOUPE Autorisée en avril dernier, une organisation des droits de l'homme en Turquie vient de tenir son premier congrès. Les responsables ont constaté une très relative amélioration: il n'y a plus eu d'exécution depuis 1984, mais plus de 100 condamnés attendent leur sort. La torture n'est plus appliquée en prison (ça fait trop de bruit chez Amnesty?), mais continue de sévir au cours des interrogatoires de police. L'assocation a du pain sur la planche dans un pays où la liberté du citoyen s'observe à la loupe. 0 • DOGME OU DISCRIMINATION? L'Arabie-Saoudite interdit l'édification ou l'ouverture de lieux de culte non-musulmans dans tout le pays. Des prêtres sont expulsés, certains emprisonnés pour avoir célébré la messe. L'importation de bibles est interdite, tout comme le port de la croix ou d'images religieuses. Réponse des Saoudiens : Notre pays est considéré par les musulmans du monde comme une mosquée où deux religions ne peuvent coexister. C'est une attitude qui ne s'applique que dans ce pays, infime partie du monde musulman. Peut-on envisager de construire une mosquée dans une église, voire au Vatican? Reste que les 500 000 chrétiens du pays sont transformés en clandestins. 0 FASSBINDER, PRETEXTE POSTHUME Le retrait de l'affiche de la pièce de Fassbinder L'Ordure, la ville et la mort aux Pays-Bas fait des remous. La tension est vite montée entre les partisans de la liberté d'expression, qui crient à la censure, et les Néerlandais, juifs et chrétiens confondus, qui la jugent profondément antisémite. Au-delà du débat proprement dit sur le contenu de la pièce, l'événement a mis à jour une vague d'antisémitisme flagrante : des responsables juifs sont menacés par des coups de téléphone anonymes ou provenant d'un Front fasciste néerlandais, jusque-là inconnu, un acteur juif est enlevé par des militants néonazis, des graffitis et des tracts violemment anti-juifs pullulent à Amsterdam. Tout cela n'est pas, non plus, sans arrière-pensées manipulatrice: l'acteur kidnappé avait monté lui-même son enlèvement ,- Qui a pris le train de qui? Fassbinder apparaÎt comme un prétexte posthume dans un contexte où le ministère de la justice envisage de créer un poste de magistrat chargé des problèmes relevant de l'antisémitisme. 0 • PRIX Le 6e prix des Droits de l'homme La croix-L'Evénement est allé cette année SOSEnfants. Le jury - ou siège Me George Pau-Langevin, présidente du MRAP - a ainsi voulu distinguer le travail de cette petite association (150 membres actifs) en faveur de l'enfance. SOS-Enfants ' intervient dans de très nombreux pays, en Haïti notamment, et reste très active sur le terrain. Un prix bienvenu à la sortie du rapport d'Amnesty International sur les tortures, enlèvements et meurtres d'enfants dans certains pays. Il faut aussi garder à l'esprit que 40 mille enfants meurent chaque jour de malnutrition, manque de soins ou maladies endémiques. Il tt ••• LA OUESTION, C'EST L'INTEGRATION ... Christian Delorme est prêtre. Il est aussi de ceux qui lurent aux origines du mouvement des ieunes de l'immigration. Les expulsions, le mouvement beur, le droit de vote, le code, l'intégration: c'est son état des lieux qu'ils nous présente. plan économique dans la so- vie de celui-ci sous prétexte ciété française. D'où les pro- qu'ils ne voudraient pas chanblèmes de délinquance, de sui- ger de nationalité. C'est tout à cides et de troubles à l'ordre fait légitime que des personnes public. d'origine étrangère tiennent à Si on pose le problème en garder, pour des raisons terme d'intégration économi- symboliques ou autres, leur que, il y aura alors un vrai dé- nationalité d'origine et ne Quel bilan faites-vous de poussé le cardinal Decourtray C. D. : Dans 5 mois, auront succès de la campag'ne de bat et des solutions pourront prennent pas la nationalité l'application de la Loi Pas- - qui est maintenant la pre- lieu les élections présidentiel- France-Plus. être trouvées. Malheureuse- française. Cela dit, ceux qui qua sur l'entrée et le séjour mière autorité de l'Eglise ca- les. Il y a de toute évidence des En fait, ce type de campagne ment, ce débat n'est pas mis ont droit à la double nationades étrangers en France? tholique de France - à inter- changements politiques qui n'est pas seulement du ressort sur la place publique. lité doivent absolument la venir. Cela a dû certainement vont s'opérer. La législation des associations de jeunes issus dL' Al ' . C'h•r., 'st,'an Delo"..".".e .' Ce n'est avoir un impact sur certains sur les étrangers peut, de ce de l'imm'igratIO n ou d e so l1'd a- Que pensez-vous de la pr'enF re. es Jeu.n.es g1e nens que maI. ntenant que l' on peut députés. La Loi Pasqua aurait fait, changer. Mais elle ne peut rité avec les immigrés, mais de «nouvelle citoyenneté» tnreess ene nfraanntcse , da'IéntSrIa nqugee rse s nauésmesurer les dégats causés par pu être pire. Le fait par exem- changer que s'il y a des grou- celui de tous ceux qui ont un :~S:c~:ti~':sn~par certaines eux aussi sur le sol français, cette loi. Lorsqu'elle a été vo- pIe, que les parents d'enfants pes de pression en France qui peu de passion civique et no- donc français à 18 ans, doitée en juin 1986, nous étions f ra n ç ais soi e n t non - sont capables d'intervenir pour tamment les élus municipaux, C. D. : J'aurai tendance à vent absolument accepter cette un petit nombre à penser que expulsables est en partie dû à qu'elle change. Et pour cela, il ainsi que les partis politiques. être un peu méchant par rap- double identité juridique. cette loi constituait un grand ce mouvement. faut dès à présent aller voir les Je crois qu'il y a une prise de port à cela, et à dire que retour en arrière par rapport à hommes politiques suscepti- conscience progressive de la «nouvelle citoyenneté» est Que pensez-vous du droit de ce qui avait été obtenu en En septembre 1986 vous bles de mettre en oeuvre une classe politique et que les jeu- une formule creuse qui masque vote des immigrés aux élec- 1981, et qu'elle allait fragiliser avez appelé publiquement à autre politique de règlementa- nes issus de l'immigration, et une incapacité à faire de vraies tions locales? les communautés immigrées. la constitution de réseaux de tion des étrangers. Je crois particulièrement les Maghré- propositions. Je crois que ce C. D. : Cette revendication Mais il a fallu que les mois solidarité avec les ex- vraiment aujourd'hui qu'il bins, sont en train de devenir thème a été évoqué essentielle- est légitime, mais c'est une s'écoulent pour que les gens, et pulsés? faut préparer l'après 88. une clientèle électorale. ment pour fuir le débat sur la question qui pose de sérieux d'abord les communautés im- La présence de Kaïssa Titous nationalité. Un certain nombre problèmes que j'ai toujours migrées, se rendent compte C. D. : Quand nous avons Cela doit-il passer par l'ins- aux côtés de Pierre Juquin est d'associations issues de l'im- soulevés. A saVO.I r, le n's que d e que cette loi était très dange- lancé cet appe 1 d e constI.tu.tIO n cription des Beurs sur les lis- une bonne chose ainsi que celle migration ou de solidarité avec constI.t uer d es cate,go.ne s d e C.I - reuse pour une partie de leurs de réseaux d'aide au maI.n.tIe nt tes électorales? d'un conseiller issu de l'immi- Christian Delorme les immigrés (comme la toyens différents, d'avoir une membres. En particulier, les ou au retour des jeunes expul- C. D. : Il est évident que plus gration auprès de Raymond FAST!) étaient très mal à l'aise citoyenneté à deux vitesses. Il jeunes que cette loi pénalise en sés, c'était surtout pour attirer il y aura de jeunes issus de Barre. Cela va inévitablement des jeunes qui ont été condam- C. D. : Quand on parle d'in- par rapport à l'acquisition au- ya des gens qui voteraient aux premier lieu, dès lors où elle l'attention sur le fait que les l'immigration qui s'inscriront changer le discours des hom- nés. Cette mesure n'était tégration, on met un peu n'im- tomatique de la nationalité élections locales et d'autres permet leur expulsion de expulsions de jeunes sont illé- sur les listes électorales, plus mes politiques en matière jusque-là pas appliquée. La porte quoi sous ce mot, et sou- française pour les jeunes. aux élections nationales. France pour motif d'ordre pu- gitimes, et que par conséquent on sera en condition de rap- d'immigration. Et ce, d'autant démarche volontaire était aussi vent la dimension culturelle. Pendant de nombreuses an- A-t-on intérêt à avoir une sousblic. leur retour est légitime. port de force. plus vite que les jeunes vote- comprise dans le Code actuel C'est une erreur manifeste, car nées, ces associations ont tenu citoyenneté? La France, ce Nous savions très bien que Théoriquement, je trouve très ront et montreront ainsi qu'ils puisque, pour être reconnu des jeunes issus de l'immigra- le discours du droit à la diffé- n'est pas les Pays-Bas, chaque Quel bilan faites-vous de la nous n'avions pas la capacité bien ce que France-Plus veut sont une clientèle électorale. Français, il faut être allé cher- tion sont totalement intégrés a rence et, au nom de ce droit, pays a sa propre histoire et grève de la faim effectuée de créer un mouvement sanc- faire. Mais j'étais à peu près cher un certificat de nationa- la culture française. Ils ont un celui de faire partie de la com- nous devons en tenir compte. par Djida Tazdaït, Nacer tuaire comme aux Etats-Unis, sûr que l'histoire des charters Dans ce cODtexte, comment lité au tribunal. plus qui est la culture fami- munauté des habitants de Nous risquerions en France de Zaïr et vous-même contre ou comme cela a été tenté en pour les droits civiques ne situez-vous le débat qui s'est La réforme du Code telle liale, de la même façon qu'un France, sans pour autant avoir revenir au schéma colonial, cette loi? Suisse. Parce que ce n'est pas fonctionnerait pas, parce que développé sur le Code de la qu'elle était prévue touchait Juif a un plus avec sa culture la nationalité française. Elles comme en Algérie française où C. D. : L'intérêt de ce geste dans la tradition française, et les jeunes issus de l'immigra- nationalité? principalement les jeunes Por- juive et un protestant un plus ont été un peu piégées par le il y avait des citoyens de statut est qu'il a permis quand même que ce n'est pas facile de ca- tion ne se trouvent pas dans les C. D. : Le débat sur le Code tugais. Alors, en dernière mi- avec sa culture protestante. débat sur le Code de la natio- musulman qui n'avaient pas une certaine présence des jeu- cher ou de prendre chez soi des aéroports. Qu'on aille les re- de la nationalité a une forte nute, les « sages» ont ajouté Le débat sur l'intégration cul- nalité qui était inattendu. les mêmes droits que les autres. nes issus de l'immigration dans gens en situation irrégulière trouver en avion, en train ou charge symbolique. Ce qui est une dernière audition -qui turelle est un débat mensonger. Je crois qu'un certain nombre Il y a ce risque-là auquel on ne le refus de cette loi. C'est vrai pendant des mois et des mois. à vélo ne fait pas une grosse grave, c'est qu'on ait posé la n'avait pas été programmée, On veut nous faire croire que de militants de ces associations pense pas lorsqu'on avance géqu'il y a eu très peu de réac- En revanche, ce que nous sa- différence. question de la légitimité de la puisqu'elle n'a pas été télévisée les jeunes Maghrébins ne peu- ont alors sorti l'idée de la nou- néreusement le droit de vote tions à ce projet quand il a été vions c'est que les jeunes qui Médiatiquement, la mode nationalité française d'un cer- - pour inviter des membres de vent pas être intégrés culturel- velle citoyenneté pour ne pas des immigrés aux élections 10- discuté et voté. Notre action étaient expulsés revenaient Beur est passée, mis à part quel- tain nombre d'habitants de la communauté portugaise. lement à la communauté natio- avoir à se prononcer sur l'in- cales. Cependant des formules n'a pas eu l'écho que nous dé- dans les deux mois et étaient ques articles charitables dans France. Dans ses applications Mais plus pour la forme. nale parce qu'ils appartiennent tégration par la nationalité très différentes de participasirions. Tout simplement parce accueillis par leurs familles. Libération. Si cette campagne pratiques, le projet de loi En fait, la question porte sur à la communauté musulmane; française. tion à la démocratie sont à que entre 1981 et 1986, les mi- Certains d'entre eux se font re- ne mord pas chez les jeunes is- n'était finalement pas très dif- l'intégration des musulmans de laquelle ne pourrait pas négo- L'acquisition de la nationa- trouver. Il ne faut pas en reslitants ou les gens sensibles aux prendre par la police, sont sus de l'immigration, c'est férent de ce qui existe au- nationalité française et tout le cier avec la laïcité de l'Etat lité française est-elle un pas- ter à une conception formelle droits des étrangers se sont dé- condamnés pour infraction à parce que ces derniers ne tien- jourd'hui et surtout n'allait débat sur le Code de la natio- français. sage obligé de l'intégra- de celle-ci, car la démocratie mobilisés. la législation des étrangers et nent pas à ce qu'on les mettent pratiquement pas toucher les nalité avait ça en arrière plan, C'est un débat théorique qui tion? n'est pas seulement l'usage du Aujourd'hui, on assiste tout de sont à nouveau renvoyés. Ce à part des autres jeunes de jeunes Maghrébins, et en tous même si techniquement le pro- ne correspond pas à la réalité. droit de vote. C'est aussi une même à une reconscientisation mouvement de retour des ex- leurs quartiers. A mon avis, le cas, pas les jeunes Algériens jet de réforme ne répondait Le vrai problème, dont on ne C. D. : Non, mais c'est le che- participation de tous les jours des gens ainsi qu'à un regrou- pulsés va aller en s'amplifiant travail à faire est plus un tra- qui sont la principale compo- pas à cette question. parle pas, c'est celui de l'inté- min le plus court. Les gens qui à la vie de la cité. Malheureupement de militants de diver- au fur et à mesure que les ex- vail global - sur les banlieues, sante de cette communauté de gration économique. Au- sont en France depuis long- sement, la majorité des cises organisations contre l'ap- pulsions vont s'accélérer. les lycées, les collèges d'invita- jeunes. N'est-iljustement pas aber- jourd'hui, les jeunes issus de temps, et y vivent, font pleine- toyens se contentent de mettre plication de cette loi. tion à s'inscrire sur les listes La loi telle qu'elle est au- rant de parler aujourd'hui l'immigration et surtout les ment partie des habitants de ce un bulletin dans l'urne. D • En tout état de cause, la grève Les mois à venir peuvent-ils électorales. C'est comme ça jourd'hui permet déjà de refu- d'intégration pour des jeu- jeunes Maghrébins sont majo- pays. On n'a pas à leur refu- Propos recueillis par • ' Ld~e~la::f::ai~m~d::e~D~J~ï:::d:a..:e:t..:.N.::a:c::e::r..:a~..:mo:d:itï:.'::er:....:/e:s::....:c:.::h::o:s::e:s..,:?:...-__- -q:..::u:.:e.-.:....j'.:.a:::n:::a::;ly:...:s-e-le-m-a_n_q.:,u_e_d_e_ _s_ e_r_l_a_n_a_t_io_n_a_l_it_é_f_r_a_n.:,ça_i_s_e_à_ _. _--::n_e-::s:-is_s_u_S_d_e_'_'_im_m---:ig::..,ra_t,_·o_n ?_ _r_i t_a_ir....:e_m_e:...n....:t.:.m:.:..a.:..:.r~g::.:.in:.:..a.:..:.l:::is:...:é.:.s.:.s..:.u:...r:...le~.:.s..:..er---.:la-.:.p...:le...:in..:..e.:....:.p...:a:...rt:.:.ic.:.:i!.p...:a_ti.:.o_n_à..:....:..:la~ _______ R:..::I1:..::B:.:H..:I1.:....:..:A..:...T:..:TA..:F_1 Différences - n° 75 - Février 1988 Gaza et Cisjordanie UN PEUPLE ETOUFFE •... La révolte des pierres déclenchée à Gaza par les Palestiniens repose les lIuestions fondamentales du conl/it israëlopalestinien. Sans généralisation abusive, sans exclusive réductrice, Différences est allé aux sources. Le directeur-adjoint du bureau de l'DLP à Paris livre lIuelllues éléments d'analyse. Arié Shapir, représentant du MAPAM, membre du mouvement La Paix Maintenant dit son amertume et montre le blocage des forces politillues israéliennes devant une situation explosive. J. -P. Chagnollaud, (1) de retour d'une mission d'information à Gaza, démontre, en universitaire, l'urgence du dialogue et de la paix (2). Dans le quartier musulman de Jérusalem On pouvait encore se Au fil des années, le monde demander avant le les a oubliés, tandis que mois de décembre si l ' E g y pte as sur ait Gaza, était une ville, un l'administration de ce territoire, un lieu -dit. territoire.Lesréfugiésdel948 Aujourd'hui on sait que c'est ont eu des enfants qui ont une bande de terre et de sable donc' grandi dans les camps ; qui longe la Méditerranée dans ce fut la première génération le sud d'Israël. Sur cette née dans l'exil. surface pauvre vit une En juin 1967, la situation population très nombreuse: s'aggrave brutalement: Gaza (1) Auteur du livre Israël et les 650 000 personnes en 1987 et se retrouve sous occupation territoires occupés, éd. de probablement un million vers israélienne. 20 ans plus tard, L'Harmattan. l'an 2000. Deux tiers de cette rien n'a changé. L'occupant (2) Voir notre reportage, Vingt ans enfants sont nés sous cette occupation: ils ont aujourd'hui 16, 18 ou 20 ans. Ils n'ont rien connu d'autre. Et tout ce qu'ils savent de leur pays d'origine, c'est ce que leurs grands-parents ont raconté. Ils sont les petits enfants des réfugiés de 1948. Ce sont ces adolescents qui sont au coeur de la révolte déclenchée au début du mois de décembre 1987, et qui continue encore en ce début d'année 1988. Ils se sont levés spontanément pour protester contre l'insupportable situation qu'ils subissent depuis toujours. Cette situation, on peut la présenter sommairement de la manière suivante : 1. L'omniprésence multiforme de l'armée d'occupation. Visuellement, ce sont les patrouilles à pied ou dans les' jeeps et les contrôles constants et systématiques. Plus profondément, la population palestinienne subit une législation d'essence militaire. Les ordonnances militaires édictées par le gouvernement israélien régissent la vie quotidienne à Gaza comme en Cisjordanie. 2. L'installation des colons israéliens: ils ne sont pas nombreux, 2 000 ou un peu plus ; mais ils aGcaparent une importante partie des terres cultivables. Ils se déplacent toujours en armes, ce qui accroît encore la tension. 3. L'absence de débouchés économiques . Gaza (le territoire comme la ville) a toujours eu des activités tournées vers la mer. La pêche a été considérablement réduite par les Israëliens qui réglementent sévèrement les sorties en mer. L'agriculture traditionnelle est • elle aussi étouffée par les fortes d'occupation, Différences nO 68.69, population est constituée de est toujours là. Et une fois

