Droit et Liberté n°150 - novembre 1955

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  • n°150 (254) de Novembre 1955
    • Après le nouvel acquittement des assasssins du petit Emmett Till, l'affaire du Mississipi continue par André Saint-Cyr page1et5
    • Une ère nouvelle s'ouvre au Maroc... Et l'Algérie? par Armand Bittoun page1
    • Sous le signe de la croix de fer page1et5
    • Pleyel le 13 Novembre: les amis du MRAP ont applaudi un brillant spectacle page2
    • Racisme et antiracisme en Lorraine par Andrée Michel page3
    • Genève: l'esprit souffle toujours par A.P Lentin page4
    • Moyen-Orient: les peuples ont intérêt à la Paix par Alfred Grant page5
    • L'affaire du Mississipi: A l'appel du M.R.A.P. à la Mutualité page6
      • Interventions et messages de : Pdt Lyon-Caen, Léo Hamon, Maria Rabaté, Yves Dechezelles, Gérard Bauer, pasteur La Gravière, Suzanne Cremieux, Pr H. Levy-Bruhl, Pr J. Hadamard, Pasteur Lehnebach, René Maran, Pierre Paraf, Jean Schaeffer, Charles Palant.
    • Georges Sadoul; "Salut au Ciné-club amitié" page8
    • Ginette et Hanseli, nouvelle de Andrée Clair page8

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N° 150 (254) 20 NOVEMBRE 1955 30 FRANCS Après le nouvel acquittement , a leflore, des assassi• ns du petit Emmett TilL L'AFFAIRE DU · MISSISSIPI CONTINUE A l'appel du M.R.A.P. ardents meetings d'union à PARIS et à ROUEN Interprète de l'émotion mondiale le gouverneur de l'Illinois demande à son tour l'intervention de Washington ACCUSE du meurtre du jeune Emmett Till dans les conditions que l'on sait, T. W. Millam et Roy Bryant étaient acquittés le 24 septembre del'!nier par le jury de Sumner. Malgré les preuves les plus accablantes: - les témoignages les plus formels, « un doute raisonnable » devait motiver ce scandaleux verdict. S'il a suscité l'enthousiasme de la population blanche de Greenwood, c'est avec stupeur et indignation que l'unanimité de la presse française l'a accueilli et dénoncé. Car il 'n'échappait à personne que cette parodie de justice était l'aveu sans équivoque de la complicité des juges avec les assassins - un encouragement mal dissimulé au crime contre les noirs - une légalisation du lynchage. Peut-être valait-il mieux qu'il n'y eût point de procès. Cela est vrai pour la sécurité de tous ceux qui avaient eu le courage d"affronter l'organe officiel de l'accusation, car ni Mme Bradley, mère de la victime, ni le de Sous le signe la Croix de Fer La mère douloureuse d'Emmett TILL soutenue par ses parents. Pétitions et délégations doivent proclamer .Ia volonté de justice du peuple français One ère nouvelle s· ouvre au Maroc vieux pasteur Moses Wright, ni le jeune Willie Reed n'auraient eu à fuir aujourd'hui le Mississipi pour préserver leur vi'e. Cela est v.rai pour la mémoire du père d'Emmette Till, mort pour l'Amérique au coulrs de la dernière guerre mondiale et qu'e le « Daily News » ne crâint pas de déshonorer à la suite d'une enquête volontairement diffamatoire. Et l'Algérie 1 Cela est aussi vrai pour la paix des églises de la Nouvelle-Orléans. Le procès de Sumner aura encore permis une apologie de la ségrégation raciale s'il n'a pas contribué à diviser la population bl anche des Etats du Nord et du Sud. Le gouverneulr de la Caroline du Sud n'a-t-il A pas récemment dénoncé ce péril en faisant VEC le retour de l'ancien Sultan sur le trône, c'est une èrè nouvelle que l'on peut espérer voir s'instaurer, annonçant la fin des effusions de sang et la paix rétablie au Maroc. André SAINT .cYR. (Suite en page 4.) Les antiracistes s'en réjouissent, comme ils se sont réjouis en enregistrant avec la plus vive satisfaction les prises de position nettes de S. M. Mohammed V sUIr la: question du respect des droits de toutes les parties de la population marocaine. Maroc: égalité des Juifs et Musulmans Dès les premiers jours, en effet, de son installation à Saint-Germain- en-Laye, il recevait le 5 novembre une délégation officielle des Israélites du Maroc à qui il a affirmé qu'aucune discrimination ne serait jamais faite entre Marocains et que « les Israélites 'marocains sont des citoyens de plein droit comme leurs compatriotes Musulmans ». Armand BITTOUN. (Suite en page 5) OllNr NUMERO: • L'AFFAIRE EMMETT TILL: Le meeting du 4 novembre (pages 6 et 7); La campagne aux EtatsUnis (page 4). • GEORGES SADOUL salue le Ciné-Club ({ AMITI E » (page 8). • GENEVE ET LE MOYEN-ORIENT, par AlbertPaul LENTIN et Alfred GRANT (pages 4 et 5). • RACISME ET ANTIRACISME EN LORRAINE reportage d'Andrée MICHEL (page 3). • LE GALA DU M.R.A.P. (page 2). • UNE NOUVELLE D'AN DREE CLAIR: ({ Ginette et Hanseli ». l __ .....,.._.....,.......,..~~.....,.. ___ ~.....,.....,.......,.._~...,..~...,..- Saluée par un discours du ministre Blank, la nouvelle Werhmacht est née à Bonn. Comme aux beaux Jours de l'ancienne, une Croix de Fer kolossale surmontait la tribune... (Voir page 5.) . \ 2 Pleyel, DROIT ET' LIBERTE 13 NoveDlbre •• Les amis du MRAP ont applaudi un brillant spectacle Q VELLE scène de variétés ne se flatterait de pou1voir afficher l'éblouissant programme présenté par le M.R.A.P. à son gala du 13 novembre? Ce gala·, devenu une tradition que les antiracistes se garderaient bien de manquer, a brillamment poursuivi la série de succès remportés lors des prècédentes manifestations de ce genre organisées par le M.R.A.P. Dès 20 h. 30, une foule compacte se pressait aux portes de la SaoJ1e Pleyel, foule qui remplit la salle lorsque le rideau S'OUr vrit. Disons que cette foule, venue là pour affirmer une fois encore sa volonté d'antiracisme, composait un public difficile quant à la qualité des numéros qu'il était ten droit d'exiger - la faute en est aux précédents galas qui furent tous magnifiques. La haute tenue artistique de celui-ci ne devait pas les décevoir. Dès le début, Virginia Capers devait créer l'ambiance. Et la salle entière explosa véritablement devant cette be\1e fi\1e noire aux proportions de statue, dont la voix magnifique est aussi à l'aise dans les blues américains que dans les vieilles chansons juives. On ne la laissait plus qu.itter la scène. Le spirituel Bernard Lavalette eut pour tâche de rassasi'er, après elle, les spectateurs, tâche dont il s'acquitta avec son élégance et sa verve habituelles. C'est alors que Colette Mars, dont chacun connaît le raffinement et la distincton, prit son auditoire sous le charme de sa voix chaude détaillant des couplets aimés de tous. C'est à Francine Alonzo qu'échut ensuite le privilège de présenter le folklore ant.illais. Ce fut un ravissement pour les yeux que toutes ces couleurs chatoyantes des costumes, lorsque le ridea'u s'ouvrit sur les quinze danseurs de la troupe, mais bien plus encore lorsqu'au son de leurs tamtam ils se mirent à danser, légers et gracieux, tels enfin qu'on se les imagine. L'Opéra était là aussi, mis en valeur par l'une des plus grandes voix du monde: celle de Mado Robin, dont la saHe, le souffle suspendu, apprécia hautement la merveilleuse int,erprétation qu'elle donna du fameux air de Rosine. La première partie du programme s'acheva en apothéose grâ'ce au précieux concours du chansonnier Edmond Meunier, bien connu des auditeurs de la radio et qui sut dire avec émotion son beau poème en hommage à Emmett Till, victime de la haine et de la démence de deux criminels. L'entr'acte, dans le hall, réunit comme à l'accoutumée, en une foule joyeuse et animée, militants et spectateurs heureux de cette occasion de se retrouver. Et les Vinifsky ouvrirent le feu de la deuxième partie. Leurs rythmes endia'blés, leurs jolies bottes rouges et leurs violons conqu,irent le public qui ne se tint plus de joie lorsque parut Mouloudji. Ce gavroche qui, je crois, conservera éternellement un air d'enfance sur son visage si expressif, présente aujourd'hui un tour de chant épuré des sujets noirs de sa prime jeunesse. Il y a gagné en intensité et en ampleulr et les auditeurs ne se lasS'aient pas d'écouter cette voix si particulière ta'ndis qu'il mimait ses couplets de sa façon bien personnelle. Ce beau spectacle n'aurait cependant pas connu un tel succès s'il n'avait bénéficié de l'aide qu'y apporta tout au long Jacques Angelvin, anima'teur de la télévision. Il sut présenter chaque artiste avec son talent habituel et son esprit toujours si vif. C'est à minuit passé seulement que le rideau tomba. Les lumières s'éteignirent et la foule quitta à regret la salle Pleyel où elle venait de passer une si belle soirée. A l'année prochaine 1 G.HUTMAN. . LES PERSONNAUTES De nombreuses pers'Ünnalités s'étaient associées, par leur présence ou par des m.essages, au gala du M.R.A.P. Autour du président et de Mme LYON-CAEN, en reconnaissait notamment: MM. Pierre PARAF, écrivain; Victor SABLE, ancien sénateur de la Martinique; SICARD DE PLAUZOLES, président d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme; COME-CORNEILLE, président de l'Association des Amis de Schoelcher; Mme Denise DECOURDEMANCHE, secrétaire générale de l'Association des Familles des Fusillés et Victimes de la Résistance Française; le docteur André BLOCH, médecin des hôpitaux, président d'honneur de l'Amicale des Médecins Israélites de France; M· Charles LEDERMAN, président de l'Union des Juifs pour la Résistance et l'Entr'aide. Parmi les messages reçus, citons ceux de MM. Edouard HERRIOT, président d'honneur de l'Assemblée Nationale; Louis MARIN, ancien ministre, membre de l'Institut; le professeur Jacques HADAMARD, membre de l'Institut; Alain LE LEAP, secrétaire général de la Confédération Générale du Travail; Mme Suzanne CREMIEUX, conseiller de l'Union Française

M. H. RIVIEREZ, sénateur; des écrivains Michel LEIRIS,

Marcelle AUCLAIR, Gabriel TIMMORY; de l'amiral MUSELIER, ancien chef des Forces Françaises Navales Libres; des généraux LE CORGUILLE et TU BERT ; du docteur Henri DESOILLES, professeur à la Faculté de Médecine; de M. Marcei PRENANT, professeur à la Faculté des Sciences; de Mlle Jacqueline MARCHAND, agrégée de l'Université. ",*", En une brève allocuti'Ün, Charles PALANT, secrétaire général du M.R.A.P., souligna le succès du gala, qui constitue chaque année une grande manifestation antiraciste, où des milliers de Parisiens expriment au M.R.A.P. leur accord et leur sympathie. Il appela tous les démocrates, tous les gens de coeur à s'unir et à agir ensemble, p'our que le racisme et l'antisémitisme soient définitivement mis en échec, dans un monde de ~aix. PAS • lP'lUJIISQlUJ'OINI INIIE VOUS lE 10111 PAS • PUISQU'ON ~IIE VOUS LlE D~T PAS' S'il avait vécu ... L'entreprise RIGAUD, de Saint-Maur, employait neuf ouvriers au creusement de canalisations à Clamart. Mal étayée, une masse de boue s'effondra, ensevelissant trois hommes. Il fallut dix heures d'efforts pour dégager le Jeune Mohamed Hachouche, le seul des trois qui vivait encore. Mals Il devait mourir le lendemain, uni Jusque dans la mort à ses camarades de travail: un Français et un Espagnol. S'II avait vécu Il aurait contlnu& à travailler beaucoup et à gagner peu, car son pain et sa sécurité comptaient peu dans les bilans de l'entreprise. Mals, s'II avait vécu, Il aurait gardé au' coeur le souvenir de tous ceux qui s'acharnèrent - sous la menace d'un nouvel éboulement - à l'arracher à la mort, parce, qu'ils savent, eux, le prix de la vie d'un homme. Des maux, La parole est d'argent ... Hier encore préfet de police et du silence, M. Dubois déclarait devant la presse anglo-américaine qu'il espérait apporter ... prochainement remède aux déplorables conditions de travail et de logement des 130.000 Nord-Africains vivant à Paris. Quarante mille seulement de ces « citoyens français », a-t.-il précisé, ont un emploi stable. DepuiS, sans reculer devant l'instabilité présente de l'emplOi, DROIT ET LIBERTÉ, 91, Fbg St-Denis - par~s-1(Jo Tél. : TAI. 48-11 et 45-26 TARIF DES ABONNEMENTS FRANCE et UNION FRANÇAISE Un an : 300 francs PAYS ETRAN~:r:RS Un an : 430 francs ABONNEMENT DE SOUTIEN : 1.000 francs TARIF SPECIAL POUR LA BELGIQUE Compte Ch. Post. : 6070-98 Paris Pour les changements d'adresse envoyer 20 francs et la dernière bande Le gérant : Ch. OVEZAREK S.I.P.N., 14, Rue de Paradis -:- PARIS (Xe) -:- Tra ... exéc. par des ou ... syndiqué. L'Oncle TOM. des mots ! M. Dubois a accepté la résidence générale à Rabat. On pourrait dire que la sollicitude de M. Dubois envers les Nord-Africains a été prise de court, mais les bidonvilles du Maroc attendent l'ancien préfet du silence au tournant de ses discours. A tu et à toi. Le gouverneur général Chauvet a lui aussi le louable souci d'élever le niveau de vie des masses rurales de l'Afrique Equatoriale. A Brazzaville, devant le Grand Conseil de l'A.E.F., il a fustigé vertement les éléments de la population française qui se livrent avec les noirs à deli exagérations verbales, notamment au « tutoiement protecteur ». Ça va changer. Et le niveau de vie des populations rurales en sera élevé d'un... ton. Racisme à guichet ouvert ..• En dehors des déclarations de personnages officiels, d'autres ex~ priment leur petite opinion personnelle sur la situation des Nord-Africains en France. Par exemple, au bureau de placement du 21, boulevard Picpus, guiChet B, c'est cet employé modeste et raciste virulent que les Nord-Africains reIJ.dent malade avec leur « charabia ». « Que venez- vous faire ici, leur hurle-t-il à travers son portillon, rentrez chez vous! » ••. Et à guichets fermés ..• Rentrer chez eux, minute! répond un certain préSident de l'Union Française nord-africaine qui propose au Gouvernement sa petite idée à lui. Primo: que tous les Musulmans chômeurs d'Alger soient refoulés vers leur commune d'origine. Secundo: que les quartiers européens soient interdits à tous les Musulmans dès la tombée de la nuit, sauf nécessité! Nécessité défait loi. Or, c'est précisément cette nécessité qui inquiète les racistes en exercice. Les leaders nationalistes qui sont au pouvoir en Afrique du Sud, quoique très satisfaits de la discrimination complète, expriment leurs craintes à ce sujet dans une lettre au premier ministre: « Si les blancs et les noirs sont vraiment séparés, qui fera les travaux pénibles dans les régions blanches? » Et le directeur des transports de Johannesbourg, s'il exprime lui aussi son accord sur le principe de discrimination, regrette que la .. nécessité de faire voyager séparément blancs et noirs lui coûte 500 millions. Cacophonie. En vérité, je vous le dis, la discrimination raciale pose de redoutables problèmes. Ne pas mélanger les blancs et les autres, ces autres devant travailler chez les blancs, tout en restant chez eux, bien que chez eux ce solt aussi chez les blancs ... Dans ce concert de maniaques, malgré les notes discordantes, c'est tout de même l'intérêt qui joue le rOle de chef d'orchestre. Sans commentaires .