Différences n°180 -Décembre 1996

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Sommaire du numéro

n°180 de décembre 1996

  • Edito: L'affront par Mouloud Aounit
  • Politiques migratoires: changement de cap par C. Benabdessadok [immigration]
  • Appel aux citoyens d'Europe
  • Conférence nationale du MRAP
    • Un moment pour sortir la tête du guidon par Alain Callès
    • Les dimensions européennes de l'antiracisme par Cathie Lloyd
    • Racime et rapport Nord-Sud par J.J. Kirkyacharian
  • Vers une éducation au non-racisme: synthèse d'un article de Jean-Paul Tauvel
  • Présentation d'un ouvrage collectif: l'antiracisme dans tous ses débats par Alain Pellé
  • Turquie: campagne internationale de soutien aux mères des disparus par Alain Callès
  • Le F.N. La presse et l'article 13 par C. Benabdessadok
  • Moyen-Orient: l'Europe peut agir pour la paix par C. Benabdessadok
  • La plainte en diffamation du F.N. contre le MRAP et l'ATMF: une insulte à la démocratie par R. Le Mignot

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Décembre 1996 - W 180 o SOMMAIRE Politiques migratoires Conférence nationale duMRAP Introduction Alain Callès Le dimension européenne Cathie Lloyd Rapports Nord/$ud J.-J. Kirkyacharian L'école 3 3 4 CHANGE ENT DE CAP il Education 8U non·racisme 5 Jean·Paul Tauvel Tous les débats Alain PaUé Turquie Les mères des disparus Alain Callés France 6 7 Les ft Assises pour une politique nouvelle des migrations» se sont tenues le 18 novembre dernier au Sénat à l'initiative des vingt-six personnalités composant le Collège Le FN et le presse Chérifa Benabdessadok Randez·vous au thé/Ure Chérita B. Chrono Plainte du FN contre 1. MRAP .t l'ATMF 8 8 10 des médiateurs, La perspective développée par l'ensemble des intervenants repose sur l'idée qu'il faut renverser totalement les logiques traditionnelles. Il s'agit d'envisager autrement la politique et les législations concernant Signez l'appel 12 les migrations et la coopération avec les pays du Sud. Renée Le Mignot Utopie 7 Pourtant les arguments sont sérieux et les premiers jalons réalistes. " page 2 l'aUront «Nul doute que le discours de haine et d'appel à la guerre civile du Front national et la surenchère démagogique contre l'immigration contribuent à alimenter un climat délétère qui favorise ses agissements}). Ces propos tenus après l'assassinat le 4 mai 1996 de Mohamed Khouass à Sens me valent, en tant que secrétaire général du MRAP, d'être poursuivi par le président du Front national. L'instigateur d'une manifestationxénophobe visant à rendre responsable l'ensemble des immigrés maghrébins, organisée le jour des obsèques de Nicolas Bourgat, oserait-il nier le caractère raciste de son parti? Ce procès, qui interpelle l'ensemble des forces démocratiques attachées aux valeurs de la République, s'inscrit dans une stratégie d'occupation de tous les terrains, en la circonstance celui de la justice. L'intention est claire: museler notre association et défier l'institution judiciaire. Le TGV affrété par le Front national pour soutenir ses deux élus de Dunkerque condamnés par la justice sur plainte du MRAP en est la preuve. Des mots aux actes il n'y aqu'un pas. Il aété franchi par des skinheads qui ont tué Brahim Bouaaram le 1er mai 1995 : ils sortaient des rangs de la manifestation du Front national. Ibrahim Ali est lui aussi mort violemment, victime des balles tirées par des colleurs d'affiches du FN à Marseille. Combattre le Front national, c'est aussi démonter ses thèses, démontrer que ses réponses n'en sont pas et qu'elles sont dangereuses pour la démocratie. Dans cet esprit, il appartient à une organisation comme le MRAP de tenir en éveilles consciences, d'organiser les résistances face à un mouvement raciste, antisémite et xénophobe. « Tête haute et main propre », tel est l'un des slogans du Front national . Le 20 décembre prochain, devant la 17< Chambre correctionnelle, nous rappellerons que ces mains sont pleines de sang et les ongles noircis par une terre profanée .• Mouloud AOUDit 1 Les Assises pour une politique nouvelle des migrations (suite de la page 1) CHANGEMENT DE CAP! CES ASSISES ont rassemblé plusieurs dizaines de personnes représentant les associations et les collectifs des sans-papiers, des membres d'institutions comme la Commission nationale consultative des droits de l'Homme et la Commission des Libertés publiques du Parlement européen, de nombreux chercheurs, ainsi que des personnalités, tel que Jacques Pelletier, Médiateur de la République. Un appel aux citoyens d'Europe élaboré et signé par les médiateurs a été rendu public (lire l'extrait ci-contre). Les propositions avancées innovent à plus d'un titre. Il ne s'agit plus en effet de demander l'abrogation des lois Pasqua-Méhaignerie, ni de rafistoler une législation devenue au fil du temps un écheveau de lambeaux entremêlés. Les Assises ont à la fois dressé le constat détaillé de l'inefficacité et de l'inutilité de la « fermeture des frontières» tant en France que dans l'Union européenne, et apporté une série d'arguments qui militent pour une autre politique des migrations, réaliste, intelligente et équitable. Les démarches argumentatives relèvent de toutes sortes de domaines: politique, philosophique, économique, morale, historique. Globalement, ces Assises ont posé quelques jalons pour sortir de 'impasse qui désespère les militants solidaires des étrangers: une politique toujours plus répressive et restrictive à l'encontre des immigrés non-communautaires, une politique démagogique et à courte vue dont le seul Les thèmes des Assises 1: Comment repenser la législation française sur la base des droits des immigrés et non de la répression 2: Comment obtenir de l'Union europénne qu'elle fonde sa politique migratoire sur la Convention européenne des droits de l'Homme 3: Comment faire des relations avec les pays d'émigration un facteur de développement dans le cadre de la coopération internationale. effet attesté est de faire croire à une opinion publique « chloroformée », selon le mot de Paul Bouchet, que l'immigration est la source de tous les maux. Cette politique est de surcroît dangereuse pour tous les citoyens, dans la mesure où elle crée toujours plus d'arbitraire et grignote lentement mais sûrement les libertés publiques comme les libertés individuelles qui fondent l'Etat de droit. Il ne sert à rien, a dit en substance Pierre Lyon-Caen, magistrat, d'adopter ou de proclamer des principes fondamentaux si on ne peut pas les mettre en pratique. Les propositions s'articulent autour quatre groupes de perspectives: à court terme, des régularisations fondées sur l'équité, à moyen et long terme l'élargissement du droit d'asile, la redéfinition à l'échelle européenne d'une législation européenne fondée sur l'application aux immigrés des principes des droits de l'Homme et l'élaboration d'une politique de codéveloppement sur des bases contractuelles qui tournent le dos aux pratiques traditionnelles. La liberté d'aller et venir A propos des migrations proprement dites, plusieurs intervenants ont souligné qu'elles ne sont pas, selon la conception dominante, uniquement dues à la misère mais aussi aux liens historiques et linguistiques, à l'insécurité politique et aux traditions culturelles. Ce qui explique d'ailleurs, en particulier pour l'Afrique francophone, qu'à niveau économique égal, la propension à émigrer varie substantiellement d'un pays à l'autre. De plus, l'idée qu'il faut développer ces pays pour fixer les personnes est trop simpliste. Souvent, au contraire, le développement appelle à la migration vers les cieux où les techniques, les savoirs et les pouvoirs s'élaborent. Ce n'est qu'à moyen et long terme que le reflux de la migration devient réalité: c'est bien ce qui s'est passé pour l'immigration portugaise en France, exemple qu'évoquait Jacqueline Costa-Lascoux dans l'entretien paru dans le dernier numéro de Différences. Il faut au contraire, instaurer la liberté « d'aller et venir» car les courants migratoires sont porteurs de potentialités de développement. Aboubacar Diop, l'un des porteparole du premier collectif des Différences n° 180 décembre 1996 sans-papiers, a évoqué le fait que l'aide matérielle apportée par les immigrés africains à leurs concitoyens des pays d'origine représente trois ou quatre fois