l~ju_in_.~ju_i1_le_t_19_8_7._ _____________~ re~'f_u~g~ié~s_d_e _1_ 94_8_. __________en _c_o_r_e_le m_ o_n_d_e_a_o_u_b_l_ié_._D_e_s_ _______________________~

restrictions à l'exportation des oranges et des citrons de Gaza. De nombreux Palestiniens de Gaza sont réduits à aller tous les jours travailler en Israël où ils n'ont d'ailleurs pas le droit de rester pour la nuit... En un mot, la situation est sans avenir sur le plan économique, politique et social. Les événements actuels sont l'expression de cette impasse. Le mouvement est parti de Gaza mais, de proche en proche, tous les segments de la société palestinienne ont été touchés. Ils expriment quelque chose d'essentiel et de profond: la volonté palestinienne de pouvoir exercer librement son droit à l'autodétermination. Trraduction Le paradoxe, apparent, c'est que ces jeunes ne sont pas politisés : ce ne sont pas eux qui peuvent donner une traduction politique à leur élan. Et c'est aujourd'hui toute la question : comment traduire ce mouvement sur le plan politique? En Israël, certains ont parfaitement conscience de l'enjeu. Ils savent l'urgence de J'enclenchement d'un processus de politique de paix mais , pour l'instant, le discours dominant n'est pas celui-là : ce sont les tenants d'une ligne dure et intransigeante qui se font le mieux entendre. La communauté internationale a un rôle décisif à Jouer: qu'il s'agisse des Nations Unies, des grandes puissances, ou de l'Europe. En ce moment particulièrement douloureux où des prises de conscience peuvent se faire, la communauté internationale doit prendre des initiatives politiques afin d'aider les Palestiniens et les Israéliens à se rapprocher un peu, et à entamer un dialogue. Il est urgent qu'ils puissent se parler et réfléchir à une solution politique globale, sinon ce conflit risque de s'enfoncer davantage dans l'incompréhension et le drame. D JEAN·PAUL CHAGNOLLAUO Différences - n° 75 - Février 1988 Ahmad Abdelrazek, de l'OLP : « Une machine répressive sans précédent» Différences : Les manifesta· tions qui se sont déroulées à Gaza et en Cisjordanie ont· elles été provoquées par des mesures particulières ? Ahmad Abdelrazek : Quand une population vit sous l'occu· pation depuis vingt ans, elle n'attend pas de raisons particulières pour exploser. La violence de la répression actuelle est inédite, mais la répression est quotidienne. Il y a en permanence des emprisonnements, des expulsions, une mainmise sur les habitants. La machine répressive déployée par Israël en ce moment n'a pas de précédent. - La solidarité des Palestiniens Israéliens a été massive. Pourtant les réalités de vie sont différentes. A. A. : On a toujours essayé de dire que les Palestiniens d'Israël, les habitants de Gaza et de Cisjordanie et les réfugiés étaient trois catégories différentes. On oublie simplement qu'ils appartiennent au même peuple d'avant l'invasion sioniste. Il est normal que les Palestiniens d'Israël soient solidaires de leurs frères. De plus, la discrimination existe aussi à l'intérieur d'Israël où les Palestiniens sont traités comme des citoyens de seconde ou troisième zone. - L'engrenage de la violence induit l'éloignement d'une solution pacifique au conflit, et notamment l'idée d'une conférence internationale. A. A. : On ne peut pas mettre sur un plan d'égalité la responsabilité des occupants et celle des occupés. L'OLP a proposé plusieurs projets de solution pacifique, le dernier en date étant la réunion d'une conférence internationale sous l'égide du Conseil de sécurité de l'ONU, avec la participation de toutes les parties concernées. Cette proposition a été rejetée par les Israéliens. L'OLP a autorisé les rencon- Arié Shapir, du MAPAM : « La solution ne peut être militaire» - Comment analysez-vous l'explosion de violence qui s'est manifestée à Gaza et dans les territoires occupés ? Arié Shapir : Nous avons été surpris par les modalités, la forme et l'ampleur des manifestations. Mais le phénomène en lui-même n'est pas surprenant. C'est le fruit de vingt ans de statu quo et d'immobilisme. Jusqu'à la dernière période, on parlait de perspectives et notamment de la Conférence internationale. Mais le Premier ministre Shamir a tout bloqué. Dépourvus de souveraineté nationale, subissant un régime militaire dicté par Israël, les Palestiniens n'acceptent pas la situation actuelle. - La solidarité des Palestiniens d'Israël s'est concrétisée d'une manière évidente. Quelle a été la réaction de l'opinion israélienne? A. S. : Toutes les agglomérations arabes ont suivi pacifiquement le mot d'ordre de grève lancé par le Comité des maires et élus municipaux arabes. Les rares débordements qui ont eu lieu ont été gonflés par la droite israélienne, dans le but de discréditer cette action en n'en montrant que les excès. On réédite là ce qu'on a trop souvent fait aux juifs : généraliser, culpabiliser en bloc. Les Palestiniens citoyens d'Israël auraient pu être les intermédiaires entre les deux communautés, un pont d'humanité. Mais la guerre a faussé les choses, créé des déchirements et des susceptibilités, produit des inégalités. - Quelles sont les perspectives de dialogue après ce « décembre noir» des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie? A. S. : La solution, tout le monde le sait, ne peut être militaire. Mais plusieurs facteurs rendent à mon avis difficile un aboutissement dans le court terme. Les Etats-Unis et Israël entrent dans une période électorale, ce qui va geler toute tres avec les forces démocratiques et progressistes israéliennes qui reconnaissent le droit à l'autodétermination du peuple palestinien. La Knesset refuse aux Israéliens de rencontrer des membres de l'OLP ... - Les derniers événements ont projeté au devant de la scène sociale et politique la jeunesse palestinienne. Comment expliquez-vous cette émergence? A. A. : Ces jeunes qui lancent des pierres sur l'armée israélienne sont nés sous l'occupation

leurs aînés sont humiliés

tous les jours sous leurs yeux, fouillés dans les transports, sans travail, ou avec des salaires inférieurs à ceux des Israéliens, privés du droit de cultiver la terre. Ces jeunes se demandent pourquoi ils sont traités ainsi. Ils refusent la perspective de se trouver plus tard dans la même situation que leurs parents aujourd'hui. Alors ... prise de décision. La répression risque de se durcir. - Le mouvement de la paix n'a pas eu le même écho que lors de l'invasion israélienne au Liban en 1982. Pourquoi? A. S. : De nombreux Israéliens en prennent conscience. Des avocats, des journalistes, des enseignants n'acceptent pas l'application discriminatoire de la loi à l'encontre des jeunes Palestiniens. On se rend compte en Israël que l'armée, censée défendre la sécurité, se pare aujourd'hui- d'une autre fonction, la répression des manifestants. Il y a une autre réalité sociologique dont il faut tenir compte : les jeunes Israéliens n'ont connu que le Grand Israël, qui est pour eux un fait. Cette génération adopte plus facilement que la précédente des réponses simplistes et dangereuses du style: « Ils n'ont qu'à s'en aller », qui dérivent très vite en : « On va les aider à s'en aller. » .. Code de la nationalité Le rejet de l'exclusion Les cc sages » de la Commission ont rendu leur copie. Surprise, la réflexion engagée dans un climat restrictif a accouché d'un rapport plutôt ouvert. Mais les décisions seront prises ailleurs et plus tard. La Commission de la nationalité a remis au Premier ministre, le 7 janvier dernier, son volumineux rapport intitulé « Etre Français, aujourd'hui et demain ». Devant l'édifice complexe (180 textes et 12 conventions internationales ou bilatérales) du code actuel, les « sages» ont opté pour un certain bon sens. A la logique de l'exclusion du projet de réforme p'roposé par Albin Chalandon, ils ont en effet préféré celle de l'intégration. Une logique que le constat de la réalité imposait. En utilisant des procédures d'investigation rationnelles empruntées plutôt au monde universitaire qu'aux pratiques de la politique, la commission des « sages » a donné une chance à la réalité un peu oubliée de millions d'hommes, de femmes et d'enfants. Le maître mot de ce rapport : consensus. Toutes les propositions, sauf une, ont en effet été adoptées à l' unanimité. Le tout fondé sur trois principes : jusqu'à 19 ans. Pas question d'imposer une nationalité à quelqu'un contre son gré. De même, les jeunes nés en France de parents étrangers et y résidant depuis au moins cinq ans (art. 44 du code actuel) pourront opter pour l'acquisition grâce à « une déclaration individuelle, personnelle et simplifiée ». Le mineur n'aura besoin d'aucune autorisation parentale, mais l'automaticité de la naturalisation est exclue. L'administration aurait des pouvoirs restreints. Aucun refus ne pourrait être opposé à des jeunes de 16 à 18 ans. Le refus de la nationalité à un jeune de 18 à 21 ans ne saurait « La politique de nationalité peut et doit jouer un rôle décisif dans le processus d'intégration (. . .) mais elle n'est pas une garantie d'intégration ». En- ::: suite, « identité nationale et in- ~ tégration doivent être corré- ~ lées : l'intégration sera d'au- ~ tant plus aisée que la ~ conscience de l'identité fran- ~ çaise sera plus forte ». Enfin, r..I ; « la Commission a situé ses ~ ressé, notamment à l'occasion de démarches administratives à la mairie, à la préfecture ou au tribunal, ainsi que lors du recensement pour le service national. Dans tous les autres cas que ceux indiqués ci-dessus, le candidat à la nationalité française pourra se la voir refusée s'il a été condamné à une peine de six mois fermes, ou s'il a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion. Un point qui mécontente tous ceux qui ont combattu le projet Chalandon. De même, pour l'acquisition de la nationalité par le mariage, la Commission est plus restrictive que le code actuel et travaux dans la conception 7 janvier 88 Marceau Long remet son rapport élective de la nation selon laquelle une nation est constituée par la volonté et le consentement libre des individus ». Dès lors, la Commission des « sages» ne pouvait que rejeter toute acquisition automatique de la nationalité française. Ainsi, maintient-elle le double droit du sol (art. 23 du code actuel), tout en étendant la possibilité de répudiation être motivé que par des condamnations précises (terrorisme, trafic de stupéfiants ... ) ou s'il a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion «en raison de comportement constituant une menace pour l'ordre public ». A cela s'ajoutent des mesures d 'accompagnement dont l'objectif est de multiplier les occasions de décision de l'intés'est montrée sensible aux arguments développés par le ministère de l'Intérieur sur les mariages blancs. Il faudra un an de vie commune (6 mois aujourd'hui), sauf en cas de naissance d'un enfant. Mais le parquet pourra saisir les tribunaux judiciaires pour s'y opposer en cas de défaut, de cessation de communauté de vie ou s'il apparaît que le conjoint « s'est livré à des actes préjudiciables aux intérêts de la France ». La Commission, sur un autre point chaud, a demandé la renégociation de certaines conventions bilatérales (Israël et Algérie), pour un service militaire effectué sur le lieu de résidence. Ce rapport, dont les conclusions tranchent avec l'esprit qui présida à la mise en place de la Commission des « sages » n'a, bien sûr, pas vocation de projet de loi. Les décisions en la matière restent entre les mains des hommes politiques. Le président, M. Marceau Long, a cependant estimé que l'ensemble des propositions constituait « une réponse sereine » à un problème qui a fait « l'objet d'un débat passionné ». Il a exprimé aussi le sentiment que ce rapport ne serait pas enterré. « Si c'était le cas, ce serait un enterrement en grandes pompes car le rapport sera édité en livre de poche. » Le sort réservé au rapport Hannoun laisse tout de même quelques inquiétudes. 0 RABHA ATTAF LE MRAP ET LE RAPPORT DES cc SAGES » Après la publication du rapport de la Commission de la nationalité, le MRAP « relève que ce texte accorde aux jeunes de 16 à 21 ans, nés de parents étrangers sur le sol français, la reconnaissance légitime de leur nationalité française ». Le MRAP refuse cependant les « restrictions apportées à l'accession à la nationalité française par déclaration pour les enfants mineurs, les conjoints de Français, et par extension pour les enfants de parents devenus français ». 0 .En France l'antisémitisme clas~ siquees! en régression, mais la perception du Juif demeure celle d'un « autre », « diffé~ relit », voire « inconnu». Telle est la conclusion d~un sondage réalisé par la SOFRES pour le compte de Tribune ';Juive et Radio J. .." Les stéréotypes archaiquèsd;u