•• L'éditeur Bernard Grasset est mort. Officier de la Légion d'honneur, officier dans l'ordre militaire du Christ, il officia également dans la collaboration. Le professeur allemand Greiling n'espère plus que la famine pour ralentir vers 1984 le taux de croissance des populations ... - « L'Allemagne est la plus pacifique des grandes puissances, écrit « l'historien » américain Wright, elle n'a mené qu'une guerre tous les 27 ans ». - A Prévent (Pas-de-CalaiS), Mokrane Tahlou, marchand ambulant de tapis et de bretelles, a été gratifié d'un procès-verbal pour défaut d'affichage des prix ... TRISTES RELENTS ••• Interdit aux Juifs 1 Face au métro « Mairie d'Issy » il y a une crèmerie. A un client qui lui faisait courtoisement remarquer que certains pots de yaourt sont à peu prèS vides, le crémier répondit en hurlant: « Vous ête un sale Juif et vous auriez dû passer par le four crématoire. » Le client, précisément rescapé des camps de concentration, décida de porter plainte et revint le lendemain solliciter le témoignage de la vendeuse. Le crémier surgit à nouveau et cria: « Je saurais répéter moi-même devant le tribunal que vous êtes un sale Juif. D'ailleurs, je vais afficher à mon magasin: « Interdit aux Juifs ». D'aucuns penseront qu'un tel cas d'antisémitisme pathologique relève du médecin, mais il nous semble que le juge a aussi son mot à dire. Le plus grand choix d'annonces ... C'est celui de France-Soir. On est tout de même surpriS de trouver dans cette variété une annonce aussi avariée que celleci: « Dame 50 ans cherche place bonne à tout faire. Israélites s'abstenir », etc ... Si M. Lazareff, directeur de France-Soir, cherche une bonne à tout faire, le voilà prévenu. Vichy-Etat. « Droit et Lioorté » s'est élevé contre les mesures arbitraires d'expulsion et de résidence surveillée qui frappèrent en 1953 MAVIAN et KOSTANTINIAN, héros de la Résistance. Voici qu'un autre Arménien d'origine, mais naturalisé Français depuis 1930, KEUKDJIAN, combattant lui aussi de la guerre contre Hitler, s'est vu expulsé de Cannes et placé en résidence surveillée en Lozère. Et ce, en vertu d'un décret de Vichy le déchéant de la nationalité française! La RépUblique était belle sous Pétain, mais après 10 ans de la IV' le vichysme se porte assez bien. Maréchal, nous voilà! . .. Il se porte beaucoup à l'Académie Française, à en juger par le nombre d' « immortels » qtù patronnent le centenaire de la naissance de Pétain. Nés comme leur maître sous NapOléon le Petit, les Weygand, Claude Farrère, Léon Bérard et autres Henry Bordeaux ont gardé au Badinguet - Bazaine de la « Révolution nationale » toute leur reconnaissance. Il avait redonné une nouvelle « verdeur » aux conceptions politico- sociales de ces fossiles. Mais son règne - quoique plus court - co/Ua plus de sang à la France que le Second Empire. Le moral des troupes. La publicité, qui ne perd jamais ses droits, sait même au besoin créer des devoirs. Ainsi, on a pu lire dans plUSieurs journaux allemands l'annonce suivante: « Les mobilisables « devraient » dès maintenant prendre du sucre de raisin vitaminé Démo-Sana; il fortifie. Pour 50 pfennigs, dans les pharmacies et drogueries. » Le sucre d~ raisin vitaminé et qui ne coûte que 50 pfennigs ne pourrait-il pas dès maintenant axer sa publicité sur les civils? Pudeur. Erik-Maria Remarque acquit une grande notoriété, aprèS l'autre guerre, en publiant « A l'Ouest. rien de nouveau », qui en était une courageuse dénonciation. Exilé depuis en Amérique, Remarque est revenu en Allemagne de l'Ouest et a repris son réquisitoire contre les horreurs de la guerre dans un livre intitulé, dans la traduction française : « L'Ile d'Espérance ». Mais pour être passé dans les mains des censeurs de Bonn, ce livre qui accusait les méfaits de la guerre et de l'hitlérisme, a été défiguré au point de n'être plus qu'une peinture des bombardements alliés en Allemagne. C'est pourquoi nous n'y lirons pas des dialogues de l'original comme celui-ci: - Tu as anéanti beaucoup de Juifs? - Si tu voyais mes états de service, tu ne poserais pas cette question. Ça c'était du travail! .. bROJ'T ET LIBERi"Ë 8 UNI N Noe E. N T Racisme et antiracisme en Lorraine UN capitaine de vaisseau doit quitter son bord le dernier. C'est sans doute en vertu de cette règle que M. Horace de Carbuccia a comparu en Justice ,un peu moins de dix ans après .que certain de ses collaborateurs .aIt été Jugé et même condamné .à mort. Le Journal qu'il dirigeait appe~ alt à la répression alors que la [répression était exercée par l'ennemi ou sous son contrôle; Il réclamait des sanctions au moment où les ({ coupables » encouraient la prison, la déportation et la mort; il suggérait des mesures d'exception aVant même que l'occupant les ait édictées. Peu de campagnes de presse, dans l'histoire, furent couronnées d'un tel succès. Le 29 aoQt 1940, une caricature de ({ Gringolre » représentait Jean Zay pendu à un drapeau tricolore et le 10 octobre suivant, sous le portrait du même .... ean Zay, paraissait le commentaire suivant: « Ce juif a été condamné pour désertion à la dégradation militaire et à la déportalion perpétuelle. Et d'un. » Jean Zay a été assassiné. Dans le numéro du 10 octobre, l'échotier de « Grlngolre » se livrait à une violente attaque contre Pierre Masse, avocat à la Cour, « Israélite qui s' était fait élire depuis peu sénateur radicalsocialiste de l'Hérault ». Pierre Masse est mort en déportation. . Le 6 décembre 1940, ({ Grlngolre » s'en prend à Marx Dormoy, ancien ministre de l'intétérieur socialiste, ' dans les termes suivants: « P eut-on savoir ce qu'il es t devenu? A-t-il rendu des comptes? Les nôtres. » Marx Dormoy a été assassiné. Le 27 février 1941, à propos de l' ({ épuration» dans les milieux universitaires, ({ Grlngolre » éorivalt: « Il y a l'incroyable Brossolette dont on voudrait bien pouvoir se contenter de rire. » Brossolette s'est tué pour éohapper à ses bourreaux. Mandel, Victor Basch et combien d'autres, républicains, francsmaçons, Juifs, sel'vlrent de cibles à la célèbl'e chronique « Répétez- le », où la Gestapo pouvait suivre la trace de ses victimes et trouvel' le pl'étexte de ses Interventions ... Et ne parlons que pour mémoire de la poussière des ({ incurables » dont les changements de nom et les déplacements flgul'âlent au ({ carnet mondain » et qui s'en Iront flnil' dans les fours d'A\lschwltz. M. Horace de Carbuccia a été acquitté. La défense avait, au cours des débats, fait entendre quelques témoins. Les témoins de l'accusation étalent et resteront absents. Oneo.ce {j)o.ui-ade ... De plus en plus, Poujade se démasque comme fasciste. Ses discours et ses activités n'ont plus grand'chose de commun avec les revendications des petits commerçants et artisans. Prétendant ({ défendre » également les ouvriers et les paysans, il se lance dans des diatrioes démagogiques sans craindre, malgré les « démentis », les allusions antisémites et xénophObes. Lui qui affirmait ({ ne pas faire de politique », n'hésite pas à préconiser « une République autoritaire » et l'accentuation de la politique raciste en Afrique du Nord - programme qui ne peut qu'aller à l'encontre des intérêts Au fil des jours PAS DE COLLABOS A LA SORBONNE 1 Aux cris de • Pas de collabos à la Sorbonne! • plusieurs centatnes d 'étudiants ont manifesté leur indignation lors du cours inaugural de Jean Guitton à la Faculté des Lettres. Organisateur, sous l'occupation, des • Centres éducatifs de la Révolution Nationale " auteur d'un livre où Pétain voyait • une expression fidèle des principes qui dirigeaient son action " Jean Guitton avait été privé de son poste, à la libération, par un comité d' épuration. Les étudiants n'oublient pas ... Une conférence du R. P. Riquet Au cours d'une conférence à la Maison de la Chimie, sur le thème • Le chrétien face à l'antisémitisme " le R. P. RIQUET a déclaré nomment : u Notre 101, notre morale, est celle de la Bible: u Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Comment, dans un coeur chrétien, pourrait-II être question d'amour 51 l'antisémitisme y demeure 7 • Rivarol condamné mais ••• Plusieurs condamnations du directeur de • Rivarol., René Malliavin, pour diffamation et injures, ont été confirmées par la Il' chambre de la Cour d'Appel de Paris. de tous les Français, y compris les commerçants. Lui qui ne cesse d'attaquer le régime parlementaire, annonce sa vOlonté... de présenter des députés aux élections. Ces députés devront prononcer un serment de fidélité à l'U.D.C.A. et accepter, s'ils trahissent ce serment, de « subir sur leur personne physique et morale les châtiments réservés aux traîtres ». Ce langage rappelle à s'y méprendre le code de « l'honneur » ~_....,.. __ ....,..-c-__ FELICITATIONS Le j"urnal nazi • Der Weg ., paraissant en Amérique du Sud sous le patronage de Skorzeny, consacre un article dithyrambique à Poujade. " Le Mouvement Poujade, écritil, est, depuis 1945, le premier mouvement couronné de succès contre la tyrannie de la démocratie. » On a les félicitations qu'on mérite. ,..._-c-...::"-c-_-c-__ en usage chez les nazis... ou les gangsters. Le recours aux méthodes fascistes apparaît aussi dans l'institution d'une « marche officielle » de l'U.D.C.A., dont la musique a été composée, comme par hasard, par l'auteur de « Maréchal, nous voilà ! » Poujade confirme ce que nous avons depuis longtemps souligné

à savoir que l'antisémitisme

n'est qu'un moyen de division et de diversion destiné à poser faussement les problèmes. On voit aujourd'hui plus clairement où il veut en venir. Tout cela ne fait pas l'affaire des commerçants, qui veulent continuer à défendre leurs légitimes revendications, mais non pas se laisser entraîner dans de tragiques aventures. C'est ce qui explique les nombreuses démissions enregistrées quotidiennement par Poujade dans la France entière. . EN Lorraine, comme dans l'ensemble de la France, le racisme à l'égard des Algériens a subi une forte recrudescence depuis l'aggravation de la situation en Algérie. Ici comme ailleurs s'intensifient les campagnes racistes menées par les journaux, les traitements discriminatoires appliqués par le patronat à la ma~n-d'oeuvre algérienne et les opérations policières périodiques déclenchées contre ces travailleurs. Examinons plus particulièrement ces trois aspects de la recrudescence du raCÏ&me en Moselle. La presse Presque quotldiennement, elle met en éviaence des fans divers, le plus souvent sans lmponance, concernant les A!genens. Des titres raclstes s'etIOrcent d'attirer l'attentlOn du lecteur. Il y a souvent contradictlOn entre le libellé du titre et le contenu de l'article qui suit. VOlci deux exemples cnoisis à quelques jours d'intervalle dans le journal ({ Le Lorrain ». Le 28 septembre 1955, à la rubrique «Tnbunal Correctionnel », ce journal titre: ({ Les Arabes ont la vedette ». Dans le contenu de l'article qui suit, on citait le cas de deux Algériens condamnés respectivement à 5.000 et 10.000 francs d'amende pour des faits sans gravité et, par une volonté curieuse d'assimilation, le cas d'un Européen condamné également. Dans la suite, on indlquait également quatre condamnations d'Européens à des peines plus graves. Mais le but recherché par ce quotidien est, semble-t-il d'attirer l'attention du lecteur sur les Algériens. A la date du 1er octobre 1955, nous trouvons dans ce même quotidien ce titre fort suggestif: ({ Le demi-défendu (par les fellagha~ ». li ne s'agissait que d'une dispute consécutive aux reprOChes adressés par des Algériens à un de leurs compatriotes qui buvait de l'alcool. . Ces deux exemples nous montrent qUels procédés sont employés pour essayer soit de ridiculiser, soit, ce qui est encore plus grave, de justifier dans l'esprit du lecteur les mesures discriminatoires et répressives prises à l'égard des Algériens. Dans les camps ... Les discriminations racistes du, patronat lorrain à l'égard des travailleurs algériens exigeraient plUSieurs chapitres pour être seulement énumérées. On déclare les Algériens citoyens français quand il s'agit d'envoyer des forces de répreSSion dans leur pays, mais quand ils viennent travailler dans les entreprises de France, ils ne sont plus assimilables à des salariés européens. La discrimination joue sur tous les plans: logement, salaires, avantages divers, droit à l'embauche, etc. Les Algériens employés en Lorraine n'ont droit pour se loger qu'à un simple lit dans un dortoir ou un camp appartenant aux houillères ou aux grandes usines sidérurgiques. Le nom de ({ camp » employé par les habitants convient parfaitement aux baraquements en bois ou demidur où les employeurs les ont logés: certains sont encore entourés des fils de fer barbelés destinés à prévenir les évasions de prisonniers soviétiques auxquels ' ces « camps » étaient destinés sous l'occupation. Pour pénétrer dans ces camps, il faut montrer « patte blanche », c'est - à - dire déposer sa carte d'identité et respecter un horaire très stricte si le visiteur est Musulman, demander l'autorisation au directeur si le visiteur est Européen. Nuit et jour le camp est gardé par des policiers de l'usine. lYiême les délégués des commissions d'hygiene et de sécurité des comités d'entreprises ont les plus grandes difficultés à y pénétrer. N'en serait-il pas a utrement si des conditions décentes étaient assurées à ces travailleurs algériens? En réalité, dans beaucoup de « camps », les Algériens dorment sur des matelas bourrés de paille, sans draps ni couvertures; ils n'ont pas de salle de cuisine; aussi on les oblige à prendre leur repas à la cantine de l'usine. Quelquefois aussi, ils font ce qu'on app~lle les « trois huit », c'est-à-dire que le même lit est , . occupé trois fois par jour par trois locataires différents. La densité est telle dans certains dortoirs qu'on a signalé l'hiver dernier des cas d'asphyxie. Et encore on peut considérer comme privilégiés ceux qui dorment dans les « camps », alors que des milliers d'autres dorment dans les granges, les garages, les ateliers, les recoins d'usine. A