celle de l'Etat français! Comment concevoir la coopération sans la liberté de circulation des personnes? Qui peut donc organiser la circulation des biens aussi bien matériels qu'intellectuels ou artistiques ? Le développement concerne au premier chef des groupes de personnes urbanisées qui ont acquis la pratique d'une langue, un savoir faire et un savoir vivre qui les poussent à aller chercher ailleurs une source de subsistance, un enrichissement matériel ou symbolique indispensable. Les migrations sont précieuses C'est bien le point de vue de Stéphane Hessel qui affirme que « les migrations sont précieuses, inscrites dans le développement des échanges, conformes aux intérêts fondamentaux des partenaires. Mais il faut leur trouver un cadre approprié, les adapter aux conjonctures évolutives des périodes de cJr Sur l'équité Nous disons d'abord équité: quand, en effet, nous proposons des critères plus larges de régular isation, ce n' est pas à une générosité gratuite que nous en appelons, mais à des droits dignes d'être r evendiqués et argumentés. Mais nous disons aussi hospitalité: quand nous parlons d'accès à notre espace national et d'accueil concr et sur les lieux d'hébergement et de travail, nous plaidons pour une disposition d'esprit diamétralement opposée à la suspicion, au rejet et finalement à la répression. Cette disposition à l'hospitalité, le philosophe Kant la défin issait en ces termes il y a deux cents ans : « le droit qu'a un étranger, à son arrivée dans le territoire d'autrui, à ne pas y être traité en ennemi », à quoi il ajoutait: «le droit qu'a tout homme de se proposer comme membre de la société ». Extrait d' un texte de Paul Ricoeur, membre du Collège crise et des périodes de croissance, ce qui implique une contractualisation consécutive à une vraie concertation. Cette concertation ne peut pas se borner aux négociations intergouvernementales, certes nécessaires. Elle doit faire intervenir de part et d'autre les acteurs des sociétés civiles du Sud et du Nord. ( ... ) Mais il est urgent, pour que ces efforts et bien d'autres se poursuivent et s'étendent, que soit mis un terme aux obstacles absurdes, fondés sur la hantise de flux incontrôlables, à la délivrance des visas, obstacles qui bloquent les immigrés et interrompent leur circulation. » Sur la question des méthodes de travail et d'action, Stéphane Hessel préconise de « mettre sur pied, avec nos partenaires européens, les formes de coopération et d'aide au développement qui tranchent avec les vices et les effets souvent pervers des politiques traditionnelles, aussi bien bilatérales que communautaires ; donc réviser aussi la convention de Lomé pour faire porter l'effort sur les données de base du développement humain: la santé, la promotion des femmes, l'instauration d'institutions démocratiques, la responsabilisation des citoyens selon leurs propres traditions et selon leurs propres aspirations. » La reconquête de l'opinion La proximité des analyses de ceux qui connaissent la question soit par leur métier, soit par leur fonction, soit par leur engagement est assez frappante. La radicalisation quelque peu exaspérée de la CNCDH rejoint celle de l'amiral Sanguinetti, imprécateur aussi talentueux que bien informé du rôle néfaste de l'armée française en Afrique, mais aussi le discours critique du Médiateur de la République, Jean Pelletier, qui propose explicitement ses services au Collège et aux sans-papiers. On peut donc espérer que malgré les divergences de tactique et de niveau de revendication, le contenu exhaustif de cette rencontre soit largement diffusé. Et surtout, que se mettent en place des espaces permanents d'échange, des méthodes de travail sérieuses, des outils communs à tous ceux qui veulent aller à la « reconquête de l'opinion ». Il faut ajouter à ce trop bref compte- rendu la mise en avant d'un précieux concept, celui de l'équité. Car l'équité est à la croisée des principes juridiques; moraux et philosophiques qui fondent une politique . • Chérifa Benabdessadok Appel aux citoyens d'Europe (Extrait) Trois actions s'imposent d'urgence. La première concerne la situation des « sans-papiers ». L'application toujours plus rigoureuse des politiques restrictives a eu pour effet d'accroître considérablement le nombre de personnes et de familles migrantes privées de toute existence légale et réduites à vivre dans l'angoisse permanente du lendemain. Sans attendre les modifications législatives qui peuventprendre du temps, il est indispensable de mettre fin sans plus tarder à des situations inhumaines, inacceptables dans un véritbale Etat de droit. Un moratoire des expulsions, la définition de critères de régularisations fondés sur l'équité, le recours à la médiation dans les cas les plus litigieux, sont les mesures transitoires les plus appropriées. La deuxième urgence est r elative au droit d ' asile. Là encore le climat de méfiance systématique à l'égard de certains étrangers a conduit à des conséquences inadmissibles. L'asile doit être accordé à tous ceux qui doivent fuir leur pays devant la persécution qui les menace, que cette menace provienne de l'Etat lui-même ou qu'elle soit le résultat de sa carence. Plus largement, l'asile humanitaire doit être étendu, au-delà d'une définition pointilleuse de la persécution, aux cas d'extrême détresse. Dans tous les cas, les risques encourus par les demandeurs d'asile doivent être appréciés avec réalisme et humanité, sans excès de juridisme soupçonneur et en tenant compte des difficultés de preuve inhérentes à de telles situations. La troisième action prioritaire, qui est aussi la plus décisive, doit porter sur le fondement des politiques européennes en matière de migr ations et de développement. C'est en premier lieu la conception même de la législation applicable aux migrations qui doit être totalement remise en cause, et non seulement tel ou tel de ses effets. L'esprit des textes actuels est resté largement discrétionnaire, faisant primer les obligations administratives toujours plus contraignantes et tracassières sur des droits toujours plus réduits et contestés. C'est cette primauté qu'il y a lieu d'inverser radicalement. D'où qu'il vienne et où qu'il Différences n° 180 décembre 1996 soit, tout homme a des droits fondamentaux que tout Etat de droit se doit de respecter et de protéger. La liberté d'aller et venir, celle de pouvoir trouver des moyens convenables d'existence, celle de pouvoir mener une vie personnelle et familiale normale, sont au premier rang de ces droits. Les restrictions qui peuvent y être apportées ne sauraient être discriminatoires ou arbitraires et doivent se limiter à celles qu'imposent à tous les nécessités d'une société démocratique. C'est dans cet esprit que peut et doit être recherchée la juste conciliation entre les droits des migrants et ceux des nationaux des pays d'accueil. Il est en effet essentiel de ne pas dissocier la lutte pour les droits légitimes des migrants de l'action globale pour la protection et la promotion de tous dans les domaines où ces droits sont principalement en question. Il s'agit notamment : • dans le domaine social, de la lutte contre l'accroissement dramatique de l' exclusion; • dans le domaine économique, de la lutte contre les diverses formes de travail illégal et la précarisation des emplois; • dans le domaine culturel, de la défense d'une conception ouverte et démocratique de la culture qui s'oppose à la ghettoïsation et aux intégrismes, et qui assure le respect des droits de la femme et de l'enfant. Il s'agit encore d'assurer l'effectivité des droits des migrants par les garanties et recours appropriés, à savoir: - le droit à une motivation claire des décisions qui les concernent; - le droit à un recours devant une juridiction impartiale et indépendante statuant dans un délai raisonnable; - le droit à l'aide juridique dans des conditions permettant un véritable défense. En ce qui concerne le développement, il s'agit de donner l'impulsion nécessaire aux nouvelles formes de solidarité entre sociétés civiles du Nord et du Sud, particulièrement en assurant une mobilité accrue entre les communautés urbaines et rurales d'émigration et les associations d'émigrés dans les pays d'accueil. • Il Conférence nationale du MRAP UN MOMENT POUR SORTIR lA TÊTE DU GUIDON La conférence nationale