Différences entre les versions de « Différences n°54 - mars 1986 »

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89, rue Oberkampf
 
75011 PARIS
 
Tél. : (1) 48.06.88.33
 
DIRECTEUR DE
 
LA PUBLICATION/GERANT
 
Albert Lévy
 
RÉDACTION
 
Rédacteur en chef
 
Jean-Michel Ollé
 
Secrétariat de rédaction/maquettes :
 
Véronique Mortaigne
 
Re[aûons extérieures:
 
Danièle Simon
 
Khaled Debbah
 
ABOIIIIEMEIITS
 
1 an: 170 F.
 
lan à l'étranger.' 200 F.
 
6 mois: 100 F.
 
EtudÜlnts et chômeurs, 1 an :140 F.
 
mois.' 80 F
 
(joindre une photocopie
 
des cartes d'étudÜlnt
 
oude p'ointage).
 
Soutien : 200 F.
 
Abonnement d'honneur: 1 000 F.
 
Algérie: 14 dinars. Belgique: 140 FB.
 
Canada: 3 dollars. Maroc: 10 dirhams.
 
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93100 Montreuil. Tél. : 42.87.3.1.00
 
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Commission paritaire n° 63634
 
ISSN 0247-9095.
 
Dép~t légal: 1986-3
 
La rédaction ne peut être tenue pour re$ponsable
 
deS textes, documents et photos confiés.
 
ONT PARTICIPE A CE NUMERO:
 
Yoro N'Diaye, Dolorès Aloia. Jean Roccia,
 
Hobert Pac, Bernadette Hétier, Monique
 
Ayoun, Yves Thoraval, Chérifa, Joelle Tavano,
 
Schofield Corryell, Jean-Jacques
 
Pikon, Christiane Dancie, Marianne Cornevin,
 
Alain Rauchvarger, Pierre Vallée, Mil·
 
lion, ·labachot, Dupont/Durand.
 
PHOTO COWERTURE :
 
Une femme du Hoggar,
 
ISABELLE ESTlER
 
OMMAmE _ ~ ___________ ~
 
8
 
11
 
12
 
18
 
26
 
28
 
32
 
34
 
MARS
 
ACTUEL
 
POINT CHAUD L' imbroglio Miskito. ROBERT PAC
 
Les sandinistes du Nicaragua promulgent ces jours-ci leur nouvelle
 
constitution. Quelle place y sera faite aux Indiens miskitos ?
 
RENCONTRE --- Attention élections. JEAN-MICHEL OLLE
 
C'est l'heure du grand choix pour les électeurs. Nous avons fait le
 
tour des programmes en matière d'immigration.
 
PREJUGES Exclusion/répression . BERNADffiE HETIER
 
L~ petite déliquance est la vraie vedette des années 80. Nous avons
 
suivi le chemin de tous les paumés qui finissent en prison.
 
DOSSIER
 
Un désir nommé désert. MONIQUE AYOUN, CHERIF A
 
Ouverture au musée des Arts océaniens, à Paris, d'une exposition
 
sur le Hoggar algérien. Qu'est-ce qui fait courir les Français vers
 
les dunes? Rien de nouveau, c'était déjà dans la Bible.
 
CULTURES
 
TENDANCES __ _ Raï de marée. AFIFA ZENATI
 
Cette nouvelle musique franchit la Méditerranée presque aussi vite
 
que le reggae avait traversé l'Atlantique. Attention aux oreilles.
 
L'EVENEMENT __ _ Regards de femmes. VERONIQUE MOR·
 
TA IGNE
 
Parti de rien, le VIII' Festival du film de femmes qui se tient en
 
mars à Créteil prend cette année figure d'événement international.
 
C'est peu dire qu'il le mérite.
 
DÉCOUVERTES
 
RÉFLEXION La fête et ses rites. JEAN DUVIGNAUD
 
On a beau vouloir ressusciter un peu partout la fête populaire, ça
 
ne marche pas fort. Un sociologue explique pourquoi. Propos
 
recueillis par Jean-Jacques Pikon
 
HISTOIRE Des années à se battre. MARIANNE CORNEVIN
 
Peut-être des siècles : la résistance à l'apartheid en Afrique du Sud
 
est très ancienne. Il semble utile de le rappeler au moment où le 21
 
mars, Journée internationale contre le racisme, commémore le
 
massacre de Sharpeville.
 
VOUS
 
L'agenda, Pour mémoire, les jeux, les petites
 
annonces. Et pour satisfaire les joueurs qui se sont plaints du
 
manque de délais, une prolongation du concours d'abonnements.
 
Il est encore temps de gagner son billet pour New York.
 
Rectificatif : la photo de couverture
 
du mois dernier venait de l'agence ~G::::-:A-,-MM~.A. ... .--:--:--:--:-",":",:,"[[Utilisateur:Charles|Charles]] 12 janvier 2012 à 18:34 (UTC)_I---_--________________- l Il
 
Différences - n" 54 - MARS 1986
 
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votre appartement. Et puis, bien sûr, quand
 
vous avez besoin d'un article, d'un
 
renseignement, d'une référence, ils se
 
trouvent toujours dans le numéro que vous
 
n'arrivez pas à retrouver. Elle n'est pas
 
facile, la vie du collectionneur!
 
Rassurez-vous, ces temps-là sont terminés.
 
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DATES
 
Il Que celui qui ne s'est jamais ennuyé un 11 novembre devant le
 
monument aux morts nous jette la première pierre: les
 
commémorations, ce n'est pas très rigolo. Grands discours vite
 
oubliés, dépôt de gerbe et recueillement, puis, rompez les rangs, on
 
repart comme avant.
 
L'ancien président l'avait bien compris, qui avait rayé de la carte le 8
 
mai. Mais, balayé lui-même par le 10 mai, il n'a pu continuer son
 
grand nettoyage du calendrier.
 
Et pourtant, quand on y pense! D'abord, on supprimerait les
 
guerres. 11 novembre, 8 mai, c'est loin tout ça, à la poubelle. 14
 
juillet, la nation cocorico, c'est ringard, au panier. 1er mai, c'est un
 
coup de la CGT, Noël et la Pentecôte, un coup des cathos : pas
 
question de garder tout ça, soyons modernes.
 
A quoi ça sert de se souvenir ? Dans les écoles, on ferait mieux de
 
supprimer l'histoire, et faire faire de l'informatique à la place. Les
 
anciens combattants, les déportés, les résistants, à l'asile de vieillards.
 
A la place des monuments, des cabines téléphoniques. Plus de noms
 
de rues, des numéros, comme à New York. Ne parlons même pas du
 
21 mars, cette commémoration d'événements en Afrique du Sud, dont
 
tout le monde se moque. A quoi ça rime de faire une journée
 
internationale contre le racisme, alors que ça n'existe plus depuis
 
belle lurette ?
 
Si on n'encombrait pas la tête des
 
Français avec toutes ces vieilleries,
 
ils seraient assurément plus
 
performants dans la dure compétition
 
internationale. Suppression,
 
dans les grammaires des
 
temps du passé, amendes pour
 
toutes les expressions subversives
 
comme « Je me souviens ». Une
 
race neuve et pure, prête à suivre
 
ses chefs pour aller de l'avant.
 
Vous vous rendez compte du
 
temps qu'on gagnerait, aux élections,
 
si on n'avait plus à se
 
souvenir de ce que faisaient les
 
candidats, avant ?
 
I~ ______________________________ ~ _____________ ~a
 
DiJJërences - n" 54-MA RS /986
 
..
 
NBREF ___________________ ~
 
Un mois pas comme les autres
 
L'Algérie à Paris
 
Contrairement à
 
certains, cela ne
 
nous effraie pas !
 
Ainsi, sous l'impulsion
 
des ministères de la
 
Culture français et algérien,
 
Paris et sa banlieue,
 
et un peu Marseille,
 
vivent à l'heure algérienne
 
pendant un mois, jusqu'au
 
20 mars. Tant mieux
 
car l'Algérie bouge, ce qui
 
n'est pas toujours évident.
 
Signe d 'a mitié et de
 
confiance entre les deux
 
peuples, ce festival concerne
 
presque tous les arts et, avant
 
tout, pour la découverte, la
 
musique «raï », qui a submergé
 
la maison de la culture
 
de Bobigny, puis la grande
 
halle de la Villette, une musique
 
. comparée au blues du
 
«Deep South» des EtatsUnis,
 
à la fois marquée par la
 
nostalgie et par l'expression
 
de pulsions et de dires parallèles
 
à ceux exprimés à haute
 
voix dans le « social» (voir
 
article). Le. rock algérien est
 
là aussi, groupe T.34, ainsi
 
que le groupe de jazz, eh oui,
 
de Safy Boutella, au Rex
 
Club et au New Morning
 
respectivement, à Paris. Au
 
centre Pompidou, une exposition
 
a retracé, jusqu'au
 
24 février, un panorama littéraire
 
algérien, grâce à des
 
manuscrits et des ouvrages
 
édités à Alger. A la Maison
 
des cultures du monde, le
 
Théâtre régional d'Oran,
 
avant d'aller à la Maison de
 
l'étranger de Marseille, a
 
présenté la dernière pièce
 
d'Abdelkader Alloua, El
 
Ajouad ( les Généraux »),
 
fresque dramatique alliant
 
ballades chantées et théâtre
 
SORTIR SANS REVOLVER
 
proprement dit, arabe dialectal
 
et arabe littéraire. Les
 
arts plastiques sont à l'honneur
 
avec 16 jeunes peintres
 
contemporains très intéressants,
 
dans le hall du CNAP
 
(27, avenue de l'Opéra), jusqu'au
 
13 mars, cependant
 
qu'Abdi Abdelkader présente
 
neuf créations d'ameublement
 
dans le temple du
 
mobilier «in et Starck »,
 
chez VIA (1, place SainteOpportune).
 
Enfin, le
 
« clou» des manifestations
 
est la grande exposition, réalisée
 
avec la wilaya de Tamanrasset,
 
«Hoggar », au
 
musée des Arts africains et
 
océaniens, jusqu'au 18 mai.
 
(Voir dossier)
 
YVES THORAVAL
 
Informations générales sur le festival:
 
Maison des cultures du monde, 101,
 
boulevard Raspail, 75006 Paris, tél. :
 
45.44.72.30.
 
Heureusement qu'on a lean-Pierre Pierre-Bloch et André Santini pour nous mettre
 
en garde, sinon on en arriverait à sortir de chez nous sans revolver, alors que la
 
France, maintenant, c'est carrément Chicago. Les deux compères, candidats de
 
l'opposition aux élections, ont commis le quatre-vingt-septième livre sur la sécurité
 
de l'histoire de la politique française. Grosse campagne de pub sur les murs des
 
grandes villes. Au premier plan, les deux Laurel et Hardy de l'autodéfense, graves,
 
sérieux, responsables, sanglés dans des imperméables de barbouzes. Au deuxième,
 
très innocemment, des Noirs. Sur l'autre photo, une auto qui brûle. Et à côté,
 
devinez? Un Arabe, évidemment.
 
Cousu main
 
DUPONT-LAJOIE ENTRE EN SCENE
 
Jouer le racisme ordinaire sur une scène pour mieux l'analyser.
 
C'est ce que fait le Théâtre de l'Opprimé. Un spectacle sur mesure.
 
A ma droite, le théâtre
 
d'intervention, invention
 
soixante-huitarde
 
par excellence : le théâtre est
 
dans la rue, la rue est une
 
fête, etc. A ma gauche, la
 
réflexion antiraciste et, souvent,
 
le désarroi des gens
 
quand il s'agit d'intervenir
 
concrètement dans une situation
 
de racisme patent.
 
Exemple: vous êtes une
 
femme et, dans le bus, un
 
étranger vous pince les
 
fesses. Que faire pour s'en
 
débarrasser sans qu'il se fasse
 
immédiatement agresser par
 
les témoins ? Ou bien, vous
 
êtes dans un taxi dont le ::l
 
chauffeur tient des propos ~
 
racistes. Ou bien, vous re- \§
 
voyez vos parents après deux"; . . . . .
 
ans d'absence, pour vous Porte de la Villette: le public est aussI sur la scene
 
apercevoir qu'ils sont prêts à qués par les thèses d'Augusto fessée ou du client du taxi.
 
voter Le Pen. Autant de Boal, monte un spectacle qui De votre siège, vous le dites.
 
situations possibles dont on met en scène ces situations. Qu'à cela ne tienne, on vous
 
se sort difficilement à l'aide Une douzaine de sketchs, fait monter sur la scène, et
 
du discours antiraciste tradi- eux disent « modèles », ins- vous la jouez telle qu'elle
 
tionne!. pirés de situations du racisme vous semble plausible ou
 
A ma droite, le théâtre. A ordinaire. Les comédiens telle que vous voudriez
 
ma gauche, la vie. Rassurez- jouent la scène, à leur façon. qu'elle soit. Le spectateur
 
vous, on va vous aider. Le Vous, dans la salle, vous devient acteur, un débat
 
Théâtre de l'opprimé, une n'êtes pas d'accord avec cette s'installe entre les divers scétroupe
 
de comédiens mar- réaction de la fille pince- narios possibles et, du coup,
 
OMAR
 
L'EPICIER
 
Omar Talb est l'Arabe
 
d'Orsay. Entendez par là
 
qu'il tient une épicerie qui
 
reste ouverte tard le soir et
 
le dimanche, un service
 
apprécié des citadins en
 
panne de supermarché.
 
La sous-préfecture de
 
Palaiseau veut lui faire
 
fermer boutique, pour une
 
sombre histoire d'autorisation
 
qu'on a négligé de
 
lui notifier depuis trois
 
ans. Toute la population
 
pétitionne à tour de bras
 
pour garder son Arabe.
 
Ce n'est pas si souvent ...
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
LAPSUS?
 
Voici le fac-similé du télex
 
pour lequel la Caisse
 
nationale d'allocations
 
familiales notifie aux
 
administrations qu'il
 
convient désormais de
 
supprimer les allocations
 
familiales aux immigrés
 
chômeurs et préretraités
 
dont les enfants sont
 
restés au pays. Une
 
interprétation fâcheuse et
 
très restrictive des accords
 
bilatéraux avec les pays
 
concernés. La mesure
 
ne viendrait pas
 
directement du
 
gouvernement, qui serait
 
néanmoins au courant .
 
Lapsus ou concession ?
 
sur les meilleures façons de
 
réagir au racisme, voir plus
 
haut les références à 68.
 
Autre originalité du Théâtre
 
de l'opprimé: c'est qu'il ne
 
s'agit pas pour eux de s'enfermer
 
dans un théâtre, devant
 
les simples spectateurs
 
du quartier. Ils font un
 
théâtre à la carte, pour tous
 
ceux qui veulent parler de
 
racisme. Une soirée-débat,
 
une rencontre de comité
 
d'entreprise, une réunion politique,
 
une manifestation
 
culturelle? Pas de problème,
 
le Théâtre de l'opprimé vient
 
à vous, où et quand vous le
 
souhaitez, et lance le débat
 
grâce à son spectacle. Voilà
 
qui peut changer de l'éternelle
 
cassette-introductive et
 
lancer un débat plus vif, plus
 
concret, donc meilleur. 0
 
Scènes de la vie raciste au
 
quotidien, par le Théâtre de
 
[' opprimé. Renseignements et
 
réservation à partir du début
 
mars, auprés de Thérèse
 
Berger, Théâtre de ['opprimé,
 
24, avenue Laumière, 75019
 
Paris, tél. : (1) 42.05.89.31.
 
 
mNTcHAuD ____________________________ ~
 
Au Nicaragua
 
IMBROGLIO MISKITO
 
Les Sandinistes préparent une nouvelle Constitution. Que vont-ils faire de leurs Indiens?
 
L.e conflit qui oppose depuis
 
cinq ans la commuauté
 
indienne Miskito,
 
Suma et Rama de la Côte
 
atlantique du Nicaragua au
 
gouvernement du pays revient
 
dans l'actualité à la
 
faveur des discussions préliminaires
 
à l'adoption d'une
 
nouvelle constitution bientôt
 
soumise au vote de l'Assemblée
 
nationale. Le gouvernement
 
a proposé à l'étude, au
 
plan régional et national, un
 
texte qui doit servir de base à
 
la rédaction du chapitre Autonomie
 
de la Côte atlantique
 
Ce conflit n'était plus que
 
rarement évoqué depuis la
 
rupture, le 27 mai 1985, des
 
négociations entre le gouvernement
 
sandiniste et l'organisation
 
indienne Misurasata premier, le Misurasata, fut «contra », basé au Costa souvent contre les villages
 
en rebellion ouverte depuis fondé au lendemain de la Rica et dirigé par Eden Pas-· indiens de la zone atlantique
 
1981. Il avait pourtant été victoire de la révolution san- tora, dont les volte-face ren- en accord avec la politique
 
une des armes privilégiées de diniste par Brooklyn Rivera dent toute collaboration im- i n d i g é n i ste des
 
l'entreprise de déstabilisation et Hazel Lau. Il disposait possible. Sandinistes ... (1). Le Misura
 
du jeune Etat révolution- d'un siège au Conseil d'Etat. entretenait évidemment des
 
naire nicaraguayen engagée En 1981, ce fut la rupture à la 1 liens étroits avec le FDN
 
par les Etats-Unis et la CIA, suite de désaccords avec le Le pasteur renégat somoziste installé lui aussi au
 
férus en manipulation des gouvernement du Nicaragua entraÎne les Indiens Honduras.
 
minorités ethniques et des quant à sa politique d'assimi- Enfin, en mai 1985, le Misectes
 
religieuses (1). Malgré lation à terme des Indiens et Le second mouvement, le satan voit le jour à l'initiative
 
tout, les négociations étaient à de nombreuses « erreurs» Misura, a été fondé par le du gouvernement sandiniste.
 
considérées comme seule- que les Sandinistes ont recon- pasteur morave Steedman Mouvement représentatif,
 
ment « suspendues» et Was- nues ensuite. Fagoth, renégat du Misura- puisque, parmi ses dirihington
 
ne pouvait envisager Le Misurasata fut alors dirigé sata et ancien garde somo- geants, on notait Hazel Lau,
 
une autonomie négociée par Brooklyn Rivera exilé au ziste auquel les Sandinistes cofondatrice du Misurasata
 
entre des Indiens et un gou- Costa Rica. Il entretenait en- avaient imprudemment ac- avec Brooklyn Rivera, et
 
vernement révolutionnaire. viron trois mille guérilleros cordé leur pardon. Fagoth Oscar Hogsdon, membre du
 
Pour éclairer nos lecteurs dans la zone atlantique. avait emmené, souvent de conseil exécutif du Conseil
 
dans cette histoire extrême- Brooklyn Rivera a toujours force, une dizaine de milliers mondial des peuples inment
 
complexe, il convient refusé toute alliance avec le de Miskitos en territoire hon- digènes. Le Misatan était évide
 
préciser qu'au moment Misura de Steedman Fagoth, durien. Il y entraînait un demment pro-gouvernedes
 
conversations interrom- et le mouvement « contra» millier de « contras» indiens mental.
 
pues de mai 1985,la «résis- FDN, somoziste, basé au avec l'aide matérielle de la
 
tance» indienne n'était pas Honduras. Il eut également CIA et d'instructeurs venus Les premiers contacts d'ocmonolithique,
 
tant s'en faut . toujours beaucoup de diffi- des Etats-Unis. Les raids tobre 1984 entre les SandiIl
 
existait alors trois mouve- cuités à s'entendre avec meurtriers se sont multipliés nistes et le Misurasata (1)
 
• ments indiens distincts. Le l'Arde, autre mouvement en territoire nicaraguayen, avaient abouti à une pre12 janvier 2012 à 18:34 (UTC)~~--------------~~----------~
 
mière rencontre entre Brooklyn
 
Rivera, Daniel Ortega,
 
chef du gouvernement, et le
 
père F. Cardenal, ministre de
 
l'Education nationale. Le
 
8 décembre 1984, à Bogota,
 
le gouvernement fit une première
 
proposition repoussée
 
par Brooklyn Rivera pour ne
 
pas garantir clairement
 
l'autodétermination des Indiens.
 
Deux nouvelles réunions,
 
en mars 1985 à Bogota
 
à nouveau, et en avril à
 
Mexico n'aboutirent pas davantage.
 
Il semble que Brooklyn Rivera
 
se soit alors livré à la
 
surenchère. Alors qu'on touchait
 
au but et qu'on débattait
 
du choix d'une tierce
 
partie garante de l'application
 
des accords, il se prononça
 
pour le Conseil épiscopal.
 
Or, ce dernier, et son
 
chef hiérarchique Mgr
 
Obando y Bravo, ont toujours
 
été clairement hostiles
 
des négociateurs sandinistes
 
de Luis Carrion par le ministre
 
de l'Intérieur, Tomas
 
Borge, héros de la Révolution;
 
trop dogmatique.
 
au gouvernement de Managua.
 
Il eût paru plus logique
 
que Brooklyn Rivera
 
désigne l'Eglise morave, celle 1 des Miskitos, d'ailleurs présente
 
aux négociations depuis
 
le début en qualité d'observateur.
 
Mais, pour le Misurasata,
 
l'Eglise morave est
 
« vendue aux Sandinistes» !
 
Une contrevérité puisque de
 
nombreux pasteurs et fidèles
 
moraves, regroupés autour
 
de Steedman Fagoth, firent
 
des séjours en prison plus ou
 
moins longs pour activités
 
contre-révolutionnaires.
 
Néanmoins, malgré cette
 
rupture, le gouvernement nicaraguayen
 
décida d'autoriser
 
le retour progressif dans
 
leurs villages des communautés
 
Miskitos, Suma et
 
Rama, qui avaient dû être
 
déplacées vers l'intérieur du
 
pays en 1982 au plus fort des
 
attaques des «contras» du
 
FDN, dans la région du Rio
 
Coco, ainsi que celui de milliers
 
d'autres familles indiennes
 
exilées au Honduras.
 
Les Miskitos bénéficiaient
 
également de la loi d'amnistie
 
décrétée par le gouvernement:
 
deux mille d'entre eux
 
qui avaient été mêlés à des
 
activités contre-révolutionnaires
 
purent regagner leurs
 
villages. Aucun Indien ne se
 
trouvait plus en prison fin
 
juillet 1985.
 
Quand tout semble
 
rentrer dans l'ordre
 
tout se complique
 
1 Une compagnie de
 
guerriers sioux
 
Par ailleurs, les Sandinistes
 
avaient été indisposés par
 
certains observateurs imposés
 
par Brooklyn Rivera,
 
particulièrement des Américains
 
du Nord, présentés par
 
celui-ci comme des « ethnologues
 
» et des « supporters
 
des luttes indiennes ». Sans
 
parler de Russel Means, de
 
l'American Indian Movement
 
des Etats-Unis (AIM)
 
qui agita la menace d'envoyer
 
au Nicaragua une compagnie
 
de guerriers sioux pour assurer
 
la défense des
 
Miskitos!
 