Hayange, nous avons vu un garage habité par 60 Algériens qui dorment sur des paillasses pOSées sur la terre battue, sans draps ni couvertures. Pas d'installation permettant le chauffage ou la cuisine, pas d'installation hygiénique. L'entrepreneur peu scrupuleux qui les emploie leur fait payer 600 francs par mois pour une place dans ce garage! A ceux qui demandent un logement pour leurs familles, comme en obtiennent les travailleurs européens, français ou italiens, on leur Objecte qu'ils ne sont pas assez stables. En réalité, on ne veut pas reconnaître que leur instabilité est causée par la fréquence des maladies et des accidents dont ils sont victimes par suite des mauvaises conditions de vie et de travail qui leur sont faites. Les travaux les plus durs Partout où ils sont employés dans les usines, les mines, les chantiers, ils font les travaux les plus durs, les plus dangereux, les plus sales, pour être, en fin de compte, les plus mal payés. Certaines entreprises constituent des équipes de travailleurs uniquement nord-africaines où l'arbitraire est la loi: là, pas de respect des conventions collectives réglementant la profession, par de respect du salaire minimum garanti interprofessionnel, pas de majoration pour heures supplémentaires, pas de garantie d'emploi. Et quand ces travailleurs font quelques réclamations, ils sont licenciés quand ils font grève, on leur envoie la police et on arrête les délégués algériens. Telle est la solution donnée par le patronat lorrain aux problèmes de l'utilisation de la main-d'omvre algérienne. L'acharnement de la police qui dirige ses coups sur ces travailleurs algériens vient r épondre aux voeux de la presse raciste et Mois la même cour a réduit la sanction infligée ou prévenu pour avoir coché un mil icien évadé. Au lieu de 4 mois de prison avec sursis et 20.000 francs d'amende, Malliavin est condamné à une simple amende de 20.000 francs . Selon qlte vous serez IBILANe Olt NOIR Contre l'acquittement de Carbuccia La section du M.R.A.P. de Marseille a adressé ou ministre de la Justice une lettre protestant contre l'acquittp.ment d'Horace de Carbuccia. • De Carbuccia, déclare-t-elle, doit expier ses crimes, si l'on ne veut pas qu'il appelle à en commettre d'autres dans les nouvelles • feuilles Infâmes • que son • Rivarol", • Aspects de la 'rance ., etc... » Un jeune Guinéen, étudiant à Paris, est ac tuell ement emprisonné arbitrairement. Il est clair que s'il était blanc, Il serait libre. Lamine Traore, marié et père d'un enfant de 6 mois, devait recevoir une aid émanant de son t erritoire d'origine, pour terminer ses études. Il fut r eçu, au ministère de la Frf).nce d'Outre-Mer, par un fonctionnaire particulièrement méprisant. Il riposta. Il y eut querelle, échange de coups. Toutefois, après procès-verbal au commissariat, le fonctionnaire en question ne crut pas nécessaire de p·orter plainte. Trois jours après, ayant été dûment « conseillé », il r evenai t sur sa décision. C'est alors que Lamine Traore, qui était parti en vacances, fut jugé par défaut et condamné à 12 mols de pl'ison ferme. Arrêté à son r etour, le 30 octobre, son àffaire revenait, il y a quelques jours, devant la 23' Chambre correctionnelle de Paris. La liberté provisoire lui fut refusée. Il faut espérer que lors de la prochaine audience, fi xée au 26 novembre, les juges se départiront de cette obstination à frap per un jeune noir d'une Deine sans rapport avec le déli t qui lui est reproché - sans même admettre la possibilité que les torts puissen t être du côté du fo nctionnaire racis te. Les antiracis tes demandent que Lamine Traore soit immédiatement lib ér é et puisse regagner le poste de contrôleur de l'enregistrement qui vient de lui être attribué à Dakar. comble d'aise un patronat qui les surexploite. La ségrégation de l'hab!tat dont son vlctimes ces travailleurs algériens concentrés dans les « camps » r end d'ailleurs plus faciles les perquisitions nocturnes, les arrestatlOns sommaires. C'est tantot sous prétexte d'opér ations de « contrôle » permettant l'arrestation de certains Algériens, qualifiés pour la circonstance d' « agitateurs », tantôt dans le but hypocritement avancé d' « assainir» les milieux algériens et de les « protéger » contre une minorité, que ces opérations honteuses sont déclenchées. Les Parisiens connurent les incidents scandaleux de la Goutted'Or suivis de plUSieurs semaines de « contrôle ». Le 6 septembre 1955, des r afles monstres à l'égard des Algériens étaient orga nisées dans toute la France. En Moselle, la police se vantait d'opérer plus de 4.000 « contrôles » d'Algériens : soit environ un Algérien sur trois était arrêté, transporté dans un commissariat, soumis à un interrogatoire, obligé de fournir ses empreintes digitales et de signer, sous peine d'arrestation, une déclaration de loyalisme envers la France. Espère- t-on résoudre ainsi le problème algérien? .. Ce jour-là, il y eut 300 Algériens arrêtés en Moselle, 1.000 dans toute la France, qui furent déportéS en Algérie, d'où l'on ne devait plus avoir de nouvelles, dans des conditions qui démontraient le mépriS total des garanties que la Constitution accorde aux personnes et qui rappelaient étrangement les méthodes pratiquées naguère à l'égard des Israélites et des patriotes. Une lettre adressée par le président de la Ligue des Droits de l'Homme de la Moseille au ministre de la Justice recevait cette réponse: « J 'ignore le cas que vise votre lettre du 12 courant ». Policiers au service du ministère de l'Intérieur, policiers en civil au service des grandes entreprises, anciens officiers des Affaires indigènes spécialisés dans les « services sociaux » destinés aux Algériens, tel est le triste réseau d'encadrement et de « contrôle » mis en place à leur égard, dans le but d'organiser systématiquement le mouchardage, la corruption et de les amener au désespOir et à la peur. La solidarité des travailleurs français Mais on ne peut intimider les frères de ceux qui, en luttant, sont bien décidés à faire respecter leur dignité d'hommes, leur droit et leurs libertés. On n 'avait pas compté non plus avec une classe ouvrière lorraine qui sait qu'elle ne peut défendre son avenir si elle accepte l'existence d'une main-d'oeuvre surexploitée dans laquelle le patronat puise ses réserves pour porter atteinte à des conquêtes sociales chèrement acquises. Au lendemain des rafles policières dirigées contre les travailleurs algériens, des tracts ont expliqué aux ouvriers ce qui s 'était passé. « Les travailleurs algériens sont vos frères », rappelaient les tracts et affiches. Des grèves, des délégations ont eu lieu un peu partout dans les mines, les usines, les chantiers, pour · protester contre ce racisme honteux et exiger le retour des détenus. Mais il est clair que la protestation doit aller en grandissant afin que ces faits ne se reproduisent plus et que leurs conséquences soient réparées. Tous les hommes de bonne volonté, quelles que soient leurs opinions politiques ou r eligieuses, dont la conscience se révolte devant ces faits déshonorants, doivent les dénoncer sans répit et s'opposer à leur poursuIte. S'inspirant des actions courageuses menées contre le racisme par les travailleurs lorrains, ils s'uniront afin d'agir contre ces exactions racistes soutenues par d'indignes campagnes de presse, et feront triompher la fraternité. (Reportage d'Andrée MICHEL.) Contre le scandaleux déni de justice du Mississipi A lVashington d "intervenir 1 exigenl les « Il n'y aura pas de procès. L'affaire est enterrée », a déclaré le juge Arthur Jordan, à l'issue des délib érations du « grand jury » de Leflore, qui, p'our la seconde fois, a acquiLté J. W. Millam et Roy Bryant. anliracisles les responsables de ce crIme n'ont pas comparu devant la Justice. » Et il demande « l'ouverture d'une enquête sur la vIolation des droits de ce citoyen de l'illinois dans un autre Etat ». ". . amerlcalns amendements ). Une quinzaine d'autres députés se sont déjà engagés à le soutenir. L' état d'esprit des antiracistes américains est r ésumé par cette phrase d'un évêque noir, W. J. 'Valls, dans une lettre que publie le journal « AfroAmerlcan », de Baltimore: « L'affaIre Emmett Till est devenue le symbole du combat pour la libel'té dans le Sud et aux Etats-Unis en général... » Genève •• l'esprit LA conférence de Genève est morte. Vive l'esprit de Genève! Car l'esprit de Genève souffle toujours, quoiqu'en disent en OccIdent les bons apôtres qui, grands {( relanceurs » de {( guerre froide » et de {( petit~ Europe », prétendent justifier leurs nouveaux plans aventureux par le prétendu {( échec total de la conférence des Quatre ». DES OMBRES ET DES LUMIERES Echec total de la conférence? Regardons-y de plus prés et voyons un peu mieux les ombres et les lumières. Certes, il est bien vrai que le communiqué final de la conférence est décevant dans la mesure où il n'annonce aucun accord précis, aucune décision concrète, mais rien n'en a été rompu, au contraire, et dans leurs discours de clôture, les quatre ministres des Affaires étrangères, tout en faisant part de leur volonté de poursuivre leurs échanges de vues par la voie diplomatique ou par des voies plus directes, ont exprimé l'espoir de progrès futurs. Ayant déblayé le terrain et clarifié les positions, la conférrnce laisse intactes et améliore même les chances d'une négociation dont chaque ministre a affirmé fortement la nécessité, en même temps qu'il manifestait sa vo~onté d'y recourir. Les principaux pourparlers -ceux qui portent sur le désarmement -- vont se poursuivre à la Commission de l'O,N.U., sous l'égide de ces Nations Unies qui vont prochainement s'agrandir puisqu'à Genève les Quatre -- autre résultat positif de leurs travaux -- semblent bien s'être mis d'accord sur l'admts~ion de certains pays candidats (pas tous). Ces constatations assez optlmistes faites -tant plus indis faire qùe toute de presse bien che à les escan: le bilan préciS d UN E FINALEMEI Reprenons le me des minist jour que les ( eux-mêmes fixé 1 SécurIté euro flcatlon de L'affaire est enterrée ? Les noirs des Etats-Unis et l' ensemble des antiracistes américains ne le voi ent pas ainsi. La lutte continue. Le mouvement de prot estation se dirige maintenant vers le gouvern ement de 'W:J.shington, vers le ministre de la Justice, M. Brownell, vers le président Eisenhower, que la loi et la Constitution autorisent à Intervenir pour faire respec ter l'équité. Des meetings organisés par les o rga ni ~a ti o n s antiracistes continuent à se tenir à travers les Etats-Unis. Après que des dizaines de milliers de personnes aient manifes té à Chicago, Baltimore, New-York, Detroit, SanFrancisco, Wa~ hin g ton, un nouveau grand ras5e mblement se 1---------------------------------------------------------------------------------------------- Les Occidenta se sont trouvés principe de la l'Allemagne pa générales libre, pays. Les Occ raient voir ces sées par les QUI cours d'experts que l'U.R.S.S. voir organisées déSigné par les allemands. Mai principal point Le grand obsta c'est l'exigence cidentaux de f l'organisation Allemagne réur Qui ne voit l( telle Allemagn courir. non sel R.S .• mais à : C'est en raison de l'ampl eur de ce mouvement que le gouverneur de l'Illinois, M. William Stratton, a été amené à lancer un appel retentissant aux autorités fédérales. L'Illinois est, rappelonS-l e, l'Etat où Emmett Till était né et où il habitait, avec ~ a m.ère, avant d'aller en vacances chez son oncle, Moses Wright, dan!! le Mississipi. C'est pourquoi M. Strat ton a pu' intervenir. Dans une lettre au ministre de la Justice il écrit: « Un cItoyen de l'illinoIs, Emmett Till, a été enlevé et assassIné. Il semble maIntenant que pr6pare pour le début de décembre à New-York. A l'issue de chacun de ces meetings, des r ésolutions sont ad optées, demandant l'intervention du Gouvernement fédéral. Les lettres et tél6grammes r éclamant justice afflu ent pat milli ers à la Maison Bla n c h e~ cependant que des délégations se r endent, par dizaines, à vVashington. Parallèlement, le d6puté Charles C. Diggs, qui assiôta au procès de Sumn er, a déposé au Congrès un proj et de r ésolution in terdisant aux repr6sentants du Mi ssi ~s i p i de siéger , étant donné que les noirs ne peuvent voter normalement dans cet Etat. Ce texte est conforme à l' esprit et à la lettre de la Constitution (13' , 14' et 15° L·allaire eonlinue (Suite de. la page 1) peser une nouvelle menace sur tous ceux qui ne partagent pas ses étranges préjugés? Toutefois, l'opinion, qui n'avait pas manqué d'affirmer sa solidarité affectueuse à l'égard des noirs et de la famille du jeune Emmett Till, attendait avec espoir la décision du « grand jury :1 de Leflore. Elle pensait que cette juridiction supérieure n'allait pas hésiter à désavouer une décision dont seul le jury de Sumner aurait à supporter la honte et le déshonneur. On se rappelle 'en effet qu'acquJttés du chef de meurtre et remis en liberté pa'r le jury de Sumner, les assassins d'Emmett Till devaient comparaître deva'nt le « grand jùry » de Leflore afin de répondre de l'accusation de kidnapping -- crime puni de la peine de mort par la loi américaine. Or, l'enlèvement en pleine nuit d'un enfant de moins de 15 'ans du domicile de son oncle avec l'intention bien a'rrêtée de lui infliger une correction, ce fait n'avait point été nié. Ne pouvait l'être non plus celui de la disparition du mineur, si LE PROCÉS DE LEFLORE Le • grand jury • de Leflore, chargé d'examiner l'affaire Emmett Till, était, comme le jury de Sumo ner, composé uniquement d'hommes blancs. Quatre témoins ont comparu devant lui: le vieil oncle de l'enfant assassiné, Moses Wright; le jeune Willie Reed, qui a vu les bourreaux à l'oeuvre, et deux policiers : George Smith et John E. Cothran. Il n'a pcs été question des deux outres témoins cités au procès de Sumner et qui ont disparu. Une nouvel le fois, les responsables de la justice n'ont pas tenu compte des témoignages des noirs. Après le verdict, George Smith, le shérif qui avait déjà contribué à l'acquittement de Sumner, a eu le cynisme de déclarer: " Je ne pense pas que les lIolrs souhaiteraient l'inculpation de Millam et Bryant. Ils souhaitent une Iituation qu'Ils puissent présenter comme un exemple frappant d'in jusHce pour pouvoir continuer à nous ottaquer. _ Ainsi ce serait servir les noirs, selon lui, que de ne pas iuger les criminels racistesavait été contestée l'identité du cada'vre repêché dans la rivière de Tallahachie. Qu,oi qu'il en soit, c'est sur la base de cette seule contestation que les juges du Mississipi avaient cru défendre leurs traditions. Et c'est ainsi que nous avons su comment le doute pouva'it être chez eux une notion juridique commode au service de l'extermination des hommes de couleur. Mais l'aveu. Depuis le procès de Leflore nous savons qu'il ne lie point les juges du Sud quand il émane des blancs pours'uivis pOUir le meurtre ou l'e kidnapping d'un noir. En tout cas, il ne fait point foi contre eux. Dans le Mississipi, on n'a pas au moins la religion de l'aveu. Tel est l'enseignement des , r é cen~es décisions des jurys du Mississ ipi lorsqu'ils sont cha'rgés de punir les responsables d'atrocités commise5 vis-à-vis de la population de couleur. Mais de tels procès, de tels verdicts, parce qu'ils mettent en ,ca u,se les principes mêmes de la justice en ce qu'elle a d'universel et de vrai quand elle est exercée dans un but inaccessible aux passions, engagent l'avenir d'une Nation. Une justice qui s'inspire de la haine de race n'est pas seulement une justice haïssable. C'est une monstmosité cont're laquelle l'humanité qui se veut civilisée se doit de combattre implacablement. A la barre de l'opinion mondial'e, les jurés de Sumner comme ceux de Leflore ne se repentiront jamais assez d'avoir été complices de l'assassinat d'un jeune nègre de 14 ans -s'il peut être quelque repentir dans des consciences de brutes. SONDAGE Le journ al britann ique Daily Herald a fait récemment une enquête sur les préjugés antisémistes en Grande-B.retagne. II en a t iré les conclusions suivantes: 12 % des Anglais « n'aiment pas les juifs ». 