cosmopolitisme financiéront

fhangé au profit denotio~s vé~ cues comme plus laudatrices : ainsi, les juifs apparaissent comme« débrouU!ards », « intelligents» .et '« aimallt l'argent ». Si à 9 1 % les sondés attribuent aux juifs d'être attachés .à la tradition, ils considèrent · à 70 .0/0 que cette communauté ~st sensible à toutes les injustices ». Néanmoins, le noyau dur du stéréotype antisémite est beau- • USURPATION EXTREME D'IDENTITE Les JALB (jeunes arabes de Lyon et de la banlieue) et l'agence [m'Média ont porté plainte pour usurpation d'identité. Un tract en forme de déclaration de guerre raciste, anti-française et haineuse, portant faussement les signatures des deux associations, a été distribué dans les boîtes aux lettres des 14e et 15e arrondissements de Paris. Un dessin représentant une Alsacienne «tchadorisée» accompagnait le texte intitulé « France Demain ». La Une d'un certain numéro du FigMag semble donner des idées aux manipulateurs les plus extrêmes . 0 Coup plus fort.da~s les classes d;'âge les plus élevées .et chez certaines catégories sociales-': artisans, commerçants, indus, triels. Un autre phénomène beau~ coup plus inquiétant a été con"') firmé ou révélé par le rapport .Hannoun : la (re)naissa.nce de": puis une dizaine d'année d'une «petite délinquanCeantisé ... mite ». Ce constat est appuyé par un autre sondage de l'Evénement du jeudi publié en octobre der.! nier), dans lequel il . apparaît que « l'antipathie à l'égarddes, Juifs est plus forte que . ./a moyenne chez les moins de vingt-cinq ans ». Innovatio~ inquiétante nourrie, entre au~ tres, par les thèses révisionnisJ• tes . diffusées prioritairement, par voie de tracts, dans le tnilieu scolaire. 0 Yeiwéné Yeiwéné. • JUSTICES EN TELESCOPAGE • MARTINIQUAIS FAUX-FILS D'EMPIRE Un Martiniquais sous les drapeaux qui refuse d'entonner le Chant des Africains, c'est pas franchement de la subversion. L'hymne du corps expéditionnaire français n'a rien pour lui sur le plan mélodique et le refrain pêche par anachronisme aigü . Ce même Martiniquais refuse de prendre connaissance d'un document concernant le « secret-défense». Voilà une attitude franchement honnête de la part d'un sympathisant indépendantiste. Mais les choses se gâtent très vite. Réformé « pour raisons psychiatriques », Manuel est incarcéré pour« refus d'obéissance » et les tribunaux multiplient erreurs, bourdes, légèreté dans le traitement du dossier. Le Parquet parisien a même reconnu de lui-même que Manuel avait été détenu illégalement durant 4 mois. Il attend toujours d'être jugé. Les histoires d'empire, ça n'en finit jamais de stagner dans les mêmes refrains .. . les pires. 0 • KAFKA ET PASQUA Il y avait le code, il y avait la Loi de 1986, voici la bureaucratrie. Un nouvel obstacle sur le parcours du combattant Quelques heures après l'arres- pour la nationalité française. tation du numéro deux du La Sous-direction de la natuFLNKS, Yeiwéné, ordonnée ralisation du ministère des Afpar un juge d'instruction que faires sociales vient de démél'on dit proche du Front natio- nager de Paris à ... Rezé, près nal, le Parquet de Nouméa fait de Nantes. Décentralisation appel. Le risque était trop gros oblige. Bon. de faire ressurgir l'image d'une Mais au passage, le personnel justice à deux vitesses qui ac- a fondu. Il faudrait cent trente • L'HORREUR quitte des meurtriers et empri- personnes, il n'yen a plus ET LA MEMOIRE sonne pour délits verbaux. qu'une centaine. Bilan de !'af-, D'autant que ce type de délit faire: trente mille dossiers en Un meurtrier vient d'être jugé est loin d'être l'apanage des in- attente (un an de travail). à Paris pour un crime commis dépendantistes. Jacques La- Ce n'est que du papier, direz en 1984. Il avait égorgé à fleur s'est même permis de se vous, c'est aussi des centaines coups de cutter un gardien de féliciter de cette incarcération de personnes attendant une la paix dans un car de police qui« aiderait M. Yeiwéné à ré- carte d'identité dont le prin- REVUErS) Euskadi information, dans sa livraison de décembre: retour sur les rafles d'octobre au Pays basque, Au sommaire également, des témoignages d'expulsés et les promotions de policiers espagnols tortionnaires ... (Ekin E. ,. BP 19364104 Bayonne cedex). Bwenando - le premier journal de Kanaky - dénonce dans son numéro 98, le scandale de l'ADRAF (35 millions détournés). Beaucoup d'infos sur la répression en NouvelleCalédonie (Bwenando BP 1671 Nouméa). Réflex n° 12 présente un dossier sur Intégration, égalité et Citoyenneté, 14, rue de Nanteuil, 75015 Paris. Hommes et Migrations de décembre est consacré aux étudiants étrangers en France. Lacouture, julien Green, Sebastiao Carvalho et André Lebon (entre autres..) sont au sommaire, 40, rue de la Duée, 75020 Paris. Celsius nO 3 ; Les hooligans, les contras et l'affaire du lycée d'Aix, La revue est spécialisée dans l'étude de l'extrême droite, Montrant, BP 284, 75228 Paris cedex 05. Révolution Africaine vient de sortir un dossier sur L'Islam dans l'idéologie du FLN algérien. A voir également le numéro du Il décembre consacré à Frantz Fanon, 15, place de l'Emir- -Abdelkhader, Alger, et également en kiosque, Tribune Juive a fêté récemment son millième numéro. Bravo f Au sommaire Elie Wiesel, Begin parlant de Sadate et un sondage sur l'image des juifs dans l'opinion publique française. Vivant, c'est le beau nom d'un nouveau presque quotidien (trois numéros par semaine), diffusé par abonnement. Situé dans la mouvance alternative, il se veut un lieu pluriel et de convergence. A suivre, 600 F par an. 8, rue du Bois-d 'A vron, 93360 Neuilly-Plaisance, qui l'emmenait, agité, à l'infir- fléchir pour la prochaine cipe leur est acquis. Les délais Ça m'intéresse de janvier: merie psychiatrique de lq pré- fois ». Lafleur devrait tourner tombent et certains de ces ci- quatre pages sur Les vraies fecture de police. sa langue sept fois dans sa toyens se retrouvent alors en questions de l'immigration, Des Diagnostic des médecins: cet bouche avant de l'ouvrir en situation irrégulière : expulsa- questions, il n'yen a que cinq, mais importantes. Et les ex-déporté en Allemagne nazie public. Yeiwéné a été libéré sur bles! réponses sont chiffrées et sans avait confondu le fourgon et le décision du parquet de Nou- Kafka d'un côté, Pasqua à démagogie. (En kiosque, III train de l'enfer. 0 méa. 0 l'autre bout. 0 19 F) 0 _ ~D~i1fo~e~'r-en-c-e-s---n~o~7Charles-~F.~é~vr~oe-r-l~9~8~8~------------------------------------------------------~----------------~ Les Clees /laienl la fêle Mi-février, la presse du monde entier a rendez-vous à Calgary pour les Jeux Olympiques. Mais ces jeux de la paix et de la fraternité sportive se feront sur le dos des Indiens. Les Indiens Crees du Lubicon Lake qui vivent à Little Buffalo dans le nord de l'Alberta, au Canada, mènent leur dernier combat. Cette "bande" de 400 individus isolés dans leur petit village de bungalows et de cabanes en rondins ont mené le boycott des jeux Olympiques d'hiver de Calgary et du principal événement culturel qui devait l'accompagner. Ils ont voulu ainsi attirer l'attention de l'opinion publique sur un fait historique qui a fait d'eux des squatters sur leurs propres terres ancestrales, les témoins impuissants de la destruction par les compagnies pétrolières de leurs terrains de chasse et de trappe. Ils ont perdu leurs moyens d'existence et même leur santé. Leur territoire était si isolé que les agents des Affaires Indiennes les oublièrent complètement lorsqu'ils signèrent le Traité-8 avec les "bandes" du nord de l'Alberta en 1899. Ce ne fut qu'en 1939 qu'Ottawa envoya spécialement un agent pour recenser les membres de la tribu. On leur promit alors une réserve où ils seraient souverains. Puis, la guerre survint fort opà traquer les écureuils! L'économie traditionnelle des Crees est détruite. Dans un rapport de 1983, le Conseil mondial des Eglises parlait de « conséquences génocidaires ». Depuis 1979, le revenu familial de la trappe est tombé de 5 000 dollars par an à environ 400 aujourd'hui. De plus, les Indiens ne peuvent pas travailler dans les exploitations pétrolières, la plupart ne sachant ni lire, ni écrire, ni même parler l'anglais. Et ce peuple, qui était encore virtuellement auto-suffisant il y a seulement 7 ans, dépend aujourd'hui à 95 070 du welfare, l'aide publique. responsabilités. On dort à quatre par chambre, il n'y a pas l'eau courante, l'hygiène est insuffisante. Spirituel sponsorisé Depuis plus d'un an, sous la direction de leur chef, Bernard Ominayak, les Indiens mènent le boycott des jeux Olympiques d'hiver à Calgary, ainsi que d'une manifestation culturelle qui lui est associée : le Spirit Sings, une exposition d'art traditionnel des Indiens, au musée Glenbow de Calgary. Ces boycotts sont amplement justifiés par le fait que le Spirit Sings est sponsorisé par Une campagne de boycott aux racines indiennes. portunément et les Crees du Comme si toute cette misère la Shell Canada, celle-là même Lubicon furent à nouveau ou- n'était pas suffisante, une épi- qui a détruit la communauté bliés. Depuis plus de 40 ans, démie de tuberculose s'est du Lubicon Lake. les Indiens ont essayé vaine- abattue sur la "bande" du Lu- Tandis que le président du Coment d'obtenir d'Ottawa bicon l'été dernier et un habi- mité d'organisation des jeux qu'un traité soit signé pour tant sur quatre de Little Buf- est le P-DG de la Turbo Oil, matérialiser cette promesse falo est atteint par la maladie. l'une des sociétés qui forent d'attribution d'une réserve. Les défenses immunitaires des près du Lubicon ... Les Indiens En 1979, ce fut l'invasion . Indiens étaient trop faibles ont lancé un appel à tous les Onze compagnies pétrolifères pour résister au bacille, à cause musées d'Histoire naturelle et commencèrent l'exploitation du changement de régime ali- d'Ethnologie du monde pour d'une nappe souterraine sous mentaire dû aux nouvelles con- qu'ils refusent de prêter des le territoire des Indiens. Les ditions de vie qui ont amené pièces pour cette exposition. bulldozers ont abattu les ar- une carence en protéines et en Près de trente musées des bres de la forêt, tuant ou fai- vitamince C. A cause des re- Etats-Unis, de RFA, de pièces de leurs collections. Le Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, lui, a répondu favorablement à la demande du musée Glenbow, malgré les interventions de nombreuses personnalités et organistions, dont le MRAP. Mais le Spirit Sings est condamné. On a aussi poussé l'audace jusqu'à faire figurer un profil d'Indien sur le face de la médaille qui sera remise aux lauréats! Supporter européens Les Indiens des autres régions du Canada se sont déclarés solidaires du boycott. A Montréal, Toronto, Prince Albert, Winnipeg, Saskatoon, entre autres villes, ils ont manifesté sur le passage de la flamme olympique en route pour Calgary. Ralph Klein, le maire de Calgary, a effectué une tournée européenne pour promouvoir « ses» jeux d'hiver. Il s'est heurté partout aux supporters européens du Lubicon Lake qui l'ont interpellé lors de ses conférences de presse et dénoncé le génocide des Indiens du Lubican par le gouvernement canadien et le Spirit Sings. L'affrontement fut particulièrement vif à Paris, à l'ambassade du Canada, le 10 novem bre 1987. Cette campagne de boycott des Crees du Lubican Lake a contraint le gouvernement canadien et celui de l'Alberta à commencer de négocier avec les Indiens l'attribution d'une réserve située hors des champs de pétrole. Même s'il n'y a pas eu encore de résultat positif parce que les conditions proposées par le gouvernement sont encore inacceptables pour les Indiens, cela montre néanmoins que l'action des Indiens et de leurs supporters a été efficace. Il faut donc maintenir la pression. . sant fuir le gibier. Les originals groupements à Little Buffalo, Grande-Bretagne, des PaysII! I (élans) se sont raréfiés au point les mauvaises conditions de vie Bas, de Suède, du Danemark, liI~q~u~e~les~In~d~i~e~n~s~en~s~o~n~t~re~'d~ui~ts~~a~c~tu~elle~s~p~o~rte~n~t~auss~i~le~u~rs~~e~tc~._o~n~t~re~f~u~s~é_d~e_f_o~u_r_n_ir_ d_ es ________________R_O _B_E_R_T_P_~_C~ Les statistiques du ministère de "Intérieur sont tombés et ça fait comme un bruit dé couperet. 70 000 personnésse sont vu refuser l'entrée de la douce · France entre octobre 1986 et octobre 1987. C'est . Sur les chiffres précédents, une augmentation de 59%. .. Les expulsions ont été de 16783 (+ 122 %) et 1383 autres, pour « menace à J'ordre public », doivent y être ajoutées. « L'urgence absolue» (sans recours possible) a été utilisée 244 fois: + 197 %. Au totatpour • BUT Si le ballon rond vous donne des boutons, si le karaté est pour vous un truc de loubards analphabètes, vous avez tout faux. Ce sont des sports. Elémentaire, Le meilleur footballeur européen de l'année, Ruud Gullit vient de dédier le Ballon d'Or qui récompensait sa suberbe saison au leader anti-apartheid Nelson Mandela. Le champion du monde de karaté, Emmanuel Pinda en a été tout retourné: «C'est évidemment très bien, j'aurais 52 252 expulsions et réfus d'entrée en 1985, on est passé à 88166 en 1987(+ 68 %). Cela fait 240 expulsions chaque jour, dimanche compris! La situation des étrangers, déjà difficile avant mars 1986 s'est donc . considérablement agravée depuis. La répression antiimmigrée s'est développée. largement grâce à la foi de septembre 1986. Et vous verrez qu'il s'en trouvera pour e.n faire un argument positif aux élections. 0 aimé faire la même chose ... Mais, pour ma part, avec plusieurs sportifs, nous voulons sensibiliser les gens sur les problèmes de l'apartheid et il est fort possible que bientôt nous menions une action dans ce sens ». Décerner des bons points serait condescendant, mais admettons avec plaisir que certaines fédérations sportives (rugby, Formule 1 et tennis) viennent de se prendre un des plus jolis buts de la saison, Après moult cartons rouge. 0 • AU SECRET Le chercheur israëlien Mordéchai Vaanunu a été kidnappé en septembre 1986 par les services secrets de son propre pays. Il avait donné à la presse anglaise des informations sur la puissance nucléaire d'Israël. , Pour lui, le danger des armes • nucléaires est tel que les ci. toyens israëliens et le monde ne , pouvaient l'ignorer. Il est aujourd'hui en prison, au secret le plus total, dans une cellule spéciale ou la lumière reste allumée en permanence et ou une caméra le filme sans arrêt. Dans une conférence de presse tenue voici quelques jours à Paris, ses amis et sa famille ont dénoncé ce scandale et fait état de leur inquiétude quant à l'avenir de Mordéchai. Le procès a lieu à huis-clos, sous accusation «d'aide à l'ennemi en temps de guerre ». Quelle guerre? La seule « faute» de ce chercheur est d'avoir dit ouvertement ce que tout le monde savait : Israël travaille à devenir une puissance nucléaire. Une de plus, quand les deux super-grands négocient pour réduire les arsenaux existants. 0 MASSACRE. Selon l'Union nationale pour la démocratie aux Comores, les exactions du président Ahmed Abdallah et de ses troupes auraient fait au moins dix-sept morts depuis le 30 novembre dernier. Selon l'UNDC, la garde présidentielle livrerait le corps de ses victimes dans des sacs poubelles, les enterrerait en cachette et ferait disparaÎtre les opposants. Les arrestations se chiffrent par centaines. DIFFERENCES Z Intervention du MRAP sur la situation du Carrefour de la différence (l, pssage du Bureau, 75011 Paris). Le centre culturel est suspendu d'activités à cause des travaux de la ZAC Dorian. Le propriétaire des locaux se découvre des appétits et tente d'expulser l'association de ses meubles pour relouer plus cher. Un Carrefour de la différence qui fait se croiser les cultures, qu'est-ce que cela pèse devant les promoteurs? La mairie de Paris est saisie. AU FOU 1 Le directeur de l'Union pour la défense de la santé mentale (UDSM) a fait récemment connaÎtre une offre de logement à la condition I--------------------------------------------------------------------i « d'être Français de race • SUCCES Dans le courrier de Différences, une bonne nouvelle côté expulsions, Deux lignes sur un télégramme pour annonccer la libération de Hassan Benkaci et les remerciements de sa famille. Fin de cauchemar égaIement pour Salem Amran. Sa mère a en effet reçu l'assurance de la préfecture de Bobigny que son fils ne serait pas expulsé et que sa situation se- A LOUER L'agence lm 'Média vient de sortir un film vidéo de 52 minutes. Fabrikons français est d'actualité puisqu'il traite du Code de la nationalité, des expulsions, de la citoyenneté, de l'intégration ... bref de tout ce qui fait actuellement question. La cassette, disponible en location peut efficacement introduire un débat. Avis à tous. Agence Im'média, 38, rue des Maronites, 75020 Paris (tél. : 46.36.01.45). Différences - n° 75 - Février 1988 rait réglée sous 48 h. Salem refusait de quitter le territoire français et avait donc prix le risque de vivre en situation clandestine. Sa famille et ses amis l'hébeergeaient à tour de rôle et Saint-Ouen (cf. Différences, décembre 1987). Dans le même temps, la situation de Zohra une jeune algérienne de Noisy-le-Sec, elle aussi menacée de reconduite à la frontière, a trouvé une issue heureuse. Comme Salem, elle avait refusé de quitter la France. La section du MRAP de Noisy-le-Sec avait donc pris son cas en charge et avait multiplié les pressions sur le préfet de Seine-Saint-Denis. Rien n'est cependant acquis et ces succès partiels ne doivent pas faire oublier que partout les expulsions continuent. 