Un autre facteur défavorable
 
fut le remplacement à la tête
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
Tout va bien, donc? Non,
 
l'imbroglio est total. Qu'on
 
en juge: d'abord, Steedman
 
Fagoth a été expulsé du Honduras,
 
le 7 janvier 1985, et a
 
rejoint les Etats-Unis. Puis,
 
le gouvernement nicaraguayen
 
a passé à la mi-mai
 
des accords discrets avec le
 
Misura (qui était pourtant
 
l'ennemi juré à la fois des
 
Sandinistes et du Misurasata),
 
garantissant des accords
 
de cessez-le-feu et la
 
protection des Miskitos rapatriés
 
vers le Rio Coco. Le
 
principal acteur de ces accords,
 
Eduardo Pantin,
 
mourut peu après, vraisemblablement
 
assassiné.
 
Le 16 juin 1985, la commission
 
Asla est créée afin d'unifier
 
les groupes de résistance
 
indienne au sein d'une organisation
 
qui assurerait le développement
 
du projet d'autonomie
 
indienne et la préparation
 
d'une assemblée générale.
 
A la direction de
 
l'Asla, Brooklyn Rivera, Wycliffe
 
Diego et Jenelee Hodgson.
 
Puis , début septembre
 
1985, le Misura et le Misurasata,
 
hier ennemis irréductibles,
 
se sont fondus en une
 
seule organisation, le Kisan.
 
Si, logiquement, Steedman
 
Fagoth a été éliminé, Brooklyn
 
Rivera a subi le même
 
sort. Mais ce dernier
 
continue de diriger un Misurasata
 
fortement affaibli et de
 
garder le contact avec Managua.
 
Dans un communiqué
 
de l'Asla daté du 12 setembre
 
1985, son secrétaire exécutif,
 
EZB Miskitos
 
lIillI Sumus
 
~ Ramas
 
_ Noirs. Créoles
 
territoire national, ainsi que
 
l'unicité du peuple du Nicaragua.
 
Il reconnaît la spécificité
 
des peuples Miskitos,
 
Suma, Rama et créole, garantit
 
leurs différentes expressions
 
culturelles et leurs
 
langues, ainsi que la légitimité
 
de leurs revendications.
 
Il est à remarquer que le
 
projet sandiniste prend en
 
compte les quelque 30 000
 
« Créoles» (criollos) qui vivent
 
dans la Côte atlantique
 
et qui ne sont pas toujours
 
solidaires des Indiens (3).
 
M er
 
Les populations indiennes au Nicaragua et Honduras.
 
Delano Martin, condamne la
 
création du Kisan qu'il désigne
 
comme une manoeuvre
 
du FDN pour en tirer un
 
avantage politique en faisant
 
ainsi croire qu'il a les Indiens
 
de son côté (2).
 
Quoi qu'il en soit, le gouvernement
 
nicaraguayen est décidé
 
à poursuivre son action
 
pour accorder l'autonomie
 
aux Indiens et créoles de la
 
Côte atlantique. Mais il
 
semble que son projet actuel
 
ne diffère pas de la déclaration
 
de principe que Lumberto
 
Campbell, vice-ministre
 
de la Côte atlantique,
 
présenta en juillet 1981 aux
 
Nations unies à Genève, lors
 
de la Conférence internationale
 
des ONG sur les
 
peuples indigènes et la terre,
 
et qui a toujours été rejetée.
 
Ce nouveau texte établit l'indivisibilité
 
et la souveraineté
 
de l'Etat sandiniste sur tout le
 
La seconde partie du texte
 
définit les droits particuliers
 
de ces communautés (langues,
 
cultures, religions ,
 
coutumes, la propriété , la
 
possession et l'usufruit de la
 
terre, des forêts et des eaux)
 
et les conditions de leur représentation
 
à l'Assemblée
 
nationale. Ce texte est encore
 
imprécis et il faudra vraisemblablement
 
encore des négociations
 
avant d' aboutir,
 
d'autant que l'état d'urgence
 
proclamé par les Sandinistes
 
n'est pas de nature à favoriser
 
le dialogue.D
 
ROBERT PAC
 
(1) Voir Différences n° 42 - Février
 
1985.
 
(2) In Akwesasne Notes volume 17,
 
n° 6, Early winter 1985.
 
(3) Contrairement à la définition du
 
dictionnaire, au Nicaragua le terme
 
« créole» (criollos) désigne les descendants
 
des anciens esclaves africains
 
noirs qui ont été très fortement
 
métissés avec les Amérindiens. ..
 
ENCONTRE __________________________ --,
 
Spécial 16 mars
 
ATTENTION, ELECTIONS
 
Nous avons passé tous les programmes électoraux
 
au banc d'essai. Voici les propositions
 
de chacun sur l'immigration.
 
..... ...... Le syndrome du 16 mars
 
1986, observé depuis des
 
mois, voire des années, a, au
 
moins, deux avantages .
 
D'abord, l'immigration n'a
 
pas été, comme on le craignait,
 
au centre de la campagne
 
électorale. La cohabitation,
 
morne invention
 
d'une démocratie qui s'encroûte,
 
lui a ravi la vedette,
 
et c'est tant mieux, parce que
 
l'usage veut, hélas, qu'on
 
dise statistiquement plus de
 
bêtises sur l'immigration que
 
de vérités. A part leshabituels
 
excités de l'Occident en
 
danger, aucun parti politique
 
n'en a vraiment fait son cheval
 
de bataille, au moins au
 
plan national, car dans la
 
chaleur des réunions locales,
 
les langues se délient.
 
Deuxième avantage, on a un
 
peu rangé au placard les
 
grandes idées vagues, l'Immigration
 
avec un grand l , celle
 
qu'on agite comme un épouvantail,
 
pour batailler sur des
 
points plus précis. On a, un
 
peu, dégonflé le «problème
 
» de l'immigration
 
qu'on arrivait mal à faire
 
'" durer, tant il n'existe pas,
 
S'appuyant sur les acquis du
 
début du septennat. Le PS veut
 
maintenir la situation actuelle,
 
qu'il trouve juste, sur
 
le principe de l'égalité des
 
droits des travailleurs. On
 
précise que «tout élargissement
 
des droits sociaux devra
 
bénéficier à l'ensemble des
 
travailleurs sans distinction
 
d'origine ». Le système actuel,
 
qui verse pour les enfants
 
d'immigrés restés au
 
pays des prestations au prorata
 
de celles du pays
 
d'origine, n'est pas remis en
 
cause. Sur ce point, le PS est
 
gêné par les restrictions mises
 
en place récemment par la
 
CNAF, qui supprime les allocations
 
aux étrangers chômeurs
 
dont les enfants sont
 
au pays. Gêne également sur
 
le droit au regroupement familial,
 
réaffirmé, mais en
 
contradiction avec l'action du
 
gouvernement qui l'a assorti
 
de nouvelles contraintes. Ces
 
points sont contestés par le
 
PCF, qui souhaite que l'égalité
 
des droits soit respectée y
 
compris pour les familles resgrands
 
renforts de pub, sur ce
 
point précis de leur programme
 
commun. Le RPR a,
 
en effet, fait sienne depuis
 
longtemps et appliqué à
 
Paris, une mesure discriminatoire
 
prônée par le FN (1). Il
 
s'agirait, au nom d'une politique
 
nataliste, de ne plus
 
verser aux immigrés les prestations
 
sociales dites « à vocation
 
démographique »,
 
telle la prime au troisième
 
enfant. C'est oublier que les
 
incitations natalistes n'ont jamais
 
fait augmenter le
 
nombre de bébés en France.
 
M. Toubon, surtout, a eu du
 
mal à expliquer, à L'heure de
 
vérité, comment le fait de
 
priver les immigrés de ces
 
prestations allait encourager
 
les Français à faire plus d'enfants.
 
A l'UDF, sous l'influence
 
de personnes comme
 
M. Stasi, sous la pression de
 
Raymond Barre qui avait
 
trouvé inconstitutionnelles de
 
telles propositions, on a refusé
 
tout net d'inclure cette
 
mesure dans le programme
 
commun. D'où disputes.
 
'-____ .. _~"'''w .. w·"·'_',, .. • .... ''''~ i ~ pour s'opposer sur des 1 -~.: mesures 'a pdren r e ou pas,
 
ci des lois à voter ou à abroger,
 
programmes obligent.
 
Qui est français ?
 
Personne n'est d'accord ...
 
Pris dans les Boûches-duRhône,
 
en janvier 1986 :
 
attention au virage à droite ...
 
Petit détail: Le panneau est
 
criblé de balles.
 
A éplucher ces programmes, té es au pays, chiffre la Malthusianisme libéral tradion
 
s'aperçoit vite que tous les som men 0 n ver sée à tionnel qui fait qu'à l'UDF on
 
partis se sont polari~és ~ur l~s 1,5 milliard de francs, et de- ne croit guère aux campagnes
 
mêmes points. Celm qm a fait mande la stricte application natalistes chères aux gaulcouler
 
le plus d'encre, ce sont du droit au regroupement listes, humanisme bon teint
 
les prestations sociales. Vieil familial. A droite, grand ou souci de se démarquer du
 
argument du racisme, c'est branle-bas dans Lander- RPR? De fait, la différence
 
sur ce chapitre qu'il yale ne au : le RPR et l'UDF au- tant vantée tient surtout au
 
III L-________ ----------------~p~l~u~s-d-e-d-i-ff-é-r-e-n-c-es-.----------r-a_ien_t_ _f a_i_ll_i __se __f_ âcher,_ _à_ _- d-e~g~r-é-d-e-c-o_n_vi_ct_i_on_ _n_ a_ta_l_is_t_e_' 1
 
Autre débat, l'acquisition de
 
la nationalité française. On
 
est revenue à cet égard, entre
 
la droite et la gauche, à une
 
vieille querelle juridique, loi
 
du sang ou loi du lieu. Pour la
 
gauche, est français, grosso
 
modo, celui qui naît en
 
France ou épouse un( e) Français(
 
e). C'est la loi du lieu,
 
tradition de la République
 
française , une seule fois
 
remise en cause, soulignent
 
PS et PCF, sous Pétain. Pour
 
le PS, l'acquisition de droit
 
de la nationalité française
 
pour les enfants nés en
 
France est partie intégrante
 
d'une politique d'insertion
 
des étrangers qui le désirent
 
dans la société française.
 
Même position au PCF, qui
 
insiste de plus sur les moyens
 
nécessaires pour faciliter les
 
naturalisations (gratuité et
 
sim pli fic a t ion des d émarches).
 
Le RPR et l'UDF sont revenus,
 
quant à eux, àlaloidu
 
sang. Même nés en France,
 
les enfants d'étrangers devront
 
mériter la naturalisation.
 
Plus d'automatisme, il
 
faudra prouver son désir d'intégration
 
et demander la nationalité
 
française , qu'on accordera
 
après enquête.
 
notamment sur la loi de 1981
 
établissant les droits des immigrés
 
clandestins dans les
 
procédures d'expulsion. Le
 
PCF note que cette loi n'est
 
pas appliquée et demande
 
plus de rigueur contre les
 
employeurs de sans-papier.
 
La plate-forme RPR-UDF
 
reste vague, mais pour le
 
RPR il ne fait aucun doute
 
qu'il faut rétablir la loi « sécurité,
 
liberté» et les contrôles
 
d'identité, ce qui implique,
 
dans ce cas, le retour de la
 
chasse au faciès. Il demande
 
aussi l'instauration de visas
 
pour tous les étrangers non
 
européens. L'UDF ne réclame
 
pas le retour de la loi
 
Peyrefitte, mais demande
 
l'instauration de papiers
 
d'identité dits «non falsifiables
 
». Quant à Raymond
 
Barre, qui n'aime pas les
 
programmes, il reste vague
 
sur les mesures envers les
 
clandestins. Il est intéressant
 
de noter que toute l'argumentation
 
barriste sur le sujet
 
réside sur ce postulat,
 
plusieurs fois énoncé: ne
 
poussons pas à bout les immigrés
 
qui sont chez nous, .
 
car ils pourraient se transformer
 
en minorités organisées
 
et révoltées, pilotées,
 
pourquoi pas, de l'extérieur.
 
1 Quelques couacs dans l'harmonie des discours
 
de campagne
 
Même clivage sur le droit de
 
vote. F. Mitterrand a solennellement
 
rappelé son attachement
 
à cette proposition.
 
Le PS l'avait un peu oubliée,
 
mais l'a remis en fin de
 
compte à son programme. Le
 
PCF, qui a adopté cette proposition
 
en 1985, s'y tient.
 
Pas question pour le RPR ni
 
pour l'UDF. Contrôle des
 
naissances, acquisition de la
 
nationalité, droit de vote, on
 
voit ce qui se joue: deux
 
conceptions de l'identité
 
française.
 
Mais aussi deux conceptions
 
de la société. Si tous les partis
 
sont d'accord, pour des. raisons
 
différentes, pour lutter
 
contre l'immigration clandestine,
 
chacun ne propose
 
pas les mêmes solutions. Le
 
PS s'appuie sur la politique
 
actuelle du gouvernement, et
 
Même goût de 1'« ordre », à
 
droite, quand il s'agit de lier
 
immigration et délinquance.
 
Pour Barre, la délinquance
 
est notable, bien qu'elle doit
 
être traitée dans le cadre de
 
la déliquance en général.
 
Pour le RPR, le lien est
 
patent. Jacques Chirac affirmait
 
face à L. Fabius que
 
40 % de la déliquance parisienne
 
est étrangère (2). Les
 
partis de gauche continuent
 
globalement, à ne pas lier les
 
deux points.
 
Terminons par le consensus :
 
le refus de gouverner avec Le
 
Pen. Le problème ne se pose
 
pas pour le PS et le PCF. Le
 
RPR, par la voie de
 
J. Chirac, s'est engagé à ne
 
pas participer à un gouvernement
 
où siégerait le FN.
 
Quelques personnalités de
 
l'UDF l'ont fait aussi.
 
Mais ... J. Chirac s'est engagé
 
au niveau gouvernemental,
 
laissant à Le Pen le soin de
 
préciser qu'au niveau local
 
tout est possible, comme le
 
prouvent les assemblées
 
corse et néo-calédonienne.
 
Quant à l'UDF, si elle
 
compte des Stasi, elle a aussi
 
ses Griotteray, qui n'ont rien
 
à envier au FN sur cette
 
question. Jean-Claude
 
Gaudin clame chaque fois
 
qu'il le peut qu'il s'alliera à
 
Marseille, si nécessaire, avec
 
l'extrême droite. Raymond
 
Barre oscille entre le brevet
 
de respectabilité et la
 
condamnation. Le consensus
 
n'est plus ce qu'il était.
 
Dans l'analyse d'un phénomène,
 
les écarts sont parfois
 
plus significatifs que les
 
moyennes. On notera donc,
 
pour terminer, quelques
 
couacs dans la belle harmonie
 
des discours de campagne. A
 
tout seigneur tout honneur,
 
le Premier ministre s'est mal
 
remis du semi-quitus donné à
 
Jacques Chirac sur l'immigration
 
dans leur face-à-face télévisé.
 
Le PCF, fortement secoué
 
dans ses rangs par la faute de
 
Vitry/Saint-Maur en 1980, a
 
redressé la barre. On ne
 
citera pas, par pure délicatesse,
 
la défense de Le Pen
 
par Raymond Barre en 1984
 
et son vigoureux « Travail,
 
famille, patrie », ni l'interview
 
de J. Chirac à Libération
 
où il préconisait le retour
 
en masse des immigrés, retour
 
payé ... par les cotisations
 
des immigrés, ni enfin
 
1'« espoir de Dreux» qui
 
concluait l'édito de Peyrefitte
 
au lendemain de l'élection,
 
dans cette ville, d'une liste
 
RPR-UDF-FN.
 
Pour éviter ces tentations
 
malsaines, le MRAP a fait
 
parvenir à tous les candidats
 
un texte qui les engage, s'ils
 
le signent, à respecter la
 
législation antiraciste et les
 
acquis des immigrés. On
 
verra ...
 
J.-M. O.
 
(1) Le MRAP a d'ailleurs attaqué M.
 
Chirac en justice sur ce point. Ce qui
 
n'empêche pas ce dernier de multiplier
 
les grandes déclarations contre
 
le racisme.
 
(2) A dire vrai, le thème a été tant et
 
tant martelé qu'il est devenu quasiment
 
implicite, ce qui est plus
 
commode. III
 
Différences-n° 54-MARS 1986
 
RUU6ÉS ___________________________ ~
 
Délinquance
 
EXCLUSION REPRESSION
 
..;
 
Sait-on vraiment pourquoi les hommes volent? Exclusion, délinquance, répression, les trois
 
passages quasi obligés du chemin.
 
Le phénomène de la dite « petite délinquance» défraie canettes de bières en rayon, sera abattu au Radar de
 
la chronique. On s'en sert pour justifier la « légitime Livry-Gargan par un vigile, en présence de policiers. Son
 
défense », les milices, la flambée sécuritaire et on meutrier sera condamné à 5 ans de réclusion, dont 3 avec
 
renvoie trop souvent dos à dos de piteux meurtriers, de sursis par la cour d'assises de Bobigny, le 14 juin 1985, soit
 
pitoyables braqueurs et d'innocentes victimes. Est-il juste deux ans de prison effective.
 
de poser en prémisses l'exclusion sociale pour tout A coup sûr, il s'agit là d'un phénomène de société .qui
 
expliquer, sinon légitimer? atteint également les jeunes de toutes origines, même si
 
Ce serait trop facile et simplificateur. Il existe de petits ceux d'origine étrangère, plus visibles, plus soupçonnés,
 
voleurs, de petits escrocs, de petits indélicats qui n'ont plus contrôlés, sont plus souvent attrapés et confondus.
 
jamais fait usage d'une arme, mais ont coutume, souvent Parmi eux, d'ailleurs, des jeunes à la carte d'identité
 
ou parfois, de berner la société de consommation, incarnée française, maghrébins, antillais, réunionnais. Ainsi Patrick
 
par les grandes surfaces ou les petits commerces. Ceux qui Mirval, Antillais, se fait prendre avec un copain français à
 
se livrent à un tel sport ne sont généralement pas ramasser les pièces de monnaie «recrachées» par un
 
dépourvus de moyens de subsistance et échappent aux distributeur de tickets de métro. Le copain sera vite relâché
 
catégories statistiques favorites: ni orphelins, ni enfants de de Fleury. Patrick, lui, mourra au cours de son transfert au
 
couples séparés, ni sous-prolétaires, ils sont contaminés par « mitard », de mauvais traitements, le 22 février 1974. Le
 
la facilité ambiante, la perte du tabou de la propriété, le meurtrier présumé, un maton, se trouve encore actuellegoût
 
du « qui sera le plus malin ». ment en liberté.
 
Il est rare que les plus sportifs, les mieux organisés et les Il y a, bien sûr, plus flagrant encore: le cas de ces jeunes
 
mieux entraînés se fassent surprendre. Ce seront donc les français ou immigrés, parfaitement innocents, morts sous
 
moins malins, les moins branchés, dans la plupart des cas, les balles de tontons-flingueurs racistes ou sécuritaires.
 
les plus dépourvus de fric qui seront les premiers pincés. Malheureusement, en donner toute la liste ne sert à rien :
 
Les plus repérables, aussi: les jeunes, les basanés ou ceux la délinquance qui inquiète les Français, aujourd'hui, n'est
 
qui sont les deux à la fois. Dans les grandes surfaces de la pas celle des meurtriers, mais celle des petits voleurs et
 
région parisienne, il se passe de grandes indélicatesses, petits braqueurs. On s'est habitué à entendre le mot,
 
portant sur des sommes importantes. Mais ce ser.a « insécurité» dans un sens univoque : ce qui perturbe ·la
 
précisément le jeune Maghrébin qui a voulu s'approvl- vie des braves gens.
 
sionner en baskets sans passer à la caisse qui sera poursuivi Mais qui songe, et qui plus est parle, de l'insécurité qui est
 
Il le premier. Le 17 juin 1983, Moussa Mezogh, 19 ans, pour devenue, dans certaines villes, le lot quotidien des
 
L....:u::n::..:e~te::..:n:.:.t:..:a:.:.tt:...·v..:.e_d_e_v_o_l_d_e_b_l_o_u_s_o_n_et_la _c _o_n_s_o_m_m_a_ti_o_n_d_e _a _d_o_l_e_sc_e_n_t_s_b_a_sa_n_e_s' ..;,._u_n_iq;..u_e_m_e_n_t _p_a_r_c_e~q;...u_'i_Is_s_o_n_t_d_e~
 
jeunes Arabes ? Création de
 
la milice « les Chevaliers de
 
Roubaix », existence de facto
 
de milices semblables de
 
villes ou de quartiers qui
 
poursuivent les jeunes d'origine
 
immigrée, à la nuit
 
tombée. Qui parle des « videurs
 
» de boîtes de nuit qui
 
tuent à Lyon, des jeunes
 
nazillons qui harcèlent à
 
Troyes ? Que dire alors du
 
sentiment de tragique insécurité
 
des familles des cités
 
populaires de France, des
 
familles maghrébines en particulier,
 
qui craignent chaque
 
jour, chaque soir, pour la vie
 
de leurs enfants ?
 
Insécurité singulièrement
 
renforcée par les bavures de
 
policiers , gendarmes ou
 
CRS. La série noire commence le 23 août 1977, avec
 
Mustapha Boukhezzer, tué à bout portant par un policier à
 
Chatenay-Malabry. Elle s'allonge d'année en année.
 
Qui est petit délinquant? On le sait, il s'agit presque
 
toujours de jeunes adolescents, de sexe masculin, de cités
 
populaires, de préférence au « type méditerranéen» ou
 
bien plus simplement «loubard ». A ceux-là, on ne
 
pardonne guère, on les soupçonne a priori, on les contrôle
 
systématiquement, on les accuse plus sur leur réputation
 
que sur preuves, on les interpelle, y compris par la force, ils
 
finissent plus souvent que des jeunes « de bonne famille »
 
en détention provisoire. SOllt-ils plus coupables?
 
Les jeunes des milieux soêiaux les plus défavorisés, qu'ils
 
soient français ou d'origine immigrée, sont, avec leurs
 
parents, dans le champ de mire des services sociaux ;
 
assistés et surveillés, ils deviennent socialement plus
 
visibles. De plus, l'engrenage de l'assistance crée l'irresponsabilité.
 
Au lieu de reconnaître aux familles les plus
 
défavorisées le droit à la formation, au travail et au revenu
 
de leur travail, la société perpétue ou crée des nouvelles
 
catégories de populations sous-prolétaires incapables de se
 
gérer : c'est ainsi qu'on enlève les enfants à leurs parents
 
plutôt que de les aider à les élever. C'est ainsi qu'on crée
 
les soupes populaires, les bons d'assistance des mairies, les
 
lieux d'accueil qui font éclater les familles. Enfin, la société
 
qui les assiste, les fait à peine survivre, tout en exerçant un
 
contrôle sur eux (gestion obligatoire des budgets familiaux
 
sous surveillance, en cas de dette envers les sociétés HLM)
 
est la même qui les pousse à la surconsommation. La
 
publicité tend à rendre de plus en plus d'objets « nécessaires
 
».
 