52 % sont d'avis qum faut entretenir de bonnes relations avec les juifs. K. Oes croix ont flombé sur les collines du comté de Leflore, tandis que se déroulaient les délibérations du « grand jury .. sur l'affaire Emmett Till: le Ku-Klux-Klan manifestait sa présence. C'est le Ku-Klux-Klan qui, por ses Interventions plus ou moins clandestines, entretient l'esprit raciste dans tout le Sud des Etats-Unis, mobilisant et excitant les hommes de main, or. ganisant les expéditions punitives, inspirant la presse; etc... Il s'efforce de terrariser les !noirs, pour le plus grand profit des planteurs Quelques jours avant l'ossassinat du petit Ilmmett, le « sorcier impérial .. du K.-K.-K. avait lancé à Atlanta (Géorgie) un appel à la croisade contre les noirs « POUR COMBATTRE LES MAUX QUI MENACENT L'HOMME BLANC ". Millam et Bryant sont des chevaliers de cette craisade. Encouragés par cet exemple et par la mansuétude des juges, les racistes ont, ces dernières semaines, multiplié leurs forfaits et leurs appels à la violence. • L'église réservée aux Inalrs, à Lake City (Caroline du Sud), a été incendiée et le posteur, J. A. Delaine, ' a dû s'enfuir. lE SIG~IE · DU I{. • Non loin de Sumner, la mère d'un jeune nair, Tlmb Oowdy, vient de révéler que son fils a été écrasé par une automobile, qui le poursuivait sur la route, parce qu'il avait joué avec une fillette blanche. • A Longview (Texas», des blancs ~nt tiré sur des enfants noirs dont les parents étaient opposés à la ségrégation dans les écoles: un jeune garçan a été tué, deux fillettes blessées. • A Orlanda (Floride), des coups de mltramettes ont été tirés contie le siège du C.I .O., où se tenait une réunion syndicale: 10 travalIIeufi noirs ont été blessés. • A Atlanta, une noire et un blanc ont été candamnés à cinq ans de prison pour s'être mariés, contrairement à la loi de ségrégation. • A Forest (Mississipi), un jeune noir de 19 ans, qui se déclare Innocent, a été condamné à la prison à vie pour' « viol d'une femme blanche ". La plaignante a déclaré que l'accusé ovalt « abus.. d'elle plus d'Ullle fols _' , ' • Le gouverneur de Géorgie s'est pranoncé une nouvelle fols pour le K. maintien de la ségrégation dans les écoles. Parlant des antiracistes, Il 0 déclaré : « Nous avons affaire à un sale petit groupe de lIègres qui veulent liquider notre mode d'existence. ,. • Le gouverneur de la Caroline du Sud a déclaré : « Le mouvement pour le mélange des races est, dans une large mesure, patronné et f.noncé par des blancs qui font profession de haïr le Sud. Ces étrangers ne comprennent pas que le nègre du Sud est c"'ntent comme il est. Rien, en tout cas, dans l'affaire Emmett Till, Ile justifiait une telle publicité. .. • ENFIN, SIGNALONS Que PLUSIEURS ETATS DU SUD ENVISAGENT OES POURSUITES CONTRE LE N.A. A.C.P. (National Association for the Advancement of Colored People), LA GRANDE ORGANISATION ANTIRACISTE AMERICAINE.

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Ces faits et ces menacas, qui donnent une idée de l'atmosphère régnant dans le Sud, montrent combien il est nécessaire pour les antiracistes de renforcer toujours plus leur action. France, à. la 1 terrible péril, offert à. l'U.R.: ranties dérisoir de Sécurité » q pv~{ ne garan MoyenLes peu~ onl in LA Au sujet de Moyen-Ol paraphras dicton: « à ( développement deux centres la libération d, oolonlsés et les intérêts opposé nisateurs, tourl ves spectaculal Ces maniresl logique InternE r,évélant un ét orientation sou en particulier cerne la grand questions du l'Angleterre,. L, rence et de attendu patlem per un coup en deux rivaux: Etats-Unis. Ble: tresigné la dé 1950 devant « curlté du M, Grande-Bretagr une conférence prenant des d quie, d'Irak, d k!stan. Les Eta à des observa est complèteme Si le pacte d des oppositions il porte surtot na ce stratégiql S.S. et la volon sion sur les pl notamment la l'Arabie séoUdl Car, dans ce feste un püls' de neutralité, ft développ~ment natIonales en d, monopolistes ql rées et de la P( militaires. L'ou veaux déboue produits export préciable entrl relations , Est-O tions militaire tendances visa monopoles an~ cains. Ainsi pour relations aveo Bandoeng et lE européen lui 01 pectlve de pre Alfre4 (Suite en Genève •• l'esprit souBle toujours Bonn •• CrOl LA conférence de Genève est morte. Vive l'esprit de Genève! Car l'esprit de Genève souffle toujours, quoiqu'en disent en Occldent les bons apôtres qui, grands « relanceurs » de « guerre froide » et de « petite Europe », prétendent justifier leurs nouveaux plans aventureux par le prétendu « échec total de la conférence des Quatre ». DES OMBRES ET DES LUMIERES Echec total de la conférence? Regardons-y de plus prés et voyons un peu mieux les ombres et les lumières. Certes, il est bien vrai que le communiqué final de la conférence est décevant dans la mesure où il n'annonce aucun accord précis, aucune décision concrète, mais rien n'en a été rompu, au contraire, et dans leurs discours 'de clôture, les quatre ministres des Affaires étrangères, tout en faisant part de leur volonté de poursuivre leurs échanges de vues par la voie diplomatique ou par des voies plUS directes, ont exprimé l'espoir de progrès futurs. Ayant déblayé le terrain et clarifié les positions, la conférC'nce laisse intactes et améliore même les chances d'une négociation dont chaque ministre a affirmé fortement la nécessité, en même temps qu'il manifestait sa vo~onté d'y recourir. Les principaux pourparlers -ceux qui portent sur le désarmement -- vont se poursuivre à la Commission de l'O.N.U., sous l'égide de ces Nations Unies qui vont prochainement s'agrandir puisqu'à Genève les Quatre -- autre résultat positif de leurs travaux -- semblent bien s'être mis d'accord sur l'admis~ion de certains pays candidats (pas tous). Ces constatations assez optilE SIGf'IE DU I{. • Non loin de Sumner, la mère d'un jeune noir, Tlmb Dowdy, vient de révéler que son fils a été écrasé par une automobile, qui le poursuivait sur la route, parce qu'II avait joué ovec une fillette blanche. • A Longview (Texas), des bla'ncs Gnt tiré sur des enfants noirs dont le. parents étaient opposés à la ségrégotion dans les écoles: un jeune garçon a été tué, deux fillettes blessées. • A Orlando (Floride), des coups de mltroillettes ont été tirés contte le siège du C.I.O., où se tenait une réunion syndicale: 10 travailleurs noirs ont été blessés. • A Atlanta, une noire et un blanc ont été condamnés à cinq ans de prison pour s'être mariés, contrairement à la loi de ségrégation. • A Forest (Mississipi), un Jeune noir de 19 ans, qui se déclare Innocent, a été condamné à la prison à vie pour' « viol d'une femme blanche -. LI plaignante a déclaré que l'accusé avait « abusé d'eUe plu. d'UII'Ie fols _' . • • Le gouverneur de Géorgie s'est prononcé une nouvelle fols pour 1. I{. mointien de la ségrégation dans les écoles. Parlant des antiracistes, Il a déclaré : « Nous avons affaire à un sale petit groupe de nègres qui veulent liquider notre mode d'existence. _ • Le gouverneur de la Caroline du Sud a déclaré : « Le mouvement pour le mélange des races est, dans une large mesure, patronné et financé par des blancs qui font profession de haïr le Sud. Ces étrangers ne comprennent pas que le nègre du Sud est c"'ntent comme il est. Rien, en tout cos, dans l'affoire Emmett Till, ne justifiait une telle publicité. _ • ENFIN, SIGNALONS Que PLUSIEURS ETATS DU SUD ENVISAGENT DES POURSUITES CONTRE LE N.A. A.C.P. (National Associotlon for the Advancement of Colored People), LA GRANDE ORGANISATION ANTIRACISTE AMERICAINE. Ces faits et ces menacGs, qui donnent une idée do l'atmosphère régnant dans le Sud, montrent combien Il est nécessaire pour les antiracistes de renforcer toujours plus leur action. mistes faites - et il était d'autant plus indispensable de les faire que toute une campagne de presse bien orchestrée cherche à les escamoter - quel est le bilan préciS de la conférence? UN BILAN FINALEMENT POSITIF Reprenons le programme même des ministres, l'ordre du jour que les Quatre s'étaient eux-mêmes fixé: l. Sécurité européenne et réunification de l'Allemagne. Les Occidentaux et l'U.R.S.S. se sont trouvés d'accord sur le principe de la réunification de l'Allemagne par des élections générales libres dans tout le pays. Les Occidentaux désireraient voir ces élections organisées par les Quatre, avec le ooncours d'experts allemands, alors que l'U.R.S.S. préférerait les voir organisées par un comité désigné par les deux Parlements allemands. Mais là n'est pas le principal point d'achoppement. Le grand obstacle à un accord, c'est l'exigence tenace des Occidentaux de faire entrer dans l'organisation atlantique une Allemagne réunifiée et réarmée. Qui ne voit le danger qu'une telle Allemagne pourrait faire courir, non seulement à l'U.R. R.S., mais à ses voisins, à la France, à la paix? Contre ce terrible péril, les Trois n'ont offert à l'U,R.R.S. que des garanties dérisoires et le « Pacte de Sécurité» qu'ils lui ont prop'j~{ ne garantit nullement sa Moyen -Orient Les peuples, eux, ont intérêt à LA PAIX Au sujet des événements du Moyen-Orient, on peut paraphraser. un célèbre dicton: « à chaque jour son développement »', Autou.r de deux centres de gravitation : la libération des peuples jadis oolonlsés et les luttes entre les Intérêts opposés des pays colonisateurs, tournent des initiatives spectaculaires. Ces manifestations ont une logique interne, naturellement, r-évélant un état d'esprit, une orientation souvent camouflée, en particulier en ce qui concerne la grande spécialiste des questions du Moyen-Orient : l'Angleterre,. Le pays de Lawrence et de Glubb Pacha a attendu patiemment pour frapper un coup en direction de ses deux rivaux: la France et les Etats-Unis. Bien qu'elle ait contresigné la déülaration de mai 1950 devant « garantir l la sécurité du Moyen - Orient, la Grande-Bretagne vient de réunir une conférence à Bagdad, comprenant des délégués de Turquie, d'Irak, d'Iran et du Pakistan. Les Etats-Unis ont droit à des observateurs, la France est complètement éliminée. Si le pacte de Bagdad traduit des oppositions Inter-puissances, Il porte surtout en lui la menace stratégique contre l'U.R. S.S. et la volonté de faire pression sur les pays récalcitrants, notamment la Syrie, le Liban, l'Arable séoudite et l'Egypte. Car, dans ces pays se manifeste un pù!ssant mouvemellt de neutralité, favorisant un libre développement des économies nationales en dehors des corsets monopolistes qui les ont enserrées et de la politique des blocs mmtalres. L'ouverture des nouveaux débouchés pour les produits exportables, l'aide appréciable entrevue grâce aux relations . Est-Ouest sans conditions militaires, stimulent les tendances visant à briser les monopoles anglo-tranco-amérlcains. Ainsi pour l'Egypte. Ses relations avec les pays de Bandoeng et les pays de l'Est européen lui ouvrent une perspective de prospérité. Elle ne Alfred GRANT. (Suite en page 7) sécurité. Cependant, sur ce point (sécurité européenne), Z'U. R.R.S. a tait une importante concession qui rapproche les points de vue en présence: eUe a accepté le maintien, sans limitation de durée, des traités existants: traité atlantique pour l'Ouest et traité de Varsovie pour l'Est, et proposé la limit~ tion contrôlée des effectifs et des armements pour tout le territoire de l'Allemagne et de certains Etats voisins, de l'Est et de l'Ouest. Finalement, alors que les perspectives de réunification allemande semblent remises aux dates les plus lointaines, un accord provisoire sur la sécurité européenne semble avoir des chances dans un avenir assez proche (nouvelle conférence des quatre ministres au printemps ou nouvellè conférence des Quatre Grands aux Etats-Unis au début de l'automne 1956, à la. veille des élections présidentielles américaines). II. Désarmement. Les Occidentaux ayant reculé par rapport à leurs positions antérieures et abandonné le projet franco-britannique de 1954, le dialogue qui s'est déroulé à Genève a été un dialogue de sourds. Les Occidentaux se sont accrochés à leur thèse du contrôle préalable au désarmement, alors que les Soviétiques préconisent le contrôle simultané au désarmement. Cependant, là encore, certaines perspectives d'accord sont apparues. Alors que sur le désarr lement atomique l'impasse !'cmble pour l'instant totale, des possibilités de synthèse apparaissent entre les diverses propositions de contrôle et les premières mesures de désarmement classique. Ces possibilités pourront se développer au souscomité de désarmement. IJI. Relations Est-Ouest. Là encore, le refus des Occidentaux de remettre en question l'embargo et le blocus des A.