0 blanche ». Tel que 1 Plus encore, selon la note diffusée, c'est la SEMIREP (HLM dépendant de la Ville de Paris) qui pose cette condition. Cela devient du racisme institutionnel. Le directeur-publiciste affirme avoir « voulu rendre publique cette discrimination pour révéler l'affaire et rompre l'hypocrisie de chacun ». N'y avait-il pas d'autres moyens! CHICHE 1 « Chacune de mes opinions est maintenant soumise à la censure de la justice pénale. Je vais maintenant lJle tenir à carreau .» Ces graves paroles sont de jean-Marie Le Pen, encore sous le coup de sa double condamnation pour provocation à la discrimination raciale, sur poursuites du MRAP. Des paroles - soulignons-le au passage - qui sont un véritable encouragement à continuer de traquer le racisme dans les propos du Menhir (comme l'appelle sa cour). Le Pen découvre que le racisme est un délit? Il n'est jamais trop tard. Le menhir se fissure? Bonne nouvelle. • III POUR MEMOIRE • JUSTICE. Près de 150 personnes manifestent silencieusement à Guyancourt, dans les Yvelines, pour « rée/amer justice sur les causes exactes de la mort» d'un jeune marocain, Ahmed Tahir, dont le corps avait été retrouvé au bord d'une route, en septembre dernier. (12 décembre) • COLLOQUE. Un colloque international auquel participent des historiens de neuf pays se tient à la Sorbonne. Pour la première fois, c'est l'ensemble de la politique nazie d'extermination et non pas seulement celle imposée à telle ou telle catégorie de victimes qui fait l'objet d'une conférence internationale. L'existence des chambres à gaz, qui furent inventées pour les malades mentaux allemands, apparaît incontestable. (11 au 13 décembre) prise le 25 mai dernier contre la revue « Annales d'histoire révisionniste" » dont le premier numéro reprenait notamment des thèses niant l'existence des chambres à gaz dans les camps de concentration nazis. (16 décembre) • RICOCHET. En gare de Villierssur- Marne, deux policiers en civil tirent sur un jeune voyageur Martiniquais qui s'enfuyait après une altercation avec les deux hommes qui n'étaient pas en mission. Une balle ricoche et vient blesser le conducteur du train à l'arrêt. (17 décembre) • BLANC COMME NEIGE. Le nazi Friedrich Paulus, aujourd'hui âgé de 81 ans, accusé d'avoir pris part au massacre de 161 Polonais en 1941, ne risque plus rien. Après 17 ans de poursuites et 5 procès an- Aux Internationaux de Tennis d'Australie, qui ont débuté à Melbourne le 11 janvier, l'Australien Pat Cash, le vainqueur de Wimbledon, a été la cible de manifestants anti-apartheid qui ont lancé des balles noi- BALLES NOIRES ET BALLON D'OR res sur le court pour protester contre sa participation récente à un tournoi en Afrique du Sud. Pat Cash a exprimé des réserves sur sa participation aux prochains Jeux Olympiques, ouverts pour la première fois aux tennismen professionnels. La Fédération Internationale de Tennis est d'ailleurs opposée (en principe) à la participation aux J.O. de joueurs s'étant produits en Afrique du Sud. Le 4 janvier, le joueur de football néerlandais Ruud Gullit, né de père originaire du Surinam et d'une mère néerlandaise, a été sacré à Paris ~~ ballon d'or », meilleur footballeur européen 1987. Il a instantanément dédié son trophée à Nelson Mandela, le leader de l'ANC, emprisonné depuis 1962, date de la naissance du footballeur. Il a souligné l'importance de ne pas s'engager dans des compétitions sportives en Afrique du Sud. « Car le sport est pour le gouvernement sud-africain "la seulefaçon d'obtenir une caution pour son propre système politique », a-t-il déclaré à la presse. 0 • PROCES EXEMPLAIRE. François Piovano, 29 ans, et Yves Podolsky, 30 ans, les assassins du jeune marocain Aziz Madak le 22 mars 1985, sont conjointement condamnés par la Cour d'assises de Nice à 15 ans de réclusion criminelle, dont dix années incompressibles. L'avocat général avait demandé la prison à perpétuité. Le jury a manifestement suivi son réquisitoire et les plaidoiries des parties civiles (famille d'Aziz, MRAP, LICRA) en retenant le caractère raciste du crime. (16 décembre) • VERDICT CRIMINEL. Le tribunal de grande instance de Paris ordonne la levée de la mesure d'interdiction de vente et d'affichage nulés pour vices de procédure, la cour criminelle de Francfort a renoncé à instruire son cas. (17 décembre). • IMMIGRES A LA MAIRIE. A l'initiative de la municipalité d'Amiens, les immigrés de la ville élisent 4 représentants qui siége-· ront avec voix consultative au sein du Conseil municipal. (19 décembre) • CONDAMNES. A New York, trois jeunes Blancs sont reconnus coupables d'homicide involontaire contre un jeune Noir, en décembre. 1986. Ils sont passibles de peines de cinq à dix ans d'emprisonnement. (21 décembre) • CONDAMNATION l Le Conseil de sécurité de l'ONU adopte, par 14 voix et une abstention (EtatsUnis) une résolution « déplorant les pratiques» de l'armée israélienne dans les territoires occupés. (22 décembre) • JOURNALISME. Werner Hôfer, 74 ans, journaliste vedette de la télévision d'Allemagne de l'Ouest, sévèrement mis en cause pour son passé de journaliste nazi, est contraint de démissionner. Le magazine Der Spiege/l'avait accusé, documents à l'appui, d'avoir chanté les louanges du régime nazi dans les colonnes du journal Berliner Zeitung auquel il donnait, à partir de 1943, une chronique culturelle hedbomadaire. (22 décembre) • SOLIDARITE. Une manifestation organisée par la CGT et le Parti communiste se déroule devant la préfecture d'Evry (Essonne) pour obtenir le renouvellement du titre de séjour de José Kinkela, un travailleur d'origine Angolaise qui est sous le coup d'un arrêté d'expulsion. Ses activités au sein de la CGT ne sont sans doute pas étrangères à cette décision. (23 décembre) • GREVE. L'Evêque palestinien, Hilarion Capucci, vicaire apostolique de Jérusalem, en est à son douzième jour de grève de la faim, à Rome, pour protester contre la répression dans les territoires occupés par Israël. (28 décembre) • RELACHE. M. Yeiwéné Yeiwéné, numéro deux du FLNKS, est remis en liberté. Il avait été emprisonné le 22 décembre pour « provocation au meurtre », ce qui avait suscité une très ferme mise en garde du président de la République. (28 décembre) • LEGITIME DEFENSE. Dans une interview accordée au Monde, M. Joseph Sitruk, nouveau grand Rabbin de France, déclare à propos de la répression meurtrière israélienne contre les Palestiniens : « Dans ces événements, la solidarité des juifs à l'égard d'Israël n'est pas inconditionnelle, mais logique. Le juif a un tel amour de la vie, un respect si grand de l'existence des autres, que le fait de tirer dans une foule, qui heurte profondément notre sensibilité, ne peut être considéré que comme un acte de légitime défense ». Faut l'faire! (28 décembre) • MANIF. Une foule importante de Parisiens se rassemblent devant le Quai d'Orsay à Paris pour manifester leur solidarité avec le peuple palestinien victime de la répression israélienne et exiger la libération des territoires occupés, à l'appel du MRAP et de nombreuses autres organisations. (29 décembre) • VICTOIRE 1 Cédant devant la réprobation, le maire de Paris lève la mesure de mutation dans d'autres secteurs de Paris de 3 assistantes sociales, coupables d'avoir signé une pétition en faveur de familles immigrées sinistrées à la suite d'incendies criminels dans le 20e arrondissement. (29 décembre) • EMIGRATION EN HAUSSE. Le Comité d'information sur les Juifs soviétiques à Jérusalem indique que le nombre d'émigrants juifs soviétiques a atteint 8.068 en 1987, soit neuf fois plus qu'en 1986 où ce chiffre était de 904. D'autre part, les citoyens soviétiques d'origine allemande ont été 14 210 à quitter l'URSS contre 930 en 1986. (29 décembre) • DETAIL ECONOMIQUE. Un manuel militaire actuellement diffusé parmi les cadres de la Bundeswehr (armée ouest-allemande) affirme que « l'emploi des gaz pour l'extermination massive des Juifs a été une victoire du principe d'économie », parce que les chambres à gaz coûtaient moins cher que les exécutions individuelles. L'affaire a contraint le ministère de la Défense à ouvrir une enquête et à présenter des excuses auprès de la communauté juive de RFA. (30 décembre) • IMPUNITE. Les archives dont dispose l'ONU imposent aux autorités de RFA l'ouverture de 4 500 dossiers de criminels de guerre qui, depuis 1945 ont joui d'une totale impunité en Allemagne de l'Ouest. (30 décembre) • RACISME AU COMMISSARIAT. Une ressortissante congolaise affirme avoir été passée à tabac au commissariat de Saint-Cyr l'Ecole. Mais c'est elle qui est accusée d'avoir agressé un policier, comme à l'accoutumée. Le tribunal de Versailles renvoie l'examen de l'affaire. Le MRAP décide de porter plainte. (30 décembre) • DEFILE NEO-NAZI. Quelque 200 néo-nazis ouest-allemands manifestent avec des flambeaux dans la nuit du Jour de l'An, à Fladungen, en Bavière, près de la frontière entre les deux Etats allemands. Répondant à l'appel de la Jeunesse Viking, mouvement d'extrême-droite, ces individus pétendent dénoncer, en criant « Allemagne, soulève-toi », ce qu'ils appellent « lafrontière de la mort et la division de l'Allemagne ». (1 er janvier) Sous la pression, le gouvernement français a dû céder. Sept des expulsés iraniens ont vu l'arrêté les concernant rapporté. Il aura fallu 3S jours de grève de la faim, des manifestations de solidarité en France et la condamnation des autorités internationales pour annuler ces expulsions. L'image de la France dans le monde en a aussi pris un sacré coup! • COUPLES FRANCO-ALGERIEN. Selim Mammeri, un adolescent de 17 ans et demi, l'un des 44 enfants franco-algériens de parents divorcés ou séparés, venus passer les fêtes de Noël et du Jour de l'An en France auprès de leurs mères, disparaît ainsi que sa mère MarieNoëlle Dupont. Durant son séjour chez sa mère, Selim avait affirmé son intention de ne pas retourner en Algérie. Tous les autres enfants sont retournés à Alger pour regagner le domicile paternel; tel que cela avait été négocié avec le gouvernement algérien. (5 janvier) • INSULTES. La police autrichienne arrête trois militants d'extrême-droite qui ont perturbé une conférence donnée dans un théâtre de Vienne par Simon Wiesenthal, à l'occasion du cinquantième anniversaire de l'Anschluss, l'annexion en mars 1938 de l'Autriche par l'Allemagne hitlérienne. La conférence était retransmise en direct par la télévision. Les manifestants ont traité le directeur du Centre de documentation juive de « menteur» et d'« assassin» et lancé du haut d'un balcon de la salle des tracts récusant l'existence des chambres à gaz. (6 janvier) • EXPULSION STOPPEE. Le préfet de Bobigny rapporte l'arrêté d'expulsion pris contre une famille mauricienne de quatre enfants habitant Bobigny. La population Différences - n° 75 - Février 1988 avait manifesté en leur faveur devant la préfecture. La situation des parents était en voie de régularisation et sera réexaminée. L'arrêté d'expulsion doit être maintenant annulé et cette situation réglée définitivement. (7 janvier) • MEDECINS VIRES. Deux médecins de l'Hôpital Baragwanath de Johannesburg sont licenciés et plusieurs autres sanctionnés poUl avoir signé une pétition dans la· quelle ils critiquent la discrimina· tion pratiquée à l'encontre des ma· lades noirs. (7 janvier) • NOSTALGIES. De jeunes appelés révèlent que depuis 4 ans un panneau qui orne une salle de détente réservée aux officiers et sousofficiers du 76e régiment d'infanterie de Vincennes représente Hitler en uniforme de SA, entouré de différents spécimens de la Wehrmacht nazie. Confronté à ce panneau, le colonel du régiment a répondu: « S'il y a intention maligne, je ne la connais pas. Y a-t-il un truc nazi dans tous ces uniformes, je suis pas foutu de vous répondre ... »Les jeunes appelés ont aussi raconté comment des soldats de la 2e compagnie du 76e RI avaient pu écouter des chants SS et des discours d'Hitler sur un magnétophone « avec la tolérance du capitaine ». (7 janvier) A Béziers, dans la nuit du samedi 9 au dimanche 10 jan' l'ier, Ahmed Zemouri est abattu par un indi'l'idu qui lui réclamait son portefeuille. Vingt quatre heures aupara' liant, à Aibert'l'ille (Sa 'l'oie), Fetici Bougherra a 'l'ait été abattu à coup de fusil, puis froidement ache'l'é de plusieurs balles tirées à bout portant alors qu'il gisait sur le trottoir. « Moi, je n'aime pas les Arabes et je les emmerde », a'l'ait lâché son assassin dès son arri'l'ée dans le café « Le Tenuinus » à l'adresse de Felici Bougherra. II a 'l'ait amené son fusil sur le siège arrière de sa 'l'oiture. A'I'ant, c'était à Carcassonne, Chambéry, Castre, Sedan, Charle'l'ille-MéZière ... Ahmed Zemouri est le 104' immigré assassiné depuis 1980, presque tous des Maghrébins. Onze l'année dernière ... C'est assez! 0 • DEGONFLAGE. Le président autrichien Kurt Waldheim renonce à accompagner le Pape à l'ancien camp de concentration nazi de Mauthausen lors de la visite officielle que le Pape effectuera à partir du 23 juin en Autriche. (7 janvier) • FLIC TUEUR. A la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, procès du policier Christian Holtz qui tua le jeune Zouaoui Benelmabrouk d'une balle dans le dos le 7 mai 1984, ce qui ne l'empêche pas de plaider la légitime défense. Jugement mis en délibéré. (8 janvier) • MORT SUSPECTE. Rassemblement devant la mairie de Noisy-leSec à l'occasion de l'anniversaire de la mort de Nasser Hamoudi, dont le corps ·fut découvert l'an dernier dans le local des ordures d'un immeuble HLM des Lilas, dans la banlieue parisienne. Juste avant sa mort, le jeune homme avait été retenu en garde à vue au commissariat de Noisy-le-Sec où sa famille affirme qu'on l'aurait tabassé. Elle dénonce le fait que le rapport d'autopsie ne lui ait toujours pas été communiqué. Côté police, on affirme que le jeune homme était mort d'une overdose de drogue. (9 janvier) Agenda réalisé par ROBERT PAC Il Dossier de FRANCK TERUEL ES EXILES DE ONTREUIL Différences - n° 75 - Février 1988 Vrai ou faux, le cliché veut que Montreuil (Seine-Saint-Denis) soit la deuxième ville malienne du monde après Bamako. Quelle importance ? Le certain est que cette banlieue de Paris est la capitale de l'émigration malienne en France. Et les jeunes filles qui chantent le soir l'absence ou l'exil du frère ou du fiancé parti font rimer « la-bas» avec « foyer Bara ». Beaucoup d'exilés de la misère ne connaissent ni la France ni Montreuil, seulement l'adresse d'un foyer. Première halte de l'expatriation, première oasis aussi, où les cousins, les amis, les « frères» le prendront en charge et le mettront au chaud. L'exil est dur quand on a faim et qu'on n'a pas vingt ans. Ce reportage a commencé par une erreur. Des cinq foyers maliens de Montreuil, deux sont très proches. Alors, c'est aux Grands-Pêchers que l'histoire commence, plutôt que rue de la NouvelleFrance. Il n'y avait, bien sûr, personne pour accueillir le journaliste dans les locaux récents, intégrés à la cité HLM. Mais, comme un signe de convivialité - de débrouillardise aussi - la grande salle commune du rez-dechaussée était pleine de petits étals. Cigarettes, boissons, un peu de nourriture, des fruits, des cassettes, quelques vêtements et beaucoup de monde dans les divers palabres engagés ici et là. Quelques phrases plus tard, cest Fofana qui ouvre sa porte. Non, il ne veut pas d'interview, afin de ne pas parler au nom de toute la communauté. Mais pour rendre service, il veut bien répondre à quelques questions. Pour m'aider. La subtilité n'est pas que de forme. Le couloir est sombre, les déchets nombreux, mais entassés en petits paquets soigneux. Le ménage n'est pas fait dans les parties communes, par manque de personnel. La chambre est minuscule, type cité universitaire. Deux lits superposés, un coin cuisine ou le thé finit d'infuser. « j'ai 29 ans et je suis en France depuis dix ans. Je suis couvreur et la plupart des Maliens sont aussi des ouvriers, manoeuvres dans le bâtiment ou manutentionnaires. Je gagne environ 4 500 F par mois. j'arrive à économiser 3 000 F qui servent pour la famille, la caisse commune, les problèmes à régler au pays. ii Pas de loisirs, pas de sorties, c'est la norme des travailleurs pauvres, sous-qualifiés, isolés dans un milieu étranger. Un seul atout: leur solidarité, leur cohésion. C'est une tradition au Mali, une donnée de la culture, Il Il Il Il Dans la région de Gourna Rarhous, des rigoles sont creusées pour capturer les eaux de pluie. l ) une façon d'être qui devient ici une obligation. « On s'arrange pour ne pas être trop loin les uns des autres. Ceux qui vivent ailleurs viennent le week-end, ou nous passons les voir. C'est très différent chez nous de chez les Français. On aime vivre en société. Ici, on est coupé, seul, sans famille. Alors on se regroupe entre Maliens. C'est moins dur. )) Un besoin de se grouper qui conduit parfois à des impasses. Les Maliens refusent de se disperser en petits foyers de moins de cent personnes. Ils préfèrent être nombreux. « On garde des liens avec le pays. C'est très important pour maintenir notre culture, notre appartenance nationale, poursuit Fofana. Nous participons à la vie de là-bas. Si un problème se pose au pays, nous envoyons de l'argent, tous ensemble, pour le régler. Dans mon village, c'est nous qui avons payé pour la route, l'école, la mosquée et le puits. C'est notre manière d'être là quand même. )) A l'heure de l'intégration tous azimuts, est-ce un langage possible? Ou les choses vont-elles si mal qu'on ne puisse faire sa vie en France? Non, c'est un choix. L'exil est au Mali devenu traditionnel pour des générations de jeunes gens que la terre ne peut nourrir. Autrefois, en Afrique de l'Ouest, aujourd'hui en France (ex-occupant colonial), c'est la survie pour soi et pour le village qu'on part chercher loin du pays. « La plupart des Maliens ne sont en France que contraints et forcés. Moi je veux rentrer au pays. Je veux revenir au Mali avec une formation de mécanicien agricole pour être utile au village, à mon pays. La plupart d'entre nous vient de la région de Yélimané, près de Fayes. Beaucoup, peut-être 40 %, sont des ruraux chassés par la sécheresse. Pas le choix. )) Même constat chez Doukouré Boro, de l'UTM (Union des travailleurs maliens) : « Contrairement à beaucoup d'immigrés qui demandent l'intégration, les Maliens ont l'espoir de rentrer définitivement. L'émigration est un exil temporaire dû aux conditions économiques au Mali. Nous voulons rentrer avec une formation professionnelle pour aider au développement de ce que Des hommes comme sus/lendus qui attendent de redevenir des hommes sur leur telle nous avons laissé derrière nous. C'est pour cela que si nous sommes venus pour travailler, nous avons des revendications de formation. )) Et c'est vrai que dans toutes ces rencontres, l'exil apparaît comme un passage obligé. Mais un passage seulement. C'est une condition pour pouvoir un jour rentrer vivre parmi les siens. D'où, peut-être, la longue patience de ces hommes maltraités qui, comme suspendus, attendent de