1 Un jeune, pris à "Dier une bricole à douze ans,
 
sera fiché à la 'olice
 
jusqu'à la fin de ses jours.
 
La notion de propriété pnvee, naguère identifiable et
 
sacro-sainte se dilue dans le gigantisme des magasins de
 
distribution, entraîne l'atténuation de la gravité sociale du
 
vol : voler dans un rayon d'hypermarché, ce n'est voler
 
personne puisque ce n'est pas voler quelqu'un de précis. Ce
 
n'est donc pas si grave. On commence par voler des
 
bonbons, des confiseries, un vélo parce que celui des autres
 
gamins est si rouge et si beau et qu'on n'en a pas ...
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
Ainsi témoigne Ahmed : «Je
 
suis arrivé en France tout
 
jeune. J'ai vécu dans une
 
ZUP où il y avait des Français
 
et des étrangers. Mon père
 
travaillait, ma mère restait
 
avec les enfants. J'étais toujours
 
dehors et je voyais les
 
autres gosses qui avaient d'abord
 
des vélos, puis des mobylettes,
 
puis des voitures. Et
 
moi, j'ai piqué des vélos, des
 
mobylettes, des voitures, pour
 
avoir comme les autres, puis
 
des trucs pour avoir du fric. »
 
Tout va bien tant qu'on ne se
 
fait pas piquer. Mais aujourd'hui,
 
pour les petits délinquants,
 
il n'y a plus guère de
 
possibilité d'échapper; tant
 
de flics , de vigiles , de
 
maîtres-chiens... Un jeune,
 
s'il est pris à 12 ans sera désormais fiché au commissariat et
 
donc, « connu des services de police ».
 
Un enfant de famille aisée sera plus probablement
 
reconduit à ses parents. Dans la plupart des cas, l'affaire en
 
restera là parce que les parents, alertés, feront le nécessaire
 
pour que l~s choses évoluent.
 
Est-ce à dire qu'il y aurait une fatalité pour les enfants de
 
familles en difficulté? Là encore, généraliser serait une
 
grave erreur. Combien de familles nombreuses d'origine
 
étrangère, avec toute le déracinement que cela représente,
 
ont élevé admirablement leurs enfants, garçons et filles en
 
faisant des hommes et des femmes responsables .
 
Cependant la pauvreté et l'exclusion sociale, l'inégalité,
 
surtout si elles se retrouvent de génération en génération
 
ou si elles apparaissent comme un mur infranchissable.
 
sont étroitement liées à la délinquance : pas de travail, pas
 
de domicile fixe, pas de moyens de subsistance, solitude.
 
rejet par les autres membres du corps social. Et un beau
 
jour, c'est la condamnation et l'emprisonnement ou. pire
 
encore, la prison avant la condamnation. la détention
 
provisoire destinée à assurer des garanties de représentation
 
(éviter que le prévenu ne « disparaisse ») et éviter des
 
troubles à l'ordre public.
 
«L'emprisonnement est vécu par la population sousprolétaire,
 
et par la plupart des détenus, quelle que soit leur
 
origine sociale, comme une des formes les plus aiguës
 
d'exclusion. Physiquement, le
 
détenu est exclu, mis à l'écart
 
de la société: aux yeux de
 
celle-ci, il constitue un danger
 
social, il doit expier une
 
faute ... Intervient ici un sentiment
 
de culpabilité ... {Mais]
 
ce sentiment de culpabilité,
 
renforcé par une condamnation
 
pénale, lui est par ailleurs
 
antérieur: point n'est besoin
 
d'une juridiction pour
 
condamner le sous-prolétaire.
 
Les voisins, le quartier,
 
la famille, l'accablent ...
 
culpabilité interdit tout
 
misme et maintient la
 
sonne dans une
 
qu'elle imagine méritée.
 
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ON ASSURE!
 
que cette culpabilité est vécue
 
par tout un peuple, elle devient
 
collective, elle s'accompagne
 
de ségrégation sociale.
 
( .. .) La prison s'inscrit dans
 
la destinée de ce peuple et
 
devient un lieu de passage
 
obligé pour les plus exclus ...
 
(ATD-Quart monde ,
 
IGLOO n° 93-94.)
 
L'analyse ci-dessus est applicable,
 
avec quelques variantes,
 
aux jeunes d'origine immigrée
 
: exclusion qui fait un
 
peuple d'exclus un peuple ~
 
voué à la marginalité et donc à ~
 
la prison. Voici le témoignage ~
 
de M ... recueilli en 1984 : ~
 
« Un jour je me suis retrouvé ~
 
en prz.s on. La', on est d es \~:)
 
« merdes », des« chiens » . Et:
 
les « merdes », on les fout à la
 
poubelle. C'est ce que pensent les matons. A la prison, c'est
 
pire que dehors, on est encore plus solitaire, plus dans la
 
merde, pour étouffer. A la prison, il y a 5 000 taulards,
 
violeurs, braqueurs, jeunes, vieux .. . C'est le « chacun pour
 
soi et Dieu pour tous » ou en plus direct : le premier baise
 
l'autre. C'est la société, la «justice » qui font les délinquants
 
... J'ai essayé de me réinsérer, j'ai frappé à toutes les
 
portes et on me les a toutes claquées à la figure parce que
 
j'avais l'image du taulard, c'est-à-dire la peste. » Et ainsi de
 
suite, pour ne pas revoler, recel et re-prison: « Je me suis
 
retrouvé avec les mineurs. C'est un autre monde, les mômes
 
se retrouvaient à trois dans une cellule pour deux mal
 
nourris. En plus, un môme, à seize ans, ça ne sait pas gérer
 
son budget. Et puis, il y a les « toxicos » qui sont au service
 
médico-psychiatrique. Ils sont bourrés de médicaments. Les
 
psychiatres les défoncent comme dehors. Puis, peu à peu, on
 
diminue les doses et il n'y a plus de doses du tout, et les
 
mômes s'ouvrent les veines, ou se pendent. »
 
Aujourd'hui, M ... , comme plusieurs centaines d'autres
 
jeunes à travers la France, est en formation d'animateur
 
pour porter secours aux petits frères des ZUP et leur éviter
 
les terribles galères des grands. C'est bien de tirer profit de
 
leur expérience et de la mettre au service des plus jeunes,
 
mais la société, en même temps, ignore les grands comme
 
les petits et s'en remet aux uns pour gérer les autres. « On
 
s'est aperçu, dit M ... , que ce sont les jeunes des Z UP, en tant
 
qu'aiûmateurs-éducateurs, qui peuvent arranger les
 
merdes » ...
 
Quand on a été jeune délinquant, qu'on a connu /a
 
ga/ère, comment s'en sortir?
 
Reprendre goût à la vie? Ceux, par exemple, qui ont
 
entamé, il y a trois ans déjà, une formation mise en place
 
par le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité
 
nationale: «Dans le cadre du plan de lutte contre la
 
pauvreté et la précarité, le gouvernement s'est donné pour
 
objectif de faire accéder à une formation professionnelle
 
reconnue de travailleur social, de jeunes adultes qui, du fait
 
de leur origine sociale et de leur expérience individuelle,
 
seront à même d'apporter au travail social une dimension et
 
une efficacité nouvelles. ( .. .) Les candidats seront sélectionnés
 
en fonction, notamment, de critères d'« intention »
 
ou critère personnel. Le programme s'adresse à des
 
personnes ayant manifesté une volonté de « faire quelque
 
chose » pour leur environnement social. Volonté qui s'est
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
traduite par une action (bénévole,
 
militante) et donc l'acquisition
 
d'un certain savoirfaire
 
(. . .) qu'il faut consolider
 
et enrichir, grâce à la formation,
 
afin qu'il devienne la
 
base d'une démarche professionnelle.
 
( .. .) Je tiens à insister
 
sur l'importance que
 
j'attache à la réussite de ce
 
programme dans lequel les
 
objectifs de promotion et de
 
promotion sociale sont indissociables.
 
» (Georgina Dufoix)
 
Il existe plusieurs façons d'essayer
 
de s'en sortir et d'aider
 
les autres à s'en sortir: par
 
exemple, quand on a été
 
jeune délinquant, qu'on a
 
vécu la galère et l'absence
 
d'espoir, on peut créer une
 
assoclatlOn, comme il s'en est créée des centaines dans
 
toute la France depuis cinq ans. Citons le cas exemplaire de.
 
«Mixture », association de jeunes de Villeneuve-sur-Lot,
 
pour la plupart enfants de familles musulmanes rapatriées
 
dans les bagages de la France après 1962. Mixture a été
 
mise en place par XXXXX XXXXXXX, délinquant repenti que
 
la justice a pourtant lourdement condamné (voir Différences
 
n° 53).
 
Tout comme dans l'histoire, dans le jaillissement des
 
jacqueries paysannes et des émeutes de crève-la-faim,
 
coupe-jarrets et mendiants, il y a eu prise de conscience
 
qu'il ne s'agissait pas seulement de cas isolés, qu'il existait
 
des structures d'opposition et c'est ainsi « que certains se
 
sont faits révolutionnaires, conscients et organisés» (ATDQuart
 
monde - Igloo n° 93-94). Le même texte souligne
 
que «seule une analyse politique permet ce passage :
 
permettre au sous-prolétaire culpabilisé et révolté de devenir
 
militant d'une société sans exclusion. Cette perspective
 
bouleverse la conception actuelle de l'action préventive à la
 
délinquance. Il s'agit d'abord de rassembler les plus
 
exclus ... » Ne pourrait-on mieux dire encore : il s'agit que
 
les jeunes, les exclus, les délinquants, les anciens délinquants
 
se rassemblent, prennent conscience collectivement
 
dans le cadre de leurs
 
groupes et associations de
 
quartier, de leurs aspirations
 
et motivations profondes, des
 
causes de l'état de délinquance,
 
si lucidement analysées
 
par nombre d'entre eux.
 
Il s'agit qu'ils puissent en
 
faire une analyse politique
 
cohérente, qu'ils soient partenaires
 
d'une action pour
 
changer la société, pour en
 
faire une société sans exclusion,
 
dans laquelle tous jouissent
 
de droit égaux.
 
C'est loin encore de la politique
 
de prévention mise en
 
oeuvre actuellement. On ne
 
change pas les esprits et les
 
coeurs du jour au lendemain.
 
Mais, pour avancer, il faut
 
clairement savoir où est le
 
chemin.
 
BERNADETTE HETIER
 
OuRMÉMmRE __________________________ ~
 
_ KURDES_
 
Quatre patrio"tes Kurdes
 
sont abattus par l'armée
 
turque dans le sud-est de
 
la Turquie (15 janvier).
 
_EXCUSES_
 
Bonn: le jeune député
 
bavarois flerrmann FelIner
 
(CSU), qui avait tenu
 
des propos antisémites au
 
sujet des réparations demandées
 
au groupe Flick pour
 
l'utilisation de travailleurs forcés
 
juifs pendant la guerre, s'en
 
excuse publiquement à la
 
tribune du Bundestag et auprès
 
du président de la communauté
 
juive ouest-allemande (16 janvier).
 
___ VISA __ -
 
Le fils du cinéaste soviétique
 
émigré Andréi Tarkovsky, Andréi,
 
15 ans et sa belle-mère
 
Anna Egorkina, 85 ans arrivent
 
à Paris à l'issue de longues
 
démarches pour obtenir leur visa
 
d'émigration (19 janvier).
 
MLK __ -
 
Célébration aux Etats-Unis de la
 
Journée nationale d'hommage à
 
Martin Luther King Jr. Discours,
 
expositions, concerts,
 
inauguration d'un buste du célèbre
 
pasteur noir au Capitol à
 
Washington. Grand spectacle
 
pour finir dans la capitale américaine
 
organisée p'ar Ste vie
 
Wonder. Pour leur part, les
 
membres du Ku Klux Klan ont
 
défilé devant le Capitole et dans
 
plusieurs villes américaines en
 
réclamant la suppression de la
 
journée d'hommage à Martin
 
Luther King (20 janvier).
 
__ SACRE __ _
 
Le Conseil du grand rabbinat
 
d'Israël interdit à tout juif de
 
pénétrer dans l'enceinte du mont
 
du Temple (où se trouve l'esplanade
 
des Mosquées), à Jérusalem,
 
« en raison de la sainteté
 
de l'endroit ». Cette interdiction
 
fait suite à une série d'incidents
 
au cours desquels, la semaine
 
précédente, des extrêmistes juifs
 
__' LESOTHO __
 
Après trois mois de blocus,
 
l'Afrique du Sud provoque la
 
chute du gouvernement du Lesotho
 
accusé d'être solidaire de
 
l'ANC, principale organisation
 
noire luttant pour l'émancipation
 
en Afrique du Sud.
 
Vingt-deux dissidents noirs, tous
 
leaders de 1'« United Democratic
 
Front », sont jugés pour
 
haute trahison à Johannesburg.
 
Ils risquent tous la peine de mort
 
(20 janvier).
 
_ P'TITS GARS _
 
Début du procès des trois légionnaires
 
accusés du meurtre de
 
flabib Grimzi dans le Bordeaux
 
Vintimille en novembre 83. Ils
 
seront lourdement condamnés, à
 
perpétuité pour deux d'entre eux
 
(20 janvier).
 
__ SLEPAK __
 
Mme Orlovsky demande aux
 
autorités soviétiques qu'à l'occasion
 
du 27' congrès du Parti
 
communiste, sa soeur Marie
 
Siepak soit autorisée à émigrer
 
en Israël au titre du regroupement
 
familial (20 janvier).
 
_ CIMETIERES _
 
Le vice-président du Conseil
 
d'Etat polonais reçoit à Varsovie
 
M. Sigmund Nissenbaum, président
 
d'une fondation de RFA.
 
Les discussions portent sur la
 
restauration de cimetières juifs
 
de Varsovie (24 janvier).
 
_CHOMEUR?_
 
Le directeur de l'ANPE de Grenoble
 
comparaît à nouveau devant
 
la cour correctionnelle de
 
Lyon. En effet, l'ANPE de Grenoble
 
faisait figurer sur ses
 
fiches, à la demande des employeurs,
 
des mentions excluant
 
les candidatures de Noirs ou
 
d'étrangers. Plusieurs employeurs
 
ont été déjà condamnés
 
le 5 janvier 1982 (24 janvier).
 
_ MAUVAIS GOUT _
 
(parmi lesquels des parlemen- Laura Ashley, fabricant de tissus
 
___ PRIX __ _
 
Win nie Mandela reçoit le prix
 
Robert F. Kennedy pour les
 
Droits de l'homme 1985 dans un
 
hôtel de la périphérie de Johannesburg.
 
Elle partage ce prix
 
avec deux autres importants militants
 
antiapartheid: Allan
 
Boesak, président de l'Alliance
 
mondiale des églises réformées
 
et Beyers Naudes, secrétaire générai
 
du Conseil des églises sudafricaines.
 
Winnie Mandela et
 
Boesak avaient été dans l'impossibilité
 
de se rendre à New York
 
pour recevoir leur prix
 
(26 janvier).
 
___ MORT __ _
 
Un écolier noir est tué et trois
 
autres blessés lors d'un rassemblement
 
de 5 000 élèves violemment
 
dispersé par la police, dans
 
un ghetto de Krugersdorp, à
 
50 kilomètres de Johannesburg
 
(27 janvier).
 
PETITION __
 
Un demi-million d'Israéliens signent
 
une pétition contre le
 
racisme qui est remise au président
 
du Parlement, M. Shlomo
 
flillel. Cette pétition a été organisée
 
par le Front de lutte antiraciste
 
qui regroupe 17 formations
 
politiques en lutte contre le
 
mouvement d'inspiration raciste
 
antiarabe «Kach » du député
 
rabbin Meir Kahana
 
(27 janvier).
 
___ ASILE __ _
 
Vingt-cinq aSSOCIatIOns de défense
 
et d'accueil des candidats
 
au refuge, dont le MRAP, ouvrent
 
à Paris une campagne
 
nationale sur «le droit d'asile
 
aujourd'hui et demain »
 
(29 janvier).
 
_ INDEMNITES _
 
Une cour d'appel américaine
 
déclare recevables les demandes
 
d'indemnisation présentées par
 
les Américains d'origine japonaise
 
au nombre de 120 000
 
arrêtés sous prétexte de sécurité
 
nationale et internés dans des
 
camps aux Etats-Unis pendant la
 
Seconde Guerre mondiale
 
(29 janvier).
 
__ PAROLES __
 
Nelson Mandela lui aussi dit non
 
à Botha.
 
M. Pieter Botha annonce que les
 
laissez-passer pour les Noirs seront
 
supprimés avant le 1" juillet
 
prochain (31 janvier).
 
__ RAPPORT __
 
Au moment où le gouvernement
 
turc doit fournir à la CommissiOI}
 
des droits de l'homme du
 
Conseil de l'Europe son premier
 
rapport sur cette question , le
 
plus grand journal turc Notkta
 
(Le Point) publie la confession
 
d'un policier tortionnaire qui
 
raconte, dessins à l'appui, comment
 
il a exercé pendant plus de
 
sept ans toutes sortes de sévices
 
sur quelque deux cents prisonniers
 
politiques, hommes et
 
femmes (1" février).
 
___ FUSIL __ _
 
Youssef Lharbi, un ouvrier de
 
30 ans d'origine maghrébine, est
 
tué d'un coup de fusil à Sannois
 
(Val-de-Marne) la suite d'une
 
rixe dans un café (2 février).
 
___ ONU __ _
 
Nations unies: M. flermann
 
Klenner, un ancien nazi, est élu
 
vice-président de la Commission
 
des droits de l'homme!
 
(3 février).
 
__ VOYAGE __
 
En «voyage d'agrément» en
 
Afrique du Sud, 40 policiers
 
ouest-allemands visitent une
 
école de dressage de chiens et
 
des camps d'entraînement de
 
leurs confrères suf-africains
 
(4 février).
 
_ ETONNEMENT _
 
Le bureau national du MRAP
 
s'étonne des récentes directives
 
de la Caisse nationale d'allocations
 
familiales de supprimer les
 
allocations versées aux immigrés
 
privés de travail pour leurs enfants
 
restés au pays (4 février).
 
___ AIDES __ _
 
Le secrétaire d'Etat américain
 
George Shultz se déclare, devant
 
une commission de la Chambre
 
des représentants, «tout à fait
 
favorable à aider la cause » de
 
Savimbi, le chef des mercenaires
 
de l'UNITA, à la solde de l'Afrique
 
du Sud, menant des actions
 
militaires visant à déstabiliser le
 
régime de l'Angola (5 février).
 
taires d'extrême droite) avaient londonien, met au rebut toute sa M. Pieter Botha propose d'é__
 
L'ARCHE __
 
pénétré de force sur l'esplanade production d'un modèle de tissu, changer Nelson Mandela contre
 
des Mosquées et perturbé la parce que le motif imprimé sur deux dissidents soviétiques et un Décès à Paris, à 65 ans, de
 
prière des musulmans, provo- celui-ci évoquait la tristement soldat sud-africain emprisonné Jacques Sabbath, ancien réd ac-
 
II!I quant des affrontements (20 jan- célèbre svastika, emblème de en Angola. Cette dernière pro- teur en chef de L'Arche, la revue
 
III L-~_·e_r~)._ _______________________f l~it:l:er~(24::~ja:n:v~i:er~):. ____________~ p~o~s~it~io~n~e~st~r~e~je~t~é~e~p~ar~I~'A~ng~o_1_a._ ___d_ u~j~u_d_a_is_m__e _fr _a_n~ç~a_is_(~5_~_é_v_ri_e_r~).~
 
~ ~L_ __________________________________________________________________________________________ ~
 
Le 11 février 1986 : Anatoli Chtcharansky libéré. Sur le pont de Glienicke à Berlin, pendant plus d'une
 
demi-heure, on procède aux « échanges d'espions » .
 
_ __ NAZIS __ _
 
Cinq membres d'un groupe néonazi
 
violent « The Order » dont
 
l'objectif est de renverser le
 
gouvernement américain et de
 
créer un Etat« aryen » sans juifs
 
ni minorités, sont condamnés à
 
des peines de 29 à 35 ans de
 
prison pour hold-up, cambriolages,
 
racket et plusieurs
 
meurtres (6 février).
 
__ ISRAEL __
 
Une centaine d'étudiants israéliens
 
empêchent, aux cris de
 
«Vive Mandela », l'ambassadeur
 
d'Afrique du Sud en Israël
 
de prendre la parole à l'Université
 
hébraïque.
 
_ FLYING DOC _
 
Washington contraint le président
 
Duvalier à abandonner le
 
pouvoir à flaïti. La France lui
 
accorde un droit d'asile « provisoire
 
» (7 février).
 
___ PUNIS __ _
 
Le chef de l'Etat sud-africain,
 
M. Pieter Botha, désavoue publiquement
 
son ministre des Affaires
 
étrangères, M. Pik Botha.
 
D'autre part, M. Frederick Van
 
Zyl Slabbert, dirigeant de l'opposition
 
et du PFP (Parti fédéral
 
Différences - nO 54 - MARS 1986
 
progressiste), démissionne après
 
un violent réquisitoire contre le
 
gouvernement et le constat amer
 
d'un « immense sentiment d'absurdité
 
» (7 février).
 
__ EST-OUEST __
 
Un fermier du nord-est des
 
Etats-Unis mélange des laines de
 
moutons américains et soviétiques
 
pour tisser « une toison de
 
paix » qui, explique-t-il, contribuera
 
au réchauffement des relations
 
entre les deux superpuissances
 
(8 février).
 
__ ROSETTE __
 
Le grand écrivain noir américain
 
James Baldwin est fait commandeur
 
de la Légion d'honneur par
 
le président François Mitterrand
 
(10 février).
 
ENFIN __ _
 
Le dissident soviétique Anatoli
 
Chtcharanski est libéré à Berlin
 
à la faveur d'un échange d'agents
 
entre l'Est et l'Ouest. Il a
 
passé neuf ans en prison
 
(11 février).
 
_ RIVOLI-BEAUBOURG_
 
Un an après l'attentat antisémite
 
qui l'a ravagé, le cinéma Rivoli
 
Beaubourg n'a toujours pas été
 
reconstruit. Le MRAP lance une
 
campagne avec Jeanne Moreau
 
et Costa-Gavras pour trouver les
 
fonds nécessaires. Il a notamment
 
écrit au Conseil de Paris
 
pour que celui-ci complète la
 
subvention accordée par Jack
 
Lang (11 février).
 
_ CONDAMNES _
 
Vingt-six Marocains accusés
 
d'appartenir au mouvement liai
 
Amam (En avant) sont
 
condamnés à des peines allant de
 
trois à 26 ans de prison par la
 
chambre criminelle de la cour
 
d'appel de Casablanca
 
(12 février).
 