du MRAP se déroulera les 1 er et 2 février 1997 à Paris. Présentation des méthodes et des objectifs, ainsi que des thèmes sur l'Europe et sur les rapports Nord-Sud. L A QUESTION TRAITEE est d'importance, mais elle est également très vaste puisqu'elle concerne la société tant en terme de racisme qu'en termes politique, économique, culturel, cultuel ou historique. Nous devons nous en saisir, en décortiquer tous les éléments, toutes les ramifications, pour pouvoir à l'issue de la conférence la maîtriser dans toute sa plénitude. Actuellement, trop d'éléments, tant d'analyses autant que de réponses, sont disparates et dispersés et donc inopérants pour une réelle efficacité dans la lutte contre le racisme et son ascension vertigineuse. Si nous réussissons à aboutir à un résultat global incluant la diversité des approches, alors nous pourrons fixer le résultat sur un support comme une publication. Nous disposerons ainsi d'un outil utile pour le Mouvement et ses comités locaux dans notre lutte contre le racisme sous ses diverses formes. Quatre thèmes de réflexion Pour y parvenir, nous devons user d'une rigueur à la mesure de notre exigence. Puisque la question comporte de multiples facettes, nous mettrons en chantier plusieurs ateliers thématiques qui seront: - Quel antiracisme pour le racisme d'aujourd'hui? - Citoyenneté, nationalité, lutte contre le Front national - Problématique européenne de la montée du racisme aujourd'hui - Flux migratoires, problématique NordSud, concepts opératoires et leurres. lES DIMENSIONS EUROPÉENNES DE l'ANTIRACISME QUELS SONT les problèmes principaux rencontrés par les antiracistes aujourd'hui? Durant ces deux demI s décennies nous avons vu apparaître des tendances communes en Europe qui plongent leurs origines soit dans les problèmes mondiaux, soit dans la construction des institutions et de l'identité européennes. Il se développe une nouvelle expérience d'insécurité et de précarité des conditions de vie en lien direct avec les problèmes économiques dans les sociétés post-industrielles. Ceci qui se traduit notamment par la xénophobie et l'exclusion sociale. Les immigrants venus rebâtir l'Europe après 1945 ne sont plus tolérés aujourd'hui. Les états européens n'ont plus d'empire, mais ils gardent des zones d'influence et des sphères d'intérêt économique. L'indifférence est profonde envers le sort des peuples du reste du monde et à l'égard des exclus de l'Europe. Alors que les restrictions sur les mouvements de capitaux sont levées afin d'éta- Différences n° 180 décembre 1996 La méthode Afin que tout le monde puisse participer à ces travaux, tous les ateliers se dérouleront en séance plénière. Cela exigera de la part de chacun de la rigueur afin que chaque thème soit traité dans l'espace qui lui est imparti. Le but à atteindre étant que tous les participants bénéficient de l'ensemble des travaux étalés sur deux jours. Chaque atelier bénéficiera des apports d'un spécialiste et de la commission du MRAP plus spécialement chargée du thème. L'intervenant extérieur aura pour fonction de stimuler notre réflexion et de faciliter le travail de chaque atelier. Le représentant de la commission MRAP donnera l'état de la réflexion du Mouvement et ce, dans l' objectif d'amorcer le débat qui s'instaurera pour chaque atelier. Nous devrions être en mesure à l'issue de la Conférence de produire une synthèse qui puisse être matérialisée par un outil de lutte concret, fouillé, diversifié et argumenté pour l'ensemble du Mouvement. La tâche est ardue; il nous faudra beaucoup de rigueur pour concentrer notre réflexion sur l'essentiel. C'est un pari à la hauteur de ce que les militants et la société attendent d'un Mouvement comme le nôtre. A nous de bien remplir notre fonction .• Alain Callès blir un marché européen, on construit de nouveaux obstacles pour le reste du monde. Les gouvernements nationaux ont commencé à harmoniser les lois sur l'immigration dans un sens restrictif tout en développant un discours sur la tolérance et en proposant des lois (ou des réformes de loi) contre le racisme, comme le projet Toubon. Les processus d'exclusion se sont intensifiés par des restrictions de l'accès aux droits sociaux et les demandeurs d'asile deviennent de nouveaux exclus. Cette politique de repli et de recul exprime la pusillanimité de la classe politique face aux partis d'extrême droite comme le Front national en France, le Vlaams Block en Belgique, les Libéraux en Autriche. Ces processus se répercutent au-delà des frontières nationales, généralisant des législations restrictives dans l'intérêt de l'harmonisation. Au niveau des institutions européennes, le discours sur le racisme est @" contradictoire. Tout en admettant ces politiques restrictives, le Parlement européen débat régulièrement du problème de la xénophobie. La Commission finance des associations antiracistes ou d'immigrés et déclare 1997 « année européenne contre le racisme». Les antiracistes peuvent réagir à ces contradictions soit en dénonçant les concessions à l'antiracisme comme hypocrites, soit en les acceptant comme une volonté de prende le problème en compte. Nous pouvons nous en prévaloir politiquement, auprès des acteurs politiques européens afin qu'ils soient fidèles à leurs engagements, et examinent de plus près les liens entre les restrictions introduites par Schengen, Trevi ou Maastricht, les actes des gouvernements nationaux et le développement de mouvements racistes. Elargir le travail en commun En 1992 des antiracistes ont essayé d' établir une coordination européenne. Nous avons appris rapidement combien il était difficile de travailler ensemble. En effet, d'un pays à l'autre, les antiracistes partent de concepts différents, d'expériences historiques différentes et dans des conjonctures politiques elles aussi différentes. Nous devons tester empiriquement, pas à pas, les formes de la coopération internationale en ce domaine, évaluer en les comparant en profondeur nos expériences respectives. Il ne serait probablement pas possible de nous mettre d'accord d'emblée sur un programme d'actions communes. Cependant nous avons réussi à élaborer ensemble des activités ponctuelles utilisant des moyens rapides de communication (comme Internet). Des antiracistes britanniques se sont, par exemple, mobilisés contre la visite de Le Pen à la conférence du parti Conservateur en 1987. Des manifestations ont eu lieu devant les ambassades allemandes partout dans le monde après Solingen en 1993, et la campagne « sauvons Mumia » a eu un écho mondial. De plus, nous devons échanger des informations sur les nouvelles lois qui peuvent accentuer les exclusions racistes ou sociales, avec d'autres antiracistes à travers le monde. Nous avons besoin d'un dialogue en Europe, mais nous ne devons pas oublier le contexte global et international. Des contacts avec nos homologues en Afrique, par exemple, peuvent nous aider à comprendre les facteurs humains des migrations et à coopérer dans des cas particuliers. • Cathie Lloyd 1 er et 2 février 1997 à Paris RACISME ET RAPPORTS NORD 1 SUD L E RAPPORT entre le racisme au Nord et le sous-développement au Sud est maintenant bien admis dans son principe parmi les militants du MRAP, bien que nous demeurions toujours un peu ignorants des faits : il y a parmi nous quelques spécialistes mais tout le monde ne peut le devenir. On peut cependant continuer à se documenter, conserver des dossiers et beaucoup de comités locaux ont des « bibliothèques » qui contiennent quelques documents importants comme les rapports du PNUD, et de bons livres (ceux de Susan George et d'autres). Mais la question n'est pas vraiment là : ce qui importe, c'est de bien faire voir le rapport entre racisme et inégalité structurelle, et d'argumenter en fonction de ce rapport. On peut l'écrire par exemple ainsi

racisme = exclusion, exclus = inférieurs