redevenir des hommes sur leur terre. Car l'accueil en France, nous n'en parlerons que peu. Un mot ici, un sourire là. Ce sera tout. Il faudra poser brutalement la question. « Hé, oui! ça existe le racisme. Les Maliens sont encore plus rejetés que les autres. Pourquoi? Les relations avec les Français ne sont pas mauvaises, mais moi, après dix ans, je n'ai pas de relations avec eux. Les seuls camarades français sont mes collègues de travail. Au début, je les trouvais tristes, seuls, parlant seulement avec leurs amis. Ici, on perd l'habitude du pays. Celle de parler à tout le monde, simplement. Et puis, tu sais, nos quelques frères qui veulent s'installer ne peuvent même pas se loger. Ils doivent vivre avec femme et enfants dans une seule chambre. Et ce n'est pas un problème d'argent ... )) Le responsable du service immigration de la commune le confirmera: peu ou pas d'incidents avec les Français, mais un racisme diffus. « Si l'Arabe fait peur, est perçu comme le méchant, l'homme au couteau, violent et agressif, l'image de l'Africain noir reste celle du grand benêt, du grand enfant naïf. )) Le genre Banania quoi. La seule parade reste la cohésion de la communauté. Elle est proverbiale chez les Maliens. Une nécessité renforcée du poids des traditions et de la structure sociale malienne. L'équi/le de télévision, autorisée à tourner dans un foyer, ne /leut y /lénétrer : les chefs, non consultés, font grise mine « La plupart de nos affaires, explique Fofana, sont organisées par chaque ethnie. Mais on fait les choses en commun. Dans le foyer, l'organisation est commune et depuis les grèves de 1984, il existe une coordination des Africains de Montreuil. Si un problème concerne tous les Maliens, les délégués s'en occupent. Mais chez nous, l'autorité c'est d'abord celle du chef, souvent le plus âgé. Il y en a un par ethnie et leur arbitrage est accepté de tous. S'il n'y a pas d'abus et si la communauté est convaincue. Et tout le monde a son mot à dire. )) Simple, mais solide. Parfois lourd à supporter, mais indispensable. La réalité parfois pesante des traditions permet de mieux résister aux difficultés, de se serrer les coudes, d'empêcher toute dérive individuelle catastrophique. Mais l'information passe mal: seul le chef est le porteparole de tous et habilité à parler pour tous. Lors de la grève des loyers de 1984 qui bouscula pourtant un peules hiérarchies, une équipe de télé, autorisée par les résidents à tourner dans un foyer, se vit refuser l'entrée le lendemain: les chefs, non consultés, avaient refusé au dernier moment. Cette soudure de la communauté tend aussi à accentuer son repli sur elle-même, à la couper de la société. Sans compter que certaines décisions semblent parfois plus relever de l'intérêt personnel des chefs que de celui de l'ensemble des Maliens. La grève des loyers en 1984 donne l'exemple du bon côté de la cohésion: dix-huit mois sans que personne ne lâche. De plus, la drogue, l'alcoolisme ou la délinquance restent marginaux. La communauté malienne fait rarement la Une des faits divers et un Malien en difficulté est automatiquement pris en charge par la communauté, parfois très longtemps, lorsqu'il est chômeur, par exemple. Pas de miracle, c'est difficile. Parce que ces solides traditions ont un revers coercitif d'exclusion pour ceux qui s'y refusent. Parce que ces mêmes traditions s'affaiblissent au choc d'une culture différente. Enfin, parce que la solidarité la plus forte se fatigue devant la misère : 38 % des Maliens de Montreuil sont au chômage. « Tu ne verras jamais un Malien mendiant ou clochard )), affirmait Fofana. C'est vrai. Mais si la communauté venait à s'échouer sur les écueils du chômage, du racisme et du désespoir? « Je rentrerais )), disentils, et dans le couloir, une carte du Paris-Alger-Dakar. Pas pour les belles voitures. Parce que dans l'angle du Niger que la caravane va traverser à 100 km/h, il ya un coin du Mali. Et quelqu'un a rajouté, en rouge: « Yélimané )). Ça rime avec arrivée.D Il Il Il Il COOPERATION L'aide au retour? Chiche, disent les Maliens de Des élèves des écoles de Montreuil ont décidé Montreuil. spontanément de se jumeler avec des classes pa- Depuis longtemps, ils montent des projets de co- rallèles de la région de Yélimané. Plusieurs caisopératives multifonctionnelles, autonomes qui se ses de matériel scolaire sont déjà parties avec démènent pour que leurs membres acquièrent des l'aide de la Fédération mondiale des villes jumeformations utiles avant de rentrer au pays. lées. La municipalité de Montreuil a su aider à la créa- Autre activité, la municipalité intervient pour aition d'une association de jumelage-coopération der les Maliens à monter leur dossier de formation avec le cercle (département) de Yélimané d'où et leurs projets de retour. Quinze personnes ont viennent la plupart des Maliens présents dans la déjà tenté l'expérience. commune. Le 19 décembre dernier, le maire de la ville a an- 330000 F de budget en 1981, c'est déjà important. noncé aux immigrés maliens que des gommiers ve- L'association regroupe des médecins, des organi- naient d'être livrés à Yélimané. Des arbres qui sations, des chercheurs, des enseignants. Son but: fournissent une richesse agricole, mais constituent rechercher des financements pour des projets dé- aussi un outil très efficace contre l'avancée du définis avec les Maliens, de façon à bien coller aux sert qui menace toute la région. besoins réels de la population. Des actes simples, apparemment énoncés dans le Le cercle de Yélimané, c'est 86 villages et 90000 désordre, mais qui procèdent d'un véritable prohabitants dans une région les plus pauvres d'un gramme. pays parmi les plus pauvres. Trois axes et principes dans ce qui doit, pour la Pas de charité, la solidarité la plus simple et la plus municipalité et l'association de jumelage, être une efficace possible. Concrètement, l'adduction d'eau action menée en coopération avec des partede Yélimané est neuve, refaite avec l'aide du naires: Syndicat des eaux d'lle-de-France. Les habitants • Engager des actions concrètes pour aider une en assurent la gestion et ont désormais l'eau cou- des régions les plus pauvres du Mali. Aider la porante et plus abondante. Prochaine étape : des pulation à réaliser certains de ses projets et à les micro-barrages pour augmenter les récoltes. autogérer, ce qui constitue la base indispensable A Noël 1986, le centre de santé a été refait avec d'un développement indépendant. l'aide de jeunes volontaires montreuillois. Au- • Créer les conditions d'un véritable choix: resjourd'hui, on en est à envisager la fourniture ré- ter au pays ou partir. Mettre fin au déracinement gulière de médicaments contre les maladies qui et à l'exil provoqués par le chômage et la misère. font des ravages. Une coopération directe entre les • Lutter contre le racisme en France, grâce à des médecins de Montreuil et ceux de Yélimané est en liens de solidarité et d'amitié, pour une meilleure El J_ __c _o__u_rs . _~ _________________________________________c_ o_n_n_a_is_s_an c __e _r _é_c_ip_~_o__q_u e _' ___________________. J UIE MISÈRE ORIIIISÉE La plupart des 4 500 Maliens vivant à Montreuil sont hébergés en foyer et concentrés dans cinq des neuf foyers de la ville: Nouvelle-France, Bara, les Grands-Pêchers, Branly et Roche-Brune. Ils représentent un quart des 20 % d'immigrés que compte la ville. La communauté, créée à Montreuil à la fin des armées 60, s'est constituée autour d'un noyau de plusieurs centaines d'expulsés de Paris intra-muros. Et dans quelles conditions! Le foyer Bara est un ancien entrepôt, aménagé en 1968 et prévu pour deux cent cinq résidents. Opération préfectorale, il passa immédiatement à quatre cent dix habitants par le simple remplacement des lits prévus par des couchettes superposées. La capacité d'accueil venait de doubler, mais les équipements restaient les mêmes. Aujourd'hui, ils y sont huit cents « S'entasser n'est pas un plaisir», dira l'un des Maliens rencontrés, qui demande pourtant le droit de vivre en collectivité. La logique du surpeuplement et de la dégradation était inscrite dans la première décision du préfet et pas seulement à Bara. L'inertie de la communauté qui tend à se regrouper a fait le reste. Aujourd'hui, la ville veut raser le foyer, reconstruire des locaux adaptés et reloger les Maliens travaillant dans la commune. Ce qui suppose que les communes alentour acceptent de recevoir des Maliens sur leur territoire. Rien de moins sûr. sent leurs dirigeants, sans tenir compte des âges, ethnies ou castes ... ii Entre ce qui naît et la tradition des chefs, la lutte a payé. Et il le fallait: un pompier a un jour déclaré qu'« un incendie ferait à Bara des dizaines de victimes. ii Une seule grenade lacrymogène lancée dans les locaux fit un jour dix-huit blessés. La panique. Le personnel, c'est vrai, se résume au directeur, assisté d'un homme d'entretien et disposant de quelques heures de ménage par semaine. Pour huit cents personnes. Exceptionnel? Allez donc traîner vos guêtres du côté du foyer de la Nouvelle-France (quelle ironie que ce nom de hasard). S'y retrouvent tous les anciens du foyer Léo-Gaumont, hangar reconverti en meublé, autrefois perdu aux confins du XXe arrondissement. Dès 1974, les résidents sont en grève des loyers. La bagarre dure six longues années. Préfet, région, ministère, tout le monde est sollicité, harcelé. L'affaire ira jusqu'à l'Assemblée nationale. Un accord global est conclu en 1980 : le foyer Gaumont sera fermé, puis refait. La commune accepte d'accueillir deux cents des résidents dans un futur foyer construit par une filiale de la Sonacotra. L'ADEF reçoit des subventions pour reloger les quatre cents autres. Il est convenu qu'en attendant, les deux cents restant à Montreuil seront relogés très provisoirement dans des baraquements, à la Nouvelle-France. Sept ans après, rien n'est fait. Le provisoire est éternel et l'AFTAM est son prophète. Les Maliens du foyer provisoire sont devenus quatre cents, gonflés de tous ceux qui n'ont jamais été relogés. Dans les baraques - les bungalows disent-ils avec humour - on gèle l'hiver, mais le pire, c'est la pluie qui s'infiltre. Et tout ça A la Nouvelle-France, le provisoire est éternel La plupart de ces foyers sont gérés par l' AFT AM où siègent des représentants de la DASS, du préfet ou de la Caisse centrale de coopération. L'AFTAM ne se veut que gestionnaire, pas investisseur. ii Vous n'êtes que des responsables de gardiennage et des encaisseurs de loyers », répondent alors les résidents. Les pouvoirs publics regardent ailleurs. Après des années, c'est le choc : dix-huit mois de grève des loyers en 84-85, pour exiger des conditions de vie plus décentes. L'AFTAM craque et accepte de faire de petits travaux, rien de sérieux. S'il manque officiellement 30 000 places en foyer pour les immigrés de la seule région parisienne, pas un lit neuf n'a été installé depuis plusieurs années. Ce qui signifie davantage d'entassement dans les foyers existants. Dans la grève, des manifestations ont eu lieu, la municipalité a aidé, des organisations maliennes sont nées. Doukouré Boro, responsable de l'Union des travailleurs Maliens (UTM) est issu de ce mouvement sur lequel continue de peser le poids de la tradition. ii Notre rôle, c'est d'établir des liens de contacts, de travail avec la population de la ville, puisque les Maliens y sont très nombreux. Ça commence par la participation à toutes les activités qui mobilisent les Montreuillois. Moi, je suis membre d'un comité de résident et, comme tel, je suis nommé par mon chef d'ethnie. Mais à l'UTM, c'est l'ensemble des adhérents qui éli- Différences - n° 75 - Février 1988 à deux ou trois par chambre pour 400 F par tête. Fin décembre, ne renonçant pas, les Maliens ouvraient leurs portes au public. Le foyer Nouvelle-France, c'est comme un amas de cubes au bout d'un stade pelé. C'est triste. Et l'on mesure ici que les clandestins - qui existent, bien sûr - ça n'est vraiment pas le fond du problème. Les vêtements lavés pendent le long des murs, sur des cintres. Tout est fait par les habitants pour préserver la propreté des lieux et leur dignité. Parmi les visiteurs, le maire communiste, des élus de gauche et deux du RPR. On se rassemble dans la pièce commune, serrés. Le préfet invité n'est pas là. Face au maire, le doyen du foyer prononc;e quelques paroles de bienvenue et l'on parle. On. raconte là les absurdes propositions de relogement à des loyers trop chers. On dit la vie difficile et la solidarité. On parle du pays. On a dit aussi qu'on ne lâcherait pas. Doukouré Gaoro traduisait dans les deux langues pour - disait-il avec humour - ii qu'on n'ait pas à applaudir sans comprendre ». Et dans cette assemblée, sont revenus aussi les mots du président de l'UTM : ii La solidarité, on n'a que ça. La négociation est une tradition malienne très ancrée. Cela évite les conflits tribaux ou de clans. C'est une nécessité au Mali ou coexistent des ethnies très diverses. Et ça continue ici, en France. ii Les Maliens de Montreuil attendent donc.o Il ~ L v R E s o ICI ET 0 AILLEURS REVE INACHEVE. Pour la seconde année, les Etats-Unis célèbrent, le 15 janvier, la Fête nationale en hommage au pasteur Martin Luther King Jr, décrétée il y a deux ans. La parution de Je fais un rêve, aux éditions du Centurion, vient donc à point nommé. Ce livre rassemble dix textes du pasteur noir, pour la plupart inconnus en langue française, qui viennent opportunément compléter ceux déjà parus en France chez Castermann, sous le titre La force d'aimer. Le « rêve », c'est celui que Luther King décrivit le 28 août 1963, lors de la Marche sur Washington, devant 250000 personnes rassemblées pour exprimer leur volonté de liberté et de fraternité, son rêve d'un monde d'où l'injustice serait bannie et où les hommes seraient jugés non plus à la couleur de leur peau, mais à la nature de leur caractère. Cet ouvrage reproduit plusieurs des derniers discours qu'il prononça en 1967 et 1968. Le 4 avril 1967, le paster King prit fermement position contre la guerre du Viêt Nam à l'église Riverside de New FEMMES ET ISLAM. Ghassan Ascha est libanais, né à Beyrouth . Docteur en études islamiques, il sait de quoi il parle. Du Coran dans le texte, mais aussi de l'Islam dans le contexte de sa naissance, de son histoire et de la manière dont les politiques en place se mêlent du religieux. Tel un détective acharné, il traque les textes et la réalité sociale et juridique du monde arabomusulman pour en saisir toutes les contradictions, les impostures et les mensonges relatifs au statut de la femme. y ork et son propos déborde largement des frontières des Etats-Unis. « La lutte pour les libertés, la dignité, la fraternité est indissociable de la lutte pour la paix. Chaque nation doit désormais se sentir liée par dessus tout à l'ensemble du genre humain pour préserver ce qu'elle a de meilleur dans sa société individuelle ». Et il concluait en affirmant que la lutte contre le racisme, la pauvreté, le chômage, amène forcément à mettre en question l'économie capitaliste, l'ensemble de la société occidentale. Cette remise en cause montre le problème du racisme, le problème de l'exploitation économique et le problème de la guerre comme liés entre eux. La veille de son assassinat, à Memphis, le 3 avril 1968, Martin Luther King Jr prononçait son dernier sermon, des paroles rétrospectivement tragiques: « Nous avons devant nous des journées difficiles. Mais peu m'importe ce qui va m'arriver maintenant. Car je suis allé jusqu'au sommet de la montagne. » 0 ROBERT PAC Je fais un rêve. Textes choisis de Martin Luther King Jr Editions Le Centurion. L' Islam en Malaisie l'Occident, le propos part et se construit de l'intérieur de la réalité étudiée. Ghassan Ascha fait oeuvre d'érudit, mais l'ouvrage se lit agréablement malgré la complexité de la question. La thèse de G. Ascha est exposée d'emblée: « Toutes les religions répriment la femme. » La démonstration sur l'exemple musulman ne manque pas d'inédits notamment du point de vue épistémologique avec l'irruption d'une démarche profondément laïque totalement assumée. D Loin de toute justification par rapport à Ghassan Ascha, Du statut inférieur de la femme en Islam, éditions l'Harmattan. ,--------------------------~----------------------------------------------------~ GUILLEMETS. A l'heure des bilans, « le débat» sur le code de la nationalité sera sûrement l'un de ceux qui auront marqué cette législature. Et si les guillemets s'imposent d'emblée, c'est que nous avons assisté à une querelle-serpent de mer hantée par d'évidentes arrièrepensées électorales. La valse-hésitation gouvernementale est momentanément close puisqu'il revient à une commission de « sages » désignés par le Garde des Sceaux, d'arrêter les termes exacts de la réforme du code. C'est fait, mais, l'opinion n'en restera pas moins marquée par les arguments avancés pour légitimer l'initiative gouvernementale et son absolue nécessité. Car « la nationalité », écrit Smain Laacher, « a dans une grande mesure partie liée, plus pour certains (les plus nombreux) que pour d'autres, aux mots, à des mots clefs, des mots symboles, des mots de vie ou de mort pour lesquels on est 01 prêt à tout ... la dignité, le sang, le mérite, le loyalisme ... », armes symboliques redoutables dont la manipulation et le maniement sont à inscrire dans le monde où ils s'exercent: la planète, toute la planète t:l comme unique ~ frontière pour [§ t.;;.é;;:;..........,;;;:::;;;. les dominants ~ triompher, de s'imposer à d'autres et de s'imposer à tous ». Il y a donc bien une histoire du code de la nationalité que les études de Jean-Michel Belorgey et Christian Bruschi permettent de restituer ; une histoire faite d'oscillations entre des séquences d'ouvertures et des périodes fermées, imprégnée, comme pour masquer les enjeux réels, de « valeurs et de morales » et contaminée à certaines époques par les réalités coloniales. La définition du citoyen - et donc de l'étranger - a constamment varié et cette évolution a toujours été consubstancielle à l'ampleur des droits, accordés ou déniés, au non-national. Cette histoire est ainsi celle d'une discrimination, d'un partage permanent du champ des droits, d'une délimitation en constante transformation