-P. LENTIN. (Suite en page 7) el anlisélll « Je crains que la nouvelle armée allemande ne soit pareille à l'ancienne », a déclaré le pasteur NiemoHer, chef de l'église luthérienne d'Allemagne, tandis que les .revanchards et les nazis saluaient la renaissance de la Wehrmacht, par la grâce des Accords de Paris. Ces inquiétudes ne sont que trop j'ustifiées par l'état d'esprit qui règne en Allemagne de Bonn, jusque dans les cercles dirigeants, où, pendant la maladie d'Adena'uer, la direction des affaires appartenait au sinistre Globke, aut'eur des lois raciales de Nuremberg. Pour faire admettre le réarmement allemand, M. MendèsFrance et ses amis avaient fait miroiter la solution « européenne » du problème sarrois. La Sarre a dit « non » et la Wehrmacht, elle, poursuit sa marche. ' Il Y a quelques jou,rs, à lohn les anciens (et futurs; dats' des blindés {)nt organisl manifestation. Après avoir c des hymnes nazis et racist,e ont defilé dans les rues, génl en tête, en scandant le CI « Pendez les juifs ». Les autorités de Bonn n'on sévi, pas plus qu'elles ne ! sent - et pour cause -- 0 les publications de caractèTl lérien, contre la reconstit des organisations nazies, c la nomination aux postes les divers de l'administration 1 l'armée des pires criminel! guerre. Le CUj antiraciste Des milliers de femmes, la plupart blanches, ont défilé dans le les décisions du gouvernement sud-africain de réduire encore le dro fois en Afrique du Sud que les antiracistes blcmcs participent à ~ \ ili Il. L'ALGÉRIE ? • (Suite de la page 1) Et dans son premier message officiel au peuple marocain le souverain renouvelait solennellement ses assurances: « Nous espérons voir, a-t-il dit, dans un Maroc nouveau, libre ei indépendant, régner la tolérance et la concorde afin que tous ses habitants, quelles que soient leur confession et leur nationalité, se sentent plus en sécurité pour leurs personnes, leurs intérêts et leurs libertés. » C'est encore une fois la meilleurè réponse aux tentatives visant à dresser Musulmans et juifs les uns contre les autres, tentatives que le M.R.A.P. avait stigmatisées dans sa résolution du 5 octobre 1955. Algérie: sang et racisme En Algérie cependant, et malgré le plus large mOUivement d'opinion qui se soit jamais manifesté pour empêcher que la t'rance ne s'y laisse entraîner dans une guerre absurde et sans issue, les opérations dites « de police » et les « ratissages » continuent. Le sang coule tous les jours et tous les JOUI s la liste des victimes algériennes et françaises s'allonge impitoyablement. Et lors des récents débats sur l'Algérie à l'Assemblée Nationale, on a pu, entendre un député, M. Aumeran, parlant de l'action militaire et de l'état de siège, réclamer « des cours martiales itinérantes, statuant sur les lieux du crime, et taisant exécuter instanfcmém ent la sentence» ; un autre député, M. Pierre André, se plaindre du trop petit nombre d'exécutions capitales et dire : « ... Ce prétendu nationalisme, c'est, en réalité, un fanatisme dressé avec une violence extraordinaire contre les Français d'abord, contre les blancs en général ensuite ». ( j. O. » du' 8 octobre 1955). On croit entendre le langage des pires racistes de l'Afrique du Sud. ~'opinion veut la paix Et pourtant, c'est dans les couches les plus laI ges de l'opinion que le bon sens commence il prévaloir et que l'on se révolte contre ces harangues de haines qui ne pourraient que nous précipiter dans de nouvelles catastrophes. C'est dans « Le Figaro» qu'on lit sous la plume de Jean Schlumberger: « Depuis des semaines, criant au défaitisme et à la trahison, des voix nous adjurent pathétiquement de nous cramponner coûte que coûte à des concepiions coloniales considérées dans le monde comme périmées. Bien qu'on sache à quelle catastrophe cette rc.ideur dépollrvue d'imagination nous a conduits en Indochine, c'est une même persévérance dans de vieux errements que certains, et non des moindres, nous prêchent aujourd'hui comme seul moyen de nous maintenir en Afrique du Nord. » L'idée d'élections loyalement organisées, de représentants valablement désignés des populations algériennes, de l'ouverture d'un dialogue et du cessez-le-feu immédiat, se répand de plus e'n plus: C'est Albert Camus qui écrit dans l' « Express» (16-10-1955) : « Une chance demeure. Elle est dans une libre confrontation, au cours d'une rencontre décisive, des forces qui sont en présence. Seule, cette franche explication pourrait renverser quelques-unes des barrières qui séparent les Français d'Algérie aussi bien. des Arabes que des Métropolitains. » C'est Guy Mollet qui écrit « Le Populaire de Paris ) 9-1955) : « Dans chacun des pays ressés nous devons permet une élite nationale de se ma ter librement et c'est avec qu'il sera possible de négoci traité d'association. » Tandis que M. Jacques D déclare à l'Assemblée Nati (11-10-1955) : « Si l'Assemblée National montrant lucide en ce qui cerne l'Algérie, définissait politique d'abandon des solll de force et de recours à la ciation, les répercussions d'u acte seraient considérables, sage de la France appcra sous un tout autre éclaira l'échelle internationale ainsi Algérie. Il y aurait de la j'oie les foyers françms et dan. rangs des soldats maintenu rappelés sous les drar/eaux. peuple algérien saluerait ave pair et camDréhension la fin guerre ql!i lui est faite. « Seule la négociation est forme aux véritobles int français. » Un changement s'impose 1 Ces dernières sema'ines initiatives très nombreuses se manifestées pour alerter nion et l'amener à compre que la sewle solution de réside dans la négociation, l'exiger. Il est impossible de les tO,utes. Il convient cependanj signaler la « jou,rnée du fi vembre pour l'étude et la di~ sion des problèmes d'AfriquE Nord », journée d'études ql groupé des personnalités et groupes très divers, et à laql le M.R.A.P., qui avait été ir uffle toujours Bonn •• Croix de Fer "- ft., •• ait d'aue de les ampagne rée cherquel est férence? me mêrdre du s'étaient et réunlgne. U.R.S.S. d sur le tion de élections tout le désireorganicIe oonds, alors rait les comité rlements t pas le ppement. accord, des Ocer dans qu'une it faire à l'U.R. ns, à la ntre ce is n'ont des ga « Pacte ont proment sa x ents du peut célèbre 1 conste des rient : e Lawacha a r frapde ses et les It conde mal la séla France e. traduit sances, la mel'U. R. e presItrants, Liban, pte. maniement n libre nomles orsets enserblocs s nourIes e apeaux condlnt les er les amérl- Ses s de l'Est persIle ne sécurité. Cependant, sur ce point (sécurité européenne), l'U. R.R.S. a tait une importante concession qui rapproche les points de vue en présence: elle a accepté le maintien, sans limitation de durée, des traités existants: traité atlantique pour l'Ouest et traité de Varsovie pour l'Est, et proposé la limitation contrôlée des effectifs et des armements pour tout le territoire de l'Allemagne et de certains Etats voisins, de l'Est et de l'Ouest. Finalement, alors que les perspectives de réunification allemande semblent remises aux dates les plus lointaines, un accord provisoire sur la sécurité européenne semble avoir des chances dans un avenir assez proche (nouvelle conférence des quatre ministres au printemps ou nouvellè conférence des Quatre Grands aux Etats-Unis au début de l'automne 1956, à la veille des élections présidentielles américaines). II. Désarmement. Les Occidentaux ayant reculé par rapport à leurs positions antérieures et abandonné le projet franco-britannique de 1954, le dialogue qui s'est déroulé à Genève a été un dialogue de sourds. Les Occidentaux se sont accrochés à leur thèse du contr6le préalable au désarmement, alors que les Soviétiques préconisent le contr6le simultané au désarmement. Cependant, là encore, certaines perspectives d'accord sont apparues. Alors que sur le désarne ment atomique l'impasse ~cmble pour l'instant totale, des possibilités de synthèse apparaissent entre les diverses propositions de contr6le et les premières mesures de désarmement classique. Ces possibilités pourront se développer au souscomité de désarmement. nI. Relations Est-Ouest. Là encore, le refus des Occidentaux de remettre en question l'embargo et le blocus des A.-P. LENT IN. (Suite en page 7) el anlisémilisme « Je crains que la nouvelle armée allemande ne soit pareille à l'ancienne ~, a déclaré le pasteur NiemoHer, chef de l'église luthérienne d'Allemagne, tandis que les revanchards et les nazis saluaient la re·naissance de la Wehrmacht, par la grâce des Accords de Paris. Ces inquiétudes ne sont que trop joustifiées par l'état d'esprit qui règne en Allemagne de Bonn, jusque dans les cerdes dirigeants, où, pendant la maladie d'Adenauer, la direction des affaires appartenait au sinistre G1obke, aut·eur des lois raciales de Nuremberg. Pour faire admettre le réarmement allemand, M. MendèsFrance et ses amis avaient fait miroiter la solution « européenne ~ du problème sarrois. La Sarre a dit « non ;) et la Wehrmacht, elle, poursuit sa marche. Il Y a quelques joulrs, à Iserlohn, les anciens (et futurs) soldats des blindés ont organisé une manifestation. Après avoir chanté des hymnes nazis et racist,es, ils ont défilé dans les rues, généraux en tête, en scandant le cri de « Pendez les Juifs ». Les autorités de Bonn n'ont pas sévi, pas plus qu'elles ne sévissent - et pour cause - contre les publications de caractère hitlérien, contre la reconstitution des organisations nazies, contre la nomination aux postes les plus divers de l'administration et de l'armée des pires crimin,els de guerre. Pourtant, en Allemagne même, les forces de progrès et de paix, en dépit d'une répression violente, développent constamment leur lutte contre la remilitarisation, pour la réunification. « Même en Allemagne occidentale, constate le grand quotidien suédois « Stockholm Tidningen », l'opinion se répand de plus en plus que la réunification vaut mieux que les accords de Paris. » Ainsi se précisent les responsabilités des instigateurs des Accords de Paris et l'urgence d'une solution pacifique et démocratique du problème allemand. Le Cap •• antiraciste sans Manifestation précédent Des milliers de femmes, la plupart blanches, ont défilé dans les rues du Cap pour protester cOlntre les décisions du gouvernement sud-africain de réduire encore le droit de vote des noirs. C'est la première fois en Afrique du Sud que les antiracistes blcmc. participent à une manifestation aussi Importante. FRANCFORT • LES OEUVRES D'ALFRED ROSENBERG et d'autres livres nazis étaient exposés par un, libraire à la Foire de Francfort. Les autorités refusant d'intervenir, les outres libraires exposants les ont enlevés de force. GRAZ (Autriche) • DES NAZIS ont tenté d'incendier la Maison de la Commu'nauté Juive. LONDRES • L'HISTORIEN BRUNO WEIL, spécialiste de l'affaire Dreyfus, a déclaré, au cours d'une conférence, que « le gouvernement allemand aurait pu, à l'époque, établir l'innocence de Dreyfus, mais il a refusé Intentionnellement de le faire ". • « AU KENYA, des sujets de la reine peuvent être déte!nus sans mandat, Interrogés sans être coupabfes, torturés... Par ailleurs, Il y a une grande différence entre les peines ln· fligées aux blancs et aux noirs ", a déclaré Lord Stabolgi à la Chambre des Lords. . MELBOURNE • ILSE KOCH, la « chienne de Buchenwald ., ayant annoncé son intention de se rendre en Australie après sa prochaine sortie de prison, une vive émotion s'est emparëe de tout le pays. D'autant plus que la crimine:le naz.ie a déclaré : (( Plusieurs de mes amis ont déjà émlgr' en, AustraHe. » NEW-YORK • LA DELEtGA TION sud-africaine s'est retirée de l'O.N.U., le problème racial eln Afrique du Sud ayant été inscrit à l'ordre du jour. o LA POPULATION de l'Asie s'élèvera à deux milliards d'habitants en 1980, contre 1 milliard 320 million. actuel lement, estiment les services spécialisés de l'O.N.U. Cet accroissement est dû essentiellement à la diminution de la mortalité. WASHINGTON • PARLANT DE L'ANTISEMITISMÊ aux Etats-Unis, M. Browne~I, ministre de la Justice, a déclaré que si le docteur Salk, inventuer du vaccin contre la poliomyélite, voulait habiter certains quartiers des villes américaines ou adhérer à certains clubs ou associations, il en serait exclu parce que juif. Qu'attend donc le mltnistre pour sévir contre ces agissements contraires à la 101 et à la Constitution? ET L'ALGÉRIE ? • (Suite de la page 1) Et dans son premier message officiel au peuple marocain le souverain renouvelait solennellement ses assurances: « Nous espérons voir, a-t-il dit, dans un Maroc nouveau, libre ei indépendant, régner la tolérance et la concorde afin que tous ses habitants, quelles que soient leur confession et leur nationalité, se sentent plus en sécurité pour leurs personnes, leurs intérêts et leurs libertés. C'est encore une fois la meilleure réponse aux tentatives visant à dresser Musulmans et Juifs les uns contre les autres, tentatives que le M.R.A.P. avait stigmatisées dans sa résolution du 5 octobre 1955. Algérie: sang et racisme En Algérie cependant, et malgré le plus large mOUIVement d'opinion qui se soit jamais manifesté pour empêcher que la r'rance ne s'y laisse entraîner dans une guerre absurde et sans issue, les opérations dites « de police et les 1: ratissages » continuent. Le sang coule tous les jüurs et tous les jours la liste des victimes algériennes et françaises s'allonge impitoyablement. Et lors des récents débats sur l'Algérie à l'Assemblée Nationale, on a PUI entendre un député, M. Aumeran, parlant de l'action militaire et de l'état de siège, réclamer « des cours martiales itinérantes, statuant SUr les lieux du crime, et taisant exécuter instantanément la sentence :. ; un autre député, M. Pierre André, se plaindre du trop petit nombre d'exécutions capitales et dire : ( ... Ce prétendu nationalisme, c'est, en réalité, un fanatisme dressé avec une violence extraordinaire contre les Français d'abord, contre les blancs en général ensuite ». ( J. O. » du' 8 octobre 1955). On croit entendre le langage des pires racistes de l'Afrique du Sud. ~' opinion veut la paix Et pourta'n!, c'est dans les couches les plus laI ges de l'opinion que le bon sens commence il prévaloir et que l'on se révolte contre ces harangues de haines qui ne pourraient que nous précipiter dans de nouvelles catastrophes. C'est dans « Le Figaro)) qu'on lit sous la plume de Jean Schlumberger: « Depuis des semaines, criant au défaitisme et à la trahison, des voix nous adjurent pathétiquement de nous cramponner coûte que coate à des concepiions coloniales considérées dans le monde comme périmées. Bien qu'on sache à quelle catastrophe cette rc.ideur dépourvue d'imagination nous a conduits en Indochine, c'est une même perSévérance dans de vieux err ements que certains, et non des moindres, nous prêchent aujourd'hui comme seul moyen de nous maintenir en Afrique du Nord. ;) L'idée d'élections loyalement organisées, de représentants valablement désignés des populations algériennes, de l'ouverture d'un dialogue et du cessez-le-feu immédiat, se répand de plus en plus: Cest Albert Camus qui écrit dans l' « Express:. (16-10-1955) : « Une chance demeure. Elle est dans une libre confrontation, au cours d'une rencontre décisive, des forces qui sont en présence. Seule, cette franche explication pourrait renverser quelques-unes des barrières qui séparent les Français d'Algérie aussi bien. des Arabes que des Métropolitains. » C'est Guy Mollet qui écrit dans « Le Populaire de Paris » (16- 9-1955) : « Dans chacun des pays intéressés nous devons permettre à U'ne élite nationale de se manifester librement et c'est avec elle qu'il sera possible de négocier un traité d'association. » Tandis que M. Jacques Duclos déclare à l'Assemblée Nationale (11-10-1955) : .