_ COOPERATION _
 
La société française CGEE AIsthom,
 
qui opère sur le chantier
 
de la centrale nucléaire sudafricaine
 
de Koeberg, près du
 
Cap, a retiré en décembre dernier
 
l'autorisation d'accès au
 
chantier à Cecil Theys, président
 
régional du Syndicat des électriciens
 
(EATUSA), à la suite
 
d'une réunion entre les dirigeants
 
de CGEE-Alsthom, des
 
représentants de la police sudafricaine
 
et de la Compagnie
 
nationale d'électricité
 
(ESCOM). On lui reproche d'avoir
 
participé à une · manifestation
 
antiapartheid (12 février).
 
__ CINQ ANS __
 
Cinq ans de prison, dont trois
 
avec sursis, pour l'assassin de
 
Wahid flachichi à Lyon. La
 
famille proteste contre la clémence
 
de la peine (14 février).
 
__ RIGOLO __
 
Le maire chrétien-démocrate de
 
Korschenbroich en Rhénanie.
 
démissionne de ses fonctions en
 
raison du tollé déclenché par une
 
remarque antisémite qu'il avait
 
faite le mois dernier en plein
 
conseil municipal. Il avait cru
 
bon de plaisanter en déclarant
 
que, pour équilibrer son budget
 
communal. « il allait falloir assommer
 
une paire de riches
 
juifs ».(14 février).
 
__ OTAGES __
 
Un quatrième habitant juif de
 
Beyrouth, enlevé l'été dernier.
 
est retrouvé mort au Liban
 
(15 février).
 
Réalisé par
 
ROBERT PAC Il
 
   
. .....
 
"~-'". .. R
 
Djanet. Quand vous arrivez,
 
tout est jaune. Ilfaut plusieurs
 
jours pour que les yeux s'habituent
 
à cette extraordinaire
 
lumière ocre, presque dorée
 
qui .inonde le désert. il faut
 
l'amadouer, la prendre à
 
petites gorgées comme une
 
potion.
 
A l'aéroport, quelques Touaregs,
 
habillés dans un vêtement d'une seule couleur, et des
 
touristes. Des touristes tout de même un peu particuliers, le
 
désert attire à lui des catégories de gens très différents,
 
mais qui ont tous en commun le goût de l'aventure et d'un
 
inconnu que chacun interprète à sa manière. Qu'est-ce qui
 
réunit donc le jeune garçon qui a vendu sa 2 CV pour
 
franchir ce pas vers ce qu'il croit être l'absolu et ce couple
 
de médecins suisses soucieux de faire du tourisme
 
intelligent?
 
Entre ces deux cas limites, on trouve une palette
 
diversifiée: routards, alpinistes, amateurs de solitude en
 
car climatisé ou à la dure, doux hallucinés ou casse-cou
 
exaltés. Et des «fous de désert ", impatients d'avoir leur
 
dose et qui rêvent en secret d'arriver, par la faim, la soif, ou
 
la lente marche à travers les sables, jusqu'à leurs limites les
 
plus reculées, comme ces pèlerins d'antan.
 
L'agence de tourisme algérienne en place à Djanet
 
D,··· .. ~ · eSèl.1
 
crONAT) offre deux possibilités : des ballades en Land- '
 
Rover ou des excursions à pied qui peuvent durer de trois à
 
six jours selon la formule adoptée. Mieux vaut partir à pied,
 
Le rythme habituel est de vingt kilomètres par jour. Des
 
ânes chargés de barils d'eau, de Victuailles et du matériel
 
de camping suivent le groupe.
 
Départ avant le lever du soleil, pause-thé, casse-croûte,
 
sieste vers midi jusqu'à quinze heures pendant la grande
 
chaleur, à l'ombre d'un rocher ou d'un bouquet d'épineux,
 
Remise en marche jusqu'au coucher du soleil,
 
C'est l/IIe seRS8IÎIIII ulJÏllue .de dlJ""it
 
au milieu de nulle ,.,
 
Le iythme est régulier, mais pas monotone, aucun oued ne
 
ressemble à un autre. Tout change de couleur d'heure en
 
heure, le ciel, la terre, les rochers, le sable, Ces marches
 
sont épuisantes, mais, étrangement, quand le soir vient, on
 
n'est guère fatigué et l'on se joint volontiers, quand on le
 
peut, aux Touaregs. Ceux -ci ont pour coutume de serVir
 
rituellement le thé trois fois, car, selon le dicton, cc Le
 
premier est amer comme la vie, le deuxième fort comme
 
l'amour et le troisième suave comme la mort. »
 
1 ' , , Des campements sont prévus pour la nuit, mais on peut
 
aussi dormir à la belle étoile. C'est une sensation unique '
 
que de dormir au milieu de nulle part. On a l'impression de
 
disparaître. Les constellations de la nuit prennent possession
 
du désert et l'entourent de leur chape étoilée.
 
Mais, ce n'est guère l'endroit de se laisser aller au lyrisme
 
(qu'il inspire pourtant). Le désert tord le cou à l'éloquence.
 
Il supporte mal le romantisme, le bavardage, l'enflure.
 
Muet, minéral et introverti, il exprime la mort plus que la
 
vie. Il est sec, gigantesque, cahotique. Et il suffit toujours,
 
théoriquement au moins, d'une gourde prématurément
 
vide, de provisions épuisées, d'un scorpion ou d'une
 
cheville foulée pour devenir à jamais prisonnier de cette
 
étendue implacable, bien qu'il devienne très rare qu'un
 
touriste y meure!
 
On imagine volontiers le désert comme d'immenses
 
étendues de sable. Pourtant celles-ci ne représentent
 
même pas la moitié de la superficie du Sahara. Zones
 
montagneuses et plaines rocailleuses sont bien plus vastes.
 
Espaces lunaires où les rocs noirâtres semblent avoir été
 
sculptés par de mystérieux architectes. Enormes boules de
 
granit, forêts de pierres se succèdent. Et quand, entre les
 
pierres, apparaissent les dunes, douces et lisses et qui
 
montent à l'assaut du ciel, c'est presque un miracle, on
 
croirait voir un ventre de femme. Les dunes, c'est la chair
 
du désert. Des plages de tendresse où il se repose enfin,
 
allongeant son grand corps s~nueux et galbé, plein de
 
courbes et de bosses.
 
,L'inattendu domine. Que fait-il là dans ce creux, cet arbre
 
solitaire et rachitique, piquant comme un chardon? On le
 
croyait hospitalier et. il blesse. Le désert est un immense
 
mirage. Déconcertant, il ne donne pas ce qu'il promet, mais
 
davantage ou tout autre chose.
 
cc Ne cherche pas à lireâans le dêsert, écrivait Edmond
 
Jabès, tu y trouverais tous les
 
livres ensevelis dans la poussière
 
de leurs mots. »
 
Idriss, le guide, tout en marchant,
 
chantonne à voix
 
basse. En route, il compose"
 
des poèmes qu'il chante le ~~,-"
 
soir autour du feu de camp.
 
Idriss est un troubadour, en
 
même temps qu'un guide
 
parfaitement compétent. Le
 
dernier jour, alors que nous
 
revenions vers la palmeraie
 
de Djanet, j'ai failli lui demander
 
son adresse. Puis j'y
 
ai renoncé. 0
 
MONIQUE A YOUN
 
Le Hoggar: le paysage
 
reste inchangé,
 
les hommes bougent.
 
ID
 
Désert
 
Le désert, voilà un terme qui
 
plonge notre imagination loin
 
dans le temps passé et à
 
venir du monde, un terme
 
chargé de significations
 
fortes et de représentations
 
multiples. Parmi celles-ci, la
 
plus commune, déjà marquée
 
du sceau du paradoxe, se
 
rapporte au rapprochement
 
entre le désert et l'océan. La muse du désert semble
 
particulièrement sensible aux images qui répètent cette
 
comparaison. On y trouve le flot des dunes, les vagues que
 
forment les ergs, la tempête de sable, et les rives du
 
Sahara. Le chameau devient vaisseau du désert, les oasis
 
des îles, les puits sont des escales, et le premier Français
 
qui ait traversé le Sahara aurait été marin (1). Mais,
 
incontournable différence, le Sahara « a ses humains », ils y
 
ont laissé des traces, et dans une des versions dramatiques
 
c'est « le pays de la soif ».
 
Dans la conscience collective occidentale, le désert a
 
depuis fort longtemps été investi d'une mystique qui s'est
 
nourrie à plusieurs sources. Ainsi, la spiritualité biblique et
 
chrétienne était pleine de références au désert; espace
 
et temps hostiles à traverser, mais aussi refuge sûr pour le
 
peuple juif; le désert, lieu de retraite des prophètes et du
 
Christ, lieu où le diable tente, mais aussi où Dieu parle:
 
« Dieu conduit les âmes saintes dans le désert ou dans la
 
solitude pour leur parler au coeur» (Osée II, 14) (2).
 
Mais il est remarquable de constater qu'en France la
 
littérature du désert s'est trouvée fécondée d'une manière
 
exceptionnelle avec la découverte du Sahara, laquelle a
 
accompagné l'expansion coloniale.
 
De manière globale, avant comme après la conquête, deux
 
types d'appréhension du désert se côtoient, se croisent ou
 
se confondent. D'une part, la séduction, la fascination qu'il
 
exerce et qui va jusqu'à « l'abolition de l'être devant l'absolu
 
et l'infini ». André Gide note dans l'Immoraliste: «En ce
 
pays de mortelle gloire et d'intolérable splendeur,
 
l'homme, l'accident humain s'estompe ou s'efface. L'effort
 
de l'homme y paraît laid et nuisible. » D'autre part, cette
 
l'EXPO
 
Un regard se porte sur une région de l'Algérie, le Hoggar. Les
 
collections ethnographiques du musée de l'Homme et du musée
 
des Arts africains et océaniens, ainsi que des collections privées,
 
sont mises en scène dans un environnement qui reconstitue
 
l'habitat nomade chez les pasteurs Touaregs Kel Ahaggar.
 
L'espace est recréé par une animation audiovisuelle. L'ensemble
 
suggère les différents modes de vie des popukltions du Hoggar
 
aujourd'hui, les ruptures et les éklns d'une société traditionnelle
 
et son insertion dans un pays en plein développement. Une invite
 
entre ville et désert. Une rencontre avec des hommes plus
 
vraiment mouvants, immobile.~ non plus.
 
Musée des Arts africains et océaniens, 293, avenue Daumesnil,
 
75012 Paris. Du 21 février au 18 mai.
 
Hommes bleus, Touaregs, parties intégrantes
 
du mythe du désert. Et les femmes?
 
fascination se double d'une volonté d'affrontement qui se
 
présente d'abord, comme un affrontement à la nature
 
simultanément extasiant et terrifiante.
 
Le père Charles de Foucauld représente l'un des
 
exemples les mieux connus de l'attraction qu'exerce le
 
désert mais aussi (surtout?) de la volonté de transformer
 
cette terre «virginale» et, bien sûr, ses habitants. Pour
 
accomplir sa mission évangélisatrice, Foucauld sillonne le
 
désert en faisant des « tournées d'apprivoisement» durant
 
lesquelles il « décide de donner une aumône de sept francs
 
dans chaque ksar petit, quatorze francs dans chaque grand,
 
vingt et un francs dans chaque très grand» (3). Mais
 
surtout, il va toujours plus loin. Il écrit dans son journal, au
 
moment où il s'établit définitivement dans le Hoggar: «Je
 
choisis Tamanrasset, village de vingt-deux feux, en pleine
 
montagne, à l'écart de tous les centres importants. Il ne
 
semble pas que jamais il doive y avoir ici garnison,
 
télégraphe, Européens; de longtemps il n'y aura pas de
 
mission: je choisis ce lieu délaissé, et je m'y fixe» (3).
 
Les mythes aussi ont besoin de se nourrir aux portes du
 
réel. C'est donc la conquête de l'Algérie et du Sahara
 
algérien qui vont rapprocher le désert de la France et
 
permettre aux divers explorateurs, etnographes, aventuriers,
 
écrivains, peintres de construire l'exotisme du désert.
 
Ils vont lui donner des contours, des personnages, des
 
histoires qui s'appuient sur l'idée de la mission civilisatrice.
 
Ils seront en cela les continuateurs et les relais de la notion
 
de progrès. La destinée prométhéenne de l'homme est une
 
fois de plus réhabilitée avec force. Si l'Orient des
 
Romantiques, pour plusieurs raisons, n'a jamais mobilisé les
 
1
 
grandes foules, en revanche le désert, comme sujet ou
 
contexte, touche une grande masse de personnes et leur
 
permet d'échapper aux limites et aux frustrations de la
 
réalité qu9tidienne; là tout devient possible: l'épopée, le
 
courage, les amours impossibles, la rencontre avec l'infini
 
et l'absolu, l'aventure, l'inattendu.. . Les textes comme
 
l'Atlantide (P. Benoit), le Petit Prince (Saint-Exupéry), Fort
 
Sagane (L. Gardel), et bien d'autres encore ainsi que les
 
bandes dessinées ont créé un imaginaire collectif auquel il
 
est difficile d'échapper.
 
Les ltIumles de Chltles de FDutluld:
 
une ,um;ne de septlt,na d,ns tlllflue kSll petit,
 
flUilltlae It,na d,ns thilflue ,,,nd
 
L'annoblissement par le désert se conjugue avec un certain
 
annoblissement de ceux qui y vivent. Ainsi, les Touaregs
 
continuent de fasciner les Européens depuis plus d'un
 
siècle. Ils sont constamment modalisés de toutes sortes
 
d'adjectifs plutôt valorisants. La revue Géo (4) titre «Le
 
valeureux peuple du désert» et le journaliste qui s'est
 
rendu à Tamanrasset remarque «Les hautes silhouettes
 
longitilignes des Touaregs habillés de pied en cap (qui) se
 
détachent avantageusement de la masse bigarrée ... »Cette
 
admiration va parfois jusqu'à l'extrême, jusqu'à l'ambiguïté;
 
ainsi on s'étonne devant « les réflexes étonnants» de «ces
 
hommes du désert» tout simplement parce qu'un jeune
 
rêvé
 
Touareg de 20 ans a choisi le métier de chauffeur, et qu'il
 
n'a rien perdu en changeant de «monture ».
 
Hier comme aujourd'hui, le désert signifie avant tout la
 
nature à l'état brut et l'antisociété : « L'homme ici s'abolit, en
 
ce qu'il a de social ou d'artificiel, devant la nature
 
péremptoire, et son apparente démesure. Toute la charge
 
collective qui l'oppresse devient dérisoire: un fardeau
 
d'illusions; la lumière crue fait l'évidence: ce qui importe,
 
seul, c'est la vérité humaine que chaque être porte en SOl~
 
et que la foule oblitère. Le désert restitue à l'homme son
 
contenu d'humanité. » Une humanité vierge, non souillée
 
par la société corruptrice, une humanité sans les hommes
 
en quelque sorte (5).
 
Autre temps, autres moeurs, aujourd'hui le Sahara, le
 
décor westernien du Hoggar, représentent pour les
 
amoureux de la mer de sable, les « vraies» vacances, une
 
sorte de retour à la nature presque obligé: « Il y a ainsi
 
dans tout homme moderne une nécessaire quête du désert
 
que quelques-uns réalisent plus intensément et de façon
 
plus sensible que les autres qui ne vivent le désert qu'à
 
l'état d'idée ou qu'à travers le substitut des vacances
 
période d'absence, de déconnextion du temps moderne:
 
de retour charnel au sable, ce sable des plages qui est,
 
même s'il est souillé, la rencontre de tous les éléments
 
archaïques: eau, terre, air, feu, et qui est aussi bien sûr la
 
limite sensible du monde civilisé. (2) »
 
Le besoin du mirage désertique ne va pas parfois sans
 
quelque ambiguïté. Ainsi, la condescendance, que l'on
 
exprime parfois à l'égard des hommes «authentiques» qui
 
vivent dans le désert, s'accompagne souvent d'une certaine
 
désolation devant le fait que les nomades se sédentarisent
 
qu'ils conduisent des camions au lieu des caravane~
 
d'antan, bref, que la modernité s'installe aussi aux confins
 
du désert. .
 
Espace à coloniser - civiliser, prétexte à rêver, le désert
 
offre des images parlantes aux fantasmes du sédentaire en
 
crise; l'espace céleste a pris depuis quelques années le
 
relais de ce lieu imaginaire où distance spatiale et distance
 
temporelle se confondent. L'un et l'autre nous permettent
 
de transgresser plus ou moins merveilleusement notre
 
destin moderne. Si la guerre n'a pu être évitée au Sahara,
 
espérons que le destin nous épargnera la guerre des
 
étoiles. 0
 
CHER/FA
 
(1) Connaissance de l'Afrique, le Sa-.
 
hara avant le pétrole, Guy Le Rumeur,
 
Société continentale d'éditions
 
modernes illustrées, 1960.
 
(2) Le Désert nécessaire, Jean Robert
 
Henry, in revue Autrement, série S,
 
n° 83.
 
(3) Charles de Foucauld, René Bazin, oc
 
Plon, 1921. ~
 
(4) N° 70, décembre 1984. ~
 
(5) Sahara, François Vergnaud, ~
 
Petite Planète. ~
 
~
 
IVRES ____________________ ~
 
Sid-Ali Melouah : BD réalistes
 
BD ET TAPIS VOLANTS. « Il n'y a pas
 
de raison qu'un petit garçon algérien
 
s'identifie à Goldorak! », s'exclame
 
Sid-Ali Melouah. «Les auteurs de
 
bande dessinée, qu'ils soient Français,
 
Belges, Italiens ou Américains produisent
 
tous en fonction d'une vision typiquement
 
américaine qui est le western.
 
L'originalité de la bande dessinée algérienne,
 
c'est de traiter des sujets qui lui
 
soient propres, avec des héros qui ont
 
des têtes d'Arabes, non de Suédois ou
 
d'Amerloques, et des fictions qui
 
conviennent à des imaginations nourries
 
de batailles au sabre, de djellabahs qui
 
volent, de youyous de femmes et de
 
contes des mille et une nuits. »
 
Sid-Ali Melouah pense au contraire que
 
la bande dessinée, outre sa fonction
 
nécessaire de pourvoyeuse de rêve et
 
d'évasion, peut être utilisée de façon
 
positive et mise au service de la sécurité,
 
de l'éducation, de la fraternité
 
entre les peuples. «Par mes dessins,
 
déclare Sid-Ali, j'aimerais faire rêver les
 
gens sans pour autant perdre de vue que
 
nous avons un passif culturel à récupérer
 
et qu'il est nécessaire de traiter des
 
thèmes qui concernent la société algérienne.
 
»
 
La bande dessinée de Melouah
 
confirme que rêve et réalité ne sont pas
 
inconciliables. Avec un grand souci de
 
véracité historique, il part d'éléments
 
réels et vérifiables pour ensuite donner
 
Celui qui nous assène cette affirmation libre cours à une imagination débridée,
 
carrée - mais si profondément juste - où pirates enturbannés, bateaux ailés,
 
c'est un garçon très doux et très sen- étranges tapis volants (Sid-Ali propose,
 
sible, mais qui est parfois agacé par un en effet, une vision toute personnelle et
 
dernier carré de rétrogrades qui contes- futuriste des traditionnesls tapis votent
 
l'importance et le bien-fondé de la lants) , se chevauchent et s'entrecroisent
 
BD algérienne ou qui la pensent néces- en un défilé époustouflant. ..
 
sairement porteuse d'un message né- Avant de devenir l'un des principaux
 
gatif venant influencer ou contrecarrer précurseurs de la bande dessinée de III L-____________________________~ ~_l_e_s_o~p_t_io_n_s_d_u~p_a~y_s_. __________________sc _i_e_n_c_e_f_i_ct_io__n _a _l~g~é_ri_e_n_n_e~,__M_ e_ lo_u_a_h _a ~
 
longtemps fait du dessin d'humour.
 
Mais son inventivité toujours en éveil
 
et son type bien particulier de sensibilité
 
pointue, investigatrice et «questionneuse
 
» devaient trouver leur véritable
 
épanouissement à travers un dessin dit
 
réaliste, lui permettant d'approcher des
 
aspects de la réalité algérienne (dans
 
l'actualité ou dans l'histoire), tout en
 
laissant le champ libre à sa fantaisie
 
imaginative.
 
Ce qu'on appelle la « bande dessinée
 
réaliste », ce n'est pas tant un scénario
 
fondé sur des faits réels, c'est surtout un
 
certain style de dessin qui nécessite une
 
approche en matière d'anatomie artistique.
 
Et en cela Melouah excelle: le
 
tracé de ses personnages est sûr,
 
musclé, et l'identification de son graphisme
 
est en complète harmonie avec
 
les normes qu'il entend donner à la BD
 
algérienne et à l'originalité de celle-ci.
 
On sait qu'en Algérie cette forme
 
d'expression nouvelle, qu'on nomme le
 
ge art, s'est imposée depuis peu, mais
 
qu'à présent les autorités algériennes
 
prennent conscience de l'importance de
 
cet art.
 
Lors de son bref passage à Paris, nous
 
en avons félicité Melouah qui nous a
 
répondu : «Peut-être que nous, pionniers
 
en la matière, y sommes pour
 
quelque chose. Ce serait en tout cas là
 
notre plus grande satisfaction. » 0
 
MONIQUE AYOUN
 
Cité interdite, de Sid-Ali Melouah, éd.
 
ENAL.
 
DRAGUE. Comment faire l'amour avec
 
un nègre sans se fatiguer ou les tribulations
 
de deux jeunes Noirs dans un
 
quartier de Montréal, le Carré Saint
 
Louis. L'un est fou de jazz et écoute des
 
disques à longueur de journée en faisant
 
des commentaires très personnels
 
sur Freud, sa vie, son oeuvre ... L'autre
 
tente d'écrire un roman-journal, n'y
 
arrive pas toujours. Il est cent fois tenté
 
de renoncer, mais persiste malgré tout
 
et frappe sur sa vieille Remington, qui
 
aurait - lui a certifié le vendeur -
 
appartenu à Chester Himes ... De quoi , , rever ... .
 
Des filles partagent leur vie ... passent. ..
 
font un tour de valse ... repartent aussitôt.
 
.. , mais quelquefois s'installent
 
pour une durée plus ou moins longue.
 
Dany Laferrière, l'auteur de ce romanjournal,
 
possède un style vif, mordant,
 
ironique et parfois désespéré... La
 
drague a ses lois, à chacun d'y trouver
 
son compte. 0
 
J. T.
 
Comment faire l'amour avec un nègre
 
sans se fatiguer, de Dany Laferrière
 
VLB éditeur.
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
Azouz Begag
 
BANLIEUES. Dans son roman le Gone
 
du Chaâba, Azouz Begag nous conte
 
l'enfance d'un jeune algérien dans les
 
bidonvilles de Villeurbanne, banlieue
 
de Lyon... Bidonville où, malgré la
 
misère, les conditions de vie rudes et
 
précaires, survivent encore l'amitié, les
 
traditions, l'observance des coutumes
 
religieuses et où l'autorité du chef reste
 
toujours indiscutée ...
 
Peu à peu, le bidonville va cependant se
 
dépeupler. Les familles, une à une,
 
vont quitter le Chaâba pour s'installer
 
dans ces banlieues modernes où la fée
 
électricité et la télévision (la tilifiziou)
 
font leur entrée .. .
 