« la qualité» de français définissait

en creux, par opposition, les statuts de l'étranger et ce n'est nullement un hasard, note Christian Bruschi, si, bien avant la réforme projetée du code, une loi sur l'entrée et le séjour des étrangers, dite « loi Pasqua », a été adoptée dès septembre 1986. et l'assignation L-___ - forcée, codi- Dialogue de sourds On est loin d'un simple aménagement formel de quelques dispositions du code de la nationalité qu'appelle la situation fiée, quasiment particulière de sacrée à une nation, à une nationalité pour les dominés. C'est là le premier piège qui guette toute étude sérieuse de la nationalité car de tels mots - et tout ce qu'ils recèlent ou sousentendent comme signification - encombrent les polémiques, déplacent les enjeux et minent parfois le langage scientifique lui-même qui se trouve d'autant brouillé que cette question a été l'objet d'un «historique enfermement conceptuel dans l'espace du droit ». La troisième difficulté est ce que S. Laacher décrit comme étant « une véritable substitution conceptuelle ou mieux une substitution d'objet ». Définition variable On ne parle de nationalité que pour traiter d'immigration - et plus précisément de certaines composantes de cette immigration -, évitant ainsi de retranscrire et de remémorer les conditions historiques et les multiples détours qui ont permis « à certaines représentations (du national) de Différences - n° 75 - Février 1988 certains enfants d'immigrés. En agissant sur le droit du séjour d'une part, et en transformant les modalités d'accès à la nationalité d'autre part, c'est à une véritable redéfinition que l'on procède; ce redéploiement des notions de national et de non-national dessine ainsi une nouvelle géographie des droits, accordés aux uns et soustraits aux autres, et transforme « les schémas de perception et de compréhension » entre les divers groupes, permettant au passage, souligne Jacqueline Costa-Lascoux, d'escamoter au moins trois questions de fond : les droits politiques des résidents étrangers, la concertation avec les pays du Sud (dont on craint de nouveaux flux migratoires que l'on espère décourager et conjurer au moyen d'une modification interne du droit), et enfin le contenu réel de la citoyenneté dans la France d'aujourd'hui. »Au-delà d'une polémique sur la nationalité qui se saisirait d'arguments archaïques ou fallacieux, on risque de créer des citoyennetés de valeurs inégales, avec, en boomerang, la déception d'une égalité formelle sans concrétisation sociale », écrit-elle en évoquant le cas des Antillais. Pas plus pour ces Français bien particuliers que pour les immigrés qui se naturalisent, rien n'est réglé. Analysant le rapport des immigrés algériens à la nationalité française, Abdelmalek Sayad montre bien que la naturalisation n'est jamais tant chez celui qui l'entame que du côté de ceux qui l'y invitent et l'acceptent, ou l'en dissuadent et le rejettent, cette libre décision rationnelle que l'on souhaiterait voir accomplie au terme de tout un cheminement migratoire évident et irréprochable, et que l'on souhaiterait voir « sanctifiée », sacralisée par un rite solennel. « La naturalisation est », écrit-il, « une opération d'annexion comme il en est peu d'aussi profonde et d'aussi totale .. . (elle) se pose à la manière d'un honneur qu'il faut mériter et qu'il faut payer avant et après. La cérémonie a ses rites propiatoires et ses rites votifs. A la manière d'unefaveur insigne, elle honore le naturalisé qu'elle intègre à elle, lui conférant de la qualité (qualité de français) et le reconnaissant digne d'elle, digne d'être français. En se naturalisant, le naturalisé honore, à son tour, la nationalité qu'il acquiert et, faisant allégeance, il s'honore de l'avoir acquise (ou d'avoir été acquis par elle); il s'honore plus qu'il ne l'honore. » Algériens de France Tout « marché de la naturalisation» est donc régi par des règles complexes et enchevêtrées, surtout lorsque ceux qui entament - ou refusent - la procédure sont algériens de France, placés en raison de l'histoire coloniale et de l'ancienneté des flux migratoires dans une situation exeptionnelle vis-à-vis du code de la nationalité. De telles situations ne peuvent guère être explicitées à l'opinion par les formulations simplistes entendues ici et là ces derniers mois. La révision du code, censée les résoudre, ne fera en fait qu'en pérenniser la complexité. DRISS EL YAZAMI Questions de nationalité. Editions l'Harmattan - Ouvrage Collectif. Il UN VILLAGE PIQUE DE THEA TRE « C'est une expérience folle, un pari impossible qui dure depuis 15 ans.» Lorsqu'une compagnie professionnelle de théâtre s'est installée dans un village du Lot-et-Garonne, peu de gens y ont cru. Aujourd'hui, les Baladins en Agenais ont conquis toute la région. L'impromptu de Montclar, La Nuit des Hélènes, du French Cancan et du Beckett : la troupe de Roger Louvet s'en donne à coeur joie. Montclar étale ses maisons de pierre sur une colline, au milieu de la campagne vallonnée. A 50 km d'Agen vivent là 900 habitants, pour la plupart retraités, et une trentaine de comédiens. Au centre du village, un café porte le nom de la compagnie. « C'est souvent une vraie ruche qui bourdonne », explique Louis, la cinquantaine, yeux rieurs et pommettes rosies par la fraîcheur. Deux jeunes comédiens jouent au tarot avec des villageois. Au fond, habillés en valets façon Molière, trois acteurs répètent. Faire plaisir Quant Roger Louret, à la sortie du conservatoire de Toulouse, décide d'implanter une troupe dans son village natal, il y a eu quelques grincements de dents. Durant cinq étés, il organise, avec d'autres acteurs, un festival. «Finalement la greffe a pris », rigole Louis. « Au départ, les Montclarais assistaient aux dîners spectacles, pour faire plaisir. Ils ont été surpris par la qualité du travail et la persévérance des comédiens », commente Huguette, la patronne du café, aussi chaleureuse que son accent du Sud-Ouest. Depuis toujours, elle soutient la compagnie. Elle a nourri quotidiennement les quelque 180 baladins qui ont tenté, à ce jour, l'expérience. Le temps d'une pièce, pour quelques mois ou quelques années. Josiane, jeune femme brune et pétillante, tient un des libres-services. Elle assiste à tous les spectacles. « Des comédiens sont hébergés chez des habitants. Ils font vivre les commerçants et les artisans. Alors on les aide comme on peut ... il était temps que Montclar remonte. D'ailleurs, quand la compagnie part en tournée, le village somnole. » Montclar a goûté au théâtre et s'est piqué au jeu. « Nous n'avons pas d'industrie mais nous avons les baladins », observe le maire de Montclar. « Quelques irréductibles rouspètent pour le bruit. Mais au fond, tout le monde est heureux de voir que l'on rachète les maisons vides.» Il y a eu, quelques jours avant Noël, 103 représentations proposées: soit 18 heures de spectacles non-stop. Comme pour la première nuit du théâtre en 1985, le public s'est déplacé de toute la région, et audelà, de Perpignan ou de Paris. Elle a été baptisée, en décembre 1987, « Nuit des Hélènes », puisqu'une dizaine de pièces étaient consacrées à Hélène de Troie. La programmation, éclectique, était à l'image du travail de la compagnie. Autant d'oeuvres classiques que de textes contemporains. Tous les Feydeau en un acte, du Molière, du Tcheckov, du Tardieu, des créations de Roger Louret et une pièce de Michel Déon, académicien: L'« Impromptu de Montclar », écrite et créée pour l'occasion. Un événement culturel unique en France. Un défi relevé grâce à l'appui de tout le village. Quatre-vingts bénévoles se sont chargés de l'accueil. Papeterie, boulangerie et divers commerces sont restés ouverts toute la nuit. Des jeunes chômeurs avaient été embauchés pour la régie. Des baladins Cinquante-deux comédiens ont préparé ce marathon théâtral durant deux mois. « Jouer une seule fois donne une intensité et une lucidité énorme », a constaté Nicolas Briançon, qui a interprété à Paris, durant sept mois, une pièce de Cocteau, aux côtés de Jean Marais. Comment une compagnie, installée dans un village perdu, a-t-elle pu conquérir un public rural, habituellement peu porté vers le théâtre et souvent négligé? Comment expliquer que les balladins aient déplacé, en 1987, plus de 40 000 spectateurs ? Plus que beaucoup de centres dramatiques nationaux. Pour Roger Louret, le théâtre est un apprentissage. « Personne n'est hermétique ni idiot. A Montclar, le public apprécie le théâtre contemporain car sa curiosité a été éveillée. Il ne s'agit, pas pour autant, de tomber dans la facilité ... en mettant du French Cancan dans du Beckett, par exemple. « Chaque fois que je viens, je me sens chez moi », sourit Muriel Robin, qui a suspendu son travail chez Michel Galabru pour venir préparer la nuit du théâtre. Une leçon de convivialité? Pour Bernard Rouyre, comédien et musicien à Montclar, le mot d'intégration n'a pas de sens. « Quelle que soit l'origine des comédiens, on travaille ensemble. C'est à l'image du village. » D LAURE LASFARGUES c N E M A D'AUJOURD 'HUI s LUMIERES D'AFRIQUE. Le Festival d'Amiens 87, jumelé avec le Fespaco de Ouagadougou, offrait en bonne place Yeelen de Souleymane Cissé (Mali) et Yam Daabo de Idrissa Ouedraogo (Burkina Faso). Ces films, pour notre plus grand plaisir, sortent dans les salles. Courez-y! Ces deux films ont une qualité première : ils font la nique à un cinéma misérabiliste dont le seul but serait de faire pleurer le spectateur nanti, le faire s'apitoyer, lui, homme d'un pays riche sur les malheurs de l'Afrique. Le Choix et la Lumière, par la simple force d'images très riches, fortes de sens et de sensibilité, émeuvent, secouent le spectateur. Idrissa Ouedraogo déclare que le Choix revendique« l'adhésion de l'humain ». (1) « Pour chaque individu, l'imagination est personnelle, intuitive. Pour moi, l'imagination est planétaire, cosmique, (2) explique Souleymane Cissé. Leurs films racontent des histoires. Celle de Niankoro, un jeune homme bambara qui fuit et recherche un père absent et menaçant. Situé dans des temps immémoriaux, cette quête et fuite le (nous) conduit d'un village au désert, de la brousse aux dunes du Sahara. Il rencontre en route l'amour de la femme du roi peul et va réinventer sa propre histoire: celle d'un enfant et d'une femme, sa mère. « A la fin de Yeelen, (3) l'enfant découvre deux oeufs sous le sable ... On croit Yam Daabo, Le Choix, de Issidro Ouedraogo que tout est fini, mais une nouvelle vie recommence. Cet enfant qui prend un oeuf et le donne à sa mère, il a le droit, le devoir, maintenant, de tout remettre à nouveau sur les rails et de faire avancer notre société. » Les personnages du Choix parlent le mossi, une des nombreuses langues du Burkina. C'est l'histoire d'un voyage, d'un choix. Plutôt que d'attendre le camion d'aide et de dépendre de secours internationaux, Salam, le père, s'en va avec sa famille à la recherche d'un lieu nouveau. Ils partent d'abord à Ouagadougou et vendent l'âne et la charette. Le jeune fils meurt renversé par une automobile. Différences - n° 75 - Février 1988 Yeelen, La Lumière, de Souleymane Cissé Ils se remettent en marche. « Mon choix à moi, nous a dit Idrissa Ouedraogo, est de susciter des émotions qui suscitent des débats. » (1) Comme dans Yeelen, les femmes sont des personnages forts. Elles émeuvent les spectateurs, elles agissent sur leur environnement. Pour le réalisateur, même la mère qui semble résignée et s'exprime peu, est capable par sa fermeté sans violence de fléchir son mari. Nous la voyons simplement porter à sa fille, que le père a attachée et condamnée au jeûne, un peu de nourriture. Et c'est ce geste banal de solidarité qui va faire changer le père d'avis. Les spectateurs de son pays, comme les spectateurs français, pourront voir le film en version originale mossi, sous-titrée français. « C'est la langue coloniale, mais comptent, avant tout, les grandes émotions universelles que suscitent les images. » (1) Au cinéma, aussi, l'échange est inégal. Ces films africains sont encore plus fragiles, même s'ils croulent sous les récompenses; Yeelen, premier film d'Afrique noire à être distingué à Cannes, sort dans un grand circuit, mais avec une publicité discrète. Yam Daabo, tout aussi primé que le film malien, ne doit son arrivée sur nos écrans qu'à la ténacité de son auteur et au courage d'un distributeur indépendant. Alors n'attendez pas! D CHRISTIANE OANCIE (1) Entretien à Différence. (2) Positif, décembre 87, nO 322. (3) Libération, 2 décembre 87. Film Roir .sur lBS BlaRCS Enfin un film sur l'aide humanitaire ! Y a bon les Blancs de Marco Ferreri (La grande bouffe, Touche pas la femme blanche, La dernière femme) est venu combler un vide. La thèse de Ferreri est limpide : toute aide humanitaire est perverse. Elle est le fruit d'un subterfuge par lequel un colonialisme nouveau succède à l'ancien •.. De quoi s'agit-il? De l'opération « Anges bleus» : cinq camions rutilants bourrés de ... spaghetti et de lait condensé s'acheminent vers les populations déshéritées du Sahel. L'équipe est européenne et la caméra s'appesantit particulièrement sur le couple composé de Marushka Detmers (une jeune Hollandaise en mal de vivre) et de Michel Placido (un conducteur en manque d'affection et d'emploi stable). Peu à peu la caravane (que Ferreri veut an ti-thèse du Paris-Dakar) cahote sur la résurgence des problèmes personnels des convoyeurs blancs, l'ignorance des moeurs locales. L'incompréhension se développe entre les porteurs d'aide et ceux qui sont sensés en être les bénéficiaires. Le malentendu se (dé)noue dans une scène inspirée d'un rite vaudou: la coupe Detmers/Placido se fait bouffer (au sens propre) par un groupe d'Africains parlant bambara. Y a bon· les Blancs ! Toutes les analyses un peu sérieuses sur ce phénomène hyper-médiatisé de l'aide humanitaire ont montré, à la lumière des rapports structurels entre le Nord et le Sud, les effets pervers, inégalitaires. Marco Ferreri a eu raison de vouloir illustrer cette réalité par des images de fiction. Mais son film pêche par un excès d'éclatement. Tout y est appréhendé, mais superficiellement. Le spectateur reste perplexe devant un propos qui voudrait brasser toute l'actualité. L'ambiguité du message demeure, nourrie des stéréotypes en vigueur dans le Nord. Voici un film qui à vouloir brasser trop de sable s 'enlise dans une générosité mal assumée. Voire très ambiguë. Combien de spectateurs n'en retiendront qu'une vague histoire de cannibales ?O CHER/FA B. El

El A6ENDA FEVRIER 5 Salif Keita est à Paris pour deux concerts à 18 h 30 au Théâtre de la Ville. Courez-y! 7 Dernier jour pour la Compagnie de Barbarie et son Femmes de cirque à Paris, sous le chapiteau d'Annie Fratellini. Ren. : 43.56.78.37. 8 Cycle cinéma égyptien à la Maison de l'étranger de Marseille. Avec Omar Sharif jeune, et plein de stars encore largement méconnues. Rens. ; 91.95.90.15. 8 Jusqu'au 6 mars. Mercier et Carnier, de Samuel Beckett. C'est un événement rare ... et mondial: la création d'une nouvelle pièce de Samuel Beckett. Le texte. ? Le voyage impossible et fantasque d'un couple d'amis inséparables et cocasses. Maison des arts de Créteil. Tél. : 48.99.94.50. 9 Jusqu'au 13, Festival de jazz au Cargo de Grenoble. La Compagnie Lubat, Claude Barthélémy Trio, Tete Montiliu et Barney Williams Quartet, Eddy Louiss ... et bien d'autres: 17 concerts au total en 5 jours. Acrrochez vous! Rens. : 76.25.05.45. 1 0 Un cadeau du musée de l'Homme, avec la prolongation de l'expo, jusqu'au 29, Ancien Perou, vie, pouvoir et mort. Rens. ; 45.53.70.60. Aux mêmes dates, jetez donc un coup d'oeil appuyé à l'exposition consacrée aux jouets d'enfants, dans le hall d'entrée. C'est gratuit et l'on y trouve des objets magnifiques. 1 0 Cycle Pierre Boulez par l'Orchestre national de Lille. C'est à Amiens, à la Maison de la culture. 20 h 30. 1 ~ Soirée Blues au Cithéa, une petite -- salle courageuse, mais en difficulté. N'y aurait-til de place que pour les grandes? Cithéa, 112, rue Oberkampf, 75011 Paris. Tél. ; 43.57.35.13. 1 ~ Jazz en Italie, au Dunois. Avec __ Franco d'Andrea, Aldo Romano et d'autres. Tél. : 45.84.72.00. 1 6 11 était au Théâtre de la Ville à Paris, le revoici à Marseille le 16, Narbonne le 17, Toulouse le 18 et Yerres le 20. LLuis LLach sait toujours créer le miracle de la mélodie. 1 6 Concert-bal de la Compagnie Lubat (encore eux ... ). Des personnages venus tout droit de l'Ouest, le vrai (celui des bons vins) et qui ont laissé traîné leurs oreilles un peu partout. Ça donne du jazz, de la musique à racines et à fête. On est donc au Rutebeuf de Clichy ce soir-là. Rens. ; 47.39.28.58. M COSMOPOLITES u s QUE s AMAR PAS AMER. Il a grandi aux sons d'Hendrix, a accompagné Higelin, B.B. King puis, depuis 7 ans (il en a 29) a créé son propre groupe. Présélectionné pour le prochain festival de Bourges, Amar n'a sacrément pas peur du blues ... Il s'appelle Amar comme d'autres s'appellent Chuck. Il joue, chante, trépigne le blues mais il ne l'a pas. Même que c'en est impressionnant d'énergie. Pas pour rien qu'il s'est baptisé Sundy ... Indéniablement, il démé- na-ge 1. .. Il a la bouche qui se tord tandis qu'il martyrise ses cordes de guitare. Est-ce une grimace scénique, un rictus de bête ou l'extrême jouissance à jouer la musique qu'il aime? ... Certes, c'est plutôt drôle de le voir s'agiter, en sautillant d'un pied sur l'autre tout en scandant les trémolos de guitare par des habituels « Est-ce que vous êtes bien là ? Est-ce que vous êtes prêts ? ... Les mots du blues, quoi. Mais surtout qu'on ne s'y méprenne pas: Amar, excellent musicien, joue de sa guitare autant que de sa dérision. Il démontre ainsi que le blues, le vrai, l'authentique, n'a nul besoin de mise en scène; qu'il se suffit largement dans sa seule puissance musicale, son rythme aux échos archaîques, universels. Concert généreux ... Le sax ferme (évidemment) les yeux pour s'adonner à des improvisations endiablées. C'est qu'il joue du blues, lui aussi ... Perpétuant la tradition du genre mais en l'innovant égaIement dans ce qu'Amar et lui ont de plus personnel et sans doute de tout à fait nouveau en France ces dernières années : la rage. Ah ! oui! Parce qu'on oubliait de vous dire: Amar, tête du groupe, n'est ni black ni américain. Il est beur. De banlieue. Mais si on oubliait cette précision, c'est parce que fondamentalement, il est musicien. Et il dé-mé-na-ge ... SOUAO BELHAOOAO DOUE. Rare est l'improvisateur qui atteint une audience large sans diluer son travail. Encore plus rare, un artiste qui voit son audience s'étendre aussi vite que sa vision musicale. A 33 ans, Pat Metheny - guitariste virtuose, compositeur éclectique, pionnier de la guitaresynthétiseur - se trouve dans une position très enviable. Musicien très précoce, Pat Metheny a entamé depuis deux ans, une vraie course à la production musicale, avec deux albums