« Si L'Assemblée Nationale, se montrant lucide en ce qui concerne l'Algérie, définissait une politique d'abandon des solrtfions de force et de recours à la négociatior., les répercussions d'urt tel acte seraient considérables, le visage de la France appc:raîtrait sous un tout autre éclairage à l'échelle internationale aiT{si qu'en Algérie. Il y aurait de la joie dans les foyers françoi.s et dans les rangs des soldais maintenus ou rappelés sous les draneaux. Et le peuple algérien saluerait avec espoir et camoréhension la tin de la guerre qui lui est faite. « Seule la négociation est conforme aux vérifdJles intérêts français. :. Un changement s'impose! Ces dernières sema'ines des initiatives très nombreuses se sont manifestées pour alerter l'opinion et l'amener à comprendre que la seulle solution de paix réside dans la négociation, et à l'exiger. Il est impossible de les citer tO,utes. Il convient cependant de signaler la « Joulrnée du 6 novembre pour l'étude et la discussion des problèmes d'Afrique du Nord ~, journée d'études qui a groupé des personnalités et des groupes très divers, et à laquelle le M.R.A.P., qui avait été invité Le sultan, arrivant a.. Maroc, descend de l'avion. au titre d'organisation antiraciste, a ten u à être présent, comme il entend s'associer à toutes les tentatives faites en vue de la paix en Afriqoe du Nord. L'appel, enfin, des Intellectuels du Comité d'action contre la poursuite de la guerre en AfT/que du Nord, par le poids des signatures recueillies, allant de Mauriac à Joliot-Curie et comprenant des dizaines de noms dont Roger Martin - du - Gard, Jean Cassou, ,Jean Rostand, André Breton, JeanPaul Sartre, le R. P. Avril, Jean Cocteau et tant d'autres quj ne représentent aucune formation politique et qui groupent toutes les tendances, est une des manifestations les plus importantes de la prise de conscience nationale sur la gravité de la situation et l'urgence du règlement de la question algérienne par des solutions de paix. CeuIX qui ont entre leurs ma'ins les destinées de la nation ne peuvent plus se dérober à ces appels sans encourir les responsabilités des pires catastrophes où risque de nous entraîner leur aveuglement. e DROIT ET LIBERTE L'AFFAIRE 1 d u M (s SIS S 1 Pli A I~appel du M.R.A.P., à la Mutualité A l'appel du M. R. A. P., Pans antiraciste a réclamé avec force le juste chatiment des assassins d '.I:!.mmett 1111, au cours du grand meeting de la MutualIte, le 4 novembre dernier. L' l taU, à quelques JOU!'S ue la date fixée pour le seccnd procès. il fallait que l'opinion publique, qui avait exprimé son émo tion après le scandaleux acquittement de Sumner, lance un nouvel et solennel avertissement aux jurés de Leflore, à tous ceux dont il dépend, aux Etats-Unis, que justice soit rendue. C'est pourquoi j eunes et vieux, hommes et femmes de toutes origines, antiracistes de toutes tendances, étaient venus si nombreux. C'est pourquoi tant de personnalités diverses, par leur présence ou par des messages, s'étaient associées à la manifestation. Ce fut un puissant meeting, digne des belles traditions du peuple parisien, un meeting résolu ct combattif, qui se déroula SOUs le signe de l'union la plus large, la plus complète. Les personnalités Après M. Léon LYON-CAEN, premier président honoraire de la Cour de Cassation, président du M.R.A.P., qui ouvrit la séance, on entendit tour à tour les interventions de MM. Yves DECHEZELLES, avocat à la Cour; le pasteur LENEBACH, les écrivains René MARAN, prix Goncourt, et Pierre PARAF ; Mme Maria RABATE, député de Paris; MM. Léo HAMON, sénateur; Alfred GRANT, secrétaire général de l'Union des Sociétés Juives de France; Jean SCHAFFER, secrétaire de la Confédération Générale du Travail; Charles PALANT, secrétaire général du M.R.A.P. A la tribune on reconnaissait égalemen t MM. l'abbé GRANGIER, Victor SABLE, ancien sénateur de la Martinique; Charles LEDERespoir que le second ·procès, prévu à Leflore le 7 novembre, ne sera pas un nouveau déni de justice ». Par ce texte~ les antiracistes parisiens s'engagent « à alerter partout les gens de coeur, afin que d'innombrables télégrammes, lettres et délégations traduisent la volonté du peuple français de voir les criminels châtiés et les droits de l'homme sauvegardés ». « Ils adressent l'expression de leur affectueuse sympathie à la mère d'Emmett Till et à son oncle Moses Wright qui a si courageusement témoigné au procès de Sumner. ({ Ils assurent les antiracistes américains, dressés de plus en plus nombreux en un magnifique mouvement, de leur totale solidarité dans la lutte pour la dignité humaine, pour l'égalité et la fraternité des hommes. » Une délégation à r ambassade américaine Le lendemain malin, 5 novembre cette réSJpluLion a été portée à l'ambassade des ~tats-Unis, par une délE'gation du Bureau National du M.R.A.P. conduite par Charles Palan t, secré taire général du Mouvement. ... * ... Si, après le jury de Sumner, le jury de Leflore 'a fait fi de la volonté des antiracistes, il est certain que le meeting du 4 novembre pèsera dans la balance de la Justice. Déjà, se faisant l' éc!1o de l'émotion unive rsellement ressentie, le gouverneur de l'Illinois s'est adressé au minislère américain de la Justice pour demander l'inlervention des autorités féderaIes dans l'affaire du Mississipi. Il appartient à tous les antiracistes de poursuivre la lutte, de multiplier les pétillons, les délégations pour que t riomphent les Droits de l'Homme. L'affaire du Mississipi continue. MAN, président de l'Union des ,..---- Juifs pour la Résistance et l'En- Yves DECHEZELLES' tr'aide ; LAFARE, président de l'Association des Etudiants Martiniquais; RAHANDRAHA (Etudiants Malgaches) et les membres du Bureau National du M.R.A.P. Les messages D'autre part, les personnalités suivantes, n'ayant pu être présentes, avaien t fait parvenir des lettres de solidarité ou des messages dont il fut donné lecture : M. Gérard BAUER, de l'Académie Goncourt; Mmes EBOUE-TELL, Suzanne CREMtEUX, le pasteur LA GRAVIERE, conseillers de l'Union Française; MM. Almé CESAIRE, Gilbert de CHAMBRUN, André DENIS, députés; Henry TORRES, Sénateur; SICARD ·de PLAUZOLES, président d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme; le d·octeur WEILHALLE, de l'Aèadémie de Médecine; le professeurs Jacques HADAMARD, membre de l'Institut; V. JANKELEVITCH, LEVY - BRU HL, des Facultés de Lettres et de Droit; le pasteur André BOEGNER, les généraux LE CORGUILLE et TUBERT; l'amiral MUSELIER, ancien chef des Forces Françaises Navales Libres; Cla\Jde AUTANT-LARA, cinéaste; les acteurs Françoise ROSAY, SImone SIGNORET, Y. MONTAND; les écrivains Alioune DIOP, Marc BEIGBEDER, Michel LEIRIS, Robert MERLE, Claude ROY, VERCORS; M" Gaston MAURICE, Yves MONTEL, Joë NORD MANN, Etienne NOUVEAU, avocats à la Cour; Adolphe ESPIARD, ancien directeur du ministère des Anciens Combattants. L'Union des Etudiants Juifs de France avait également envoyé un message de sympathie. Alerter partout les gens de coeur! A l'issue de la manifestation, une résolution tut adoptée à l'unanimité, condamnant le verdict de Sumner, qui constitue un scandalel,lx encouragement au racisme et exprimant « le ferme Avocat à la Cour "Soyons vigilants" Quel est le crime le plus affreux: celui des hommes blancs tuant cet enfant, piétinant son pauvre visage - ou celui de ces juges ayant devant eux les assassins et qui les· ont acquittés? ... En tant que démocrates, toutes les atteintes aux droits de l'homme nous concernent. Si nous ne protestions pas, nous deviendrions complices. N'oublions pas que si, dans ce pays d'Amérique, de tels crimes sont encore possibles, il est des territoires, plus proches de nous, où vivent des hommes qui sont nos frères et où des crimes semblables sont commis. Aujourd'hui, l'antiracisme vigilant et actif est devenu la forme la plus actuelle, la plus concrète de la lutte pour la démocratie et pour la paix. En nous joignant à ce combat, nous rendrons un grand service à la ~rance. Alfred GRANT: Secrétaire Général de l 'Union des Sociétés Juives de France "La race des seigneurs doit disparaÎtre " Nous connaissons ça! On crée une caricature de celui qui doit être la cible - et la conscience de l'assassin est tranquillisée. L'assassiné, le noir ou le juif, l'Algérien ou le négroïde, est un être inférieur, un membre de la race inférieure à supprimer de la surface du globe, par la race supérieure, celle des seigneurs. Or, s'il est une race à supprimer de la surface du globe, c'est bien celle des seigneurs. Cette race-là doit disparaître et céder la place à la fraternité entre les hommes et les peuples, au respect des droi ts de tous les hommes. A la tribune, de gauche à droite : Victor Sablé, Pierre Paraf, Maria Raboté, Charles Palant, le président Lyon-Caen, René Maran, Alfred Grant, Yves Dechexelles. Le ,Président LYON-CAEN: " Il est temps _que cesse cette. haine bestiale " Après avoir brièvement retracé le dramatique assassinat d'Emmett Till et l'acquittement des deux meurtriers à S@lner, le président Lyon - Caen évoque, dans son allocution d'ouverture, l'émotion suscitée en France par cette affaire. Et il poursuit: « Le MR.AP., toujours à l'avant-garde de la défense des persécutés et opprimés de toutes nationalités, de toutes races, religions ou couleurs, a jugé utile qu'à nouveau l'opinion publique française se dr esse, élève la voix pour la défense de la cause sacrée de la diginité humaine et des droits imprescriptibles de l'homme. Car c'est bien là ce qui est en cause dans cette affaire. « Il est temps, en vérité, que cesse celte haine bestiale des races. « Nous avons vu naguère un racisme analogue à celui qui ar' ma les bras des assassins du jeune Till et inspira le verdict de leu'/' acquittement. cruellement sévir dans un pays voisin du nôtre et le déshonorer. « Nous ne pouvons admettre que les tortionnaires d'outreRhin servent de modèles et trouvent des émules dans une nation qui aime à se placer à la tête de la civilisation et se targue d' Nre la terre de refuge des libertés. » Léo HAMON: "[UVRONS A LA fRAT(RNlTf r Sénateur A partir du moment où il règne dans un pays un olimat où la vie d'un noir ne vaut pas la vie d'un blanc, la démocratie y est menacée. Cette justice défectueuse ne nous fait pas oublier la meilleure Amérique, que nous voulons aimer. Nous n'oublions pas plus les combattants américains de la Normandie que les combattants russes de Stalingrad. Je reviens de Chine et je n'ai rencontré là-bas aucune trace de racisme anti-blanc. Il faut nous en réjouir, d'autant plus que, dès à présent, l'humanité colorée 'compte, dans la seule Asie, un milliard d'individus. Les blancs sont, dans le monde, une minorité. La majorité colorée ra.ttrapera d'ici peu son retard technique et nos enfants vivront dans un monde où ces hommes auront la place qui leur revient. Travaillons à faire de ce monde un monde de fraternité. Ainsi la France sera entourée de l'amour de l'humanité. Mme Maria KARATE · Il Nous saluons Député de Paris cette unanimité Il A la base de ces atrocités, nom trouvons la haine raciale ei xénophObe. Notre pays n 'en es, pas exempt ... Dans les événements actuels qui déferlent en Afrique du Nord, comment ne pas voir aussi l'affirmation d'une politique raciale que, nous, communistes. dénonçons et combattons impitoyablement et sans r~:;€'rve ... Le même raci~me, la même discrimination raciale s'expriment dans des faits moins sanglants mais profondément douloureux : l'inégalité des Algériens en France par rapport aux autres travailleurs, dans le domaine des salaires, des allocations familiales, etc ... ; la complaisance (pour ne dire plus) avec laquelle la grande presse entretient la haine à leur égard; les rafles racistes à Paris et les ratissages en Algérie et au Maroc... Tel est l,} dernier cri de l'oeuvre civil\natrice d'un gouvernement dont le seul langage est la répreSSion. ... Nous ne pouvons que souscrire à cet élan d'unanimité m'l nou& réunit ce soir, tant dans· h salle que sur cette tribune. Apr~s le second verdiel. Au lendemain de la décision du « grand jury » de Leflore, acquittant une nouvelle fois les assassins d'Emmett Till, le M.R. A.P. a publié la résolution suivante, qui a 0té r eproduite par la presse: Le Mouvement contre le Racisme, l'Antisémitisme et pour la Paix, sOr d'Interpréter la volonté de tous les Français, élève une protestation Indignée contre la décision du « grand jury » de Leflore (Mississipi) d'acquitter, après les Juges de Sumner, les deux criminels Bryant et Mllam, qui ont pourtant reconnu avoir enlevé le jeune noir Emmett Till, retrouvé mort peu après. A l'appel du M.R.A.P. de nombreux antiracistes ont exprimé leur émotion et leur colère au lendemain du verdict de Sumner. Il y a quelques jours encore, au cours d'un meeting organisé pal' le M.R.A.P. à la Mutualité, d'éminentes personnalités venues de tous les horizons politiques et religieux, ont réclamé, en présence d'une foule considérable, le Juste châtiment des coupables. Passant outre aux appels du Coeur et de la raison, la décision de Leflore, nouveau défi