Peu à peu, également, va s'insinuer en
 
Azouz la honte d'être arabe. Il préférera
 
s'avouer juif plutôt qu'Algérien et
 
le jour où sa mère, en costume traditionnel,
 
viendra l'attendre à la sortie
 
des classes, il saura l'éviter et lui faire
 
comprendre que cela ne doit jamais se
 
reproduire .. .
 
Dans un style oscillant sans cesse entre
 
le rire et les larmes, le comique et le
 
tragique, Azouz Begag nous fait vivre
 
l'exode à la fois dérisoire et tragique de
 
ces familles algériennes dans les années
 
1960-1970. 0 J. T.
 
Le Gone du Chaâba, de Azouz Begag,
 
éd. du Seuil, coll. Points.
 
LES BRAHMANES. Samskara, le
 
roman de l'Indien Anantha Murthy est
 
un roman initiatique. Un homme vient
 
de mourir à l'Agrahara - le village où
 
vivent les brahmanes. Qui va donc se
 
charger de l'ensevelir, ainsi que l'exigent
 
la tradition et les rites funéraires?
 
Tout ce roman consiste en fait en une
 
réflexion sur la caste des brahmanes et
 
sur leur mode de vie. Les brahmanes
 
sont, en effet, une classe socialement
 
inactive et qui vit des revenus ainsi que
 
des produits de la terre que quelqu'un
 
d'autre travaille et cultive à leur place.
 
Samskara consiste donc en une critique
 
sociale, une réflexion philosophique et
 
une description minutieuse et passionnante
 
de la vie quotidienne en Inde
 
durant les années 1930-1940. La femme
 
y revêt un rôle d'une importance primordiale,
 
tant par son rôle d'épouse
 
vertueuse que par son rôle de maîtresse
 
initiatrice des plaisirs de la chair qu'un
 
brahmane se doit de connaître et de
 
pratiquer - entre autres - pour devenir
 
un homme accompli. 0
 
JOELLE TAVANO
 
Samskara, rites pour un mort, de U. R.
 
Anantha Murthy, éd. L'Harmattan, traduit
 
de l'anglais par Anne-Cécile Padoux.
 
NOTRE TERRE. Le titre de cette revue
 
trimestrielle, Nitassinan, emprunté au
 
vocabulaire des Indiens Innus (Montagnais)
 
du Québec, signifie « Notre
 
terre ». Il exprime mieux qu'un long
 
discours la philosophie et le sens de la
 
lutte que mènent les peuples indiens des
 
Amériques. Aujourd'hui , face à la
 
société occidentale , inhumaine et suicidaire
 
à terme, les Indiens apparaissent
 
comme les détenteurs des valeurs qui
 
assurent un avenir à l'humanité. Il est
 
encore temps pour nous d'entendre la
 
parole de l'Indien.
 
Nitassinan en est à son cinquième
 
numéro. Au sommaire, on trouve plusieurs
 
articles sur Léonard Peltier, le
 
leader emprisonné injustement aux
 
Etats-Unis, l'éducation des jeunes Indiens
 
et beaucoup de contes et de
 
poésie.
 
Quatre numéros sont consacrés chacun
 
à un peuple indien. Le numéro 2 parle
 
des Innus (Montagnais) du Québec, le
 
numéro 3 des Navajos et des Hopis du
 
sud-ouest des Etats-Unis, le numéro 4
 
des Indiens « français » de la Guyane et
 
le numéro 5 du Manifeste iroquois, un
 
document essentiel, le message au
 
monde occidental d'une des cultures
 
connues les plus anciennes pour la
 
survie d'un monde de paix et de
 
fraternité. 0
 
ROBERT PAC
 
Nitassinan, revue trimestriellé éditée par
 
le Comité de soutien aux Indiens d'Amérique.
 
BP llO-08, 75363 Parix cedex 08.
 
Le numéro : 25 F, abonnement annuel 4
 
numéros: 100 F (soutien 150 F) .
 
fi
 
Bobigny, janvier 1986 :
 
le Premier Festival raï.
 
Différences-n° 54-MARS 1986
 
ran, Belzunce, les Minguettes,
 
Barbès et enfin Paris, à Bobigny
 
en janvier, la Villette en février.
 
Le nouveau son-choc qui, depuis quelques
 
années, fait frétiller des milliers de
 
jeunes Algériens passe physiquement
 
les frontières. Nu, cru, le raï signifie et
 
chante son opinion. Une opinion pleine
 
de verdeur gaillarde, de rythmes sensuels
 
et lancinants. La vie quotidienne,
 
la rue, une réalité qui exagère toujours
 
trop, c'est ce que l'on crie à plein
 
gosier, tripes ouvertes. Désormais, la
 
tête haute, on chante l'alcool et les
 
femmes. Tant pis pour les musulmans
 
trop bien pensants, tant pis pour les
 
autorités trop longtemps réticentes.
 
Les promoteurs du pop raï : une sympathique
 
smala de chabs (jeunes) Oranais
 
de la zone. Petit chic, petit genre,
 
séducteurs made in Méditerranée, ils se
 
sont imprégnés de rock, de reggae, de
 
flamenco. Ils ont ensuite régénéré ce
 
vieux genre musical que leur ont légué
 
les flûtes bédouines des premiers
 
cheikhs (vieux maîtres) du raï.
 
Foulard au garde-à-vous sur les hanches
 
souvent généreuses des femmes, bras
 
tendus, synthétiseur et boîte à rythme à
 
fond la caisse, le raï a cette magie
 
d'exciter, d'électriser la salle avant
 
même les premiers trémolos.
 
Que ce soit à Bobigny, sur une scène
 
municipale oranaise, dans un cabaret
 
ou un mariage, le rite est invariablement
 
le même. Simple et spontané. Le
 
même que quand on chantait sous les
 
portes cochères, avec un bidon de
 
plastique pour toute derbouka et une
 
vieille guitare essoufflée qui se laisse
 
gratouiller tant bien que mal. Esprits
 
rationnels et cartésiens, ne cherchez pas
 
le produit pro, ne cherchez pas le travail
 
fini, ici il n'y a pas de labeur, il n'y a que
 
la vie et elle n'est plus tout à fait
 
morose.
 
Ainsi naquit le raï
 
Le raï, c'est avant tout une ambiance
 
qui déchaîne, un état d'esprit qui se
 
hurle, des paroles qui s'improvisent.
 
Vulgaires, obscènes? Pensez-vous!
 
Plutôt quotidiennes, banales, savoureuses,
 
comme seul peut l'être le
 
langage populaire teinté souvent de
 
franco-algérien comme: « Je t'aime, je
 
t'aime, rani nebeghik » ( Je t'aime, je
 
t'aime, je te désire ») , ou encore: «Je
 
t'aime, je t'aime, rani n'couli'alik » ( Je
 
t'aime, je t'aime, je coule à cause de
 
toi »). De quoi faire ravaler sept fois
 
leurs plumes rouillées aux juristes de la
 
langue arabe, les détracteurs les plus
 
acharnés du raï.
 
Ils sont jeunes, ils étaient pauvres, ils
 
sont contestataires, mais ils l'ignorent.
 
Les plus en vogue s'appellent chab
 
Khaled (aisément qualifié de « roi du
 
raï »), chab Mami (le môme à la voix de
 
cristal) et le duo très sage chaba
 
Fadilalchab Sahraoui. Ils étaient à Bobigny
 
fin janvier, c'était leur première
 
victoire hors du territoire natal où leurs
 
cassettes s'arrachent par milliers. Leur
 
raï: un moyen d'expression furieusement
 
rénové , dont les premières racines
 
remontent au début du siècle.
 
Le mot raï est né dans les montagnes de
 
l'Oranie, prononcé par des bergers
 
bédouins qui faisaient vibrer leur solitude
 
au son d'une flûte langoureuse.
 
Chanteurs par occasion , flûtistes par
 
nature, ils comblaient les rimes cassées
 
ou l'absence d'inspiration par un pathétique
 
« y a raï » ou « raï y a raï » .
 
On retrouve partout ce même procédé
 
d'onomatopée musicale: en andalou,
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
« taraliyalal » ; en Egypte, c'est « ya lil
 
ya ain » ; en version rock, « yé yé » ou
 
« oh yeah » . Moulé dans des airs
 
simples, leur rythme avait pour seul
 
écho le regard surpris, mais désintéressé,
 
de leurs chèvres.
 
Ce n'est que plus tard, dans les années
 
vingt, que le raï quitte le spleen des
 
hauteurs et s'adapte aux créneaux plus
 
frisonnants de la vie semi-urbaine des
 
gros bourgs. Là, des filles dites « de
 
joie» reprennent ce rythme plaintif et
 
mél.ancolique. La forme mélodique
 
subit peu de changement, mais le fond
 
thématique se trouve totalement chamboulé.
 
Les chikhates en font le chant de
 
leurs marasmes, de leur condition ,
 
mais, surtout, elles l'agrémentent de
 
paroles grivoises, aiguisées. On y conte
 
les moeurs libertines, l'alcool, les passes,
 
les amours brûlantes ou les passions
 
déçues. La naissance du phonographe
 
(78 tours) et les diffusions dans les bars,
 
maisons de tolérance et surtout dans les
 
cafés, même les jours de marché, allait
 
définitivement happer la chanson bédouine.
 
Les Raïmans de vingt ans
 
Il s'ensuit donc un déferlement de
 
chikhates dont l'une, Chikha Rémiti.
 
marque encore de son sceau la légende .
 
Mais il y en a d'autres. « Agressive, elle
 
mord dans cette morale codée par les
 
vulcanisateurs des participes passés et les
 
mécaniciens de "bonnes moeurs" à
 
pleines dents pour ces emmurées déboussolées
 
» , écrit le journal Algérie
 
Actualité dans un article consacré à
 
Rimiti Rilizania (native des environs de
 
Sidi-bel-Abbès), et qui débuta comme
 
danseuse .
 
Troisième étape du raï. les années
 
cinquante, où l'on verra l'introduction
 
d'instruments modernes comme l'accordéon,
 
le violon et surtout la trompette.
 
La trompette du célèbre Bellemou.
 
dont les sons stridents ouvriront définitivement
 
la voie au pop raï des années
 
d'après l'indépendance.
 
Cocktail, fusion, synthèse de tous ces
 
g~nres, le pop raï des années quatrevmgt
 
est bien un carrefour. Incursion
 
dans le genre « bédoui » (bédouin)
 
dans le « Asri » (oranais moderne).
 
dans. la tra?ition hispano-mauresque
 
(Ennco MaClas), etc., etc., la liste serait
 
épuisante à dresser, les frontière s,
 
comme dans tout phénomène musical.
 
étant très difficiles à délimiter.
 
Pour les jeunes chanteurs, ces discussions,
 
souvent dignes de celles sur le
 
sexe des anges, n'ont aucune teneur.
 
Pour eux, le raï est, il s'écoule comme
 
s'écoule goutte à goutte la grisaille du
 
quotidien. Musique d'ambiance. musique
 
de corps, le pop raï est typiquement
 
jeune, typiquement algérien. II
 
est un jeune cri de révolte musicale qui
 
embrase et balaie toute velléité de
 
régionalisme.
 
De l'état du raï
 
au raï de l'Etat
 
D'Est en Ouest, du Nord au Sud , un
 
seul critère: refuser de vivre dans
 
l'étouffement de la petite morale, celle
 
de la société. Mais, de la rue au cabaret ,
 
du cabaret aux séries de concert, le raï
 
saura-t-il durer , sera-t-il un phénomène
 
éphémère , une simple explosion de trop
 
plein? Pour cela, l'amateurisme ternit,
 
hélas, trop vite,! Alors, jeunes raïneurs,
 
à vous d'affirmer le son, à vous de
 
travailler avec vos propres formations .
 
Avec vous, le public dit non à l'inertie .
 
Le raï, en Algérie? Très longtemps
 
marginalisé , trop longtemps laissé aux
 
seules fluctuations mercantiles des producteurs
 
de mauvaises cassettes.
 
Encore maintenant, on la manie avec
 
des gants de bonne morale arabo-islamique,
 
mais les millions de jeunes sont
 
là et les autorités ne veulent pas être en
 
reste .. .
 
On lui a lâché la bride. tout à coup. l'été
 
dernier. Quelques lauriers reviennent
 
de droit (c'est incontestable) à certains
 
journalistes tenaces de Radio Chaîne III
 
et de l'hebdomadaire Algérie Actualité.
 
Un premier test. en juillet 1985. au
 
Festival de la jeunesse où Raina Raï. un
 
groupe pourtant loin d'être « hardraï
 
» , a déchaîné les foules pour
 
qu'enfin, le mois suivant à Oran. ait lieu
 
la première reconnaissance officielle du
 
raï avec l'organisation de son premier
 
festival .
 
Malgré cela, le raï de chab Khaled,
 
Mar~i. Fadéla, ne passe toujours pas la
 
frontière de la sacro-sainte télévision
 
algérienne. Oui. là-bas aussi. difficile
 
de bouger les carcans des variétés
 
soporifiques. Difficile, quand Algérie
 
Actualité écrit: « 011 boit sllr des
 
paroles religieuses. 01/ dallse sllr des
 
challts funèbres. 011 Il 'aime pas. 011
 
veut. 011 Ile boit pas. 011 se saolÎle. 011
 
Ile chail te pas. 011 crie. Ollll'écrit pas. 011
 
improvise avec ses tripes. » Mais les
 
chabs, grands princes, répondront à la
 
télé algérienne, ce que l'on dit là-bas :
 
« Na 'al bau li may habnach » « Maudits
 
soient ceux qui ne nous aiment
 
pas »). Quant à la télé française, à
 
quand les premiers clips, alors que,
 
déjà, les cassettes, pirates ou non , sont
 
presque introuvables? 0
 
AFiFA ZENATI
 
Discographie:
 
Bada raykoun, Chah Khaled
 
Ouach etsalini, Chab Mami
 
Horizon music, 7, rue Decres, I!!I
 
75014 Paris III
 
Différences-n° 54-MARS 1986
 
Il
 
Cinéma à Créteil
 
REGARDS DE FEMMES
 
la Maison des arts de Créteil
 
accueille le VIW Festival
 
international de film de
 
femmes.
 
Un portrait de Bulle Qgier,
 
un hommage à Dorothy
 
Arzner, une rétrospective Mai
 
Zetterling et bien d'autres
 
choses encore ...
 
Huitième du nom, le Festival
 
international du film de femmes,
 
qui s'ouvre le 14 mars, a élu
 
domicile à la Maison des arts de
 
Créteil pour la deuxième année consécutive.
 
Après les temps pionniers de
 
Sceaux, où une poignée de féministes
 
convaincues tentaient de sortir des films
 
réalisés par des femmes des placards où
 
ils étaient confinés, le Festival prend du
 
poids.
 
Vingt mille entrées en 1985, encore plus
 
en 1986 - du moins l'espère-t-on chez
 
les organisatrices - pour un menu riche
 
et varié. « Nous avons voulu, cette
 
année, explique Jackie Buet, mettre en
 
valeur deux aspects essentiels de la
 
création cinématographique féminine:
 
sur la forme, la défense d'un cinéma
 
d'auteur, c'est-à-dire non commercial, et
 
vous verrez à Créteil des films qui ne
 
sortiront nulle part ailleurs. Sur le fond,
 
un des soucis majeurs des réalisatrices
 
tourne autour de la question de l'identité
 
sexuelle: qu'est-ce que le masculin,
 
qu'est-ce que le féminin? »
 
Pièce maîtresse - pour cinéphiles
 
avertis - de ce festival, un hommage à
 
Dorothy Arzner, réalisatrice américaine,
 
qui tourna, entre 1927 et 1943,
 
plus de vingt films et fut une des rares (y
 
compris parmi ses collègues masculins)
 
à réaliser Je passage du muet au parlant.
 
Le premier film parlant produit par la
 
Paramount, c'est elle, les débuts de
 
Katharina Hepburn et de Joan
 
Crawford aussi .
 
Le Festival, en collaboration avec la
 
cinémathèque française, présentera dix
 
de ses films, dont Merri/y, we go to hell
 
avec Gary Grant et Cristopher Song, où
 
Katharina Hepburn est à la fois pilote,
 
amoureuse d'un homme marié et amie
 
de la fille du même homme. Gageons
 
que le spectateur moyen ressente quelques
 
difficultés à assister à toutes les
 
projections des films de Dorothy
 
Arzner, mais l'itinéraire de cette pionnière
 
mérite qu'on s'y arrête.
 
Considérée comme l'une des dix éminents
 
réalisateurs d'Hollywood, avec
 
Lubitsch, Cukor, Capra, Dorothy
 
Arzner est née en 1900 à Los Angeles.
 
Ambulancière dans sa jeunesse, elle
 
visite, un beau jour de 1920, des studios
 
à Hollywood. Coup de foudre. Les sept
 
années qui suivront seront celles de
 
l'apprentissage, qu'elle décrivait ainsi
 
dans une interview à la revue Ciné
 
Monde en 1937 : «Mon raisonnement
 
fut le suivant: la plupart des spectateurs
 
de cinéma sont des ... spectatrices. Les . • 1:iI'~ '
 
recettes dépendent largement du nombre
 
de femmes qui font la queue devant le .
 
petit guichet. Aussi, s'il n'y a pas de ~ '--_---"------'-""'----------'
 
« metteuses en scène » i/ faut qu'il y en Bulle Ogier
 
ait. Et je commençais au bas de l'échelle.
 
Mon premier emploi fut celui de dactylo
 
dans le département des scénarios, à
 
quinze dollars par semaine. Une vacance
 
dans les rangs des lecteurs de
 
manuscrit fut mon premier échelon.
 
Puis, grâce à l'appui de William de
 
Mille, je devins script-girl; de là James
 
Cruze me promut au rang de monteuse.
 
Quand je fus persuadée que je n'avais
 
plus rien à apprendre des secrets du
 
montage, je n'eus cesse de trouver un
 
emploi comme scénariste. Je finis par
 
l'avoir et, quelques temps après, j'eus
 
enfin l'occasion de diriger mon premier
 
film, Fashions for women. »
 
Peinture au couteau
 
« Le sens dramatique des femmes est
 
inestimable pour le cinéma », ajoutait
 
Dorothy Arzner. Une génération plus
 
tard, Mai Zetterling inverse les compléments:
 
les femmes ont besoin du
 
cinéma. Réalisatrice suédoise, née en
 
1925, actrice au Théâtre royal de Stockholm,
 
puis de cinéma, elle est passée de
 
l'autre côté de la caméra pour dénoncer.
 
Des Amoureux (1984),
 
peinture au couteau des années trente,
 
où l'on suit l'itinéraire de trois femmes
 
sur le point d'accoucher, à Scrubbers
 
(1985), un film sur les prisons de
 
femmes en Angleterre, nulle trace de
 
complaisance chez Mai Zetterling.
 
Une rétrospective de cinq de ses films
 
est proposée aux spectateurs. A voir,
 
car beaucoup ne sont pas distribués en
 
France et le travail de recherche (actrices
 
non professionnelles prises sur Je
 
vif, construction cinématographique)
 
est remarquable.
 
Et si vous n'aimez que le cinéma
 
français, allez quand même, et surtout,
 
à Créteil, vous y serez comblés. En
 
créant cette année une section « Réalisatrices
 
françaises », le Festival de films
 
de femmes s'est écarté de ses chemins
 
habituels, la compétition internationale
 
(quinze longs métrages pour 1986) n'incluant
 
habituellement que des films non
 
distribués en France.
 
Un vrai délice de dix films français, de,
 
Louise l'insoumise de Charlotte Silvera,
 
à Sans toit, ni loi d'Agnès Varda, Rue
 
Case Nègres d'Euzhan Paley, ou Trois
 
Dorothy Arzner, pendant le tournage de Dance, girl, dance.
 
hommes et un couffin de Coline Serreau.
 
« Les femmes ont fait une percée
 
remarquable dans le cinéma français
 
grand public, explique Jackie Buet,
 
nous ne pouvions pas manquer de le
 
dire. »
 
La peur des images
 
Nouvelle section également, «Autoportrait
 
~'une actrice» inaugurée par
 
Bulle Ogler. L'occasion de voir et de
 
revoir La Salamandre d'Alain Tanner
 
Un mariage de Claude Lelouch ou I~
 
merveilleux Pont du Nord de Jacques
 
Rivette, avec Bulle et Pascale.
 
Un peu louche sur le fond, pourtant, ce
 
portrait d'actrice qui permet, comme
 
l'ont répété les organisatrices avec un
 
peu trop d'insistance, de présenter des
 
films d'homme. La peur de l'image de
 
m~rque ,n~&ative (hystériques, sectaires,
 
hegenes, etc.) a profondément
 
ma~qué une équipe qui longtemps a
 
subi les foudres conjuguées de la
 
presse, des ~isogynes purs et durs, des
 
femmes antIghettos, ou tout simplement
 
antiféministes.
 
Aujourd'hui, la mixité est de mise et à
 
Créteil, on ne manque pas une occ~sion
 
de la rev~ndiquer: mixité du public,
 
des orgamsateurs, et, depuis peu, des
 
réalisateurs, puisque le Marché du film
 
organisé pour la deuxième année consé~
 
cutive à l'intention des professionnels,
 
se propose de « réunir des oeuvres de
 
fictions, et des documentaires réalisés
 
par des hommes et des femmes de tous
 
horizons ». Professionnalisme oblige.
 
Différences - nO 54 - MARS 1986
 
Pas antihomme,
 
mais procinéma
 
Démarche controversée reflet d'une
 
certaine crise mondiale' du féminisme
 
plus frileux et moins militant. La venue
 
de Bulle Ogier au Festival de Créteil
 
représente ainsi une minivictoire. Très
 
réticente au ,d.él?art, l'actrice explique:
 
«Je me méftals du ghetto, mais j'ai
 
rencontré en Suisse la cinéaste Edna
 
Politi qui a levé cette objection. Elle m'a
 
d.it avoir v~ à ce fest~val des quantités de
 
fl~ms q.ue Ion ne VOlt nulle part ailleurs.
 
C est lmportant. Elle m'a convaincue
 
que ce n'était pas un festival antihommes,
 
mais procinéma. »
 
« Le désir de plaire rend dépendant de
 
l'opinion », disait madame de StaëL et
 
c'est peut-être dommage. La recherche
 
d'une reconnaissance plus large sur le
 
plan de la , q.u~lité cinématographique
 
est certes legltIme. Mais le Festival de
 
Créteil ne risque-t-il pas ainsi de s'écarter,
 
lentement mais sûrement, de sa
 
raison d'être: la promotion et la défense
 
d'un cinéma d'auteur réalisé par
 
des femmes, à qui certaines portes
 
restent fermées, ou, du moins, très
 
coûteuses à ouvrir? D
 
'" VERONIQUE MORTAIGNE ~
 
Festival international du film de femmes
 
de Créteil, du 14 au 23 mars.
 
Maison des arts, place Salvador-Allende,
 
métro Créteil-préfecture.
 
Tél. : (1) 48.99.90.50.
 