par destination, donc il est juste qu'il y ait des inégalités. Il est juste que des poches de misère se constituent partout, c'est la rançon de la prospérité. Il y a même une école pour théoriser l'opposition entre « winners » et « losers ». L'intérêt de cette dénonciation n'est pas de nous donner bonne conscience en « bottant en touche» : on ne pour- Montrer à nos concitoyens l'interdépendance des actions en faveur du Sud et celles pour l'égalité ici même. rait rien faire contre le racisme puisqu'il y al' inégalité dans le monde et vice versa ... mais il faut en tirer des axes pour l'action, pour de nouvelles actions. La charité ne peut nous dispenser de la justice et il ne faut pas donner une interprétation minorante de l'idée de solidarité. Pour que la justice l'emporte, il faut des Différences n° 180 décembre 1996 actions qui mettent en mouvement beaucoup de gens, et sur des objectifs très clairs, à la forme et au contenu aussi précis que possibles, faute de quoi nous retomberions dans l'idéologique, sans intéresser vraiment personne. On peut distinguer deux niveaux d'actions réalisables. Le niveau économique et social Aucune des actions locales d'aide au développement n'est à mépriser et il y en a beaucoup. Cependant, il faudrait leur donner une assise sociale plus large, un appui plus fort dans la population. Par exemple les conseils généraux et les municipalités doivent être incités à rechercher des partenariats, des jumelages, avec l'appui des forces locales - syndicats, associations, y compris celles des originaires des pays en question, forces religieuses, etc .. et pour des réalisations concrètes, qui feraient l' objet d'une étude publique. A elle seule cette action sociale a ses limites et risquerait au bout d'un certain temps de copier médiocrement l 'humanitaire, sans les moyens dont disposent les grandes ONG humanitaires. C'est pourquoi il faut la doubler d'une action politique. Car l'opinion publique est loin d'avoir compris ce rapport dont j'ai parlé et même si elle en voit quelque chose, elle le perçoit souvent comme un danger (s'agit-il de sacrifier notre bienêtre au profit de miséreux incapables ?) Notre intervention politique Cette intervention doit consister à montrer à nos concitoyens et à nos élus, l'interdépendance des actions en faveur du« Sud» et de l'action en faveur de l'égalité ici même, égalité qui ne doit pas être celle de la misère, mais celle de l'accès aux biens matériels et culturels. Naturellement, il n'y a pas de priorité à établir entre ces deux types d'action, c'est une seule et même entreprise, de longue haleine, mais d'urgence . • Jean-Jacques Kirkyacharian • • L'antiracisme à l'école VERS UNE ÉDUCATION AU NON-RACISME domination culturelle et de colonialisme. 2 - L'approche morale (ou « moralisante») s'exprime souvent sur le mode de la dénonciation en s'appuyant sur des critères d'ordre moral ou idéologique. Elle a le mérite d'introduire une dimension éthique et prend en compte la nécessité de réprimer le racisme par une pression sociale forte. Mais elle dérive trop souvent vers un manichéisme dangereux car la culpabilisation peut susciter chez les jeunes déclassés des phénomènes d'allergie ou de rejet type skinheads. On touche dans ce cas de figure et d'une manière générale les limites d'une pédagogie antiraciste qui se définit comme « anti » ; d'où la probable nécessité de sortir de la stratégie « réactive» pour penser une éducation au « non-raClsme ». Rédacteur en chef de la revue Migrants Formation (1), Jean-Paul Tauvel a publié un article riche et rigoureux dans un ouvrage collectif intitulé « L'antiracisme dans tous ses débats» (lire page ci-contre). Nous présentons ici une fidèle synthèse de ce texte dont le titre initial était « Sortir de l'incantation rituelle ». L A QUESTION de la méthodologie de l'éducation contre le racisme est d'autant plus actuelle que la problématique a changé. Ces dernières décennies, l'antiracisme éducatif faisait essentiellement référence à l'Holocauste. L'horreur et la monstruosité des camps d'extermination suffisaient en eux-mêmes à susciter l'indignation. Mais les années et les générations ont passé et l'évocation de ces formes extrêmes, absolues, du racisme risque d'être reçue de plus en plus par les jeunes comme le rappel de faits à caractère historique remontant à une époque lointaine et révolue, sans correspondance avec l'actualité. Comment donc aujourd'hui l'éducation antiraciste est-elle appréhendée ? On peut regrouper et classer les actions menées selon la démarche qui les inspire et tenter une typologie des approches pédagogiques. 1 - L'approche républicaine (à la Jules Ferry). Cette démarche, qui est en fait une absence de démarche, pousse à leur limite les principes égalitaristes et universalistes de l'école. Elle se traduit par l'occultation volontaire de l'ethnicité dans le contexte scolaire. Séduisante sur le plan des principes, elle a également prouvé son efficacité en réussissant à assimiler plusieurs générations d'enfants d'immigrés. On peut néanmoins se demander si elle est en phase avec la société actuelle et si elle peut résister à l'ethnicisation des rapports sociaux dans les quartiers dits sensibles. Il faut ajouter à cette interrogation le fait que l'universalisme à la française a aussi dissimulé des formes de 3 - L'approche rationaliste (ou intellectuelle). Cette manière de traiter le racisme a l'immense avantage de postuler le primat de la raison sur l'irrationnel et la passion, ce qui en fait une démarche éducative et humaniste par excellence. Elle part de la conviction que le ra- L'apport de la définition à l'efficacité de l'action Jean-Paul Tauvel souligne également les efforts soutenus des chercheurs pour s'approcher d'une définition toujours plus fine du racisme. La valeur pédagogique de ce travail ne ressort pas d'une simple satisfaction intellectuelle mais se réfère aussi à l'efficacité de l'action pédagogique et de l'action tout court. La distinction entre hétérophobie et racisme proposée par Albert Memmi permet d'éviter les amalgames si fréquents sur cette question à forte charge affective. Pour Albert Memmi, « l' hétérophobie n'est pas encore du racisme, lequel est une élaboration idéelle, plus ou moins fictionne" e, à partir de l'hétérophobie. De sorte que nous nous trouvons devant une construction à deux niveaux: un soubassement émotionnel, archaïque, et très largement répandu, et une argumentation réactionnelle, souvent aberrante, mais somme toute explicable, parfaitement « lisible» comme on dit aujourd'hui. Le traitement du racisme devra tenir compte de cette dualité. » Cf. Le racisme, Gallimard, co". Folio, 1994. Différences n° 180 décembre 1996 cisme est une idée fausse, une erreur, et que l'argumentation à base scientifique (unité génétique de l'espèce humaine) ou philosophique (relativisme culturel) est la meilleure arme pour en montrer l'inanité. Les limites de cette approche apparaissent en particulier lorsqu'il s'agit de publics d'enfants, plus sensibles à d'autres modes d'appréhenSlOn. 4 - L'approche psychologisante est essentiellement praticable avec des publics d'adultes en formation. Elle se présente comme un développement de la précédente et part du postulat qu'un véritable changement d'attitude ou de comportement ne peut effectivement s'opérer que si le sujet met au clair ses propres représentations de l'Autre. C'est une démarche largement pratiquée dans les pays anglo-saxons. Mais il faut la pratiquer avec précaution car elle peut notamment entraîner des effets de déstabilisation voire de légitimation au moins provisoire de sentiments ou d'attitudes racistes. Elle demande un minimum de formation aux interventions de type psychologique 5 - L'approche transversale d'ouverture culturelle est très pratiquée en milieu scolaire. Elle contourne le problème du racisme par une méthode transdisciplinaire : éducation au développement, opération « Composition française» sur les apports étrangers dans le patrimoine français, étude de certains textes de Montaigne ou de Montesquieu, etc. Mais elle peut aussi induire des effets pervers comme la stigmatisation des jeunes issus de l'immigration qui se trouvent réduits, explicitement ou non, à des représentants du tiers monde ou d'une mythique « culture d'origine ». 