Song X avec le légendaire saxophoniste

alto Ornette Coleman, Charlie Haden à la contrebasse, Jack DeJ ohnette à la batterie et Denardo Coleman à la batterie et aux percussions et Still Life (Talking), excellent s'il en est. Il a également composé la bande sonore de The Falcon and the Snowman, mis en scène par John Schlesinger. Cette bande sonore comprenait le tube This is not America par David Bowie et le Pat Metheny Group. Né à Lee's Summit, près de Kansas City, le 12 août 1954, Pat Metheny est musicien professionnel depuis l'âge de 16 ans. Adolescent, il enseignait à l'université de Miami et au Berklee College of Music de Boston et entra dans le groupe de Gary Burton à 19 ans. En trois ans (1974-1977) il participa à trois disques ECM du vibraphoniste (Ring, Dreams So Real, et Passengers). Pat Metheny a joué et enregistré des disques avec les musiciens les plus novateurs des deux dernières décennies : Gary Burton, Paul Bley, Sonny Rollins, Paul Motian, Dave Liebman, Jack Dejohnette, Charlie Haden, Billy Higgins, Ornette Coleman et le brésilien Milton Nascimento. Le Pat Metheny Group a fait en 1987 une tournée mondiale : URSS, Europe, Etats-Unis, Canada, Japon et Amérique du Sud. En automne, Pat Metheny a enregistré en première mondiale une composition écrite spécialement pour lui par un compositeur de musique contemporaine, l'américain Steve Reich. 0 Still Life, Pat Metheny group, Geffen Records. Song X, avec Omette Coleman et Charlie Haden. Pat Metheny sera au Zénith le 2 mars, puis entreprendra une tournée française. LIMPIDE. La trentaine et déjà une longue carrière derrière elle, Marie-Claire Seguin, est à la fois une « pro » et une valeur montante. Elle nous vient du Québec, elle sort aujourd'hui son neuvième album Minuit 1/4. Peu connue en France, malgré une certaine mode canadienne, la presse québecquoise l'a encensé, et la jeunesse lui a taillé une place de choix. « Fiévreuse, limpide, voix-source, voix ondulante, entre opéra et rock, entre ballade et blues, entre Amérique et Europe », dit-on là-bas. En juillet 1987, pour le vingtième anniversaire du Festival d'été à Québec, elle a chanté, avec Maurane, devant quelques 20 000 personnes et fait un « tabac ». Elle sera au Théâtre de la Ville le 8 et le 12 mars prochain. 0 Minuit 1/4, Marie-Claire Seguin. B LOC-NOTE s YVES THORAVAL 1 MA. Un nouveau sigle dans le firmament culturel européen: l'Institut du monde arabe. Il est enfin o~vert, après moult péripéties et son superbe bâtiment de verre « moucharabié » en alvéoles d'acier se dresse face au chevet de Notre-Dame, ô horreur!, avec une cafétéria qui a la même vue que la Tour d'Argent, en bien moins cher! Nous reviendrons longuement dans Différences sur ce vaisseau tangant des Mille et une nuits culturelles, mais sachons déjà qu'il est totalement public et que tout un chacun peut consulter les 40 000 livres de sa bibliothèque consacrés au monde arabo-islamique, dont la civilisation matérielle est très joliment présentée dans son musée qui expose un échantillon presque parfait de tout ce qui s'est fait de beau dans cette partie du monde, de la Reine de Saba (avant l'Islam) jusqu'aux créateurs les plus contemporains. GRANDS PRIX. L'Etat, le ministère de la Culture, récompense chaque année des créateurs qui se sont particuliàrement illustrés dans leur domaine. Pour la littérature, après Kateb Yacine l'an dernier, le lauréat 1987 (à côté de Johnny Halliday pour la chanson !) est le merveilleux poète judéoalexandrin francophone, Edmond Jabés (dernier ouvrage: Le Livre lu en Israël, Gallimard), pendant qu'Antoine Vitez se voit couronné pour le théâtre, ainsi qu'un passionnant vieux monsieur, Nino Frank, pour la traduction, qui a littéralement « découvert» la littérature italienne au public français. LE MASQUE. En 150 masques (plus des costumes, des échasses, etc.), un voyage à travers 30 pays nous est proposé jusqu'au 4 avril par l'exposition: Le Masque et les Cinq Mondes, concoctée par la Maison des Cultures du Monde à l'Espace Art 4 de La Défense. C'est un reflet à la fois esthétique, religieux, un itinéraire à travers les thérapies et les mythologies, de peuples des 5 continents: l'une des plus importantes manifestations sur ce thème jamais organisée en France. DAMAS. Rien à voir avec la capitale de la Syrie mais avec LéonGontran Damas, l'un des trois « pères fondateurs» de la Négritude, avec Senghor et Césaire. L.-G. Damas, poète guyanais, mort il y a dix ans, Différences - n° 75 - Février 1988 L'Institut du monde arabe: enfin ouvert. aura été l'un des plus grands poètes des Caraïbes et de la littérature francophone hors de l'Héxagone, un pont également entre la culture négroaméricaine et la culture française. Sous l'égide de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT), un hommage multiforme sera rendu toute l'année 1988 au grand Guyanais, dans le monde et surtout en France, dans les lycées, dans les universités, par des rencontres, des manifestations publiques, des expositions et des concerts de jazz, un art que le poète appréciait tout particulièrement. Pour se joindre à cet hommage, prendre langue avec l'ACCT. 1 MMIGRES.Non, pas ceux que vous croyez, une fois n'est pas coutume, mais les nombreux Français représentant toutes les branches du cinéma : réalisateurs, acteurs, costumiers, partis outre-Atlantique depuis cette fatidique année 1896 où Félix Mesguich présenta une nouvelle invention française, le Cinématographe» sur le sol américain. Depuis, Hollywood les a tous vus passer : René Clair, Michèle Morgan, Montand, Signoret, Truffaut, Adjani, etc. Mécennés par le Crédit Foncier, une exposition et un bouquin passionnant, Paris-Hollywood (éd. Hazan) commémorent magnifiquement cette époque d'une immigration parfois assez dorée. 0 IMA : 23, quai Saint-Bernard, Paris 75005. Tél. : 4634 25 25. ART 4/La Défense: 15, place de la Défense. Tél. : 49 00 15 96. ACCT: 13, quai André-Citroën, Paris 75015. Tél. : 45 756241. 1 7 JuSqU'aU21 février,puis en alternance jusqu'au 23 avril. Anaca(Jna. ge Jean Metellus. Haïti, première république noire au monde, a été marquée pa.r d'incessantes tragédies. La pièce raconde l'histoire de Sa dernière reine, Aracaorta : Après la conquête espagnole, le peuple de l'île sera déciné. Théâtre national de Chaillot. Tél. : 47.27.81.15. 10• Stan · Getz, charme\lr, véhément et raffiné, un grand du saxophone. POur une soirée à Marne-la-Vallée. Tél. : 60.05.64.87. 10A Aubervilliers, au Caf'OMJA, dont •• il faut surveiller la programmation, Gilles Langoureau est de passage. Il est rare faites donc le détour. Rens. 48.34.20.12. 1 0 Retour à Clichy, toujours au • Rutebeuf; C'est la grande Nuit du laser et du clip. Feront-ils mieux que TV6 ? 10 Cycle Jorge Luis Borges à la Maison de l'Amérique latine, à Paris. Pour les hispanophones, hommages et conférences sur le maître. Rens. : 42.22.68.00. 11 Au Dunois, Alan Silva et le Celestrial communication orchestra. Si VOuS le rateZ aujourd'hui, il repasse le 28. Tél. : 45.84.72.00. 1 ~ Karim Kacel fait l'Olympia. Ouf! -- Vite, tous boulevard des Italiens. 16 Toujours à la Maison de l'Amérique latine: Haïti en question, avec Christian Rudel, grand reporter, c'est à 18 h 30, 217, bd Saint-Germain, 75007 Paris. MARS 1. 9 Maurane à Choisy-le-Roi. La voix du Festival de Bourges 1987 : sûrement le concert de la semaine (c'est samedi soir}. C'est à 20 .h 30 au centre Paul-Eluard. Rens. : 48.90.89.79. BRETON. Des cours à Paris, tous les mardi(l7 h-19 h) au lycée Buffon et tous les mercredis (13 h-15 h) au lycée Volta~re. Cours gratuits, ouvert à tous. Rens. Ronan Tremel, 40.11.59.57. JESUITE. Deux séries de conférences j:s;j~~Sâ~S fuCharlesi~~)~r~ g~s sl~:r~aCharles;~~s le 16 février, c'est au Japon, carrefour des spiritualités orientales que l'on vous initiera. En mars, débuterau.t\ cyçleslJ.r Développement et sous-développement. ... Rens. : 45.44.58.91. iii Les enlants d'abord Décembre à Montreuil, c'est d'abord le salon du livre pour enfants. Difficile en celle troisième édition de distinguer entre le salon commercial, la foire aux livres et l'Apostrophe-vitefait- sur-Ie-gaz. Problème de croissance ou dérapage ? Tant pis, voici la récolte. MON BEL ORANGER Un livre et une collection de chez Stock. Tout a commencé en 1971 avec un livre merveilleux portant ce nom et écrit par le romancier brésilien José Mauro de Vascoucelos. Il racontait l'histoire d'un enfant aux prises avec l'effroyable misère des favelas brésiliennes. Ce livre disait la faim, la honte mais aussi l'amour et le courage. De son succès est née l'idée d'une collectiOl qui rassemblerait des textes pouvant être lus autant par les adolescents que par leurs parents. Les thèmes sont constants

il s'agit d'enfants

aux prises avec un grave problème : guerre, maladie, racisme, misère ... Mais ces livres ne sont pas tristes ; au contraire, ils sont toniques, pleins de vie et d'humour, montrant que les obstacles peuvent et doivent être surmontés. Une trentaine de titres sont parus, venus de tous pays et horizons. Citons: - « Moi, je s'rai quelqu'un» : décision que prend Rap, un petit noir du sud des Etats-Unis. Ecrit par Hadley Irwin. - « On m'a trouvé» ; c'est Alex l'enfant adopté à la recherche de son passé. Ecrit par Nina Bawden. - « David, c'est moi» ; un enfant ballotté à travers l'Europe au hasard de la guerre et qui parvient à retrouver sa famille et son identité. Ecrit par Anne Holm. - « Une nouvelle vie plus deux chats» ; pour Alison, adolescente anglaise pour qui tout bascule le jour où sa maman meurt. Ecrit par Andrew Taylor. - « Une trompette ex-tra-or-di-naire » ; celle de Ratbag, adolescent des faubourgs populaires de Londres, dont la passion de la musique va transformer la vie. Ecrit par David Line. PAROLES ESSENTIELLES Une collection créée par Vif Argent; s'adresse aux 8-11 ans jusqu'à 90 ans •.. Ce sont des albums documentaires qui abordent les problèmes du monde actuel. Une première partie les illustre à travers une histoire; celle de l'illettrisme dans « Illettré ! ignorant! » ; ou celle de la guerre et de la faim dans « Bouffe, boeuf et bang ! » : ou encore un hymne à la protection de la nature dans Pour la terre. La deuxième partie documentaire donne des pistes de recherche pour ceux qui souhaitent approfondir le sujet. On y trouve des proverbes et citations magnifiques de tous horizons, des définitions, des statistiques, des témoignages et bibliographies. Une collection que toutes les écoles primaires devraient avoir ; absolument. SYROS Un éditeur à découvrir ... d'urgence. A signaler avant tout car ils sont rares: des livres bilingues s'adressant aux plus petits comme aux grands; essentiellement en version portugais-français, arabe-français. On trouve ces livres dans la collection animée par Suzanne Bukiet. Citons : - Ecritures de S. Bukiet. A la fois recueil de contes et livre d'art graphique. Cinq grands contes illustrent les cinq grandes familles d'écritures, chinoise, cyrillique,'arabe, indienne et latine. - Mosaïques (bilingue arabe-français). H. Huneïdi et H. Muller. Une initiation à l'art de la mosaïque à travers une promenade dans le bassin méditerranéen. - Séverin et l'ordinateur, Salem et l'ordinateur (version arabe avec traduction française). Par J.-O. Cloud. Une initiation à l'informatique, ses possibilités et son histoire. Autre collection passionnante dirigée par Germaine Finifter : Les copains de la classe. L'auteur se fait reporter-conteur pour nous faire découvrir « ces copains de classe» venus d'ailleurs, dont on parle souvent, mais qu'on écoute rarement. Dans ces pages, ils disent leur vie passée, l'histoire de leur pays, leur itinéraire, leurs coutumes, des contes, des recettes de cuisine ... Toute leur vie quoi! Citons: Nous venons du Portugal de G. Finifter et L. Weber. Nous venons d'Algérie de G. Finifter et D. Farrès. En préparation, entre autres, Nous venons du Viêt-Nam. Chez Syros encore, un livreclé: L'amiral des mots, de Pierre Aroneanu et G. Lo Monaco. Préface d'A. Jacquart. Grâce à lui, on réalise que les mots qui ont pris place dans le dictionnaire, ont les origines les plus diverses. Des livres bilingues aussi au stand de la SONUMED (Société de diffusion du livre arabe, à Montreuil), dont un album : Alif ou le banquet des lettres: l'alphabet arabe et une fable fantastique se renconLes mots, sous toutes les trent. Un cocktail original et coutures. une excellente initiation à la calligraphie. Les sciences à la portée des enfants aux éditions Ophrys dans une collection dirigée par le Palais de la Découverte. Les enfants y découvrent l'énergie, l'eau, le vent, l'hérédité ... J'ai sous les yeux l'Arc-en-ciel qui amène à se poser des questions sur tout l'univers des couleurs depuis le caméléon jusqu'à la télévision. Très réussi. MAGNARO Pour les adolescents, El Romanes, de Sandra Jayat. Un récit où auteur et personnages sont des gitans. S. Jayat raconte comment de 1936 à 1944, un jeune guitariste gitan lutte pour sa liberté. Une histoire où la souffrance et la mort côtoient (suite p. 34) La /lhiloso/lhie ou la religion Il Y a 700 000 juifS en France. Seule une minorité pratique le judaïsme, mais les cercles d'études des textes religieux se multiplient. Renaissance religieuse, recherche philosophique ou démarche culturelle ? Verdier, Albin-Michel, Cal man - L é v y, B ibliophane, le Cerf. .. C'est peut-être la quasitotalité des grandes maisons d'édition qu'il faudrait citer. Toutes ont décidé d'ouvrir un rayon Judaica . Les textes fondamentaux du judaïsme connaissent un regain d'intérêt. Le mouvement est impressionnant, il touche tous les cercles intellectuels et les livres se vendent par milliers, tandis que les groupes d'études se multiplient. Marc- Alain, professeur de centaines d'élèves à Paris, explique: « Levinas est le principal moteur de ce courant. Il est à placer parmi les plus grands philosophes contemporains en France et à l'étranger. Or, il a montré que le Talmud était à la hauteur et peut-être même au-delà des autres écrits philosophiques. Grâce à ses recherches, les études juives possèdent maintenant une place à part entière dans l'Université. Certains milieux juifs n'ont plus de complexes à étudier leurs textes. » Mais cette recherche, si elle concerne les juifs au premier plan, dépasse largement ce cadre. Pour ne citer qu'un exemple, dans Les entretiens avec les philosophes (La découverte) sur les philosophes français contemporains, Levinas est interrogé essentiellement sur ses recherches talmudiques. Ses réflexions se font au centre de débats généraux sur la philosophie. De nos jours, le Talmud est devenu incontournable dans le panorama général des sciences humaines. Les maîtres et professeurs de Talmud ne cachent pas leur surprise et parfois même leur joie. Ils retrouvent beaucoup d'élèves qui n'ont généralement aucune pratique religieuse. La société en crise qui se cherche des réponses après les échecs répétés de presque tous les systèmes joue un rôle prépondérant. Les synagogues et les églises battent des records d'affluence, mais les professeurs de Talmud précisent que cette recherche des textes s'inscrit rarement dans une quête religieuse. « Il s'agit d'un regain d'intérêt pour un message qui a fait ses preuves en passant par toutes les civilisations sans jamais s'altérer. » Guy Spingarn, professeur du CERJ (Centre d'études et de réflexion juive) de Lyon, distingue deux réflexes qu'il considère comme très différents: « Il y a retour au superstitieux et retour à l'étude. Certains pseudo-religieux se rendent dans les lieux de culte comme on va au casino: je Différences - n° 75 - Février 1988 joue et j'espère gagner un prix. Ce n'est pas notre démarche. Nous étudions pour comprendre ce que nous sommes. » On ne peut pourtant s'empêcher d'être perplexe quand on le rencontre: il porte les tsitsith traditionnels, la barbe et la kipa, il refuse de toucher à toute nourriture qui n'est pas abattue rituellement, il n'enseigne que des textes qu'il considère comme sacrés et qui lui règlent toute sa vie. Qu'est-ce qui le différencie d'un leader de secte? « Deux différences essentielles. Ce sont les hommes qui font un gourou. Moi je ne suis pas prêt à jouer ce rôle. De plus, la Bible apprend aux gens à être actifs pas passifs. Dans le judaïsme, quand tu voudrais t'installer, t'asseoir, être sûr, c'est lui-même qui te remet en question. » Philippe, présent au cours, ajoute: « La tradition nous dit que Dieu ne voulait pas que les textes soient écrits parce qu'il laissait à l'homme une liberté totale de discuter et d'adapter son message aux différentes époques. Le message ne peut être trahi, mais au niveau de l'interprétation, chacun est libre. Pour être honnête, il faut aller encore plus loin: c'est si on ne veut pas trahir les textes qu'il faut les remettre en cause continuelle~ ment. Voilà dix ans que j'étudie et je ne sais toujours pas pourquoi. » lean-Paul poursuit: « Je n'étudie pas les textes uniquement par plaisir intellectuel, c'est aussi un commandement en soi. Mes parents sont de Constantine, une ville que l'on appelait la petite Jéru~ ~ .:l ~ t.":I La communion juive, Bar Mitzva. salem avec des synagogues à chaque coin de rue. Quand la culture française a fait son apparition en Algérie, les gens se sont précipités dessus, ils ont tout fait pour s' oêcidentaliser. Je crois que seules les pratiques juives les plUs générales sont restées, les fêtes, par exemple. Quand les pieds-noirs sont arrivés en France, ils ont emmené avec eux les quelques vestiges de leur culture. Nous sommes les enfants de la deuxième génération et la crise est sévère. J'étudie en grande partie pour savoir pourquoi je vois mes parents agir comme des automates. » Et l'explication que donne le rav (maître) au début de son cours résume assez bien tous ces sentiments réunis: « J'étudie le Talmud, d'abord parce que je veux comprendre comment un juif réfléchit et donc comment moi je réfléchis. » 0 BERNARD ABOUAF Il En direct du Comité de Castres Une sous-préfecture ordinaire Castres, 50 000 habitants, entre Toulouse et Montpellier, une ville où il peut faire bon vivre à condition de ne pas être basané, chevelu .. . diffé re nt. En e ffet , la ville natale de Jaurès est aujourd ' hui sous la coupe - plutôt rase - des parachutistes. Ils sont un mill ier environ , essentiellement des engagés. Formés pour se battre, pour tuer. Castres le sait. Castres se t ait. Les parachutistes gagnent - et dépensent - suffisamment d'argent pour être respectés des commerçants et des élus. La communauté maghrébine, un millier de personnes également, respecte cette loi du silence, le couvrefeu officieux: ils évitent un certain nombre de bars et de quartiers après 20 h et s'enferment chez eux quand, comme en juin 1983, une ratonnade est organisée par les parachutistes. En cas d'agression , ils ne portent même pas plainte, car ils savent le chantage à l'emploi qui sera exercé sur eux au commissariat de police, ils connaissent l'indulgence de la justice à l'égard de leurs agresseurs. Mais un soir, dans une boîte de nuit, un jeune Maghrebin semble avoir oublié la consigne. Il boit. Il regarde les parachutistes. Inadmissible. Poursuivi dans les rues de Castres par trois paras, il est rattrapé, assassiné à coups de couteaux. Il s'appelait 5nouci Bouchiba. Il avait 32 ans. LA STRATEGIE DE REDUCTION Dans un premier temps, l'armée, la police, la préfecture et la municipalité tentent de réduire le crime à une rixe entre jeunes gens éméchés. Cette volonté d'étouffer l'affaire, présentée comme une stratégie de réduction des tensions entre communautés, suscite au contraire la révolte