::J
 
~
 
~ :;e;
 
~
 
~
 
DEUX INITIATIVES
 
ORIGINALES
 
Cinéma à domicile
 
Une opération de sensibilisation au
 
cinéma se déroule dans le département
 
du Val-de-Marne avant le Festival de
 
Créteil. Des animatrices projettent une
 
sélection de films dans les écoles
 
lycées, locaux associatifs, MJC, comités
 
d'entreprises ... , révèlent les « ficelles»
 
du cinéma (qui fait les films, pourquoi,
 
comment ?), et animent des débats sur
 
« la question de la création des femmes
 
et de leur langage cinématographiques,
 
souvent nouvelle pour les groupes
 
touc~é~. En . effet, le public est plus
 
enclin a penser que les films réalisés par
 
des femmes traitent d'aspects sociaux et
 
revendicatifs que de sujets présentant
 
une originalité ouvrant à d'autres
 
champs de réflexion. »
 
En 1985, 71 animations de ce type ont
 
été réalisées dans une vingtaine de villes
 
de la région parisienne, s'adressant à un
 
public de 28 000 personnes environ ce
 
qui a permis au Festival d'attirer ens'uite
 
un très gros public local.
 
Le carrefour des festivals
 
Trente-deux organisateurs de festivals et
 
de journées cinématographiques français
 
présenteront leurs travaux et leurs
 
projets sur des stands pendant la durée
 
du Festival de Créteil.
 
Cinq d'entre eux viendront avec des
 
films: en autre, le Festival international
 
de? films du monde rural d'Aurillac, qui
 
presentera un moyen métrage américain
 
tourné en Chine, Small happiness/
 
Women of a chinese village. 0
 
Il
 
Lettre d'un inculpé: la Turquie et ses prisons
 
sadique ses hommes qui s'acharnent sur
 
un des co-détenus de Güney, un simple
 
ouvrier dont les autorités ont décidé de
 
PRISON TURQUE. Voilà une plece faire un bouc émissaire, pour le « faire
 
d'une actualité brûlante, qui traite d'un parler ». «Le colonel» déclare avec
 
sujet délicat et difficile parmi d'autres une franchise brutale: « Ici, il n'y a pas
 
_ la torture infligée à des milliers de de constitution, il n'y a pas de droit, il
 
détenus politiques dans les prisons de la n'y a pas de machin universel des droits
 
Turquie. Brillamment mise en scène de l'homme. Ici, il n'y a que les lois de la
 
par Marianik Révillon, Lettres d'un guerre.»
 
inculpé a été adapté de deux ouvrages La scénographie de Michel Launay, est
 
inédits en France, du grand acteur et un espace ouvert fait de trames, de
 
cinéaste turc, Yilmaz Güney, qui avait miroirs et de poutrelles, où les acteurs
 
lui-même passé plusieurs années der- se meuvent comme des funambules. Ce
 
rière les barreaux pour ses convictions décor exprime la situation de ces marprogressistes.
 
tyrs, voués à une mort lente et horrible,
 
persuadés que leur lutte pour la dignité,
 
La pièce se passe entièrement à l'inté- et pour le bonheur des autres, ne sera
 
rieur d'une prison et Güney est incarné jamais inconnue ou oubliée.
 
T ENCORE
 
CHAUD, CHAUD. C'est reparti à SaintDenis.
 
La faculté Paris VIII, ex-Vincennes,
 
organise, comme chaque
 
année, son festival interculturel. La
 
faculté la plus métissée de France veut
 
s'ouvrir aux cultures représentées parmi
 
ses étudiants, mieux s'intégrer au département
 
de Seine-Saint-Denis qui
 
l'accueille.
 
Un double axe pour trois journées, avec
 
des débats, des films, de la musique,
 
des expos photos, des stands, tout pour
 
se rencontrer. La population locale est
 
vivement conviée, comme on dit, à
 
venir à la fac, du 20 au 22 mars, les
 
portes seront grandes ouvertes.
 
Quatre idées bases: on s'interrogera
 
d'abord sur les traditions interculturelIes
 
de Paris VIII, comment ce métissage
 
est vécu par les élèves, les profs,
 
le personnel. On fera le point sur le
 
mouvement alternatif en France, sur les
 
banlieues, Saint-Denis, les communes
 
avoisinantes, tout le département. Et
 
surtout, sans doute le plus neuf, un
 
groupe d'élèves et d'enseignants présentera
 
un travail d'enquête sur les
 
étudiants étrangers qui ont fait leurs
 
études en France et sont retournés au
 
pays, avec leurs acquis, leur savoir, et
 
leurs problèmes. De quoi énerver tous
 
ceux qui parlent de faux étudiants
 
étrangers.
 
Pas d'inquiétude : malgré l'aridité des
 
thèmes, on s'amusera bien à
 
Saint-Denis-Vincennes pour les premiers
 
jours du printemps. Chaud,
 
chaud, chaud, le printemps, bien entendu!
 
Renseignements: (1) 48.21.63.64, poste
 
16-37, l'après-midi.
 
IMAGE
 
par un personnage qui s'appelle tout Marianik Révillon, qui s'occupe depuis
 
simplement «l'homme » . Dans des 1979 de l'atelier-théâtre d'Aubervilliers
 
lettres à sa femme, celui-ci exprime, _ essentiellement composé de jeunes
 
avec une vigueur lyrique, son amour de travailleurs, dont beaucoup d'imla
 
vie, son espoir, à la fois rationnel et migrés _ a créé avec ce groupe plusieurs ORCHESTRE NOIR. L'extrême droite,
 
passionné, de voir naître à l'avenir un pièces, toutes porteuses d'un message ce n'est pas seulement quelques indimonde
 
débarrassé des formes les plus social et politique. En 1985, elle a créé vidus à la cervelle détraquée, admiraflagrantes
 
de l'inhumanité. sa propre compagnie de professionnels, teurs solitaires de Hitler. La situation
 
« Sais-tu, dit "l'homme", que mes pen- l'Asphodèle. est bien plus complexe ; les nostalgisées
 
construisent des mondes de plus en Lettres d'un inculpé est remarquable- ques de l'ordre et de la « pureté de la
 
plus libres, purs, illimités. » « Le monde ment interprété par des membres des race» sont bel et bien organisés en des
 
change, ajoute-t-il, et il n'offre aucune deux groupes, mêlant acteurs et ama- réseaux très étroits et bien protégés.
 
chance de survie à ceux qui ne parvien- teurs, français et étrangers. Ainsi, l'ex- C'est ce que montre très clairement le
 
nent pas à s'accommoder du change- cellent acteur libanais, Habib Ham- film reportage (1) de Stéphan Lejeune,
 
ment, il les écrase ... Nous ne serons pas moud, est « l'homme », tandis que le l'Orchestre noir, qui, jusque-là, n'avait
 
écrasés, nous suivrons en permanence le rôle du garde est joué par le Nicara- connu que des projections militantes,
 
processus du changement et, emportés guayen Raoul Fernandez. La distribu- mais qui est sorti en salle le 26 février.
 
par ses flots, nous coulerons vers les tion comprend également deux Turcs, Un film violent mais qui, preuve à
 
lendemains ... » « une femme» et « un soldat ». l'appui, dessine des ramifications inter-
 
Particulièrement frappante est l'inter- SCHOFIELD CORYELL nationales de cet «ordre noir ». La
 
prétation de ce monstre froid, le tor- Lettres d'un inculpé, de Yilmaz Güney, Belgique y apparaît comme la plaque
 
tionnaire en chef, qui s'appelle «le Grand Théâtre de la Cité internationale, tournante, orientée tout à la fois vers la
 
colonel », haut de taille et élancé, vêtu jus qu'a u 22 ma r s. Tél.: (1) Grande-Bretagne (le National Front),
 
Il '11 . 45893869 l'Espagne (la Cedade, Fuerza Nueva),
 
~d~e_b~l~a~n~c~,~s~u~rv:e~l~a~n~t~a:ve~c~u~n~c~yn~l:s~m:e[[Utilisateur:Charles|Charles]]'~'::~'~' ________________________ [[Utilisateur:Charles|Charles]] 12 janvier 2012 à 18:34 (UTC) ___________________ --J
 
la France (le Front national, le Parti des
 
forces nouvelles, les Faisceaux nationalistes
 
européens), les Etats-Unis (le
 
KKK), l'Amérique latine, l'Allemagne
 
(le NPD) (2). La Belgique, c'est essentiellement
 
le Front de la jeunesse, le
 
VMO, le Westland New Post - qui
 
semble étonnamment lié à certaines
 
personnalités de la Sûreté de l'Etat.
 
Images frappantes par tant de brutalité
 
gratuite: les camps d'entraînement militaire
 
où se retrouvent des enfants en
 
uniforme noir, les attentats, les
 
tortures ... Images inquiétantes lorsque
 
l'on voit la police féliciter le dirigeant oi
 
du VMO, Erikson, lui qui avouera que c:i'--_--'-...-...J
 
« l'erreur d'Hitler, c'est d'avoir perdu la Un musée pour la mode
 
guerre » . D'autant plus inquiétantes
 
que demeure ouverte la question de
 
savoir qui finance qui ... Un film qui en
 
dérangera plus d'un .. .
 
GERMAINE DUPONT
 
L'Orchestre noir. Stéphan Lejeune, à
 
partir du 26 février 1986, au cinéma
 
Utopia (rue Champollion, Paris 5').
 
(1) Un film document, fondé sur une enquête
 
dans les milieux d'ED. Le projet a mis quatre ans
 
pour être achevé.
 
(2) Comme le montre le reportage tourné au
 
pèlerinage de l'Yser à Dixmude et où l'on
 
retrouve tout ce beau monde .. .
 
peuple nomade d'Asie centrale qui
 
occupa, entre le VIe et le VIne siècle le
 
territoire de l'actuelle Hongrie, possédait
 
de merveilleux orfèvres et facteurs
 
d'armes et d'excellents forgerons et
 
potiers. Une civilisation « autre », une
 
culture rattachée au splendide « art des
 
steppes », dont toutes les pièces ici
 
montrées proviennent des musées hongrois.
 
Encore un nouveau musée à Paris!
 
Celui des Arts de la mode, Paris
 
oblige! Mais ce n'est pas un temple de
 
la fanfreluche, comme d'aucuns le craignaient,
 
mais bien un lieu vivant,
 
moderne, centre d'étude et de création,
 
DE L'OR. L'air du temps est aux bilans. ouvert au public, qui vient de coloniser
 
Il en est un que l'on pourrait dresser, les combles joliment rénovés d'un autre
 
dans un domaine dont les responsables musée, lui-même agréable et bien
 
sont restés trop discrets: celui de la agencé: les Arts décoratifs. Avec un
 
lecture publique en France. Depuis fonds de 9 000 costumes et de 30000
 
1981, date significative, mais pas seule- accessoires, éntre autres, le musée rement
 
pour ce que vous croyez, avec un place pour le public, une partie de ses
 
budget triplé par rapport aux années collections permanentes dans leur amprécédentes,
 
la Direction du livre du biance, mais il accueillera également
 
ministère de la Culture a investi hôpi- des expositions dont celle, prestigieuse,
 
taux, prisons, communautés immigrées de Saint-Laurent: pour le visiteur, c'est
 
ou comités d'entreprises pour les doter un lieu de nostalgie pour un passé
 
en livres. révolu, mais aussi le laboratoire pour la
 
Mais, surtout, elle a équipé dix-sept mode, art ô combien vivant! du futur.
 
départements qui manquaient de bi- Retour à la lecture : il est des livres qui
 
bliothèques centrales de prêt, desser- sont, en soi, une petite oeuvre d'art.
 
vant une population supplémentaire Ainsi, de l'Art de l'Islam, un classique,
 
estimée à dix millions de personnes, de Titus Burckhardt, réédité chez Sindacquérant
 
près de cinq millions de bab, illustré de superbes photos de
 
volumes supplémentaires. Roland et Sabrina Michaud. Tout le
 
De même, le nombre des bibliothèques contraire de ce que les Américains
 
municipales dans les villes de plus de nomment coffee table book, de ceux
 
10 000 habitants est passé de 634 en que l'on expose ostensiblement chez
 
1981 à 705 en 1985; sans oublier soi, mais un passionnant itinéraire, par
 
l'équipement audiovisuel de 52 bi- un spécialiste reconnu, à travers les arts
 
bliothèques municipales supplémen- de l'Islam, sous toutes leurs formes. 0
 
taires. YVES THORAVAL
 
Des chiffres, me direz-vous? Sans Direction du livre et de la lecture, 27,
 
doute, mais qui marquent une étape avenue de l'Opéra, 75001 Paris.
 
irréversible en faveur de tous les ci- Pavillon des Arts, Forum des Halles
 
toyens pour l'avenir de la lecture ... (tous les jours, sauf lundi, de 10 heures à
 
Connaissez-vous les Avars, sans « e »? 18 h 30).
 
L'ELU
 
Il afallu l'obstination d'une petite maison de
 
distribution et la sortie par l'écurie Walt
 
Disney du dernier film de Kagan, Natty
 
Gan, pour que l'Elu qu'il a réalisé en 1981
 
soit enfin présenté dans les salles. Le film est
 
tiré d'un roman de Chaim Potok, romancier
 
juif new-yorkais.
 
L'Elu est un film d'apprentissage. Jeremy
 
Paul Kagan est familier de ces personnages
 
qui n'arrivent pas à grandir parce qu'au
 
moment où ils sont supposés passer à l'âge
 
adulte un drame de l'histoire de leur pays ou
 
de leur milieu les désespère, les arrête dans
 
leur marche confiante.
 
L'époque de l'Elu est la fin de la guerre,
 
1944. Les deux héros sont juifs. L'un,
 
Daniel, fils de rabbin, vit dans la tradition
 
orthodoxe, consacrant le plus clair de son
 
temps à étudier le Talmud. Il rencontre
 
Reuven, fils d'un intellectuel libéral et jeune
 
Américain «branché» façon années quarante
 
: jazz, Freud et existentialisme, Danny
 
va se déprendre de la rigidité de son
 
éducation, passer outre les interdictions de
 
son rabbin de père (Rod Steiger, méconnaissable)
 
flirter, avec le sionisme et entrer à
 
l'Université. Ce n'est là que le début d'un
 
apprentissage sans fin, mais les crises de
 
croissance des jeunes Américains représentés
 
par Kagan sont infiniment plus
 
joyeuses que les certitudes musclées et
 
bellicistes de tous les Rambos.
 
CHRISTIANE DANCIE
 
A. Goldmann et
 
G. Hennebelle ,
 
CINEMA ET , ,
 
JUDEITE
 
Préface R. Robin el M. Ferro
 
L'histoire du cinéma yiddish,
 
sa naissance, son développement
 
en Europe de
 
l'Est et aux États-Unis dans
 
les années 30.
 
Sa situation aux USA (autour
 
de Chaplin, les frères
 
Marx, Jerry Lewis, Mel
 
Brooks, Woody Allen) en
 
France (Drach, Hanin ... ) en
 
Allemagne (sous Hitler et
 
après) en Israël et ailleurs.
 
CinémaClion nU 37 - 192 pages +
 
100 illustrations - 132 F
 
Si vous allez voir l'exposition l'Or des Musée des Arts de la mode, 107, rue de
 
Avars (pavillon des Arts, jusqu'au Rivoli, 75001 Paris. Ouvert tous les
 
1_ _3_ 0_m_ a_ rs~)_,~v_o_u_s __d~ é~c_o_u_v_r_ir_e_z __q~ u_e_ _c _e_ _~ J_o_u_rs~,_s_a_u~f_l_e_m_a_r_d_i,~_d_e_1_2_ à_ 1_8_h_e_u_r_e_s_. _________________________~ ____~ III
 
Différences - n° 54 - MARS /986
 
Le propre de l'homme
 
LA FETE ET SES RITES
 
Ecrivain et
 
sociologue, Jean
 
Duvignaud
 
s'intéresse aux
 
phénomènes
 
collectifs: le rire,
 
la solidarité ...
 
D'après lui, on
 
tente de réhabiliter
 
la fête, mais le
 
coeur n'y est pas.
 
Jean Duvignaud : « Fondamentalement,
 
la fête
 
appartient à des moments
 
«incasables» de
 
la vie des sociétés, tout
 
en étant, dans le même
 
temps une prise de possession
 
d'espaces. Qu'on
 
songe à l'investissement
 
du Jeu de paume en
 
1789, ou à la Commune
 
de 1870 où le peuple
 
français et ses tribuns
 
contestaient alors les
 
espaces publics « confisqués
 
» par la monarchie,
 
puis par Haussmann ...
 
Un historien a relaté
 
qu'avant la Révolution
 
se déroulaient en Provence
 
des fêtes populaires jugées «contestatrices (;?t
 
barbares » par la bourgeoisie même qui allait faire cette
 
révolution. Et cette bourgeoisie organisa - elle - des
 
manifestations à tendances pédagogiques et idéologiques
 
à travers lesquelles s'expliquait, s'explicitait sa
 
pensée poétique. Ces manifestations - si elles étaient
 
indispensables - ne pouvaient être considérées comme
 
de véritables fêtes. La société cherche toujours à se
 
protéger contre l'inopiné, le déstructuré et la subversion
 
inhérents à la fête ; en la déplaçant ou en la régularisant.
 
Et ça, on peut le constater de la prise de la Bastille à mai
 
68 ... Où l'on contraint la fête populaire collective à
 
vivre dans la durée ce qu'elle ne fait qu'émerger dans les
 
instants de son irruption. Comme si la société réintégrait
 
alors la dimension de la fête dans une orbite « sécuritaire
 
» pour en circonscrire le caractère subversif.
 
Nos sociétés actuelles, technologiques et hyperurbanisées,
 
ne permettent guère la réalité de la fête. Dans les
 
années cinquante s'est élaboré un mode d'habitat
 
vertical - d'empilement - où règne la boîte-télévision
 
(individuelle ou familiale). Le concept de «grand
 
ensemble» est bien celui de la mise en compartements
 
de la vie. Et lorsqu'on sort, à l'extérieur, c'est pour être
 
confronté à des espaces surveillés, flêchés, contrôlés.
 
Immeubles, tours et grandes surfaces sont devenus des
 
lieux de mass media, des espaces sociaux où le spontané et
 
l'intempestif liés par nature à la fête s'amenuisent de plus
 
en plus. La fête, c'est d'abord l'investissement d'espaces
 
horizontaux pour de libres rencontres. On pourrait même
 
dire qu'il n'y a de démocratie festive qu'au ras du sol ».
 
Différences: Mais, en tant que sociologue, vous avez depuis
 
plusieurs décennies réactualisé ces réflexions autour de la
 
fête.
 
J. D. : « Une longue enquête réalisée avec mes étudiants, il
 
y a quelques années, sur le thème La planète des jeunes
 
nous avait révélé que nombre d'entre eux (et même de
 
moins jeunes) se réunissaient dans ce que nous avons
 
appelé des «niches écologiques ». Pour vivre d'autres
 
rapports interindividuels dans un plaisir de communication
 
directe que la société quotidienne ne permet pas dans ses
 
espaces normatifs.
 
En se regroupant par affinités où les gens aimaient se
 
retrouver en «microgroupes », dans les quartiers, les
 
villages, les métiers ... Pour partager: nourriture, danse,
 
musique, voyage ... Mais le système idéologique sur lequel
 
repose nos sociétés est fondé sur l'efficacité, l'intensité et la
 
quantité de travail abstrait; il exige avant tout des
 
individus l'acceptation de la réalité laborieuse. Marx
 
d'ailleurs partageait cette conception (liée à la notion de
 
péché originel) : l'homme est fait pour le travail et doit y
 
consacrer ses forces et ses capacités majeures.
 
Le refus et l'écart
 
Alors, pour ceux qui s'opposent au système: deux
 
alternatives. Soit un refus violent, soit tenter de se mettre
 
en dehors en expérimentant - ici et maintenant - ce que les
 
grandes utopies nous ont toujours promis à l'échéance de
 
plusieurs générations. C'est ce qui est apparu dans le sillage
 
des années post-soixante-huit ... Les nouvelles générations
 
revendiquaient le sens de la fête ; en la faisant à leur
 
manière (même en vase clos). Avec une certaine volonté de
 
créativité collective et la suggestion de nouveaux rapports
 
sociaux. »
 
Différences: Pour arriver à aujourd'hui ?
 
J. D. : « En régularisant la notion de fête nos sociétés
 
occ~dent~le~ ont créé la nostalgie de son esse~ce profonde.
 
AUJourd hm, les gens ont le sentiment que les fêtes
 
pourraient être autre chose que ce qu'on leur vend. Car la
 
fête est aussi illusion lyrique et moment périssable, mais
 
dont l'intensité peut avoir de formidables résonnances.
 
Pour entrer dans l'espace même de la fête il faut retrouver
 
l'élé~.ental du co~ps : la mangeaille, la da'nse, ect., que les
 
partICIpants y aIllent vraiment de leur corps et pas
 
s~ulement de .. . l'idéologie. Avec tout l'aspect de ritualisatIon
 
par lequel un groupe humain « socialise» ainsi toutes
 
les instances destructrices (la faim, la mort, etc) ... »
 
Différences: Est-ce que nous n'assistons pas actuellement à
 
une déperdition, une banalisation de la fête et de ses rituels à
 
travers le monde ?
 
J. D. : « Ce n'est pas simple. Au Brésil, par exemple, la
 
macumba, un rite religieux teinté de fête, survit d'une
 
« La puissance de la fête :
 
faire éclater pour un instant
 
les normes de productivité,
 
de gain, d'efficacité qui sont
 
le lot de la vie quotidienne. »
 
manière très populaire et fIIIi , .. '" PJ~~:'T'
 
12 janvier 2012 à 18:34 (UTC):61t~~io[[Utilisateur:Charles|Charles]] 12 janvier 2012 à 18:34 (UTC):eiS~~e J~ , ....,; . ~, .'
 
la culture africaine, qui de- '
 
meure un rituel très précisément
 
codifié. Avec les sonorités
 
des tambours, l'imposition
 
des rythmes, les corps
 
entrent en transes et sont
 
alors comme partagés entre
 
plaisir et souffrance ...
 
Mais que l'on considère le
 
carnaval de Rio d'aujourd'hui.
 
Cette considérable fête
 
collective est devenue complètement
 
médiatisée au niveau
 
international et son
 
origine profonde s'est grandement
 
émoussée. Alors que
 
le carnaval de Bahia a beaucoup
 
mieux conservé ses
 
racines culturelles festives.
 
Différences : Et la réalité de la
 
fête dans nos sociétés
 
d'Europe?
 
J. D. : « Nous savons désormais que les grandes « unanimités
 
» sont devenues problématiques et que prétendre
 
créer de fausses unanimités collectives peut aussi conduire
 
au fascisme. N'oublions pas qu'un Hitler savait très bien
 
rassembler les masses allemandes dans de monumentales
 
« fêtes » ; sans distinction de classes ni prise en compte de
 
réalités sociales différentes. »
 
Différences: Mais nos simples fêtes nationales et celles de
 
passage d'une année à l'autre ...
 