à la dignité humaine, constitue un terrible encouragement au racisme qui, déjà, se déchaîne-avec une violence accrue dans tout le Sud des Etats-Unis. Le M.R.A.P., s'associant à la campagne menée par les antiracistes américains, s'adresse solennellement au Gouvernement des Etats-Unis, pour qu'il Intervienne contre cet abominable déni de Justice, comme le lui permettent la Constitution et les lois en vigueur. La conscience universelle exige que oesse oe scandale. Quelques messages . Gérard BAUER de l'Académie Goncourt .le ne pourrai ·pas être des, vôtres à la réunion à laquelle vous m'avez fait l'honneur de me convier. Mals sachez que j'y suis en pensée, dans l'appréciation de votre Initiative et la sympathie de votre Mouvement. Joignez ma protestation à celles qui seront ce soir-là exprimées a votre tribune. Le pasteur LA GRAVIERE Aujourd'hui, de nos coeurs et de nos voix unis à ceux des hommes et des femmès de toutes races et sous tous les cieux, nous exprimons une même colère, une même douleur et, aussi, une même espérance, celle que nous conservons QUAND MEME en une justice à laquelle une occasion est laissée de se ressaisir et de désavouer un verdict qui la déshonore. Mme Suzanne CREMlEUX Conseiller de l'Union Française Je m'associe à toutes vos protestations; Il semble qu'II n'y ait aucune Indépendance de la Justice aux Etats-Unis, puisque des Juges. osent acquitter les assassins d'un pauvJ'e petit noir de 14 ans sifflant d'admiration devant une blanche. N'y a-t-il donc plus de mères aux Etats-Unis et celles-ci n'ont-elles pas la honte au front? Le racisme? Mals Il est partout; II. est latent, et jamais nous ne ferons assez ·pour lutter contre lui. Nous portons en nous le deuil du petit Emmett Till, comme nous porterons éternellement en nous le deuil de ceux d'Auschwitz ·et de Ravensbr·ük. . POUl' les Etats-Unis, la Liberté éclairant le monde n'est-elle pas qu'une publicité supplémentaire à l'usage du monde extérieur, si celle-cl doit absoudre la renaissance des crimes de la barbarie fasciste? Le Professeur Henri LEVY-BRUHL de la Faculté de Droit Le verdict acquittant les meurtriers du jeune Emmett Till est un des plus monstrueux que connaisse l'histoire. Le meurtre éLait manifeste. La culpabilité des accusés ne fai sait aucun doute. Leur seul mobile ne pouvait être que la haine de race. Les jurés qui les ont innocentés ont proclamé à la face du monde que l'on pouvait impunément tuer un homme - pire même: un enfant - parce qu'il avait la peau noire. Il faut qu'à cette doctrine abominable, le monde réponde par un long ori de r évolte et d'indignation. Rien ne rendra la vie au pauvre orphelin, mais si la réaction du monde civilisé est assez puissante, on peut espérer que ce jugement sera le dernier dicté par la haine des races, cette honte de l'humanité. Le Professeur J. HADAMARD Membre de l'Institut A tous ceux que révolte l'inooncevable verdict rendu en faVeur des assassins du Jeune EmmeU Till, Je tiens à me joindre de toute mon Indignation. DROlr Er .LlBERTE 7 Paris antiraciste a demandé Justice Le Pasteur LEHNEHACH · / / Un ch rétien ne peut qu'être a. vec vous ... " Je croirais faillir à mon mInistère, à ma vocation, si je n'étais pas là, ce soir, parmi vous. Appartenir à une race, avoir une couleur, une religion qui n'est pas celle de tous les autres, et être pour cela voué à l'injustice - c'est là une des choses les plus inhumaines. L'humanité, c'est au contraire le droit pour tout homme à la. vie, le droit d'accéder à la place que son coeur et son intelligence lui méritent sur terre, quelle que soit sa race ou sa religion. Je me souviens d'un vieux Malgacp. e qui me disait: {( Si on nous retirait la peau à l'un et à .l'autre, on se ressemblerait rudement ... » Ceux qui partagent ma foi et se disent chrétiens ne peuvent être ailleurs, de volonté -et de coeur, qu'avez nous. Unissons nos voix pour proclamer notre volonté de justice, pour affirmer notre fraternité humaine. Ren~riXCharlesr~N : "('est partout qu'il faut combattre le racisme" Des faits comme l'assas"lnat du jeune Emmett Till sont Incompréhensibles pour un Français. Le sud des Etats-Unis a tué d'innombrables noirs qui n'avaient rien fait. Pour rien. Pour le plaisir de tuer. Le noir, c'est pire qu'un chien. Quoique à un degré beaucoup moindre en France aussi, nous avons à déplorer le racisme. Les étudiants du Quartier Latin sa- Pierre PARAF Ecrivain Il Le nom d'E. TILL doit nous unir" A l'ombre de notre frère Emmett Till, le jeune noir assassiné, la résistance Clontlnue. Résistance aux préjugés, aux persécutions, aux haines qu'on esp-érait avoir englouties sous les ruines du nazisme. C'est, dans la même fidélité, le même idéal qui nous réunit. vent très bien qu'ils ne sont pas admis dans certains hôtels s'ils sont noirs... Le racisme a augmenté depuis que l'hitlérisme a passé par ici. Il est utile qu'on s'élève avec force contre le racisme américain, car c'est en même temps condamner tous les racismes, y compris dans notre pays. {( ... Emmett Till était orphelin de guerre, déclare notamment Palant, son père est tombé durant la dernière guerre sur l'un des fronts où se jouait la liberté des hommes, persuadé que son sacrifice permettrait l'avènement d'un monde fraternel et humain, où les peuples n'auraient plUS à connaître la haine, la méfiance, la peur, l'insécurité du lendemain, un monde qui ne connaîtrait plus le racisme: .. {( Ce 'monde, hélas! Emmett Till ne le verra pas, ni Willie Mac Gee, ni les sept noirs de Martinsville, ni Ethel . et Julius Rosenberg - ce monde dont tous ces morts · sont comme les douleurs de l'enfantement, et que, dans l'union et la lutte, les antiracistes, les hommes épris de paix imposeront demain. » Après avoir salué l'action des antiracistes américains, Charles Palant rappelle l'émotion unanime du peuple français après le verdict de Sumner. Nos propositions à la L.I.C.A. « Notre Mouvement, poursuitil, avait, dans les semaines qui précédèrent le procès, multiplié Une vue de la salle. les démarches pour exiger la justice. A l'annonce du verdict et dans les heures qui suivirent, nous élevions une protestation solennelle et décidions un grand rassemblement à Paris. « En même temps, une autre organisation prenait une initiative semblable - initiative dont nous nous sommes sincèrement réjouis, d'autant plus que la L.I.C.A. ne s'était que timidement manifestée pour défendre Mac GeeJ pour défendre les Rosenberg et pour soutenir chacune des luttes antiracistes qui virent se lever des masses nombreuses ces dernières années. « Animé du plus pur esprit d'union, notre Mouvement, renonçant à sa propre manifestation, lança un appel vibrant à tous les antiracistes, pour assurer un succès retentissant au meeting qui se déroula le 27 septembre aux Sociétés Savantes. « Nous nous honorons d'avoir agi de la sof'f;e, tout en déplorant que les dirigeants de la L.I.C.A. aient adopté une attitude peu. amicale vis-à-vis du M.R.A.P., en ne permettant pas à un de ses représentants de prendre la parole, alors que des centaines de militants et amis de notre Mouvement avaient répondu à notre appel. {( Il va de soi que nous avans invité la L.I.C.A. à préparer avec nous le meeting de ce soir et à poursuivre ensemble toute action pour le triomTlhe de la justice dans· l'affaire du Mississipi. Il est clair aussi que si 'la L.I.C.A. avait envoyé un délégué ce soir, comme nous l'y avons invitée, il aurait pris librement la parole, comme cela s'est produit à plusieurs de nos manifestations, notamment au cours de notre campagne contre le réarmement allemand. « Mais les dirigeants de la L.I.C.A., qui n'ont pu empêcher ces derniers mois, et en particulier le 27 septembre, les progrès de l'union des antiracistes, ont répondu néqativement à toutes nos p'roTlositions. Ils ont motivé leur refus en se déclarant partisans de faire un meeting après et non avant le second procès. Nous pensons, nous, que les antiracistes se doivent de taire tout leur possible, dans l'union, et avant qu'il ne soit tron tard, pour empêcher que la justice soit batouée une seconde tois. Nous ne saurions nous contenter de protester devant le fait accomnli. « C'est pourquoi nous aTlnelons les antiracistes de toutes tendances, et vous en Tlarticulier, camarades de la L.I.C.A., à peser tous ensemble dans la balance de la Justice... » Mettons tout en oeuvre! Soulignant que le châtiment des assassins d'Emmett Till porterait un coup à la fois au racisme antinoir et au racisme antijuif et rehausserait la confiance de l'opinion publique dans une amélioration du climat international, Charles Palant conclut: « Ne perdons pas de temps, redoublons nos efforts. Tous unis, antiracistes de France, mettons tout en oeuvre pour que triomphe la justice. » Que les amis d'Emmett Till, que sa courageuse maman sentent que des millions d'êtres au loin sont avec eux. Le nom du jeune noir est entré dans l'anthologie de la souffrance et de l'injustice. Et au pays de l'affaire Dreyfus nul n'oublie jamais une telle anthologie. Ce nom doit être, entre tous ceux qui viennent de familles politiques, religieuses, philosophiques si diverses, un foyer de notre étroite communion. La situation au Moyen-Orient Jean SCHAEFFER Secrétaire de la C.G.T. 1/ Les travailleurs sont • • Il antiracistes Je vous apporte l'adhésion de la Confédération Générale du Travail à l'initiative du M.R. A.P. Car la C.G.T. a banni de son sein toutes les divisions entre les travailleurs et ne comprend pas que des hommes soient divisés par leur race. Même si la lutte est longue, nous pensons que les travailleurs américains réussiront à vaincre l'hystérie raciste qui empoisonne leur pays. . Pour notre part nous protestons, au nom des travailleurs de France et interviendrons auprès de l'ambassade des Etats-Unis pour que la justice l'emporte dans l'affaire du Mississipi. (Suite de la page 5) rompt pas pour cela ses contacts avec l'Ouest, mais son indépendance la rend arbitre entre les offres qui lui sont faites pour l'achat de son riz et -de son coton et pour l'industrialisation du pays. Le neutralisme prend ici ses racines. Cette nouvelle situation amène les trois pays -occidentaux, qui sont pourtant des adeptes de la libre concurrence, à reviser leurs conc( ptions et à tenter de reprendre le terrain perdu. Pour eux la coexistence pratique et I::l. liberté de commercer sont en opposition avec la tradition de « chasse gardée l. Sur ce terrain a poussé toute la campagne déclenchée contre la vente d'armes par la Tchécoslovaquie et l'U.R.S.S. à l'Egypte, la Syrie et l'Arabie séoudite, en oubliant que ces pays s'approvIsionnaient jusqu'ici en armes, sans arrêt, dans les pays occidentaux qui, au surplus, sont prêts à continuer dans le même sens, comme Il le font aux autres pays du MoyenOrient, mais en exigeant l'adhésion au pacte de Bagdad ... Et afin de surenchérir, les Anglais, pal' le plan Eden et les LE MEETING DE Un grand mee,tlng d'union organisé par le M.R.A.P. a eu lieu à Rouen le 18 novembre, salle Salnte-Crolx-des-pelletlers, pour que justice soit rendue dans l'affaire Emmett Till. Sous la présidence de M. A. VALLEE, secrétaire de la Fédération de la Ligue des Droits de l'Homme, le paste'ur HERUBEL et notre ami Me MANVILLE, membre du Bureau National du M.R.A.P., ont pris successivement la parole. S'étalent également associés à 'a manifestation: la Jeune Rép'ubllque, le Syndicat des Instltut. eurs, le Comité de Résistance à la Guer,re et à l'Oppression, les Amérioains par Jelul de Johnston, envisagent même un démantèlement . et l'occupation d'une pa,rtie de l'Etat d'Israël. N'es.t-ce pas une preuve éclatante de la façon dont ces hommes politiques disposent délibérément de la souveraineté nationale d'un pays? Au lieu d'envisager une solution d'entente aux problèmes litigieux, ils cherchent à créer de nouveaux litiges et de nouvelles bases d'incidents de frontières. Au lieu de réunir les parties intéressées par les soins de l'O.N.U., au lieu d'une conférence à Quatre Clomme celle qui a mis fin à la guerre en Indochine, au lieu de rechercher des mesures adéquates dans le respect de la souveraineté de chaqUE Etat constitué, ils enveniment les relations entre Israé- , liens et Egyptiens, pour « arbitrer » ensuite les conflits surgis dans oette atmosphère d'excitation et de nervosité. Les peuples de cette contrée n'ont aucun intérêt à s'entretuer, ni I!is Arabes ni les Juifs, à plus forte raison les Egyptiens et Irakiens, également musulmans. Bien au contraire. Que l'esprit de Genève fasse ROUEN Amis de Témoignage Chrétien, le Mouvement de Libération du Peuple, le Secours Popu.lalre Français, la Confédération Générale du Travail, le Parti Communiste Français, ainsi que, à titre personne 1: le docteur Y. GUEGEN, M. SAINT-CYR, conseiller municipal; M' MEYER, avocat au Barreau de Rouen. son apparinon au Moyen-Orient et les pays de cette région connaîtront une longue périodE' de prospérité dans le complément de leurs économies respectives, garantie par la paix et la coopération. Comme l'a déclaré un diplomate soviétique à la délégation d'organisations JUIves venue à Genève, lors de la conférence des quatre ministres des Affaires étrangères, les conditions ne sont pas telles qLli'une guerre solt Imminente au Moyen-Orient, alors que les oanons se sont tus partout ailleurs dans le monde. Toute lll!tiative poussant à une guerre, quelque nom qu'elle porte - punitive, répressive, défensive, préventive, etc... - est condamnable, comme contraire à la détente internationale. L'espoir est justifié. Les peuples y veilleront, car les forces àe paix, qui sont puissantes dans le monde, contrecarrer,ont toute tentative d'allumer un nouveau foyer de guerre. GENÈVE (Suite de la page 5) produits dits « stratégiques » a bloqué la discussion et empêché tout résultat immédiat. Mais, là encore, tous les observateurs ont noté à quel point fOnt nom!Jteuses les sim;lit·udes entre· les propositions d'échanges économiques et culturels formulées par les délégatiOns occidentales et la délégation soviétique. De telles similitudes favoriseront des conventions bilatérales entre pays de l'Est et pays de l'Ouest, dont les Quatre ont convenu qu'il tallait encourager le développement. Signalons enfin qu'en marge des réunions officielles de la conférence, et notamment au cours d'entretiens privéS parfois fructueux, de grands problèmes internationaux ont été examinés par les Quatre, qui ont dressé le catalogue des solutioP.S possibles. En Extrême-Orient, les Quatre ont confirmé leur accord sur des élections générales au Vietnam, élections dont le principe reste acquis, même si l'application ne peut pas être immédiate. Au Moyen-Orient, les Occidentaux ont dû convenir qut la meilleure solution serait un pacte de sécurité collective garantissant les frontières et le statu quo actuels, mais la crainte de voir l'U.R.S.S. dire son mot dans. un domaine jusqu'ici réservé leur a fait refuser toute décision pratique dans ce sens. En définitive, on peut dire que l'amélioration constante des relations Est-Ouest, la dégradation des « situations de force » sur lesquelles comptaient les partisans de la « guerre froide », la baisse de prestige de ces champions, sont des faits acquiS sur lesquels il est impossible de revenir. Certes, une hirondelle ne fait pas le printemps et une conférence ne fait pas la paix, mais la paix est sur le bon chemin. La "'Igilance des peuples doit fair e le reste. 