se sentant encore une fois

niés, alors que l'un des leurs vient d'être tué, les jeunes d'origine maghrébine sont révoltés . Les militants du MRAP sont décidés à réagir. Ils invitent les associations locales en relation avec les immigrés à leur réunion mensuelle. Ils y sont généralement une dizaine ; ce soirlà, plus de 150 ' Ils décident d'organiser une manifestation le samedi suivant

plus de 2 000 personnes y par-

Snouci : assassiné par des paras. ticipent, en silence. Deux simples banderoles en tête de manifestation. « Le racisme tue », lit-on sur la première. « Nous voulons vivre ensemble » sur la seconde tenue par des enfants de toutes origines. Mais ce mouvement de reconnaissance d'une communauté ne s'arrête pas après la manifestation. Le samedi suivant une plaque commémorative est symboliquement posée sur la maison où 5noussi a été assassiné . Une commission extra-municipale « Vivre ensemble» a été demandée. Une dé-" légation de jeunes et des associations est reçue pendant plus de 3 h par le sous-préfet. Des réunions avec des représentants de la police, de l'armée, de la justice vont être organisées. La demande faite par le MRAP, voici quatre ans, de donner à une rue le nom « de l'amitié entre les peupies » a enfin été entendue. Dans les maisons de quartier les jeunes ont rédigé des cahiers de doléances où ils ont rassemblé leurs témoignages du racisme quotidien dont ils sont victimes. Aujourd'hui, enfin, les problèmes de racisme ne sont plus éludés à Castres et les institutions semblent réellement prêtes à prendre des disposit ions pour que les ressortissants de toutes les communautés vivent mieux ensemble. Fallait-il un meurtre pour cela 10 MONIQUE FAURE Mouvements o KANAKY. Action encore à Rodez ou une stèle portant le nom des dix militants du FLNKS assassinés à Hienghène a été inaugurée par plusieu rs associations dont le MRAP. Des panneaux d'explication mettant en cause l'acquittement des meurtriers ont été affichés aux grilles du Palais de justice. o FOUDRES. Pour avoir débaptisé la rue des Bons-Français en rue Malik-Oussékine, le MRAP de Nantes s'est attiré les foudres du Front national local: c 'est une « nouve lle provocation antifrançaise » ont claironné les amis du gros blond avec une chemise noire (dixit Cabu). Malik était français, répond le Comité de Nantes, mais seulement un peu trop basané pour éviter les matraques de policiers eux aussi français. Mais que la victime soit française' ou pas, le MRAP voulait par son geste honorer « toutes les victimes du racisme et de la haine ». Le Front national? « La France qu'il prétend incarner, c'est celle qui juge au faciès, celle qui visite l'Afrique du Sud sans y voir l'apartheid, celle qui défile à Madrid avec les nostalgiques du franquisme, celle qui réduit les génocides juif et tzigane à un détail. » Ça s'appelle un retour de flamme . o MALIK EST LA ! Outre sa participation à la manifestation du 5 décembre (date anniversaire de la mort de Malik Oussékine), le MRAP a bougé un peu partout en France pour que les mémoires n 'oublient pas. A Poitiers, il était partie prenante pour baptiser un amphi du nom du jeune étudiant battu à mort. A Chateauroux, Dreux, Vanteau-Guérin, Nantes, Rennes, Saint-Lo, des actions similaires ont eu lieu, chaque fois à l'initiative ou avec le soutien des comités locaux. A Agen, deux cents personnes se sont retrouvées place des Droits-de-I'homme pour demander qu'un lycée porte le nom de Malik Oussékine. Quelques jours plus tard, le Comité d'Agen participait à la journée internationale des droits de l'homme avec un débat autour de l'Afrique du Sud. La presse locale a largement rendu compte de cette action. o DEHORS. A la venue de Le Pen dans la région de DouvaineThonon, quinze associations, dont le MRAP, ont appelé à une manifestation et ont été reçues à la mairie pour protester. Selon la presse locale, Le Pen s 'est pris un bide : peu de présents dans son meeting. A Nice, la convention du Front national a aussi suscité de nombreuses protestations et une manifestation. Pendant que le Menhir faisait trempette dans la belle bleue, ses aides de camp ont annoncé la prochaine sortie d'un argumentaire-programme pour les présidentielles. On en reparlera sans doute. o BAVURE. Dans une conférence de presse tenue avec l'aide de la FETRANI, les militants du MRAP des Yvelines ont dénoncé la bavure dont fut victime voici quelques semaines Mme T. .. Cette femme est congolaise, ce qui suffit peut-être à expliquer qu'elle ait pu être retenue sans charge, insultée et battue dans un commissariat. La plainte qu 'elle a déposée après quinze jours d'hôpital a été rejetée. Celle du policier (pour outrages et violences) a été acceptée. La justice calédonienne fait des petits en métropole. MRAP MINITEl 36-15 Tapez MR~" r ELUS Réuni à Paris le 9 février dernier, le Conseil national du MRAP a élu la nouvelle direction de l'association, Ont été élus au Bureau national: Jacques Chevassus, Pierre·Marie Danquigny, Charles Palant, George PauLangevin, Mouloud Aounit, Marie-Thérèse Denis, Marie-Christine Lucas, René Mazenod, Bertrand Bary, Jean Blum, Gérard Coulon, Dominique Dujardin, Alain Jovelin, Baya Jurquet, Paul Muzard, Gérard Nicol, Albert Jacquard, Alain Miranda, Ro/ant Rappaport, Véronique de RUdder, Anne-Marie Dumas, Albert Lévy, Stéphane Meyer, Jean-Louis SagotDuvauroux, Alain Calles, Dominique Coujard, Gisèle Jean, Jean·Albert , GUidou, René Maurin, Pierre Krausz. Le nouveau secrétariat du mouvement sera désormais composé d'Albert Lévy (secrétaire général), René Mazenod, Marie-Christine Lucas, Stéphane Meyer, Jean-Louis Sagot-Duvauroux, Marie-Thérèse Denis, Mouloud Aounit et Anne-Marie Dumas. A la présidence du MRAP, seront désormais Rolant Rappaport (président délégué), Albert Jacquard, Charles Palant, George Pau-Langevin, Alain Miranda, Jacques Chevassus, Véronique de Rudder et Pierre-Marie Danquigny.O Pau : des hommes ou des chiens ? Le Comité pal o is du MRAP exprime son indignation sur les conditions dans lesquelles s'est déroulée la perquisition au camp des nomades du Cami-Salié à Pau le 1 5 décembre 1987. Les témoins et victimes de cette perquisition attestent de la brutalité avec laquelle elle a eu lieu. Rechercher d'éventuels voleurs est le rôle de la police, assimiler toute une communauté à des délinquants, cela s'appelle du racisme. Tsiganes et Gens du voyage vontils encore longtemps être traités comme les parias de notre société n'ont-ils aucun droit 1 Sont-ils des citoyens de seconde zone 1 Le MRAP fera connaître aux autorités compétentes, y compris à Claude Malhuret, secrétaire d'Etat aux Droits de l'homme, son indignation. Voici le récit que livre la communauté perquisitionnée. Suivent 56 signatures. « Cette année 1 987, ça fait la troisième fois que les forces de police et de gendarmerie investissent notre terrain . Et, cette fois-ci ... ça dépasse les bornes. On n'avait pas vu ça depuis 39-45 ' « je m'en rappelle bien» dit un ancien. « Ce n 'était pas la police, c 'était la Gestapo. » Une ce ntaine de policiers ont encerclé notre terrain, avec des chiens et des armes. Enfants, jeunes, adultes et personnes âgées ont été photo- POUR MEMOIRE • PAS D'EXPERTISE. La chambre d'accusation de Bordeaux rejette la demande du parquet d'une « expertise historique» de l'affaire Papon. Les avocats des parties civiles, parmi lesquelles le MRAP, avaient dénoncé cette « expertise» comme un artifice de procédure. (S janvier) Différences - n° 75 ~ Février 1988 grahiés avec la pancarte, comme au temps des camps de concentration, "avec prise d'empreintes, en public, sur la route, devant les passants qui s'arrêtaient étonnés, y compris une femme enceinte en chemise de nuit. Les caravanes ont été fouillées, avec même des dégâts et de la casse, sans respects pour les objets personnels de nos défunts, en vidant le linge des placards, en fouillant même les couches d'un vieillard de 80 ans, garabataire depuis cinq ans ... démailloté ! Le tout, accompagné de commentaires du style: « C'est le bordel ici 1 », « Vous êtes des voleurs, vos enfants et vos petits-enfants le seront aussi! », sans parler des propos désobligeants pour des jeunes filles sorties du lit ... Un gendarme, maître-chien, excitant son chien, n'a rien trouvé de mieux à dire : « Nos bêtes n'ont pas encore mangé .. . » Il faut préciser que , malgré ce qui a été dit, la perquisition n'a donné aucun résultat qui permette au juge d'instruction d'avancer dans son enquête. Nous serions très heureux qu 'il nous fasse un mot d'excuse et qu 'il nous restitue les photos et les empreintes qu'il nous a prises, de force, nous mettant ainsi dans le rayon des malfaiteurs fichés.O • DIVIN. Au cours de la Convention du Front national qui se déroule, la ville de Jacques Médecin, Jean-Marie Le Pen affirme à nouveau sa conviction d'être investi d'une mission divine. Deux manifestations de protestation, dont l'une à l'appel du MRAP, réunissent des milliers de personnes. (8, 9 et 10 janvier) D EXPULSION. Contre l'expulsion d'un jeune d'origine marocaine, âgé de 21 ans et vivant en France depuis l'âge de 4 mois, le MRAP a publié un communiqué de protestation. Il y dénonce une décision absurde et lourde de conséquences : « Cha'lb n'est jamais allé au Maroc; il ne connaît que la langue française; fiancé avec une jeune française, il est assuré d'obtenir un emploi à Sète. Alors que sa réinsertion est possible, son expulsion constituerait un cruel déracinement, inspiré par d'étroites conceptions xénophobes. » Les comités de l'Hérault se sont mobilisés contre cette décision d'expulsion. D LE MRAP ET LE CODE. Après la publication du rapport de la Commission de la nationalité, le MRAP - sous réserve d 'une analyse détaillée - relève que ce texte accorde aux jeunes de 16 à 21 ans, nés de parents étrangers sur le sol français, la reconnaissance légitime de leur nationalité française. Une telle" orientation positive, qui contredit le projet gouvernemental de réforme du Code de la nationalité, prend en compte les protestations exprimées contre ce projet dans les milieux le plus divers. Cependant, le MRAP ne peut souscrire aux restrictions apportées aux acquis du code actuel concernant l'accession à la nationalité française par déclaration pour les enfants mineurs, les conjoints de Français, et par extension pour les enfants de parents devenus français . Ce rapport peut servir de point d'appui pour contrecarrer toutes les tentatives portant à l'esprit plus que centenaire du Code de la nationalité et consacrer l'apport irremplaçable de /'immigration dans le renouveau de la population française. (Paris, le 8. 1. 1988) 0 D PALESTINE. Le MRAP participait, le 29 décembre dernier à la manifestation de p'rotestation contre la répression dans les territoires occupés de Cisjordanie et Gaza. Albert Lévy a saisi l'occasion de rappeler la solidarité du MRAP au peuple palestinien et son soutien au projet d'une Conférence internationale sur le Proche Orient associant toutes les parties en présence : - « Les familles palestiniennes des territoires occupés, toutes frappées par cette terrible vague de violences et d' intimidation, sont des êtres de chair et de sang. Rien ne peut justifier les actes commis contre ces hommes, ces femmes, ces enfants. Rien ne peut nous empêcher de leur manifester notre soutien lucide et fraternel », a déclaré le secrétaire général du MRAP. - « Les droits élémentaires bafoués, les tanks et les fusils contre des enfants, des procès expéditifs, la fermeture des universités , l'ouverture forcée des boutiques de commerçants en grève, le blocus alimentaire contre une population rebelle : tout cela va à l'encontre des valeurs dé mocratiques auxquelles la population d' Israël est attachée. Or, un peuple qui tolère que les libertés d'un autre peuple soiènt niées en son nom, 'ne peut pas être lui-même un peuple libre. » Le 6 janvier, jean-Paul Chagnollaud, mandaté par le MRAP pour une mission d'enquête en Cisjordanie et à Gaza tenait une conférence de presse avec l'Association internationale des juristes démocrates et la Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples. 0 Il Les enfants d'abord (suite de la p. 30) l'amour, la musique et un formidable espoir en la vie. Très beau. Pour les 8-12 ans, Rue des gamins incomparables, de Philippe Neveu, dans la collection Tire lire poche. Comment un enfant découvre qu'il est différent des autres. Est-ce qu'il vaut plus qu'un Portugais? Moins qu'une fille ? Autant qu'un Noir? Après maintes péripéties, il comprendra que les hommes sont incomparables. La clé d'Ahollssein, de Maguy Vautier, dans la collection Romans et Recherches, à partir de 14 ans. L'auteur nous introduit parmi les Touaregs, nous faisant découvrir leurs coutumes, leur savoir, leur vie libre et nomade. Puis, la grande sécheresse de 1973 remet en question leur mode de vie, beaucoup doivent se réfugier à la ville et se sédentariser. Un remarquable roman sociologique. L'enfant du Taj Mahal, de Louis Arnaud. Illustrations de Frédéric Clément. A reçu le prix élan 1986 du meilleur ouvrage pour la jeunesse. Ce contre-récit symbolique nous transporte en Inde, dans un bidonville de Bombay, auprès de Rama, un jeune garçon qui, avec les siens, implore le ciel afin que la terre soit fécondée car ils ont faim. Mais la mousson s'abat brusquement; l'eau monte inexorablement. Les plus pauvres doivent partir. Rama rêve; pourquoi les siens ne se réfugieraient-ils pas au Taj Mahal, cet hôtel des Maharajahs .. . L'Inde en raccourci, entre le quotidien et le mystique et présentée avec une magnifique iconographie. A connaître aussi, le premier roman de Leïla Sebbar, écrit pour les enfants; Ismaël dans la jungle des villes. Ismaël vit l'histoire et les problèmes d'un jeune immigré ... de beaucoup d'immigrés. Il est paru dans le mensuel Je bouquine, édité par Bayard-Presse, n° 29 de juillet 1986. Autres éditeurs à suivre; Litho, Grund, Milan et Gamma. Partir avec le Cevied pour Découvrir. rencontrer et comprendre Amérique Latine, Asie, Afrique. Mars; Inde, Philippines. Pâques; Turquie, Tunisie. Brochure été 88 à demander au Cevied, 8 quai Mal Joffre, 69002 Lyon. Tél.: 78.42.95.33 (n° 326). Le Sahara différemment : en petits groupes avec guide algérien, à pied ou en 4 x 4. Doc. à Assoc. Tidikelt, 30 r. Salneuve, 75017 Paris. Tél.: 42.67.00.61 (nO 327). Venez découvrir la faune, la flore, les oiseaux, l'architec- ELISABETH CHIKHA ture des Grands Causses. Nourriture saine, produits fermiers, jeux en salle et de plein air. A. Desjardins, La Salvetat, La Couvertoirade, 12230 La Cavalerie. 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Les antiracistes que vous êtes ignorent-ils que les femmes immigrées, à la croisée des attaques contre les femmes et contre les immigrés, subissent plus fortement encore le chômage, l'insécurité, la marginalisation 1914-1975, ce livre-constat doit être considéré comme un document. Ce « quotidien d'un communiste» est un livre d'histoire. Commande (80 F) à Ph Mioch, rue Saint-Laurent, 11120 Marcorignan. CCP 527 II Montpellier (n° 330). Foie gras oie ou canard, magrets frais ou fumés, cassoulets ou confits ... Gourmets, adressez-vous toute l'année à J. Legrand, 58, r. des Mathurins, 75008 Paris. Tél.: 42.65.50.46 (nO 331). en même temps qu'elles constituent un objet permanent de fantasmes exotiques et sexistes? Aussi est-ce avec consternation que nous avons découvert vos affiches. Racisme rime avec sexisme ! Peut-on lutter efficacement contre le racisme et reproduire à l'égard des femmes le même type de ringardises et d'idées reçues! Dans votre charte, vous proclamiez l'égalité entre toutes et tous ! Que sont ces déclarations devenues ? 0 Commission contre le sexisme et la pornographie. Collectif féministe contre le racisme. Maison des femmes, 8, cité Prost, 75011 Paris. MRAP MINITEL 36-15 Tapez MRAP Un beaujolais différent: cultivé en biodynamie. Mention· « Nature et Progrès ». Doc. à René Bosse-Platière, « Les Carrières », Lucenay, 69480 Anse. Tél.: 74.67.00.99 (nO 332). Au couvent Saint-François-deVico (Corse du Sud) 20160, avec l'Assoc. des amis du couvent, session du 25 au 31 juillet: Se rencontrer, rencontrer la Corse et les Corses. Un temps de découverte des hommes et du pays. (nO 333). Tarif: 25 T.T.C. la ligne (26 signes ou espaces). Texte et règlement à Différences: 89, rue Oberkampf, 75011 Paris. Tél. : 48.06.88.33 Les membres de la Société des amis de Différences bénéficient d'une insertion gratuite par an (maximum 5 lignes) 1 1 1 1 1 1 1 1 L.~I-L17 janvier 2012 à 14:12 (UTC)~~I_~I~~-L~~I~I17 janvier 2012 à 14:12 (UTC)~I~I~I L 1 1 ~.---'--+--~L-_L_I~----L--L~~..l....-JI ..J.....J L 1 1 1 1 ml~~ LES PIEDS SENSIBLES c'esll'affaire de SULLY Confort, élégance, qualité, des chaussures faites pour marcher 85 rue de Sèvres 5 rue du Louvre 53 bd de Strasbourg 81 rue St-Lazare Du 34 au 43 féminin, du 38 au 48 masculin. six largeurs CAT ALOGUE GRATUIT S l T 1. 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