J. D. : « En Europe, aujourd'hui, les fêtes nationales sont
 
loin de l'effervescence ancienne qui s'emparait des rues et
 
des villes. En France, notre 14 juillet relève maintenant de
 
la célébration sociopolitique grave, solennelle, et finalement
 
pompeuse. Quant à nos fêtes de fin d'année, elles ont
 
aussi perdu leur caractère vraiment festif en devenant un
 
parcours obligé du rythme calendaire ; sans compter leur
 
fantastique impact de commercialisation.
 
Mais on pourrait s'interroger sur certaines fêtes locales et
 
régionales qui perdurent avec une certaine authenticité
 
telles les Ducasses du Nord. Comme s'il y avait là de
 
nécessaires compensations festives et une convivialité plus
 
forte dans certaines zones laborieuses climatiquement
 
défavorisées.
 
Différences - n° 54 - MARS 1986
 
Dans la nature profonde de la fête - comme dans le rêve -
 
la logique cesse d'être euclidienne ... La puissance de la fête
 
réside dans sa fonction ponctuelle à faire éclater temporairement
 
les normes de productivité, de gain, et d'efficacité
 
de la vie quotidienne ordinaire. »
 
Différences: Alors, ces derniers mois en France le temps
 
n'était pas à la fête? !. D. : « Ah si ! Il Y a eu cet événement complètement
 
mattendu d'un peu avant Noël. Quand les forains ont
 
investi le jardin des Tuileries. Certes, pour des raisons
 
objectives de revendications professionnelles (syndicales et
 
autres). Mais, en offrant simultanément à la population
 
parisienne un espace tout à fait imprévu de jeux et de
 
lumières. Et ce, justement, dans un espace historique où la
 
monarchie donnait jadis ses propres fêtes. Oui, cette
 
période de Luna-Park spontané au jardin des Tuileries
 
était, je pense, une vraie fête. D'ailleurs, les enfants ne s'y
 
sont pas trompés ! » D Propos recueillis par
 
J.-J. PIKON
 
Duvignaud a publié récemment Le propre de l'homme, un
 
essai sur le rire (éd. Hachette). Il prépare actuellement un
 
nouveau livre sur la notion de solidarité (chez le même
 
éditeur) . Il
 
El
 
mTmRE ____________________________ ~
 
Afrique du Sud
 
DES ANNEES
 
A SE BATTRE
 
Le 21 mars 1960, la
 
police de l'apartheid
 
ouvre le feu
 
sur des manifestants
 
à Sharpeville.
 
69 morts, qui s'ajoutent
 
aux milliers
 
de martyrs de la
 
résistance commencée
 
au début de
 
ce siècle. Depuis,
 
l'ONU a fait de cette
 
date la journée internationale
 
contre le
 
racisme.
 
Contrairement au reste de
 
l'Afrique noire, où la
 
conquête coloniale a été
 
réalisée par des militaires
 
et des fonctionnaires européens
 
de passage, qui ont
 
laissé aux Africains la propriété
 
de la terre, l'implantation
 
étrangère en
 
Afrique du Sud a été le
 
fait de civils qui ont systématiquement
 
exproprié
 
les populations autochtones
 
de leurs terres
 
et de leur bétail.
 
Au lieu d'avoir commencé
 
à l'extême fin du XIX'
 
siècle, la conquête du pays
 
khoisan (Bochimans et
 
Hottentots aujourd'hui
 
disparus) a débuté en 1652 ; celle du pays noir en 1779 avec
 
la première « guerre de frontière» ou « guerre khosa »
 
dans l'est de l'actuelle province du Cap.
 
La résistance opposée par les Noirs à l'envahisseur blanc a
 
été exceptionnellement longue et vigoureuse, puisque la.
 
révolte du chef zoulou Bambata, dans le Natal, en 1906, est
 
considérée comme le dernier épisode de la résistance
 
armée de type tribal.
 
Il Le 8 janvier 1912, deux ans après la naissance de
 
l'Union sud-africaine, la fondation du South African
 
National Native Congress qui sera rebaptisé African
 
National Congress, (ANC) , en 1923, marque le départ
 
d'une nouvelle forme de résistance africaine, fondée sur le
 
rejet des divisions tribales et la collaboration avec des
 
organisations politiques indiennes et métisses.
 
L'avocat indien Gandhi, qui a séjourné en Afrique du Sud
 
entre 1893 et 1914, et organisé la résistance indienne a
 
utilisé des méthodes non violentes. Son exemple sera suivi
 
pendant près de cinquante ans par l'ANC.
 
Il Le 26 juin 1955, l'ANC convoque à Kliptown, près de
 
Johannesburg, un Congrès du peuple réunissant près
 
de trois mille délégués, noirs, indiens, métis et blancs. Par
 
acclamations, l'assemblée adopte le préambule suivant:
 
« L'Afrique du Sud appartient à tous ceux qui y vivent,
 
Blancs et Noirs, et aucun gouvernement n'est justifié à
 
Drétendre exercer l'autorité s'il ne la tient de la volonté de
 
tous. »
 
On vote une Chartè de la liberté en dix chapitres, dont
 
celui-ci : « Toute personne, sans distinction de race, de
 
,couleur ou de sexe, doit avoir le droit de voter et d'être
 
éligible à tout organe législatif ou administratif »
 
A l'Appel à la paix et à l'amitié exprimé à la fin de la
 
Charte, le gouvernement répond en traduisant en justice
 
156 signataires sous l'accusation de trahison (Treason
 
Trial) et en intensifiant les poursuites pour infraction aux
 
:lois sur les pass. En cette année 1955, le nombre des
 
condamnations à une peine de prison ou une amende
 
:,'élèvera à 338 000, soit une pour cent Noirs urbanisés.
 
Il Le 9 août 1956, plus de 20 000 femmes noires
 
entament une marche sur Pretoria, la capitale
 
administrative, pour protester contre la loi étendant aux
 
lfemmes l'obligation du pass. Le 9 août est célébré depuis
 
comme le Jour des femmes (South Africa Women's Day).
 
Il Le 21 mars 1960, la police .ouvre le feu sur une foule
 
de Sud-Africains noirs qui se présentaient sans pass.
 
lLa fusillade fait 69 morts et plus de 200 blessés à
 
Shaperville. En vertu de l'état d'urgence proclamé le 30
 
mars, 20000 personnes sont arrêtées et 2000 détenues
 
sans jugement. Le 8 avril, l'ANC est interdit en même
 
temps que le Pan' African Congress (PAC) , parti noir
 
dissident, fondé en 1959 par Robert Sobukwe, et qui
 
revendique « le gouvernement des Africains par les Africains
 
et pour les Africains ».
 
Albert Luthuli, président de l'ANC (qui obtiendra le prix
 
Nobel de la paix en 1961), est condamné à trois ans de
 
prison, ainsi que Robert Sobukwe.
 
Il Le 16 décembre 1961, six mois après la proclamation
 
de la république d'Afrique du Sud, une campagne de
 
sabotages est lancée par des militants de l'ANC et du P AC
 
(tous les deux interdits depuis plus d'un an), auxquels se
 
joignent des Sud-Africains indiens et blancs.
 
La répression est immédiate et terrible, surtout après
 
l'arrestation, en août 1963, à Rivonia, dans la banlieue de
 
Pretoria, de dix dirigeants de l'ANC, parmi lesquels Walter
 
Sisulu et Goban Mbeki.
 
Le procès dit de Rivonia débute en octobre 1963 et se
 
poursuit jusqu'en juin 1964. En même temps que les
 
auteurs de sabotages arrêtés à Rivonia, on y juge Nelson
 
Mandela, alors âgé de quarante-cinq ans, qui a été, avec
 
Olivier Tambo, actuel président de l'ANC, le premier
 
avocat noir d'Afrique du Sud. Tous seront condamnés à
 
l'emprisonnement à vie à Robben Island, en face de la ville
 
du Cap. En 1983, Nelson Mandela sera transféré dans la
 
prison de Pollsmoor, près du Cap.
 
Il De janvier 1963 à décembre 1965, les tribunaux
 
distribueront 8 000 années de prison à 1 300 accusés
 
et 300 condamnations à mort (deux pendaisons par
 
semaine).
 
Il En i968, apparaît le mouvement de la conscience
 
Noire. Alors qu'elle paraissait brisée à la fin de 1965,
 
la résistance africaine renaît en 1968 avec la mise sur pied
 
de plusieurs organisations scolaires et communautaires
 
rattachées au mouvement de la Conscience noire, BC, dont
 
la philosophie sera résumée par Steve Biko en 1972 : « Le
 
Noir doit se dégager de ses complexes d'infériorité et être fier
 
de son propre système de valeurs, de sa culture, de sa
 
religion et de sa vision de la vie. »
 
D'abord limité aux scolarisés, étudiants et lycéens, le
 
mouvement de la Conscience noire se répand par la poésie,
 
le théâtre, la théologie et différentes organisations communautaires.
 
Beaucoup de ses membres, poursuivis par la
 
police, sont obligés de fuir leur pays ou de rester dans la
 
clandestini té.
 
Il En février 1973, pour la première fois dans l'histoire
 
de l'Afrique du Sud, des grèves obtiennent des
 
résultats. Plus de 61 000 ouvriers de Durban, presque tous
 
des Zoulou, font prendre conscience aux travailleurs noirs
 
du pouvoir qu'ils détiennent en raison de la proportion de
 
plus de 70 % qu'ils occupent dans la population active.
 
Il Le 16 juin 1976, la police réprime de façon sanglante à
 
Soweto (township de Johannesburg comptant plus
 
d'un million d'habitants) des émeutes qui avaient débuté
 
par une manifestation pacifique d'environ 10 000 collégiens
 
noirs âgés de douze à vingt et un ans contre l'introduction
 
de l'afrikaans comme langue d'enseignement pour une
 
moitié du programme.
 
Le 25 juin, le nombre des victimes annoncé officiellement
 
s'élève à 176 tués, plus de mille blessés et 1 300
 
arrestations. Entre le 25 juin et le 25 septembre, les
 
émeutes débordant largement le milieu des scolarisés
 
atteignent toutes les grandes zones industrielles d'Afrique
 
du Sud. A la fin de l'année, on fera état, officiellement, de
 
plus de 600 morts, plusieurs milliers de blessés, environ
 
5 000 arrestations et au moins 700 personnes détenues pour
 
« raisons de sécurité », parmi lesquelles presque tous les
 
dirigeants du mouvement de la Conscience noire, des
 
dizaines de journalistes et des personnalités
 
Différences-n° 54 - MARS 1986
 
Dessin CORTES
 
Il Le 17 septembre 1977, on apprend la mort en prison
 
de Steve Biko, le leader reconnu de la Conscience
 
noire. L'opinion internationale réagit violemment en
 
apprenant que Steve Biko est, depuis mars 1976, le 25
 
détenu mort à la suite de mauvais traitements de ses
 
geôliers. Aux accusations lancées conte lui, le gouvernement
 
répond par un coup de massue sans précédent porté à
 
la résistance.
 
Le 19 octobre avant l'aube, des raids de police aboutissent
 
à l'arrestation d'une cinquantaine de personnalités noires
 
ou blanches, et à la mise hors la loi de dix-huit
 
organisations, dont dix-sept relèvent de la Conscience
 
noire. Deux journaux à grand tirage destinés aux Noirs
 
sont interdits.
 
De Ghandi à Nelson Mandela,
 
deux avocats pour la cause noire.
 
Il En 1979, le gouvernement spécifie que « le terme de
 
travailleur ne sera plus désormais suivi d'une quelconque
 
référence raciale» et admet en conséquence les
 
principes de liberté d'association et d'autonomie des
 
syndicats noirs.
 
Dans l'espace de quatre années, on assiste à une véritable
 
explosion syndicale noire. Le nombre de syndiqués est
 
multiplié par quatre: 350 000 en 1983, soit 6 % des salariés
 
noirs (contre 20 % de syndiqués parmi les travailleurs
 
blancs). Deux fédérations multiraciales sont créées. la
 
FOSATU et le CUSA. Elles s'ajoutent aux deux anciennes
 
fédérations également multiraciales: la SACTU. fondée
 
en 1955, qui a toujours entretenu des liens étroits avec
 
l'ANC et qui a dû passer dans la clandestinité en 1964 : et
 
la TUCSA, créée en 1954, qui comprenait en 1983. sur
 
370000 membres, une minorité de Noirs et une majorité Il
 
d'Indiens et de métis.
 
Sauf - évidemment -la SACTU interdite, ces fédérations se
 
proclament officiellement « apolitiques ». A côté d'elles se
 
créent de nouveaux syndicats, qui n'hésitent pas, malgré
 
une intense surveillance policière, à se dire partie prenante
 
dans les mouvements de résistance politique.
 
Dans le cas du Syndicat national des mineurs, NUM, cette
 
prise de position apparaît particulièrement prometteuse
 
pour l'avenir de la résistance noire, étant donné la place
 
prépondérante tenue par l'industfie minière dans l'économie
 
sud-africaine. Fondé en 1982, le NUM annoncera
 
80000 adhérents en 1984 et 180000 en août 1985, sur un
 
total de 475 000 mineurs noirs.
 
Parmi les nouvelles associations de scolarisés qui ont
 
succédé à celles interdites en 1977, il faut distinguer deux
 
tendances: le mouvement des étudiants azaniens,
 
AZASM, fondé en 1983, adhère aux thèses de la
 
Conscience noire et le Congrès des étudiants sud-africains,
 
COSAS, fondé en 1979, a des effectifs plus importants et
 
affirme son attachement à la Charte de la liberté, donc à
 
l'ANC ; il a mis sur pied en 1983 des « organisations de
 
jeunesse» s'adressant aux jeunes travailleurs et aux jeunes
 
chômeurs.
 
Des hommes qui se battent
 
A côté de ces associations de jeunes, scolarisés ou
 
travailleurs, se fondent de nombreuses associations de
 
« résidents» dans les townships (Civic Associations), dans
 
lesquelles les femmes sont particulièrement actives.
 
Pour situer la place des milieux d'Eglise dans la résistance,
 
il faut savoir que 92 % des Sud-Africains noirs se déclarent
 
chrétiens et que presque toutes les réunions, y compris les
 
réunions syndicales s'ouvrent par une prière. C'est, dans le
 
continent africain, une situation tout à fait particulière.
 
Plusieurs personnalités religieuses ont joué et jouent un
 
rôle de premier plan dans la résistance en s'engageant
 
publiquement et en dénonçant devant l'ensemble du
 
monde chrétien le « scandale de l'apartheid ».
 
L'évêque anglican, Desmond Tutu, auquel a été attribué le
 
prix Nobel de la paix en 1984, est le mieux connu à
 
l'extérieur de l'Afrique du Sud.
 
Le pasteur Allan Boesak, aumônier de l'université de
 
Western Cape, réservée aux métis, élu en 1982 président de
 
l'Alliance réformée mondiale, WARC, prêche depuis 1979
 
l'union des Eglises et des mouvements politiques antiapartheid.
 
En 1983, il a mis ces idées en action en lançant le
 
Front démocratique uni (UDF).
 
L'archevêque de Durban, Mgr Denis Hurley, est une des
 
figures dominantes de l'Eglise catholique en Afrique du
 
Sud, Eglise dont les effectifs ont fait plus que doubler
 
depuis 1960 : deux millions et demi de fidèles, dont 80 %
 
de Noirs au recensement de 1980. Mgr Hurley a pris depuis
 
longtemps des positions clairement exprimées contre
 
l'apartheid. En 1982, il a déclaré que: «L'Eglise veut
 
engager son poids moral aux côtés des syndicats dans leur
 
lutte. » Président du conseil des évêques catholiques de
 
l'Afrique australe, SACBC, il a constamment soutenu son
 
secrétaire général, le père Smangaliso Mkhatshwa, quand
 
celui-ci a été «banni» pour cinq ans en 1977, puis
 
emprisonné et jugé au Ciskei (Etat noir « indépendant »),
 
en 1983, pour avoir adhéré à l'UDF.
 
Banni en octobre 1977, pour avoir soutenu la cause de la
 
Conscience noire, et rendu à une vie normale sept ans plus
 
tard (26 septembre 1984), le pasteur Beyers Naudé est une
 
figure extraordinaire du protestantisme sud-africain, car il
 
appartient à une famille afrikaner et à une Eglise de langue
 
afrikaans, la NGK, qui a toujours défendu l'apartheid. 0
 
1879 :
 
les Zoulous
 
font la guerre
 
aux Anglais, qui,
 
eux-mêmes,
 
ont attaqué
 
les Boers.
 
1960 :
 
Sharpeville,
 
le premier jour
 
de la campagne
 
de
 
désobéissance ...
 
civile~
 
fait plus de ~
 
soixante morts . .::L-___________ --I
 
_ MARIANNE CORNEVIN
 
iii L-________ ~E~~m~it~d~e~m~p~o~ch~e~ffe~A~p~a~n~he~w~p~u~b~oo~e~e~n~m~a[[Utilisateur:Charles|Charles]]p~a~r~m~M~R~A~P~. __ ::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::J
 
EUX_· ________________________ ~
 
PIERRE VALLÉE
 
Nor; CRolsÉJ
 
...."., ; ....... .........\ :. , . .. . ~~. ...................................
 
' ........................................ ..
 
•.•.•.•.•.•.•.•.•••.•.•.•.•.•.• •••• ~ ..... .............. . ,. ...... . .. . .'
 
HORIZONTALEMENT: 2345678910
 
1. Servent pour payer. Toujours
 
vert. - 2. D'un département
 
français.
 
3. Planches de bois. Apparus.
 
- 4. Epaissit. Nombreux
 
dans un immeuble. -
 
5. Avions l'audace de. -
 
6. Il ou elle? Vastes étendues
 
d'eau. - 7. Possessif.
 
Ville antique. - 8. Saisons.
 
Jeu. - '9. Note. Qui entraîne
 
la mort. - 10. Pronom.
 
Courbe.
 
VERTICALEMENT:
 
2
 
3
 
4
 
5
 
6
 
7
 
8
 
1. On peut les voir dans l'air. 9
 
Note. - 2. Me rendrais.
 
Organe. - 3. Mettaient en 10
 
couches. - 4. Terme de
 
tennis. Lac pyrénéen. Possédés. - 5. D'une mer. - 6. Servent à juger.
 
Mesure. - 7. Direction. Diriger. - 8. Célèbre par son violon. Possessif. -
 
9. Il parlait bien. Procure un plaisir. - 10. Parties charnues. Pour
 
encourager.
 
LA
 
On passera du premier au dernier mot en ne changeant qu'une
 
seule lettre à la fois, l'ordre des lettres restant inchangé et
 
formant à chaque fois un mot existant.
 
BIC PION
 
JUS DAME
 
Solution des jeux du numéro précédent:
 
Mots croisés:
 
Horizontalement: 1. Décalages, - 2. Arriérés. - 3. Miette. Tel. - 4. Anar.
 
Ovide. - 5. Sète. Limes. - 6. Sisteron. - 7. Ente. - 8. Ain. Obèses. -
 
9. Cossues. Et. - 10. En. Usé. Ose.
 
Verticalement: 1. Damas. Face. - 2. Erines. Ion. - 3. Créations. - 4. Aîtres. Su.
 
- 5. Let. Trous. - 6. Aréole. Bée. - 7. Gê. Virées. - 8. Estimons. - 9. Edentées.
 
- Clés. Este.
 
Cryptarithme
 
T 1, C 2, A 3, U 4, K 5, N 6, R 9.
 
L-__________ ~ ___________________________________ ~m
 
Différences-n° 54-MARS 1986
 
El
 
LES JUIFS EN URSS
 
Notre initiative d'une table ronde réunissant Français et Soviétiques
 
sur cette question nous a valu un abondant courrier, dont voici
 
des exemples.
 
Exigences
 
La table ronde franco-soviétique
 
organisée par Différences ouvre
 
une voie originale dans l'action
 
relative aux juifs d'URSS. Vous
 
avez enfin dépassé les passions
 
et les rigidités contradictoires
 
qui bloquaient la situation. Pour
 
en arriver là, je suppose qu'il a
 
fallu de la diplomatie et de
 
l'obstination de votre part; mais
 
aussi un changement d'attitude
 
notable côté soviétique. Ce n'est
 
pas rien.
 
Sur certains points débattus, je
 
pense qu'on relativiserait quelque
 
peu les griefs formulés
 
contre l'URSS - sans pour autant,
 
bien sûr, les effacer - si l'on
 
se référait de façon plus critique
 
à ce qui se passe chez nous.
 
Par exemple, il est évident que le
 
chiffre de « 500 000 à 700 000 »
 
juifs en France, avancé par le
 
CRIF, ne correspond pas à la
 
réalité. Au plan religieux, la
 
communauté connaît un lent
 
mouvement régressif, comme les
 
autres confessions. Lors des récentes
 
élections consistoriales,
 
un journal titrait: «Paris:
 
300 000 juifs. Adhérents:
 
12 000. Votants : 2 016 ! »
 
Il y a aussi , 1'« assimilation », les
 
mariages «mixtes », dont certains
 
responsables communautaires
 
n'hésitent pas à comparer
 
les «ravages» à ceux du génocide
 
nazi. Ce phénomène a
 
donné lieu ces temps-ci à de
 
vives polémiques entre Consistoire
 
et Rabbinat.
 
Malgré le soutien inconditionnel
 
d'un certain nombre de juifs
 
(combien 7 c'est à voir) à la
 
politique israélienne, l'engouement
 
pro-israélien des bien-pensants
 
et la puissance de la propagande
 
sioniste, l'émigration vers
 
Israël, en provenance de la
 
France et de l'ensemble du
 
monde occidental, est insignifiante.
 
En 1985, encore, elle ne
 
suffit pas à compenser les départs
 
d'Israéliens vers d'autres
 
pays.
 
Je signalerai enfin la grande
 
misère de la langue et de la
 
culture yiddish en France, leur
 
recul continu aux Etats-Unis,
 
leur remplacement par l'hébreu
 
en Israël.
 
Alors, une question: n'imputet-
 
on pas à l'URSS seule des
 
problèmes qui se posent partout,
 
et n'exige-t-on pas d'elle les
 
solutions qu'on ne peut soimême
 
apporter 7 Il faudrait que,
 
là-bas comme nulle part ailleurs,
 
la religion juive prospère et que
 
le yiddish se développe, que
 
cesse 1'« assimilation» et que
 
des contingents massifs d'émigrants
 
viennent affermir Israël,
 
voire même le Grand Israël !
 
Vous avez raison d'agir contre
 
toute limitation de la liberté
 
religieuse, pour des activités
 
culturelles répondant pleinement
 
aux besoins, contre toute
 
dérive antisémiste de 1'« antisionisme
 
», contre la marginalisation
 
ou l'emprisonnement, pour
 
la possibilité accordée à chacun
 
d'aller et venir s'il le souhaite ...
 
Mais attention! beaucoup de
 
ceux qui militent pour les juifs
 
d'URSS ont, consciemment ou
 
non, d'autres préoccupations.
 