6 - L'éducation à la citoyenneté se présente comme un développement de l'approche culturelle transversale. Elle 1 J est, à l'heure actuelle, très porteuse de réflexions et d'innovations pédagogiques. Bien que proche des postulats de l'approche républicaine, elle s'en différencie en ce qu'elle est volontariste et n'occulte pas a priori les réalités sociales ou culturelles, par exemple les phénomènes de discrimination, auxquels les jeunes issus de l'immigration sont particulièrement sensibles. Elle a un caractère particulièrement actif: il ne s'agit plus de produire des discours convenus, sévères ou grandiloquents, sur les devoirs de l'élève ou du citoyen mais de présenter et d'analyser collectivement des situations. Ces « études de cas » sont tirées de la vie quotidienne, des droits de l'enfant, des droits de l'élève dans l'établissement ou des droits de l'Homme ... C'est ainsi que l'éducation civique peut passer par une mise à plat juridique des rapports des jeunes avec la police et la justice, et de là à une mise au clair de leur propre rapport à la loi. Bien que riche en expériences diverses, cette méthode n'est pas la panacée. Elle peut aussi exprimer une sorte de désarroi devant la rupture du lien social et la montée des phénomènes d'incivilité et de violence dans les quartiers ou les établissements. Parler du racisme ou faire vivre la citoyenneté Cette typologie n'a pas pour objet de procéder à une sélection mais de réfléchir sur des registres et des enjeux. L'intérêt serait plutôt de retenir la part positive de chacune de ces approches tout en veillant à en neutraliser les possibles effets pervers. Et cela, pour s'engager dans une adaptation permanente à la diversité des élèves et à la façon particulière dont chacun est susceptible de réagir au message. L'enseignant, lui, aura plutôt un faible pour la démarche qui colle le mieux à sa personnalité, celle qui lui évitera d'avoir àjouer à contre-emploi dans un domaine où la sincérité et la conviction personnelle ont un pouvoir de persuasion non négligeable (si l'on veille, par exemple en travaillant en équipe, à maîtriser le risque d'une trop forte implication affective). En somme Les approches qui ne font pas de l'éducation contre le racisme une activité spécifique et en particulier l'éducation à la citoyenneté ont une valeur pédagogique incontestable. Peut-on aller jusqu'à dire que celle-ci, en dépit, ou à cause, de son côté fourre-tout, est la seule forme d'éducation antiraciste actuellement recevable par la majorité des jeunes? Dans un autre registre, il faut apprécier les approches qui ne reposent pas essentiellement sur un discours, lequel, même s'il est ouvert au dialogue, risque d'être perçu par les élèves comme un discours scolaire à peine différent des autres. Ajoutons enfin, que la célébration de « l'antiracisme» n'est pas indispensable lorsque des élèves de toutes origines pratiquent quotidiennement un « non-racisme» naturel et banal à leurs yeux. Pour conclure, il faut bien mettre en relation citoyenneté, antiracisme et démocratie. Car c'est bien ce lien qui ouvre à la question de l'organisation et du mode de fonctionnement du système éducatif tant au niveau de la classe que de l'établissement. • (1) Migrants Formation et Migrants Nouvelles sont publiés par le CNDP-Migrants qui dispose d'un centre de documentation spécialisé sur l'intégration sociale et culturelle, l'éducation, la formation des publics issus de l'immigration et des autres publics en difficulté d'insertion. Coordonnées: 91 rue Gabriel Péri, 92120, Montrouge. Tél: Dl 46 128787 Note de lecture et rendez-vous l'antiracisme dans tous ses débats CET OUVRAGE collectif (1) se propose d'aborder la question du racisme et du combat antiraciste par des approches multiples et contrastées. Chercheurs, acteurs de terrain, responsables politiques ou associatifs, observateurs plus ou moins impliqués sont ainsi mis à contribution; la diversité des analyses, des sensibilités, la variété des aspects abordés permettant de présenter les principales articulations du débat. Un tel parti-pris kaléidoscopique juxtapose ainsi l'iconoclasme (parfois hâtif, souvent pertinent) d'un J.-P. Péroncel-Hugoz et la position plus mesurée de son confrère R. Solé, l'approche universitaire d'un P.-A. Taguieff et la réflexion-témoignage du père Delorme, l'analyse juridique de D. Lochak et l'interrogation pédagogique de J.-P.Tauvel... L'ensemble souffre des faiblesses propres à ce type de recueil et, faute de circonscrire assez précisément son sujet, n'évite pas le coté « patchwork ». Les contributions sont assez hétérogènes dans la forme ( des textes denses et rigoureux côtoient des entretiens parfois insuffisamment structurés) et d'inégal intérêt: si certaines apportent d'appréciables éléments de réflexion, d'autres sacrifient avant tout à des préoccupations médiocrement polémiques. En dépit de ces restrictions, on peut considérer que le pari est globalement relevé et de la lecture, au demeurant aisée, de cet ouvrage, il faut plus attendre une excursion, avec ses surprises agréables et ses déconvenues, qu'une appréhension exhaustive des multiples avatars de l'antiracisme . • Alain Pellé (1) Sous la direction de Lucien Bitterlin , Coll. PanoramiquesArléa- Corlet / France Pays arabes, mai 1996 ; 110 francs, diffusé parLe Seuil Journée d'étude sur l'école Face à la recrudescence du racisme et de la xénophobie, l'école qui participe indéniablement au processus d'intégration des enfants issus de l'immigration, doit se doter d'une politique mieux adaptée et non fondée sur une discrimination positive (exemple des Zones d'éducation prioritaire) souvent stigmatisante. Ainsi, lors de la journée organisée au Palais du Luxembourg le 22 janvier prochain par l'association Education et Devenir, une question fondamentale sera à l'étude: « L'intégration, une mission pour l'école? ». Les conférences des professeurs Bernard Charlot (université Paris VIII) et de Martine Abda"ah-Pretcei"e (université de Valenciennes), la table-ronde « Vues du terrain » à laque"e participera Dominique Brendel, conseillère d'orientation et membre du bureau national du MRAP, ainsi que le débat contradictoire animé par Emmanuel Davidenkoff apporteront certainement des éléments de réponse. Les personnes qui souhaitent s'inscrire doivent impérativement prendre contact avec Alain Pe"é au siège du MRAP avant le 15 décembre. Différences n° 180 décembre 1996 • • Turquie CAMPAGNE INTERNATIONALE DE SOUTIEN AUX MÈRES DES DISPARUS Amnesty International lance une vaste campagne sur les disparitions en Turquie. Le MRAP s'y associe. Présentation des dernières activités du Mouvement sur la question des droits de l'Homme en Turquie et invitation à l'action. DE 1958A 1980,ilyaeu vingt disparus dans les prisons turques. Depuis 1980, en seize ans d'Etat militaro-policier, ce sont 495 personnes « gardées à vue» qui ont disparu à ce jour. Ces chiffres sont le résultat d'un recensement effectué par l'IHD, association turque des droits de l'Homme. Ces « disparitions» d'opposants, ou supposés tels, est une des formes les plus lâches du combat politique. Cette pratique constitue de la part de cet Etat totalitaire l'aveu de son incapacité à favoriser la démocratie, contrairement à ce qu'il tente de faire croire pour pouvoir bénéficier du soutien de l'Union européenne. Continuer le petit commerce ... Et contrairement aussi à ce qu'un certain nombre de pays membres aimerait pouvoir faire semblant de croire afin de continuer leur petit commerce ... Pas si petit pour certains, et pas pour la France en tout cas devenue le premier fournisseur européen de la Turquie, mais qui n'est en rien le premier à s'élever contre les disparitions ou la répression massive et meurtrière dont est victime le peuple kurde. Dans ces colonnes, j'avais commenté ia Première conférence internationale qui s'est tenue en mai dernier à Istanbul, et à laquelle j'ai représenté le MRAP. Cette conférence traitait des disparitions en Turquie et dans d'autres régions et pays dans le monde. Depuis plus d'un an, les mères de Turquie font un sit-in hebdomadaire à Istanbul, place Galatasaraï. Un peu à la façon des « folles de la place de Mai» en Argentine, elles brandissent pacifiquement le portrait des disparus. Ou défendre la liberté Inlassablement, malgré la répression, les arrestations, elles reviennent chaque samedi et exigent des réponses du gouvernement turc. Ces femmes courageuses ont une volonté d'acier et rien n'arrêtera leur lancinant questionnement. Leur volonté farouche défie ainsi les tortionnaires dont un des buts est, par la pratique de la disparition de gardés à vue, de tétaniser les proches qui ne savent pas où est le disparu, s'il est vivant ou mort, et si l'action, ou l'inaction, de la famille ne va pas nuire au disparu ou à