8 " Salut Historien du cinéma et critique jou issant d'une autorité incontestée, Georges Sadoul a salué en termes cha-leure ux la naissance du ciné-c1t:b antiraciste « Amitié ». Recevant amicalement un représentant de notre journal et un membre de la direction du cinéclub, il nous a déclaré: « La création du ciné-clU'b « Amitié » est une initiative extrêmement intéressante. C'est par tous les moyens qu'il faut combattre les préjugés, les calomnies qui visent à semer la mésentente entre les hommes de races ou de religions différentes, et qU'i sont dirigés, au bout du compte, contre la paix. - Comment, selon vous, peuvent être constitués les programmes d'un tel ciné-club? avonsnous demandé. DROIT ET LIBERTE Georges SADO UL : au Ciné-Club AMITIE" Précisément Georges Sadoul étudie spécialement ce problème en ce moment. - Depuis la guerre, nous ditil encore, un des phénomènes do- BULLETIN minants du cinéma mondial est la multiplication des cinémas nationazrx, par exemple en ExtrêmeOrient, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud. Des peuples nou- D'ADHÉSION au « Ciné-Club AMITIÉ» Nom : Prénoms: Profession Adresse sollicite son adhésion au « CIné-Club Amitié ». SIgnature: Envoyez ce bulletIn rempli à « DroIt et Liberté », 91, Faubourg-Saint-Denis, avec la somme de 200 francs (timbres ou mandat), prix de l'InscrIption. Cotisation mensuelle: 200 francs (deux séanoes). veaux prennent la parole, ce qui leur avait été refusé dClns les 40 premières années du cinéma. Outre les plus récentes révélations: le cinéma chinois, japonais et indien, il faut s'attendre au développement rapide du cinéma indonésien, du cinéma parlant aroebe, qui peuvent donner d'ici peu des chefs-d' oeuvres. Cependant, souligne-t-il, il reste encore, en 1955, que les noirs sont presque dans l'impossibIlité de s'exprimer réellement par le film, soit en Amérique, soit en Afrique. Souvent d'ailleurs la jouissance du cinéma, en tant que spectacle, leur est pratiquement interdite: en Afrique, par exemple, le nombre des salles de projection est dérisoire. Et Ge-orges Sadoul conclut: - Ainsi, un ciné-club antiraciste a un grand rôle à jouer. Je souhaite bonne chance au cinéclub « Amitié » ! Armstrong Ile « R~i du Jazz» à Paris Louis Armstrong, le « roi du jazz », est à Paris. Chaque soir, à l'Olympia, il éblouit et enthousiasme par son incomparable talent un public qui n'est seulement composé de « fans . - Certes, nous a répondu Georges Sadoul, ces questions n'ont pas été abordées par le cinéma aussi souvent qu'on pourrait le souhaiter, et pas toujours de façon très juste. ;-------------------'-~--------------------------------------- Pourtant, je crois qu'un large prowamme s'offre au ciné-club « Amitié ». D'abord les films dénonçcmt le racisme de fa çon satisfais ante. Ensuite les films qui peuvent, même s'ils relèvent de bonnes intentions, semer la confu sion, prêter à discussion. Ces films, en raison de leur influence sur un larze puhlic, doivent faire l'objet d'une critique précise. Les spcctateurs doivent apprendre à en drccler les danzcrs. Enfin, il est bon, comme vous en avez l'intention, de montrer des films interprétes et réalisés par des nrtistes et créateurs de races diverses. que d'atlcuns s'obstinenf à déclarer « inférieures ». C'est là un excellent mOVNZ de défruire les idées erronnées. 6 déceHlbre •• La vie d·Emile Zola C'est le mardi 6 décembre, à 20 h. 45, qu'aura lieu la première séance du Ciné-Club Amitié, le ciné-club antiraciste constitué avec l'appui du l\1.R.A.P. Ce ciné-club, qui a pour but à la fois de développer la culture cinématographique et d'exalter la fraternité et l'amitié entre tous les hommes, débute avec un programme particulièrement intéressant. Retiré depuis longtemps des écrans, nous aurons j'occasion de voir (ou de revoir) « La vie d'Emile Zola », le célèbre film américain de William Dieterle, avec Paul Muni, Joseph Schildkraut, Gloria Ilolden ... De nombreuses personnalités participeront au débat qui suivra. En supplément au programme, un film de marionnettes tchécoslovaque: « La poupée manquée ».

Les séances suivantes auront lieu les 2' ct 4' jeudis de chaque mois. Les programmes de janvier sont d'ores et déjà établis comme suit: Jeudi 12 janvier: « La P ... respectueuse » (Français) , de Marcel Pagliero et Charles Brabant, avec Barbara Laage, Ivan Desny, Marcel Herrand... Dialogues de Jean-Paul Sartre. « L'émigrant », de ' Charlie Chaplin.

Jeudi 26 janvier: « Maximka », une oeuvre admirable dédiée à la fraternité des races (soviétique). « Kathakall », la vieille danse dramatique de l\Ialabar (Indien).

Le Ciné-Club Amitié est ouvert à tous les antiracistes. jeunes et adultes. Tous les antiracistes se doivent de lui apporter leur soutien actif. Adhérez au Ciné-Club AmItié! r'iiiïï1rirl-IËlrl~~rnu ~"'~"'-~ ~~ HANSELI habitait au troisième étage. - Ce n'est pas encore l'heure de diner, dit-il à Ginette, viens jouer un peu chez moi ... La maman d'Hanseli ouvrit et embrassa les deux enfants. - Vous vous êtes bien amusés? Venez, il reste encore des gâteaux. Elle souleva une tenture africaine aux rayures vives et bariolées. 1\ y avait beaucoup de monde dans la pièce. Jacques Dalla . le père d'Hanseli, né à Brazzaville, sur les bords du Congo, était professeur d'histoire et de géographie. Sa femme, de mère française et de père hollandais, parlait aussi bi'en le français que le hollandais, l'anglais et l'allemand. Jusqu'à vingt ans, elle avai't vécu en Hollande. Ma'intenant elle était tradudrice dans une grande maison d'édition. Aussi Hanseli était habitué à voir défiler à la maison un nombre incalculable d'Africains, de Hollandais et de França'is. Il entendait parler un i our du sqleil de l'Afrique, de baobabs, de tamtam ou de termites. Le lendemain, de La Haye, de Rotterdam, des champs de tulipes, de la pêche au hareng ou des polders Olle la' mer menace toujours. Hanseli écoutait et posait des Ol',estions sans fin. Mais les friandises hollandaises ou africaines que ses parents offraient à leurs visiteurs l'inté ressaient beaucoup aussi. .. Pipa et Nika s'aimaient beaucoup, d'u ne affection profonde, mais peu démon~trative. Aussi ils surnommèrent Ginette et Hanseli « les vrais jumeaux ». car l'affect ion rrcinroque des deuIX petits se manifestait à chaque instant. par Andrée CLAIR Fralcheur, gentlllesse, santé, optimisme: tous ces mots à la fois qualifient les livres qu'Andrée Clair écrit pour les enfants. Nous avons salué en son temps « Moudaïna », oeuvre excellente d'éducation antiraciste qui reçut le Prix Jeunesse 1952. « Le mur gris de toutes les couleurs », qui vient de para1tre Editions Bourrelier), est aussi dédié à l'amitié, à la fraternité. Parmi les enfants dont l'histoire nous est contée, se trouve un petit noir. Tous vivent ensemble une charmante aventure - l'embellissement par des fleurs et des plantes d'un mur gris de cour parisienne - et l'auteur suscite pour tous une même sympathie. Si la couleur de peau du petit Hanseli est soulignée au passage, c'est pour mieux affirmer l'absence de préjugés chez les enfants qui accueillent volontiers comme naturelles les particularités de chacun. Ainsi, ce dialogue: _ Dis donc, pourquoi tu es presque noir? _ Parce que mon papa est noir. - EfJ ta maman? _ Elle est comme ta maman. Pourquoi tu t'appelles Pipo? _ Parce que je joue toujours du pipeau. Mais mon nom s'écrit avec un 0, c'est mieux ... Placés dans cette atmosphère familière, les petits lecteurs, que nous souhaitons nombreux, approuveront sans aucun doute le passage où l'on voit les « marmousets » remettre en place « la grande » qui voulait faire une différence entre Hanseli et ses amis blancs. C'est ce récit que nous publions ci-dessous. Dans la rue, les gens se retournaient souvent sur Ha'nseli dont la figure ronde, au joli teint de pain bien doré, entouré de boucles châtain foncé, s'éclairait de deux grands yeux noirs. Ginette était très contente qu'on admirât tant son petit camarade. Pourtant un jour, à la po rte de l'école, une'« grande » se moqua d'elle: - Elle n'est pas dégoûtée d'embrasser un nègre. Ginette, qui trouvait Hanseli si joli et qui l'aimait tant, pleura toute la matinée sans rien vouloir dire à la maîtresse. A onze heures et demie, ses yeux rouges attestaient encore son chagrin. Colette et Nicole, les plus hardies. décidèrent de donner une leçon à cette « asperge ». A quatre heures et demie, Colette courut d'u,ne trai1e du lycée à l'école. Nicole, Pierrette et Nika, déjà sorties, l'attendaient. Pipa et Hanseli arrivèrent en courant. « L'-asperge» apparut. On la laissa faire quelques pas sur l'avenue, en la suivant d'assez près. Nika rejoignit tou1 le monde au moment où Colette tirait sur la serviette que l'autre portait sous le bras. Elle se retourna. La trou.pe fit cerde autour d'elle. En voyant Hanseli et Ginette; la grande comprit la cause de cette intervention. Elle fit front avec ironie, ma'is fllt encore plus stupide que le matin: - Tout ce monde pour la défense d'un sauvage. - Sauva·ge toi-même! cria Colette dont toutes les intentions de conciliation et d'explications furent balayées. IH A\ IL IL lE IL lU JI A\ IH Et, hors d'elle"même, elle lança: - Si tu t'attaques encore à notre Hanseli ou à notre Ginette, tu auras à faire à nous. Tu verras. On fera une chanson sur toi, tout le monde se moquera de toi et tu p·leureras tellement que tu seras encore plus maigre et plus laide. KING VIDOR a réalisé ce film à Hollywood en 1929, juste après les premiers balou_ tiements du cinéma parlant. Intéressé par le succès du « Chanteur de Jazz », où le blanc Al Jolson apparaissait déguisé en nègre, il eut l'idée de tourner « Hallelujah. » avec de véritables acteurs noirs. Vidor prétend avoir voulu décrire la vie des noirs américains. Il n'a fait qu'accumuler les poncifs hollywoodiens directement hérités des esclavagis tes du Sud. et nous a donne une anthologie de ce que l'Amérique a conçu de plus insidieusement virulent en matière de racisme. Dans la mesure où Il est évoqué, le cadre social ou s'agitent les héros dérisoires de « Hallelujah » est aussi dénaturé que les gens: ceux-cl récoltent leur coton, le vendent et dilapident l'argent comme feraient des propriétaires exploitant leur propre terrain. Pas question de propriétaire blanc, et pour cause 1 Certaines sr.~nes auraient pourtant trouvé heureusement leur plaoe dans un film quI aurait montré vraiment les noirs de la Nouvelle-Orléans dans leur vie, avec leurs problèmes. Mals tout est sacrifié à un pittoresque du plus mauvais aloi. Même les blues sont décolorés, et nous aurions préféré que ce faux classique reste enfermé au fond de la cInémathèque, d'où le cinéma « La PaglMe » n'aurait pas dQ le sortir. Elle respira et, considérant l'autre, elle confirma: - Dire qu,e tu es si laide et que notre Hanseli est si joli et si gentil. - En tout cas, i·ntervint Hanseli, moi je ne voudrais pas t'embrasser, tu es 1rop bête. On entendit une voix étranglée qui disait: - Oui. tu es trop bête, parce que notre Hanseli ... Pierrette, qui n'en avait jamais tant dit, s'arrêta rougissante sous les regards étonnés. Elle regarda Colette qui lui SOUrit. 1'1t:rre.te SOu'11t encore plus. Ce règlement de comptes se passait sur h! trottoir central de l'avenue. Alain, intrigué par l'attroupement des marmousets, regardait de loin depUIS un moment. EntlIl, la CUriosite le lit tlaverser. Les autres, sentant que la solidarité du groupe sela'it plus forte que les discordes intérieures, le mirent au courant. Du reste, à part les Dinan, nouveaux venus mais tout de suite adoptés, les enfants du « 175, rue de Sèvres » se connaissaient depuis tou,jours . - Eh bien! Pour qui se prendelle avec son teint de navet? Elle ne ferait pas mal de se mettre aux rayons ultra~violets pour changer de couleur. Mais quant à avoir le joli teint de notre Hanseli, elle peut toujours attendre. Daniel, ayant vu Alain se joindre à la troupe, arriva pendant ce discours. - Si tu- as un frère, fit-il, je le plains, parce qu'une soeur idiote comme toi, ça doit être encombrant! Là-dessus, avec des regards féroces/ goguenards ou pleins de mépns, la troupe s'en 'alla, le coeur joyeux. Les enfants sentaient qu'ils formaient un bloc. S'attaquer à l'un d'eux, c'était s'attaquer aulX a'utres ! L'entente ne dura pas, hélas! bien longtemps, parce que c'était plus fort que Daniel: il fallait qu'il se fasse valoir. - Sans compter que sans nous, mes pauvres ma'rmousets, vous ne lui auriez pas fermé la bouche, à cette fille. - Tu es tellement indispensable, répliqua Colette, qu'on devrait te mettre sous cloche, comme les melons. En outre, quel avantage, on ne t'entendrait plus. Nika et Pipa scandaien1: Ennuyeux comme trois Et bêtes comme quatre. - C'est malin ce que vous dites! - Allons, laisse les ma'rmots, fit Alain plus conciliant. Le choeur poursuivi t à mi-voix les deu,x aînés qui s'efforçaien1 de garder un air indifférent. 1\ diminua devant la loge de la concierge, mais s'amplifia sous la voûte. Et ses échos ironiques 'allèrent réveiller Mlle Pierret assoupie derrière son ridea'u. Elle sursauta et, ma.chinalement, ma·rmotta : - De mon temps ... - De votre temps, tout le monde devait être muet, assura Mme Billois tout en encaustiquant le parque1. Le choeur s'engouffra dans l'escalier, mais s"assourdit : il n'était pas utile de mêler les parents à ces histoires.

Notes

<references />