CHARLES GUTMAN
 
Marseille
 
Détails
 
L'un des participants à la table
 
ronde de Différences sur les juifs
 
en URSS a évoqué l'impossibilité
 
pour les détenus juifs
 
d'exercer leurs rites religieux et
 
de manger «cacher» dans les
 
/prisons. C'est, en effet, une
 
atteinte, parmi d'autres, à leur
 
dignité.
 
Cependant, si j'en crois Actualité
 
juive du 31 janvier 1986, tout ne
 
va pas pour le mieux en France,
 
dans ce domaine. Un intéressant
 
article sur les détenus juifs dans
 
les prisons françaises montre,
 
certes, que les pratiques religieuses
 
ne leur sont pas interdites,
 
mais l'un d'eux, dont le
 
témoignage est cité, écrit: «II
 
est très difficile de pouvoir observer
 
la cacherouth parce que,
 
dans ma prison, il n'est pas
 
prévu de régime cacher. C'est
 
dur de ne pouvoir mettre les
 
tefilinn. Les livres sont très chers
 
pour nous » ...
 
Par ailleurs, je note dans le
 
Figaro (14.2.1986), à propos de
 
Chtcharanski, que, avant son
 
passage sur le pont de Glienicke,
 
«on lui avait enlevé tous ses
 
objets personnels, y compris un
 
petit livre de psaumes en hébreu,
 
cadeau de sa femme », et qu'il
 
s'est étendu sur la neige jusqu'à
 
ce qu'on le lui rende. Dernier
 
acte de résistance à ses geôliers,
 
mais aussi détail ajouté au précédent,
 
d'où il ressort que les
 
choses sont parfois moins tranchées
 
qu'on ne le croit.
 
Or, pour défendre les juifs
 
d'URSS, il faut rechercher la
 
vérité dans toutes ses nuances et
 
avoir des analyses irréfutables.
 
C'est difficile, mais c'est une
 
condition d'efficacité.
 
G/LLES LEV/NE
 
Paris 17'
 
Antisémitisme
 
( ... ) Revenons en arrière ; revenons
 
au déclin des langues juives
 
en URSS: l'hébreu et le yiddisch.
 
En 1909, pratiquement
 
tous les juifs parlaient une
 
langue juive. Mais après la Révolution,
 
ces langues déclinent
 
rapidement; en 1979, à peine
 
20 % des juifs parlent encore
 
une langue juive, même en seconde
 
langue. Cela est dû essentiellement
 
à deux facteurs :
 
- Les juifs, qui furent la minorité
 
la plus active dans la révolution
 
russe, ont cherché délibérément
 
à s'assimiler. Ce pouvoir
 
les considérait comme des citoyens
 
à part entière et l'antisémitisme
 
était hors la loi. La
 
volonté d'intégration des juifs
 
s'est traduite par un effort d'intégration
 
linguistique qu'aucune
 
autre minorité n'a égalé. Notons
 
au passage que cela explique en
 
partie l'échec de la tentative du
 
Birobidjan : si les juifs n'y sont
 
pas allés, c'est qu'ils voulaient
 
plutôt s'intégrer que constituer
 
un groupe national à part.
 
- La quasi-totalité des écrivains
 
en yiddish a disparu, soit lors
 
des purges des années 1930, soit
 
pendant la guerre. Les survivants
 
ont été liquidés lors des
 
purges entre 1948 et 1952.
 
Mais , dès 1948, l'antisémitisme
 
réapparaît en URSS. La population
 
qu'il frappe était en train de
 
s'intégrer; pour réussir cette
 
intégration, elle s'était volontairement
 
déculturée. Une fois de
 
plus , c'est au moment où l'assimilation
 
des juifs est en train de
 
réussir qu'ils sont rejetés.
 
Et quelle a été la réaction de ces
 
juifs qui avaient jeté aux orties
 
leur vieille culture pour en endosser
 
une nouvelle que maintenant
 
on leur refusait 7 Un fait
 
marquant se produisit en 1967,
 
avec la guerre des Six Jours; la
 
victoire israélienne, ils la vivent
 
comme un gigantesque pied de
 
nez à la propagande antisioniste
 
effrénée qui les entoure. Pour
 
beaucoup d'entre eux, c'est le
 
déclic: ils se redécouvrent juifs.
 
Et alors même que la propagande
 
antisémite et la répression
 
s'intensifient, on assiste à un
 
renouveau du judaïsme en
 
URSS! Il y a un besoin de
 
reculturation: c'est un regain
 
d'intérêt pour l'hébreu, langue
 
de la philosophie juive, pour
 
l'histoire juive et aussi pour la
 
foi juive. Les refuzniks d'aujourd'hui
 
ne sont pas des survivants
 
d'un autre âge : beaucoup sont
 
des jeunes, très attachés à leur
 
pays, qui pourtant leur rend la
 
vie impossible. D'où le besoin
 
d'émigrer, seule façon pour eux
 
de vivre dignement.
 
Car il faut être bien clair: c'est
 
bien l'antisémitisme qui est présent
 
en URSS. Même s'il se
 
cache - fort mal - derrière
 
l'étiquette «antisionisme »,
 
c'est bien de l'antisémitisme. Et
 
n'est abusé que celui qui veut
 
bien être abusé.
 
M. Pac, dans une lettre déjà
 
ancienne parue dans Différences,
 
incluait dans son propos
 
une démonstration de l'inutilité,
 
voire du danger du sionisme. Il
 
s'appuyait, entre autres, sur des
 
révélations concernant le groupe
 
Stern, en 1942. Pour lui, ces
 
révélations semblent jeter un
 
discrédit définitif sur le sionisme.
 
Je ne m'en cache pas, ce
 
point de vue est à l'opposé du
 
mien, aussi je vais y revenir pour
 
terminer. Je dirai tout d'abord
 
que la résurgence en URSS de
 
l'antisémitisme, cent ans après
 
les débuts du sionisme moderne,
 
me paraît la meilleure preuve de
 
la nécessité d'un Etat pour les
 
juifs.
 
Je veux enfin revenir sur le
 
groupe Stern ; il s'agissait d'un
 
groupe d'une douzaine de personnes
 
qui, par la suite, a été mis
 
hors la loi par toutes les autres
 
organisations sionistes. C'était
 
l'époque du Livre blanc, imposé
 
par l'Angleterre, et au nom
 
duquel cette puissance mandataire
 
interdisait l'immigration
 
juive en Palestine ; les bateaux
 
bondés de juifs qui fuyaient leurs
 
bourreaux étaient refoulés de
 
Palestine vers l'Europe. Parmi
 
les sionistes, ceux du groupe
 
Stern avaient eu l'idée folle et
 
démentielle de vouloir pactiser
 
avec l'Allemagne nazie pour
 
lutter contre de Livre blanc. Ce
 
groupe est tout à fait condamnable,
 
mais cette condamnation
 
ne peut toucher le mouvement
 
sioniste tout entier que si l'on se
 
livre à une démarche globalisante
 
et discriminatoire, c'est-àdire
 
raciste. Signalons tout de
 
même que le même groupe Stern
 
envisageait une convergence des
 
nationalismes juifs et arabes . Si
 
le comité antisémite de l'opinion
 
publique de l'URSS ne fait pas
 
de révélation sur ce dernier
 
point, c'est peut-être qu'il gêne
 
la démonstration «sioniste
 
nazi ».. . D
 
A. FE/GENBAUM
 
Reims
 
Merci
 
Merci à Différences pour la
 
façon dont vous rapportez les
 
conversations autour de la table
 
ronde au sujet des juifs d'Union
 
soviétique. J'espère que d'utiles
 
et fructueux échanges se poursuivront
 
dans l'intérêt mutuel de
 
toutes les parties concernées.
 
DEN/S GU/RAUD
 
Saint·Juere
 
Scandaleux
 
Depuis la création de Différences,
 
je suis un de ses fidèles et
 
je vous adresse régulièrement
 
ma participation financière.
 
Je trouve absolument scandaleux
 
d'imaginer que vous recevez
 
officiellement le grand
 
rabbin de Moscou et ses deux
 
acolytes, dont chacun, lorsqu'il
 
est bien renseigné, a tout lieu de
 
penser qu'ils sont aux ordres du
 
gouvernement soviétique, pour
 
ne pas dire davantage.
 
Je regrette que vous n'ayez pas
 
jugé opportun d'annuler cette
 
réunion .
 
Aussi bien je me vois contraint
 
de cesser toute relation avec
 
vous.
 
YVES HAGUENAUER
 
Neuilly-sur-Seine
 
Consternation
 
Nous avons choisi de supprimer
 
notre abonnement à Différences,
 
car votre numéro consacré aux
 
juifs d'URSS nous a consternés.
 
Différences - nO 54 - MARS 1986
 
Vous avez pu obtenir la présence
 
inespérée de deux représentants
 
éminents de cette communauté.
 
On aurait pu grâce à vous espérer
 
avoir de nombreux renseignements
 
de première main qui
 
changeraient des habituelles calomnies
 
répandues à ce sujet, et
 
vous avez pratiquement hurlé
 
avec les loups. Vous avez laissé à
 
vos invités la portion congrue :
 
plus d'un tiers de votre pagination
 
était consacrée aux questions
 
d'adversaires attitrés de
 
l'URSS qui se répondaient euxmêmes
 
dans leurs questions provocatrices
 
ou à celles de votre
 
rédacteur, à peine plus aimables.
 
Ce qui aurait pu être un scoop
 
journalistique s'est révélé être
 
une tribune que l'on trouve habituellement
 
dans d'autres publications
 
spécialisées dans la désinformation.
 
M. J. et R. KR/V/NE
 
Parodie
 
Je vous prie de cesser à ce jour
 
de m'envoyer Différences. Je ne
 
puis accepter la parodie de débat
 
sur les juifs d'URSS que vous
 
avez organisée. Comment revendiquer
 
l'honneur d'avoir posé de
 
si pâles questions, d'avoir laissé
 
les Soviétiques développer leur
 
discours tout faits sans intervenir
 
7 J'estime ne plus rien voir
 
à faire avec une telle publication.
 
PIERRE JANGAUX
 
Nantes
 
Bravo
 
Bravo pour votre excellente et
 
efficace intervention concernant
 
les juifs en URSS. La raison
 
l'emporte sur la passion, l'initiative
 
du MRAP me paraît être
 
la seule crédible. A Charles
 
Palant et Jean-Michel Ollé,
 
j'adresse mes félicitations.
 
SERGE KR/WKOSK/
 
adjoint au maire de Marseille
 
Outrances
 
Je suis profondément
 
convaincue, connaissant bien la
 
politique de l'Union soviétique
 
et la rigueur de son analyse de
 
tout événement, que la dénonciation
 
du sionisme et des crimes
 
israéliens commis contre les
 
peuples palestinien et libanais ne
 
porte à aucune confusion, ne fait
 
aucun amalgame et nulle surenchère
 
- en est-il besoin 7 -
 
susceptibles de renouer avec
 
l'ancien antisémitisme, et ceci,
 
et surtout, à travers des articles,
 
livres et brochures. Si profondément
 
convaincue que je mets
 
quiconque au défi d'en apporter
 
preuve. (Quels articles, quand ,
 
dans quel journal 7 Quelles
 
brochures diffusées par qui, où 7
 
Quels livres 7 Sous la responsabilité
 
du gouvernement soviétique
 
7) .
 
Si nous ne faisons que prétendre,
 
que juger ou si nous
 
posons un certain regard (nous
 
ne savons plus porter que celuilà)
 
sur les positions claires et
 
énergiques - encore heureux -
 
que prend l'URSS lorsqu'il s'agit
 
de l'agression, de l'oppression,
 
du génocide d'un peuple, dans le
 
cas présent palestinien, par le
 
gendarme du Moyen-Orient
 
made in USA, Israël - qui
 
pourvoit en armement les racistes
 
d'Afrique du Sud, qui
 
expérimente et perfectionne des
 
armes nouvelles au Liban - je
 
trouve que l'accusation « d'outrances
 
» est , pour le moins,
 
déplacée, qu'elle est, une fois
 
plus, grave en ceci qu'elle
 
cherche à nier une réalité: l'outrance,
 
l'outrecuidance sont du
 
côté d'Israël et de lui seul,
 
qu'elle est, plus encore, indécente
 
quand on sait le sort
 
réservé aux Palestiniens en
 
Israël, quand on sait se souvenir
 
de l'invasion du Liban et du
 
massacre systématique des populations
 
civiles palestiniennes
 
par l'Etat sioniste et qu'on a pu
 
voir, dernièrement, la négociation
 
et la violation par ce même
 
Etat de l'intégrité et de l'indépendance
 
du territoire tunisien.
 
Là aussi des civils ont payé.
 
En somme, non contents de
 
nous en prendre, depuis plusieurs
 
années, à «l'antisémitisme
 
» en URSS, nous en venons
 
en plus - ce doit être
 
maladif - à reprocher à ce pays
 
des positions trop dures ou trop
 
nettes vis-à-vis du sionisme.
 
Nous dépassons les bornes et
 
cette intervention auprès des
 
autorités soviétiques procède
 
plus du procès d'intention que
 
de tout autre motivation.
 
Il me semble, à l'évidence, que
 
l'URSS n'a de leçon à recevoir
 
de personne quant au respect
 
des minorités et à la lutte pour la
 
disparition des discriminations
 
ou des préjugés alors que son
 
peuple est si hautement éduqué
 
dans le sens du bien de l'homme
 
et de la collectivité. A notre tour
 
de ne pas nous rendre coupable
 
d'amalgames car en présence de
 
certains cas si exploités en Occident,
 
dont l'humanisme a pourtant
 
de singulières défaillances
 
(Walesa, martyr repu et Prix
 
Nobel bien portant mais les
 
syndicalistes turcs emprisonnés ,
 
torturés, exécutés: silence), il
 
s'agit d'un problème politique
 
uniquement et non de caractère
 
raciste, si c'est là que nous allons
 
puiser notre inspiration. Ce n'est
 
pas le fait qu'ils soient juifs qui
 
place ces individus en accusation
 
dans leur pays mais celui d'être
 
des citoyens soviétiques qui portent
 
atteinte et préjudice à la
 
sécurité de l'Etat avec l'aide
 
extérieure et qui ne sont pas
 
respectueux de la Constitution
 
que le peuple soviétique s'est
 
donnée. L'exploitation qui est
 
faite de ces cas isolés n'a d'autre
 
objectif que de nuire à l'image
 
d'un pays qui s'est doté d'un
 
système politique, économique
 
et social différent du notre.
 
Qu'on ait, ici et là, rejoint le
 
camp des pleureurs de métier ne
 
nous grandit pas.
 
Mme LESPARRE
 
Perpignan
 
[[Utilisateur:Charles|Charles]] f!jJ~ tU la ~ JII~
 
tkl~~
 
Mols
 
Droite, Nouvelle Droite, Extrême Droite
 
Sous la direction de Simone Bonnafous et Pierre-André Taguieff
 
27, RUE SAINT·GUILLAUME . PARIS 7'
 
MARS 1986 232p.120F
 
Il
 
GENDA ____________________________ ~
 
MARS
 
1 Jusqu'au 20 avril, La
 
ville de Paul Claudel
 
dans une mise en scène de
 
Bernard Sobel, au théâtre des
 
Amandiers, à Nanterre. Rens.
 
au 47.21.22.25. 0
 
3 Reprise au théâtre GérardPhilipe
 
à Saint-Denis de
 
Technique pour un coup d'Etat,
 
monté par Saskia Cohen Tanugi,
 
d'après La conjuration de Fiesque
 
de Schiller. Renseignements
 
au 42.43 .00.59. 0
 
4 Début de soirées rock à l'Eldorado-
 
Bobino à Paris. La
 
direction recherche encore de
 
jeunes groupes intéressés par la
 
scène . Se renseigner au
 
42.08.23 .50. 0
 
4 au 8, au Théâtre de la Ville à
 
Paris, Paolo Conte, chanteur
 
italien, en récital pour quelques
 
jours seulement. Renseignements
 
au 42.74.22.77. 0
 
6 au 15, trois compagnies théâtrale
 
s européennes à
 
Bourges. A voir, La tempête de
 
William Shakespeare, par la
 
compagnie de marionnettes
 
Carlo Colla et figli (Milan).
 
Renseignements au GrandThéâtre
 
de Bourges. 0
 
7 Fin des cinquièmes rendezvous
 
chorégraphiques de
 
Sceaux, avec notamment la compagnie
 
Brigitte Farges. Renseignements
 
au 46.60.05.64. 0
 
7 au 23 mars, création de La
 
Parisienne, d'Henry Becque,
 
mise en scène par Agnès Celerier,
 
au théâtre du Gymnase à
 
Marseille. Renseignements au
 
91.94.18.00. 0
 
8 à 20 h 30, à Sevran, gymnase
 
Jesse Owens, Dizzy Gillespie
 
Quintette, dans le cadre de Banlieues
 
bleues, jazz en 93. Renseignements
 
au 43.85.66.00. 0
 
10 au 18 mars, festival Jazz
 
musique à Grenoble, du
 
jazz américain au rock arabe, en
 
passant par le big-band. Renseignements
 
au 76.25.05.45. 0
 
Il au 4 mai, sculptures en
 
ciment du Nigeria, exposition
 
de 18 sculptures dans le hall
 
lSJlLATITUOE 4S]
 
AGENCE DE VOYAGES
 
DES PRIX
 
ET DES IDEES
 
21, rue de la Roquette - 75011
 
Tél. : 48.06.39.59 - Télex 213 384
 
13, bd Arago - 75013
 
Tél. : 43.37.46.49.
 
Licence A 1767
 
de la grande salle de la maison
 
de la culture du Havre. Renseignements
 
au 35 .21.21.10. 0
 
Il A Lyon, journée d'information
 
et de réflexion organisée
 
par les écoles de parents
 
et d'éducateurs sur le thème
 
« Paternage et paternité ». Renseignements
 
à la fédération ,
 
43.48.00.16. 0
 
12 Dernière du Monstre Turquin,
 
une pièce de Carlo
 
Gozzi , à la Maison des arts de
 
Créteil. Renseignements au
 
48.99 .94.50. 0
 
15 Dernier jour des rencontres
 
franco-germaniques
 
organisées par Jacques
 
Leenhardt et Françoise Gaillard
 
dans le cadre de l'association
 
Dialogue entre les cultures, au
 
Goethe Institut de Paris. Renseignements
 
au 37.23.61.21. 0
 
15 à 15 heures, rencontredébat
 
à l'auditorium de la
 
Fnac Lille, sur le thème: « Le
 
théâtre sourd, création marginale
 
? », avec la troupe des
 
Papham, troupe de malentendants.
 
Renseignements au
 
théâtre La Fontaine , tél. :
 
20.09.45.50. 0
 
16 Dernière limite pour voir
 
l'exposition de John Miro
 
au musée d'Art moderne de
 
Villeneuve-d'Ascq, près de
 
Lille . Renseignements au
 
20.M.42.46. 0
 
16 au 25 mars, 14' Festival du
 
film de Strasbourg, organisé
 
par l'Institut international
 
des droits de l'homme. Quinze
 
films inédits en compétition .
 
Renseignements à l'Institut intern
 
a tional des droits de
 
l'homme, 1, quai Leza-Marnésia,
 
67000 Strasbourg. 0
 
17 au 31 mars, l'Union chrétienne
 
de jeunes gens de
 
Paris organise différents ateliers
 
et expositions consacrés aux artistes
 
du tiers monde à Paris, plus
 
particulièrement dans cette période
 
ceux d'origine américaine
 
et caribéenne. Renseignements
 
au 47.70.90.94. 0
 
18 au 20, colloque organisé
 
par l'AECEF et le centre
 
des Fontaines sur le thème:
 
« Rencontre juifs, chrétiens, musulmans,
 
la foi et l'écoute de
 
l'autre » . Renseignements au
 
44.57.24.60 à Chantilly. 0
 
19 Sortie nationale du film de
 
Djibril Diop Mambety ,
 
Touki-Bouki, produit par Paris
 
films. 0
 
20 Unique récital de Mariann
 
Mathéus au café-théâtre la
 
Piscine à Châtenay-Malabry. Un
 
hommage à toutes les grandes
 
chanteuses populaires d'Antilles
 
et d'Haïti. Renseignements au
 
46.61.33.33 . 0
 
21 Journées internationale
 
contre le racisme, en souvenir
 
du massacre de Sharpeville
 
(Afrique du Sud), le 21 mars
 
1960. A Paris, le MRAP affrète
 
un autobus à l'ancienne, qui
 
sillonnera la ville. Des artistes se
 
produiront, des écrivains dédicaceront
 
leurs livres, des débats
 
seront improvisés sur les lieux de·
 
passage avec la population. Renseignements
 
sur le parcours et les
 
activités prévues du «Fraternibus
 
»au MRAP, 48.06.88.00.0
 
23 Dernière de L'homme
 
gris, une pièce québécoise
 
de Marie Laberge, à la maison
 
de la culture de Bobigny. Renseignements
 
auprès du théâtre. 0
 
26 à 21 heures, Uzeb, groupe
 
canadien, en concert à Poitiers,
 
salle du Confort moderne.
 
Renseignements au 49.46.08.08.
 
o
 
27 28 et 29, journées de
 
congrès des Assises nationales
 
des petites structures de
 
théâtre, pour regrouper dans
 
leur diversité les lieux de diffusion
 
de spectacle vivant. Renseignements
 
à Bourges , tél.:
 
48.65.43.66. 0
 
28 au 4 avril, voyage en Turquie
 
organisé par le CEVIED,
 
Centre d'échanges et de
 
voyages internationaux pour
 
études de développement.
 
D'autres voyages sont prévus.
 
Renseignements au CEVIED, à
 
Lyon, tél. : 78.42.95.33. 0
 
28 au 6 avril , le Printemps de
 
Bourges, nouvelle
 
monture. Au programme Touré
 
Kunda, Karim Kacel, Higelin ,
 
Murray Head... 0
 
29 jusqu'au 6 avril, premier
 
congrès international de
 
guitare à Cannes, Espace Miramar,
 
avec de nombreux stages
 
pratiques pour des musiques de
 
tous les pays. Renseignements à
 
l'OMACC, tél. : 93.99.04.04. 0
 
UMEUR
 
La fédération du MRAP-Charente a profité du Salon de la bande dessinée à
 
Angoulème pour éditer un album de dessins antiracistes, dont voici un échantillon,
 
signé Million et Labachot.
 
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COMME: çA ,
 
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\\ DU
 
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Version du 27 mars 2014 à 15:51

Sommaire du numéro

n°54 de mars 1986

  • L'imbroglio misquito (Nicaragua) par Robert Pac [Amérique latine]
  • Attention: élections (programmes en matière d'immigration) par J.M. Ollé
  • Exclusion, répression (petite délinquance) par B. Hétier
  • Un désir nommé désert (expo sur le Hoggar) par M. Ayoun, Cherifa
  • Raï de marée par Afifa Zenati
  • Regards de femmes (festival de Créteil) par V. Mortaigne
  • La fête et ses rites propos de Jean Duvignaud recueillis par J.J. Pikon
  • Des années à se battre (Afrique du Sud) par M. Cornevin
  • Courrier; les juifs en URSS [pays de l'est]

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