son entourage. C'est dans ce contexte que j'ai apporté le soutien du MRAP aux familles et aux entreprises pour sensibiliser l'opinion. Durant ces trois jours, j'ai côtoyé la famille de Hasan Oçaz dont le corps mutilé a été retrouvé dans un cimetière d'Istanbul. Il est la figure emblématique de la lutte contre les disparitions. Son corps a été retrouvé, un 18 mai, date qui sert de référence aux manifestations. Pour la police, c'est aussi l'occasion de sévères répressions dont j'ai pu être témoin en mai et dont la violence ainsi que la « pression» exercée sur la conférence a permis de sensibiliser les médias et l'opinion turcs. La campagne de sensibilisation s'étend. A Paris, des femmes turques organisent un sit-in tous les samedi après-midi. Pour la première fois, samedi 26 octobre, un sit-in a eu lieu simultanément à Paris, Rome, Berlin et Londres. Le même jour Amnesty International lançait sa campagne contre les disparitions en Turquie. Depuis, la campagne internationale de sensibilisation s'étend. A Paris, depuis des semaines, des femmes turques font un sit-in place des Innocents. Il a lieu le samedi aprèsmidi, simultanément à celui d'Istanbul. D'autres sit-in ont lieu en Europe. Pour la premiè- Différences n° 180 décembre 1996 re fois, samedi 26 octobre un sit-in a eu lieu simultanément dans plusieurs capitales d'Europe dont Paris, Rome, Berlin et Londres. Ce même jour, Amnesty International a lancé sa campagne internationale contre les disparitions en Turquie. Un film réalisé par Amnesty représente très bien ce que sont les disparitions, leurs conséquences et la dignité des familles. Il sert de support à la campagne d'Amnesty. A Paris, la projection s'est faite en présence de diverses personnalités internationales et de la soeur d'Hasan Oçak. Elle a d'ailleurs demandé à rencontrer le représentant du MRAP. On peut se rendre compte que la conscience internationale s'éveille à cette question et le MRAP doit pouvoir faire entendre sa voix dans cette campagne qui devrait prendre de l'ampleur. On ne peut que recommander d'utiliser le film d'Amnesty, disponible au MRAP. Il faut aussi souligner que cette question facilite le travail commun entre des organisations françaises qui ont pu avoir des approches différentes de la violation des droits de l 'Homme en Turquie et du problème kurde. Tout comme cette initiative a permis aux différentes associations turques et kurdes de réaliser une certaine unité. On peut supposer que ces diverses actions ont pu infléchir l'attitude récente de l'Union Européenne vis-à-vis de la Turquie, ce qui n'a malgré tout pas empêché la France de continuer les expulsions de Turcs et de Kurdes vers la Turquie Il est maintenant de notre devoir à tous de ne pas abandonner le combat en cours mais au contraire de profiter de la synergie des mouvements autour de cette question des disparitions . • Alain Callès France LE FN, LA PRESSE ET L'ARTICLE 13 métissage culturel ou ethnique mais aussi de mettre la presse au pas de l'oie. Détournement du droit de réponse quotidiens nationaux et un certain nombre de quotidiens régionaux qu'il saisirait lajustice chaque fois que les mots « extrême droite» et « extrémisme » qualifieraient le Front national. Cet article 13 de la loi sur la presse, qui définit les modalités de l'application du droit de réponse, est aujourd 'hui récupéré au nom de la « bataille du vocabulaire» que mène le FN avec un certain succès. Cela revient à « une forme d' intimidation, de censure» dans une stratégie de conquête électorale. Au-delà de la réforme de cet article préconisée par le Syndicat national des journalistes (2), c'est à la capacité du FN à fabriquer des détournements de sens que se heurtent militants et citoyens antiracistes . • L 'ASSOCIATION Reporters sans frontières a fait paraître, le mois dernier, le compte-rendu d'une mission d'enquête sur le Front national et la presse (1). Ce texte consigne les faits précis se rapportant à l'agression physique et verbale dont sont victimes des journalistes dans l'exercice de leur métier. Il montre également comment le Front national mène une « bataille du vocabulaire» qui se traduit notamment par un détournement du droit de réponse. Du mot au poing L'association a relevé, entre le 1 er janvier 1990 et le 30 septembre 1996, « quinze agressions physiques contre des j ournalistes, ayant entraîné des blessures. » « Conséquence logique de cette violence, les journalistes peuvent rarement faire leur travail normalement lors des rassemblements du parti. Quant aux spécialistes de l'extrême droite, ils doivent recourir à des mesures de protection. » Les auteurs d'articles ou d'émissions sur le FN sont systématiquement assaillis de courrier d'injures et / ou de menaces. Derrière ces faits « épisodiques », se précise d'année en année la production par les dirigeants du Front d'un discours haineux, souvent antisémite, à l'occasion ordurier, contre la presse et les médias. Le délégué national à la formation du FN, Bernard Antony, traitait en 1992 les réalisateurs d'un reportage télévisé d' « êtres absolument abjects» et de « voyous» tandis qu'un autocollant distribué gratuitement sur plusieurs stands de la « fête des Bleu-Blanc-Rouge », préconise ouvertement: « Quand tu rencontres unjournaliste gifle- le ! Si tu ne sais pas pourquoi, lui le sait ! » Ailleurs et dans d'autres circonstances, ces journalistes sont traités de « lopettes» (Serge Martinez dans Minute), de « cloportes merdeux» (Radio-Courtoisie), de « torche-cul» (National H ebdo ), ou de « syphilitiques » (Présent). Les dirigeants du FN et en particulier Le Pen, s'estiment mal traités par les médias auxquels ils doivent pourtant leur notoriété, à coup de provocations et de calembours froidement prémédités. Le paradoxe n'est qu'apparent car la presse et la liberté d'expression sont l'objet d'une haine au moins aussi tenace que celle entretenue à l'encontre de « l'étranger». Le rêve de la « race des seigneurs » est d'empêcher tout Le risque est sérieux de voir le FN se prévaloir du droit de réponse pour imposer à la presse écrite une chronique permanente dans ses colonnes. C'est ce qui a été tenté à plusieurs reprises, notamment cet été, puisque sur plainte du FN, le Tribunal de grande instance de Nanterre a imposé au Monde de publier (le 9 juin) un droit de réponse dont le contenu n'avait rien à voir avec l'article incriminé. Le quotidien ayant fait appel, les juges de la cour de Versailles ont opté pour « l'audace juridique» le 3 juillet dernier, en infirmant le jugement du TG! de Nanterre et ont condamné le FN, qui s'est pourvu en cassation. Le FN a exigé à dix reprises la publication de droits de réponse depuis le 31 octobre 1995, date à laquelle Le Pen prévenait par courrier l'ensemble des Chérifa Benabdessadok (l) « Le Front national contre la presse, mission d'enquête juillet / septembre 1996 », Secrétariat international, 5 rue Geoffroy-Marie, 75009 Paris, T : 01 44 83 84 84 (2) « Le Pen débouté du droit de réponse », in Le Journaliste, trimestriel du Syndicat national des journalistes, 4ème trimestre 1996 Saleté: un rendez-vous théâtral à ne pas rater Un homme a décidé de capter votre regard et d'avoir une franche explication avec vous. Il ne vous lâchera plus. Il vous criera sa douleur et vous transportera dans une introspection apparemment naïve, plus sûrement douloureuse. Parfois, subrepticement, sa peau frôlera la vôtre, le plus souvent la distance qu'il a décidé d'instaurer vous accusera, il s'accusera d'être une « saleté », et nous force tous à nous interroger. Il ira jusqu'à faire naître d'étranges moments de fusion durant lesquels il est « vous» et vous êtes « lui». Lui est un immigré clandestin, amoureux de la langue allemande, fétichiste du dictionnaire bilingue. Son métier? Vendeur de roses. Son destin, aller et venir imaginairement entre là-bas, Bassorah, où il est né, et ici, une grande et belle ville européenne. Il aime tant cette ville qu'il la donne à voir comme si nous y étions. Il aime par-dessus tout les bancs publics sur lesquels il s'interdit de s'asseoir: bien qu'homme vivant et pétri de désirs, il n'est pas un citoyen, donc il ne s'assoit pas sur les bancs publics. Voilà pour le récit. Le plus remarquable est ailleurs, dans l'écriture au scalpel d'un jeune auteur autrichien, Robert Schneider. Une écriture habile, exercée, qui fait de la« banale» histoire d'un immigré sans papier une partition inoubliable. Ce texte à paraître aux éditions de l'Arche est servi par une mise en scène sobre, efficace, subtile, signée Bernard Lévy. Et par un acteur, Eric Elmosnino, qui a lui aussi décidé de ne pas vous lâcher en se donnant corps et âme au texte et au vendeur de roses. Chérifa B. Salleté a été jouée à Paris au mois de novembre, au théâtre de la Cité internationale, elle est maintenant en tournée: à Lannion et Combs-la-ville (décembre), à Flers et Calais Ganvier), Châlonsen- Champagne (avril), Alençon, Amiens, et Strasbourg (mai). Différences n° 180 décembre 1996 • ~ , f II EN BREF • Manifestation à Paris le 6 novembre en commémoration de l'assassinat du Premier ministre israélien Itzhak Rabin à l'appel de nombreuses associations proches du mouvement israélien pour la paix, Shalom Akhshav. Le MRAP s'y est joint. • Vive émotion et manifestations de protestation après la condamnation des deux chanteurs du groupe de rap NTM par le tribunal de grande instance de Toulon le 15 novembre pour outrage à l'égard de l'autorité publique. • La candidate du Front national, MarieFrance Stirbois, a perdu l'élection municipale de Dreux dont le second tour s'est déroulé le 24 novembre. Mais elle a maintenu son scrutin à 39,37%. La campagne du FN avait été explicitement axée sur le racisme et la xénophobie avec notamment les propos de Bruno Gollnish sur la manière de reconnaître les Français de souche des autres. Des propos contre lesquels le MRAP a décidé de porter plainte. LeClubàAix Plusieurs centaines de personnes ont manifesté le 26 octobre à Aix-enProvence contre la tenue de l'université annuelle du Club de l'Horloge, célèbre officine qui sert de « laboratoire » idéologique au Front national. Zones d'attente D'après un article du Monde du3 novembre, cinq associations - Amnesty International, la Cimade, France Terre d'Asile, l'Anafé et la Croix-Rouge - ont déposé un recours afin d'annuler les dispositions contenues dans un courrier qui leur a été adressé par le directeur des Libertés publiques et des affaires juridiques au ministère de l'Intérieur. Ce texte date du 25 juin et concerne l'assistance qu'elles sont supposées apporter aux étrangers non admis à pénétrer sur le territoire français et placés de ce fait dans les « zones d'attente ». Celles-ci permettent de réduire les possibilités de recours offertes aux étrangers dès lors qu'ils sont en territoire français. Le décret d'application de la loi qui conférait un cadre juridique à ces zones, déjà pourtant fortement contesté par les associations (une procédure est en cours auprès du Conseil d'Etat), vient de subir une restriction de taille : le courrier de M. Faugère indique aux associations habilitées que les visites de leurs militants aux personnes maintenues en zone d'attente seront désor- CHRONO PO mais soumises à une demande écrite auprès de la direction des Libertés publiques. Ce qui fait dire à François-Julien Lafférière, président de l'Anafé, que le gouvernement après avoir refusé l'assistance, empêche cette fois tout contrôle. Debré persiste etsigne Le projet de loi sur l'immigration concocté par le ministre de l'Intérieur a été présenté et adopté en conseil des ministres le 6 novembre. Les arguments développés par les associations et d'éminentes personnalités ces derniers mois n'ont pas été entendus. Le projet régularise quelques catégories de personnes mais approfondit encore ce qui apparaît de plus en plus explicitement comme une « législation d'exception ». Le MRAP dénonce cet « équilibre en trompel'oeil » qui vise en réalité à priver les étrangers « de droits aussi fondamentaux que celui de fonder sans entraves une famille avec le conjoint de son choix, de vivre sans menace de séparation auprès des siens ou d'être entendu dans un délai raisonnable par l'autorité judiciaire ». Comme les participants aux Assises organisées par le collège des médiateurs (cf. article pages 2 et 3), le MRAP en appelle à une autre politique en matière d'immigration fondée sur le respect des libertés et droits fondamentaux de la personne humaine, visantàinstaurer de nouvelles relations de coopération avec les pays d'émigration et échappant aux logiques électoralistes qui servent la démagogie xénophobe. À propos du MEN En réponse à un courrier du MRAP adressé au ministre de l'Education nationale à propos du MEN, association de parents d'élèves proche du Front national, le chef de cabinet du ministre a pris acte et a décidé de saisir le ministère de la Justice. Dans sa L'EUROPE PEUT AGIR POUR LA PAIX Les associations membres de la plate-forme des ONG pour la Palestine, soutenues par d'autres, ont lancé sous l'égide d'Agir ici (1), une campagne intitulée « L'Europe peut agir pour la paix ». Partant du constat que l'actuel gouvernement israélien tourne le dos aux accords d'Oslo, la campagne a pour objet d'intervenir auprès des autorités françaises, députés et gouvernement. Les documents de la campagne rappellent l'importance des rapports qui lient l'Europe à Israël et à la Palestine: l'Union européenne est le premier marché pour les exportations israéliennes et le premier bailleur de fonds des territoires palestiniens. Il existe un important Accord d'association qui doit d'abord être ratifié par les parlements nationaux des quinze Etats membres avant sa mise en oeuvre prévue pour 1997. Cet accord, qui a d'ailleurs connu une première application depuis le 1er janvier 1996, « ouvre massivement les marchés européens aux produits israéliens et jette les bases d'une union douanière et d'une zone de libre-échange. Il concerne aussi la coopération sociale, culturelle, audiovisuelle ... » L'objectif de la campagne est de conditionner l'application de ces accords au « respect par Israël des droits de l'Homme dans les Territoires occupés et à la reprise des négociations pour un règlement définitif du conflit ». Pour cela, les associations signataires demandent aux députés français de geler la ratification de l'Accord d'association entre l'Union européenne et Israël et au gouvernement français d'intervenir auprès de l'Union européenne pour que soient suspendus l'Accord intérimaire et les projets de coopération scientifique et technologique. Nous reviendrons sur le bilan de cette campagne dans nos prochaines parutions. Chérifa B. (1) Agir ici: 14 passage Dubail, 75010 Paris Différences n° 180 décembre 1996 , UR MEMOIRE lettre au MRAP en date du 12 novembre, M. Delon constate en effet que la dénomination et le sigle de ce mouvement sont susceptibles de créer la confusion avec le Ministère de l'Education Nationale. Il affIrme que « Le principe de neutralité de l'éducation nationale s'oppose, bien entendu, à ce qu'une telle association puisse développer des activités, notamment de propagande, au sein des établissements scolaires. Le ministre veillera avec la plus grande vigilance au respect de cette interdiction. » Il precise également que « S'agissant de la présentation de listes de parents d'élèves aux élections des conseils d'administration des établissements scolaires, aucune liste, d'après les informations qui m'ont été communiquées au cours du processus électoral, ne s'est réclamée ouvertement d'une affiliation auprès du Mouvement pour un enseignement national, ni a fortiori du Front national. » Ledroità l'instruction La Convention internationale des droits de l'enfant a été adoptée par l'ONU le 20 novembre 1989 et la France a été l'un des premiers pays en Europe à la ratifier. Le MRAP constate que les dispositions contenues dans cette Convention, notamment en ce qui concerne le droit à l'instruction, sont d'une ap- MUMIA : ALERTE Depuis son entrée en fonction le 20 janvier 1995, Thomas Ridge, gouverneur républicain de Pennsylvanie a signé 63 ordres d'exécution dont deux ont été menés à leur terme: injection létale! Une nouvelle exécution est programmée pour le 25 novembre. Thomas Ridge a d'ores et déjà fait savoir qu'il signerait un nouvel ordre d'exécution concernant Mumia Abu-Jamal dans l'hypothèse où la Cour suprême de l'Etat refuserait de rendre un arrêt en sa faveur. La décision est attendue dans les prochaines semaines. Tous les groupes investis dans la campagne internationale doivent s'inquiéter: le juge Sabo ayant notifié, début novembre, aux avocats de la défense, que le second témoignage de Veronica Jones (voir Différences n0179) ne constituait pas à ses yeux un argument recevable pour prendre en considération la demande de réouverture du procès. Qu'attendre dès lors de la Cour suprême de l'Etat de Pennsylvanie? Nous devons plus que jamais nous tenir en alerte. Marie Agnès Combesque, commission « Amériques » plication très relative. Des élus tels que Pierre Bernard, maire de Montfermeil, Thierry Mariani, député-maire de Valréas, ont refusé d'inscrire des enfants à l'école en raison de l'irrégularité de leur séjour en France (entrés hors procédure du regroupement familial), ou de celui de leurs parents. Plus récemment, Jean Tibéri a édicté une circulaire qui pose des obstacles sérieux à l'inscription d'enfants d'origine étrangère et méconnaît le droit à l'instruction pour tous les enfants. Le MRAP entend saisir le ministre de l'Education nationale pour lui faire part de cette nouvelle entrave au droit à l'instruction. (D'après un communiqué du MRAP du 19 novembre). Concernant cette même question, le journal de la FCPE, La famille et l'école (octobre 1996, n0l25), signale que selon un récent jugement du Conseil d'Etat, un maire refuse une inscription dans une école de sa commune, doit motiver sa décision. Par ce jugement, le Conseil d'Etat estime que la décision par laquelle un maire rejette une demande d'inscription doit être regardée comme un refus d'autorisation: elle fait donc partie des décisions qui doivent être motivées sous peine d'annulation. L'Etat condamné Le tribunal administratif de Lille a condamné le 21 novembre l'Etat français à verser 30000 francs à un étudiant camerounais en réparation du préjudice causé par le refus de renouvellement de son titre de séjour durant quatorze mois. En effet, un arrêté préfectoral avait rejeté en 1994 la demande de renouvellement de sa carte de séjour, le préfet estimant que le changement d'orientation universitaire ne permettait plus de lui conférer le statut d'étudiant. Le tribunal administratif de Lille avait annulé l'arrêté préfectoral en 1995 pour « erreur de droit» mais l'étudiant et son épouse estimaient avoir subi un lourd préjudice financier, s'étant trouvé dans l'intervalle sans titre de séjour, et donc sans possibilité de travailler. Les chemins de I"asile La2ejournée d'étude du Groupe de recherches informel et scientifique sur l'asile (GRISA) aura lieu le 17 janvier 1997 au centre Malher à Paris, autour du thème « Les chemins de l'asile ». Cette journée est organisée avec le concours du HCR (dont le délégué en France introduira les travaux), et des universités Paris 1, de Poitiers et de Paris Sud. Deux chapitres seront abordés: itinéraires d'exil et vers l'Etat de droit? Pour s'inscrire, s'adresser à l'université Paris 1, Luc Legoux, 22 rue Vauquelin, 75005, tel: 01 43 3748 11. Elémentsd'informa tion rassemblées parChérifa Benabdessadok Différences n° 180 décembre 1996 EN BREF • Le Centre d'études et d'observation de la vie politique français (Cevipof) organise une série de conférences autour de six mots-clés: racisme, multiculturalisme, citoyenneté, modèle républicain, libéralisme et démocratie. Les deux premières seront respectivement présentées par Pierre-André Taguieff et Michel Wieviorka. • Compte rendu d'étude au CERI (Centre d'études et de recherches internationales) sur le « mouvement civique associatif )) le 20 décembre de 14h à 18h. Adresse: 4 rue des Chevreuses, 75006 Paris • L'audience relative à la plainte du MRAP /93 contre un conseiller municipal FN de Bobigny qui devait avoir lieu le 18 octobre a été reportée au 10 janvier 1997 par le tribunal de la ville, celui-ci n'ayant pas eu le temps d'étudier le dossier. • 1;'/ Signez et faites signer Il La plainte en diffamation du FN contre le MRAP et l'ATMF Une insulte à la démocratie Un an presque jour pour jour après l'assassinat, par des sympathisants du Front national du jeune 8rahim Bouaaram, Mohamed Khouas, âgé de 19 ans, était assassiné à Sens le 4 mai 1996. Dans un communiqué daté du 6 mai, le MRAP déclarait: «Nul doute que le discours de haine et d'appel à la guerre civile du FN, la surenchère démagogique contre l'immigration contribuent à alimenter un climat délétère qui favorise ces agissements », Moins de trois semaines après le meurtre et alors que Sens était encore sous le coup de la colère et de l'émotion, J.-M. Le Pen organisait un meeting à St-Clément situé à trois ki· lomètres du lieu du crime. et si maintenant en plus il y a égalité des civilisations,je ne sais pas jusqu'où nous descendrons. Oui,je crois à l'inégalité des races n. Le MRAP persiste et signe: oui, le FN est bien un parti raciste et xénophobe qui menace notre démocratie. Le 16 novembre 1996, cinquante ans après Nuremberg, le MRAP faisait au cours d'un colloque au Sénat le procès de J'extrême droite. A cette occasion, Mouloud Aounit, secrétaire général, soulignait la gravité de la situation devant l'inquiétante résurgence des idées du Front national. La plainte en diffamation du FN ne concerne pas que nos deux associations; elle consChoqué par cette provocation, le MRAP, l' ATMF ainsi que le maire de Sens demandaient au préfet de l'Yonne l'interdic- Rendez-vous le 20 décembre titue une véritable insulte envers tous les démocrates; elle tente une fois de plus d' entraver la liberté d'expression. tion de ce rassemblement. Devant le silence de la préfecture, l' ATMF écrivit au sous-préfet de Sens: « le respect s'impose devant le deuil et la douleur de la famille ( ... ) dans un contexte national où l'appel à la haine raciale se fait au grand jour précisément dans le discours du FN n. Du fait de ces déclarations, le MRAP et l'ATMF doivent comparaître, sur plainte en diffamation du Front national, devant la 17" chambre du tribunal correctionnel de Paris le 20 décembre 1996. Comment ose-t-on reprocher à ces associations d'avoir mis en avant le caractère raciste et xénophobe du parti de Le Pen alors même que celui-ci vient de déclarer « on a été jusqu'à parler de l'absurde égalité des races, C'est la raison pour laquelle le MRAP lance un appel à l'ensemble des forces démocratiques pour faire en sorte que ce procès soit celui de l'extrême droite en France. Nous appelons l'ensemble des démocrates à signer l'appel ci-dessous. Plus de 300 personnalités l'ont déjà fait. Nous appelons également à une solidarité financière pour nous aider à couvrir les frais du procès et de la campagne engagée (chèque à l'ordre du MRAP avec au dos la mention « plainte du FN n). Nous appelons les antiracistes de la région parisienne à être présents à l'audience le 20 décembre prochain à 13 heures. •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• « Parce que la plainte en diffamation du Front national à l'encontre : du MRAP et de l'ATMF est une insulte à la démocratie, je déclare •• publiquement partager l'opinion pour laqueUe ces deux associations • • font l'objet de poursuites judiciaires de la part de J.-M. Le Pen: • oui le FN génère des idées de haine et de xénophobie qui constituent •• une menace pour notre démocratie ». Nom: ......................................... Prénom: ................................................ . Adresse : ................................................................................................. . .................................................................................................................. Qualité: ................................................................................................ . Signature : •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• Talon à retourner au MRAP, adresse ci-contre, à l'attention de Renée Le Mignot. Vous pouvez aussi le reproduire et le faire circuler. DffMrences n° 180 décembre 1996 Renée Le Mignot 89, rue Oberkampf 75543 Paris Cedex II Tél.: 4314 83 53 Télécopie: 43 148350 • Directeur de la publication Mouloud Aounit • Gérant bénévole Martial Le Nancq • Rédactrice en chef Cherifa Benabdessadok • Administration - gestion Patricia Jouhannet • Abonnements Isabel Dos Martires 120 F pour II numéros/an 12 F le numéro • Maquette Cherifa Benabdessadok • Impression Montli8eon Té1.:33858000 • Commission paritaire n" 63634 ISSN 0247-9095 Dépôt légal 1992-10

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